LES LAR11ES D'ÜNE BERE.
Samedi 1 Octobre 1875
10 année
^.Gt.A N£*
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CHE1HIIVS Bï K V K 15. 1 OCTOBRE.
borne a pourvoir au fonctionnement d'une
communaulè délerminée.
Mais fadministralion, aujourdTiui, confi
ne par lant de cótés divers a la politique,
elle embrasse dans son activilé tanl de servi
ces importants, elle dispose, dans les villes
surtout, de ressources si considerables qu'il
n'est pas indifférent de connailre les opinions
religieuses el politiques de ceux qui én sont
les organes.
Ainsi, pour ne ciler que deux exemples,
rinslruction publique et ['administration de
la bienfaisance dependent des autorités com-
munales.
Or, qui ne le sail? L'inslruction publique
est aujourd'hui devenue, entre les mains de
plusieurs administrations communales, une
arme dirigée plusou moins ouvertemenl con-
tre l'intluence religieuse el conlre la liberie
d'enseignement. Apphquée par des adver-
saires ardents mais insidieux, la loi de 1842
n'est trop souvent qu'une mensongère en-
seigne a l'abri de laquelle des gueux fanati-
ques s'efforcent, de leur propre aveu, d'ar-
racher des ames a l'Eglise. lis vantent
leur zéle pour la diffusion des lumièreset
pour le progrès de l'instruclion; mais, en
réalité, c'est la haine de l'èducation religieu
se qui les inspire. A Bruxelies, par e.xemple,
on les voit s'affranchir des prescriptions de
la loi de 1842; ailleurs, leur souci est bien
moins d'mstaller des écoles dans des quar
ters ou des localités qui s'en trouvenl dé-
pourvus que de suscitcr une concurrence
syslématique a l'enseignemenl libre.
Les ressources de la bierifaisance publique,
créées cependant, pour la plupart, par la
charilé chrélienne, sont également exploilés
dans le but de propagandeseclaire que nous
venons d'indiquer. La volonté formelle des
fondateurs est méconnue, dés qu'elle est
empreinte d'un sentiment religieux; lesfon-
dalions les plus antiques sont ruinées, el les
deniers du pauvre suppléent a l'insuffisance
notoire et rsconnue du denier liberal. Sécu-
larisation a outrance, tel est lemotd'ordre
de nos modernes vandales. lis vont plus loin
encore: ils trahissenl ouvertemenl le mandal
charitable qui leur est confié, el ces próneurs
de la liberlé de conscience, de la liberie re
ligieuse, de la liberie individuelle, refusenl
les secours de 1'assislance publique aux pa
rents qui, usant de leur droit, préfèrent,
pour leurs enfanls, l'enseignement catholi-
que et libre aux écoles communales.
Ce n'est pas tout: le libéralisme qui est
pintjre de sa nature ceci est encore
un aveu peu suspect trouve trés-naturel
de puiser dans les caisses publiques les fonds
nécessaires a sa propagande. Sous prélexle
de subsides théalraux, artistiques, littéraires,
pliilanthropiques, etc., etc., il prodigue les
subventious électorales. A Gand, comme
nous avons eu l'occasion de le monlrer, eet
abus atleiril des proportions véritablemenl
scandaleuses. Les conlribuables en sont ve-
nus a payer jusqu'au loyer de ['Association
libéraledepuis que celle ci, réduite aux
abois, fait ménage comrnun avec la Société
littéraire. A Anvers et a Bruxelies, les corté-
ges gueux et les festivités liberates s'organi-
sent également aux dépens du public, décla-
ré taillable et corveable a merci.
En attendant, les iravaux d'utilité commu
nale chömenl, les finances des graudes villes
sont en baisse continue, et les préoccupations
sectaires et politiques des magistrals de la
cilé absorbent et paralysent compléiement
leur mission administrative.
Le remède a celle situation s'indique tout
nalurellement. II consisie a ramener les ad
ministrations communales dans leur verita
ble voie, a leur iuculquer, d'une part, l'éco-
nomie, et, d'autre part, a affecter les res
sources réellement disponibles a des besoms
sèrieux et géneraux el non pas a des inté
réts de parti.
A noire avis, alors mème que la lotte élec-
lorale se poserail, aux prochaines elections
communales, exclusivement dans les lermes
que nous venons de définir, eet élat de cho-
sessnffirait pour stimuler le zéle des catbo-
liques et pour ies determiner a combattre,
partout et avec énergie, la prépondérance
administrative du libéralisme.
