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il 1?
a A N c.
LE PRESBYTÈRE DU HASEAU.
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Samcdi 23 Octobre 1873.
N° 1,024.
10" annee.
Le Journal parait le Mercredi et le Samedi. Les insertions coülent 13 centimes la ligne. Les réclames et annonces judiciaires se paient 30 centimes la ligne. On traite d forfait pour les insertions par année.
ün numero du journal, pris au Bureau, 10 centimes. Les numéros supplémenlaires commandés pour articles, Réclames ou Annonces, coütent 10 fr. les 100 exemplaires.
CHEMIiVS I> E F E St. 1 OCTOBRE.
VIEUX MAIS vrai.
II y a des gensqoi Irouvent commode de
ne pas avoir de principes. Certes il y a des
momenis oü il faut du courage pour se tenir
fermemenl sur le terrain de ses convictions;
on risque alors de s'entendre qualifier dela-
naliqueet d'essuyer d'.autres épithétes inven-
tées par des gens qui regardenl les principes
d'un oeiI de dédain. Mais il arrive loujours un
moment ou l'on regrelle de ne pas s'ètre
laissé guider par des principes équilables.
L'avenlure suivante, arrivée a la presse bei
ge, en est un exemple.
La presse du parti liberal en Belgique n'a
d'autre principe que sa haine de la religion.
Eu cela elle ressemble a la presse libérale de
toule l'Europe.
Lorsque les troupes du roi Galanluomo
envahireiit les Elats de l'Église, une protes
tation indignée s'éleva dans le monde catho-
lique contre eet attentat a l'indépendance
d'un Etat qui est cerlainement un des plus
anciens qui existent. La presse libérale beige
applaudit au contraire a cel acte de spolia
tion. On avail beau dire auxjournaux libé-
raux: La cause de (a Papaulé est la came
des peliIs Elats. Si la Papauté lombe, com
ment prouverons-nous notre droit a I'exis-
tence, nous, pelit pays comme les Elats de
l'Église, nous, qui ne sommes que d'hier en
comparaison de ce Iróne séculaire! »Rien n'y
fil. L'allental fut consommé, la presse libé
rale donna libre carrière a sa joie impruden-
le el glorifia le triomphe du plus fori. La
justice élait violée, unacle inique élait ac
compli; mais bah! c'élait la religion calho-
lique qui en souiïrail et cela juslifiait tout!
COMTESSE DE BASSANVIELE.
Reproduction inlerdile.)
Mais les événemenls marchent. Un publi
ciste francais, M. de Girardin, prèche l'an-
nexion de la Belgique a la France. La pré-
tention était franche et brutale comme s'il
avail eu la force a son service pour Ia réali-
ser. Ne l'ayant pas, on le lut avec dédain et
el on aurait bienlót oublié en Belgique les
idéés saugrenues d'un écrivain qui, certes,
ne représente pas l'opinion publique en Fran
ce, mais voila que les journaux libéraux se
meitent de la pnrtie. L'oceasion était trop
bonne pour rétablir leur répulution de pa-
triolisme que leurs sympathies ullrarhéna-
nes avail fortement endommagée.
Avec une colère de commande, ils protes
téren! contre les ihéories du publiciste fran
cais; ils affirmérenl le droit des pelites na-
tionalités d'avoir leur place au soleil aussi
bien que les grandes agglomerations, lis
n'eurent pas assez d'insultes pour la France
mème qui, aprés lout, ne pouvait être ren
due responsable des lubies d'un journaliste.
En un mot ils élaient superbes de patriotique
indignation!
Malheureusemenl on leur a rappelé, et
cela ne pouvait manquer d'arriver, on leur
a rappelé que du lemps de l'attentat conlre
Rome, ils lenaient un langage diamétrale-
ment oppose a celui qu'ils tiennenl mainle-
nant; qu'alors ils ont applaudi des mains et
des pieds a celte politique sans morale
qui leur fait pousser aujourd'hui des cris de
paon.
Aprés tout.M. de Girardin est tin libéral
qui veul appliquer a la petite Belgique le
syslérne que I'llalie a appliqué an petit Etat
Pontifical. Les calholiques qui ont prolesté
alors sont en droit de protester aujourd'hui
et ils le font. Quant aux libéraux, ils ont
fait fi des principes de justice lorsqu'il s'est
agi de Rome; ils ont approuvé el applaudi.
Sur quels arguments fondraienl-ils leurs pro
testations conlre le uroil du plus fort? Qui
lesprendra au sérieux lorsqu'ils revendique-
ront le droit des pelites nalionalités? Toutes
leurs plaidoieries auronl Pair de palinodies,
el lonjours on leur répondra: Alors vous
avez approuvé, aujourd'hui vous n'avez pas
le droit de repousser.