Nous ne pouvons oublier d'ailieurs, com
me nous le disions en commencant, que les
elections communales préparenl des lutles
plus imporlantes et d'un résullat plus décisif.
C'est deja beaucoup, lorsque la politique et
la religion sont direclement en jeu, que de
n'avoir point a lutter d'abord sur place con-
tre la malveillance et la partialilé d'aveugles
adversaires. Sachons prévoir, dés a présent,
l'avenir, el, sans engager prématurément la
lutte, nous assurer d'avance de bonnes posi
tions de combat. En celle maliére, les détails
mèmesont leur importance. Le libéralisme a
l'art perfide d'exploi er jusqu'a des dissiden-
ces purement locales pour consolider sa su-
prématie. Tachons de ne pas lui donner
prise el envisageons les devoirs de la vie
publique, chretiennement, e'est-a dire avec
largeur et générosilé. Si nous avons des
preférences a sacrifier au blen-ètre général,
si nous avons une voix a éleverou une in
fluence a exercer, ne marchandons ni notre
activilé, ni noire dévouement! Les resullats
les plus imperceptibles aujourd'hui peuveul
aboutir plus lard a de graves et fécondes
consequences. Par-dessus lout, faisons hum-
blement, courageusement et, s'il le faut,
laborieusemenl notre devoir, partout oü il
nous sera donné de le faire. Nos adversaires
ne sont jamais calholiques el ils nous le
montrent assez, soyons calholiques toujours,
et meltous, jusqu'aux détails de noire vie
publique, en harmonie avec nos principes
et avec notre foi.
UNE VISITE A LOUISE LATEAU.
[Suite)
Je fus exact au rendez vous. A deux heu-
res et quelques minutes nous parlions du
presbvtére. La rèunion était exceptionnelle-
ment nombreu.-e ce jour la elle comprenait
une vinglaine de personnes Beiges, Alle-
mands, Italiens el Francais, et la question
étaitdesavoirsi l'on parviendraila faire entrer
tout ce monde. Nous nous acheminons silen-
cieusement vers la chaumière, quelques en
fanls se meitent a genoux sur notre passage.
M. le curé frappe a la porte, une sceur de
Louise vienl ouvnr.
Nous pénétrons d'abord dans une première
piéce toute décoree d'images de sainteté. Au-
dessus de la cheminée, une téte de Christ
a gauche, un portrait du Pape en pied, assis
sur son tróne el revèiu de ses ornemenU
pontificaux au fond el au-dessus de la com
mode, saint Joseph avec l'enl'anl Jésus, en
hlhographie et en statuette. Cc sont peut-ètre
des cadeaux. La familie de Louise Laleati,
trés-fiére dans sa pauvrelé, n'a jamais souf-
ferl qn'on lui olïr.il de Paigenl; mais je pense
qu'on a pu, saus la blesser, lui offrir un saint
Joseph en plaire et un portrait de Pie IX. De
celle première piéce on passe dans une secon
de, dont les murs sont recouverts également
d'images pieuséssansaucune valeur.Ces deux
piéces, qui n'avaienl autrefois pour sol que
ia lerre battue, sont aujourd'hui pavées en
briques. Enfin on entre nans la troisiéme et
dernière, plus petile que les aulres. Elle oc-
cupe, si je ne me trompe, l'étroil hangar
adjoint a ia maison primitive. Une fenètre,
ou plulót une lucarne, qui n'a guère plus de
deux pieds de haul, éelaire la chamhre. Elle
est légèrement entr'ouverte. Tont prés, sur
un siége de bois, j'apercois I'extatique. A
deux pas, sa mére, assise, ourle un tablier
bleu. Le fond de la piéce est occupé par une
couchette en fer. II n'en faut pas davaulage
pour remplir la chainbrelte. A peine y som
mes nousenlrésix qu'il parail matèriellement
impossible d'y lenir davaulage. Mais M. le
curé s'ingénie il fait mettre les premiers
rangs a genoux; il utilise jusqu'au dernier
coin. Après deux ou trois minutes d'efforts,
les vingl personnes sont tassées, a la condi
tion de ne pas essayer un mouvement.
Je regarde alors. Louise Lateau est vêtue
tout de noirelle porte le costume modeste
d'une paysanne, lebonnel, letablier. 8a figure
est ronde, pleine, calme, biencolorée. II serait
impossible de discerner sur ce visage, qui a
tous les signes de la bonne santé, le moindre
A PROPOS D'ÉLECTIONS.