Les journaux libéraux se lesont tenu pour
dit. Leur belle colére s'esl apaisée soudaine-
mcul et ils regretlent, sans doule, d'avoir
parlé trop vite.
Ce que nous disons ici n'est pas neuf. Cela
a élé écril dans les journaux au lemps oü
Rome élait envahie: les assemblées legislati
ves en onl relenli. Dans ce temps-la, Ia mé-
me chose a élé repétée cenl fois; notts la
répólons eneore, car les vérilés sonl bonnes
a être rappelées.
PATRIOTISME FAUX, PATRIOTIS.ME VRAI.
Eous lisons dans la Paix:
Des feuilles libérales proposenl inslam-
ment de décréter en Belgique le service mili
taire universeilement obligatoire afin de ren-
dre impossible l'exécution des menaces des
chauvinisles de France. Sur ce théme el les
jetlenl des bouquets de fleurs de rhélorique
arrosces de larnies de crocodile, non sans
insinuer que les caiholiques nes'opposenl au
militarisme general et forcé qu'afin de facili-
ter la conquêlc de nos provinces par les
Hugo, les Girardin el leur suite. A ces
outrages fanlaisisles notre réponse sera
eourle mais bonne.
Les caiholiques ont loujours été les meil-
leurs et parfois les scuts défettseurs de la
nalionalilé beige. Ils Tont soulenue sous
Albert el Isabelle quand nos Gueuxunisa
ceux de Hullande nous en voulaient dépouil-
ler. Ils ont créé la république beige de 1789
contre les Keyserlicks, lous libéraux dévoués
la domination autrichienne. Ils l'ont dé-
fendue encore en 1792, en 1794 el en 1796,
conlre nos Sans Culottes, qui demandaient
solennellement et favorisaient aulant qu'il
élait en eux notre réunion a la France. A
cetle époque néfaste les vrais et bons Beiges
comballaient le despotisme exotique dans les
plaines de la Campine, c'élaienl lous des
caiholiques, pendant que la masse des
libéraux, officiers et pékms, ltguraienl dans
les rangs de Tarmée el de l'administration
francaises, et qualifiaient de brigands les
héros d'Herenlhals. Votia des faiis qu'on
aura sans doute la prudence de ne pas con-
tcster, car nous sommes prèls a en fournir
les preuves déiaillées.
Quant au service obligatoire désiré et pro-
mis par les feuilles auxquelles nous répli-
quons ici, nous allendrorts a Tceuvre les
doctrinaires et nous verrons s'ils auront le
triste courage de nous doter de ceprogrés
la.
EXTRAIT D'UN DIALOGUE ENTRE UN PÈRE
ET SON FILS AU SUJET DU LIBÉRALISME.
Le ftls. Pourquoi l'Église caibolique
défend-elle la lecture des écrits libéraux qui
discutent les questions religieuses
Lepere. L'Église catbolique a tonjours
entendu ètre acceplé raisonnablemenlavoir
tonjours un lien duns l'intime raison de l'hom-
me. Elle n'a jamais prélendu faire admellro
son autorité mèrne infaillible et divine, sans
qu'elle se rallachat avec la grace, pour cha-
cun des fidèles, a un principe intérieur de
conviction personnelle. F.lle ne repousse done
point une discussion contradicloire au sujet
de sa morale et de ses dogmesmais elle
n'admet qu'une discussion loyale el honnête,
qui puisse éclairer et non point pervertir Ie
cceur el l'esprit de ceux qui en font l'objet de
leurs études. L'Église défend a juste litre Ia
lecture malsaine des productions libérales de
lepoque, paree que l'honnètelé, la décence
el la bonne foi n'y sonl point respeclées.
Le libéralisme contemporain n'est plus
qu'une grande hypocrisie et une grande
trahison.
II déclare qu'il est un parti e.xclusivement
politique, ne s'occupanl pas de religion (de
claration de M. Frère-Orban) et dans toule
l'Europe il est devenu seclaire, se pose en
adversaire déclaré du calholicisme, exalte les
DoelIinger, les Hyacinihe, les prètres apos-
tats, et les proelame de grands hommes et
les apótres dc la civilisation.
Le libéralisme veul la separation de l'Église
et de l'État; et il approuvé en Italië et en
Alleinagne, l'État qui s'empare des biens du
clergé, qui veut donner ['instruction mème
théologique, et qui prélend trancher les ques
tions de dogme caibolique. II critique le
Gouvernement francais présentanl un projet
de loi conlre ^Internationale, paree qu'il voit
la une atteinte a la liberie d'associalion et
en Suisse el en Prusse il applaudit des deux
mains a l'expulsion des membres des com-
munaulés religieuses.