Les elections communales du mois d'Oclo-
bre fourniront prochainement a un grand
nombre de calholiques l'occasion d'exercer
leurs prérogatives de citoyens et de protéger
les droits civils et religieux qui leur sont
chers a tanl de litres.
II est impossible, dans un article général,
d'envisager sous lous ses aspects la campa
gne electorale qui va s'ouvrir el de determi
ner d'une manière précise et compléte les de
voirs qui s'imposenta nos amis.
Tout ce que nous pouvons dire, c'est que
la lutte est obligatoire partout oü elle pré
sente quelques chances d'aboutir a un résul-
tal efficace et durable. Nous ajouterons
qu'elle est désirable partout ou elle peul
avoir pour résultat de grouper les calholiques
et de donner a leurs votes Ja portée d'une
solennelle et significative protestation.
Dans un trés grand nombre de commu
nes et mème de villes imporlantes, nos amis
auront a défendre des positions acquises;
ailleurs, ils auront a réparer de regretlables
échecs; enfin ils auront, en quelques en-
droils, a batireen bréche la prépondérance
néfaste du libéralisme.
En face de situations aussi diverses, la
prudence et le bon sens nous commandent
de ne pas nous immiseer dans des lutles li és-
souvent compliquées de questions person
nels et d'incidents locaux; mais nous
croyons utile de rappeler quelques vérités
générales qui pourronl servir de guide aux
calholiques et éclairer leur ligne de conduite.
La commune est l'unité première de notre
système politique.
II n'est done pas étonnant que les partis
qui se dispnlenl le pouvoir dans notre pays,
cherchent a occuper un point stratégique
d'une aussi haute importance.
En théorie, ilest vrai, l'autorilé commu
nale e. st un pouvoir purement adminislratif,
dont le rólele nom mème l'indique se
ADOLPI1E FAVRE.
[Reproduction inlerdile.)
Poperinghe- Ypres, S-t«,7-00,9-30,10-53,2-13,3-05,9-20. Ypres-Poperinghe, 6-40,9-07.12-03,3-37,6 30,8-43,9-30. Po-
peringhe-Hazebrouck, 7 03, 12-25, 4-17, 7-13. llazebrouck Poperinghe-Ypres, 8-35, 9 30, 4-10, 8-23.
Ypres-Hoalers, 7-50, 12-23, 6-43. Kouiers- Ypres9-23, 1-50, 7-50.
tioulers-Itrages, 8-43, 11-34, 1-13, 5,13, 7-36, (9-55. Licluerv.) Licjiierv.-Thouroul, 4-23 m. vers Ostende. Bruges-/Iok-
7 23, 8-25, 12-50, 5-00, 6-42. Lichterv .-Courtrai, 5-23 m. 9 01, 1,30, 3,37 7,21
Ypves-Courtrai 5-34, 9-49, 11-45, 2-33, 5-23, Courtrai-Ypres, 8-08, 1 1-02, 2-56, 3-40, 8-49.
Ypres-Thouroul, 7-18, 12 06, 6 20, (le Samedi a 5-50 du matin jusqu'a Langhemarck). Tiiourout- Ypres, 9-00, 1-25, 7 43,
(Ie Samedi a 0-20 du matin de Langhemarck a Ypres).
Comines-Warnêton -Le Tnuquet-Houplinos-Arme/trieres, 6-00, 10,15, 12-00, 6-23,"Armentières-Houplines Le Touquel-War-
nêton-Comines 7 -23, 10,30, 4-10, 8 -40. Comines- Warnëton 8-45„m 9-30 s. Wamêion-Comines 5-30, 9-30,
Courtrai Bruges, 8-05, I 1-00, 12-33,4-40, 6-53. 9-00 s. (Licluerv.)Bruges-Coizrfnxi, 8-23, 12-30, 5-00, 6-42.
Bruges, Blankenberghe, Heyst, (Station) 7-23, 11-08, 2-50, 7-33, (bassin) 7-31, 11-14, 2-50, 7 41. Heyst, Blankenb,Bruges,
5-45, 8,25, 11-25, 8-30.
Ingelmunster DeynzeGand, 8-00, 9-41, 2-15. Ingelmunster-Z)epM2e, 6-10 2" cl., 7-15. Gand-Deynie-Ingelmunster, 6-58,
11-20,4-41. Deynie-Ingelmunster, 1-00. 2'cl. 8 20.
Ingelmunster-Anseghem, 6-05, 12-55, 6-13. Anseghem-Ingelmunster7-ii, 2-20, 7-4-5.
Lichtervelde-Dixmade-Furnes et Dunkerke, 6-30, 9-08, 1-38, 8-00. DiznAerAe-Furnes-Dixmude et Lichtervelde, 6-35, 11-10,
3-40, 5-00.
pixmude-AYi?izport,9-30,2-20,S-45. Nieup-Dtizz», (bamsj 10-45, 4-10. (ville) 7-30,12 00,4-20.
Thouroul-Ostende, 4-50, 9-13, 1-50, 8-05. Ostende-Thouroul, 7-33, 10-10, 12 23, 6-13.
Selzaele-zYec/oo, 9-08, 1-25, 8-23. Eecloo-Se/zaele, 5-38, 10 13,4-22.
Gand-Temeuzen, (station) 8-17, 12 2 7.30 (porte d'Anvers) 8-30, 12-40. 7-43. Terneuzen-Gumt, 6-00, 10-30, 440.-
Selzaele-LoA'ere/i, 9 04, 1-30, 8 3d. (Ie Merer. 5 lu ui.; Lokeren-.Sö/ruele, 6 00, 10-23, 4 43. (Ie Mardi, 9,30.)
COB B. XI
;r"0]vr»A.iïci3s.
COURTRAIBRUXELLES.
Courtrai dép.
Bruxelies arr.
6,37
9,20
10,33
1,35
12,33
2,28
3,47
6,14
6.33.
8.34.
COURTRAI, TOURNA!LILLE.
Courtrai dép. 6.37 10,36
Tour'nai arr. 7,28 11,47
Lille 7,38 12,08
COURTRM, OANU.
Courlrai dép.
Gand arr.
6,42
8,01
12,31
1,81
S,44
3,04
6,40,
7,36.
BRUGES, GAND, BRUXELLES.
Bruxelies dép.
Courtrai arr.
BRUXELLES, COURTRAI.
3,22
8,02
8,28
10,46
12,21
2,44
5,38
7,36
6,47.
3,44.
2,34 3,34 8,47.
3,48 6,39 9,41.
4,00 6,35 10,00.
LILLE, TOURNAI, COURTRAI.
Lille dép. 5,15 8,22 11,03 2,22 3,20
Tournai 5,42 8,86 11,29 2,40 8,39
Courlrai arr. 6,34 9.47 12,26 3,38 6,33
GAND, COURTRAI.
Gand dép. 5,13 9,38 1,28 4,24 7,21.
Courlrai arr. 6,34 10,51 2,49 5,31 8,42.
Bruges d. 6,49exp.12.3i, 2,32, 3 43,ex. 0,43.
Gand a. 7,34, 1,49 4-07, 4,28, 7,88.
Bruxelies 8,50, 4 00, 6,02, 9-31.
^8^
Bruxelies 8,14
Gand arr. 6,00 9,41
Bruges 7,13 10,34
BRUXELLES, GAND, BRUGES.
11
1
,33 3,12 exp. 4,59 exp. 5,28
13 3.23 4,2(5 6 37 7,33
OT I TOO KH
2,38 4,37 3,11
7,22 8,53.
PAR
Suite. Voir le numéro précédent.
III
Une heure après celte conversation, Georges
entrait dans la salie a manger.
Berthe y était scule.
II alia vers elle.
A peine si j'ai eu le temps de vous dire bon
jour, petite cousine, fit-il en lui prenant la main
vons ne m'en votilez pas
Nullement, mon cher Georges.
C'est que j'avais a causer...
De la venle du chateau dit elle.
Allvous savez
Madame de Cernay vient de m'en parler...
Voyons, Georges, pendant que nous sommes seuls.
causons un peu... Vous ne romprenez pas que vous
faites a vos parents un immense chagrin, n'est-ce
pas
J'ai cru, effectivement, voir que ce projet
leur souriait peu. Mon Dien c'est qu'ils ne se sont
pas rendu compie de ses avantages mais ils les
comprendront.
Ils ne les comprendront pas, dit Berthe.
Georges regarda sa cousine avec surprise.
Voulezvous que je vous fasse un petit bout
de morale philosophique demanda-t-elle avec un
charmant sourire.
Volontiers.
Eh bien je vous dirai que voire Paris, avec
sa vie bruyante et affairée, a le malheur de durcir
un peu ce viscère qu'on appelle le cccnr le coeur
exisle toujours, mais il a perdu beaucoup de sa
sensibilité, de sou impressioonabililé, pour ceux
qui, comme vous, font, des sacs de sucre ou des
balles de colon le principal souci de leur vie.
Bon vous jetez des pierres dans mon jar-
din.
Qu'estce que cela vous fait, puisque vous
n'aimez pas la campagne?
Ah ma cousine, je vous y prends, a faire
des jeux de mots.
En dehors du jeu de mots, veuillez voir le
cólé sérieux de la question
Bah vous voulez parler raison
Tout a fait raisoo.
Voyons, je vous écoutema charmante
cousine.
Je veux done vous dire que mon oncle et
ma tante, qui in'ont habitués a eourir par monls
et par vaux, et dont le coeur est resté le coeur, ont
trouvé le bonheur dans la vie tranquille qu'ils ont
ici que cetle maison les possède tont enliers,
qu'elle est leur atnie, leur vieille connaissance, et
qu'a leur age, surtout, on est peu disposé a prendre
de nouvelles habitudes, a voir des lieux nouveaux...
Tenez, chaque jour voire mère, en se promenant,
voit ie chataignier qu'on y a plantéle jour de voire
première communion.
C'est moi qui l'ai planté.
Raison de plus. Elle s'y arrète, lecontemple
avec de douces larmes dans les yenx, el se rappelle
alors le temps oü vous élicz pi és d'elle, ne la quil-
tant pas d'une seconde, oü elle pouvait vous em-
brasser a toute heure... ce passé revit pour elle,
et voil'a, grace a ce chataignier, un instant de bon
heur assure a voire mère chaque jour... Oü sera
le chataignier planté par vos petiles mains Oü
seront les souvenirs dans la nouvelle demeure que
vous leur donnerez
Ce sont la des enfantillages, ma chère Berthe.
Eh que voulez vous si lout le monde
cherchait son bonheur au mème endroit, il n'v
en aurait pas assez pour chacun Je sais que
lesjeunes gens de nos jours sont possédés paree
besom de déplacement ils ne peuveut vivre dans
leur province, quoique leurs pères y aient véou,
et ils s'en vont a Paris, goüter de votre existence
libre a eux, mais quand ils seront vieux, quand ils
auront dépensé leurs forces a ce rude travail, car
je sais qu'on travaille, qui vous dil qu'ils ne re-
grelteront pas d'avoir quitté leur familie, qu'ils ne
se senliront pas un peu seuls, et que I'envie ne
leur prendra pas de revenir vers les lieux qu'ils
out habilés jadis Qui vous dil que ces lieux ne
leur sembleronl pas alors charmants, et qu'ils ne
seront pas émus en les revoyant
Vraiment, Berthe, vous parlez comme un
livre vous allez tout a i'heure m'atlendrir.
Yous recevez mes remarques bien légère
ment, mon cousin.
LégèrementVoyons, croyez-vous sérieu-
sement que mes parents regretteronl Gernay
quand ils seront bien sürs de trouver ailleurs tout
le conforlable, tout Ie bien-êlre qu'ils peuvent
désirer
Mon cher cousin, répondit la jeune fille,
nous ne nous couiprcnons pas... ou piutot vous
ne me comprenez pas. Vos parents ne craignenl
pas de raanquer de soins, ils savent bien qu'après
lout, vous avez bon coeur, et que vous ferez avec
eux votre devoir de fils.
Gertainemenl
Ce qu'ils redoutent, ce qui seuait pour eux
une grande doulenr, je vous Ie répète, ce serait de
quitter celte vieille demeure ils v laisseraient une
parlie de leur coeur, qui s'est attaché a tout ce qui
vous est indifférent, a ces murs, a ces arbres. a
l air qu'on respire ici.
Berthe s'arrêla, et Georges demeura silencieu-
sement appuyé sur la fenélre qui donnait sur le
jardin.
Tout a coup des aboiements se font entendre,
puis le bruit de pas précipilés... An moment oü
Berthe se levail pour s'infoi mer de la cause de ce
bruit, un jeune officier entrait précipilamment
dans la salie, l'ceil radieux, la poitrine palpitanle,
C'était Lncien
Berthe jela un léger cri, puis on la vit palir et
rougir tour a tour.
Quant a Georges, il selanca d'un bond dans les
bras de sou frère.
Ces tableaux dé familie ne penvent se peindre,
et la plume la plus exercée nesanrait rendre fidè-
lement l'incohérence charmante des premières
phrases qui sechangent.
(a coxTiwuer).