Les libéraux, ces sui-disant défenseurs de
l'indépendance et de la dignité humaines,
:=.?-'r>l
G°
Poperinglie- Ypres, 5-15,7-00,9-30,10-55,2-15,3-03,9-20. Ypres-Poperinglie, 6-40,9-07,12-03,3-37,6 80,8-48,9-80. Po-
peringhe-Hazebrouck, 7 03, 12-28, 4-17, 7-13. llazebrouck Poperinglie-Ypres, 8-38, 9 80, 4-10, 8-28.
Ypres-Houlers, 7-30, 12-28, 6-45. Roulers- Ypres, 9-28, 1-50, 7-80. n o r>
Roulers-/y/*«je.s, 8-43, 11-34, 1-13, 3,13, 7-30, (9-58. Licluerv.) Licliterv.- Thourout, 4-25 m. vers Ostende. Bruges-/1oit-
7 23, 8-25, 12-50, 5-00, 6-42. Lichlerv.-Cuurlrai, 3-23 m. 9 01, 1,30, 5,37 7,21.
Ypres-Courlrai 8-34, 9-49, 11-18, 2-33, 8-23, Courtrai-Ypres, 8-08, 11-02, 2-56, 5-40, 8-49.
Ypres-Thourout, 7-18, 12 06, 6 20, (le Samedi a 8-50 du malin jusqu'a Langliemarck). Thourout- ïpres, 9 00, 1-23, 7-43,
(le Samcdi a 6-20 du malin de Langhemarck Ypres).
Gomines-Warnêion -Le Touquet-Houplines-Ar>/ie»0'ères, 6 00, 10,13, 12-00, 6-28, Armentieres-uonplines Le loiiquet-W ar-
nêlon-Comities 7-23, 10,50,4-10, 8-40. Comines- XVarnêton 8 45, m 9-30s. Warnêton-C omines 8-30, 9-80,
Courtrai Bruges, 8-08, 11-00, 12-33,4-40,6-33. 9-00 s. (Lichterv.)Bruges-Courlrai, 8-23, 12-30, 5-00, 6-42.
Bruges, Blankenberglie, Heyst, (Station) 7-25, 11-08, 2-50, 7-35, (bassin) 7-31, 11 -14, 2-86, 7 41lleyst, Blankenb,Bruges,
5-45, 8,25, 11 f25', 8-30.
Ingelmunsler Deynze Grind5-00,9-41, 2-15. lugelmunster-De^/use, 6 10 2" cl., 7-13. Gand-Deyme-Ingelmunster, 6-38,
11-20, 4-41. Deynze Ingelmunsler, 1-00. 2' cl. 8 20.
lngelmunster-.4nsepAem, 6-08, 12-55, 6-13. hnse^hem-Ingelmunsler, 7-42, 2-20, 7-45.
Lichtervelde-Divmade-Furnes et Dunkerke, 6 30, 9-08, 1-35, 8-00. DitnAer/ce-Fumes-Dixmude et Lichlervelde, 6-33, 11- 10s
3-40, 5-00.
Dixmude-Art'ei«port,9 80,2 20,8-48.Nieup-/)f;rm, (bains) 10-43, 4-10. (villc) 7-30,12 00,4-20.
5, 1-50, 8-03. Ostende-Thourout, 7-55, 10-10,12 28,6-15.
Thourout-Oslendc, 4-50, 9-1
Selzaele Eecloo, 9-05, 1-23, 8-23.
Gand-Terneuzen, (station) 8-17, 12-23. 7,30 (porte d'Anvers) 8-30, 12-40. 7-48. Terneuzett- Gand, 6-00, 10-30, 440.-
Selzaele-Lo/terert, 9 04, 1-30, 8 30. (le Merer. 5-10 m.) Lokeren-S«/ïae<e, 0 00, 10-23, 4 48. (le Mardi, 9,30.)
c o n n k «s i- o sr d a. x c e
COURTRAI, BRUXELLES.
Courtrai dép. 0,37
Bruxelles arr. 9,20
10,53 12.33 3,47 6,33.
1,38 2,23 0,14 8,34.
Bruxelles dep.
Courtrai arr.
BRUXELLBS, COURTRAI.
5,22
8,02
8,28
10,40
12.21
2,44
5,33
7,36
6,47.
8,44.
COURTRAI, T0UR.NA1LILLE.
Courtrai dep. 6,37 10,80 2,34 5,34 8,47.
Tournai arr. 7,28 11.47 3,48 6,39 9,41.
Lille 7,38 12,08 4,00 6,35 10,00.
LILLE, TOURNAI, COURTRAI.
Lille dép. 5,13 8,22 11,03 2,22 3,20
Tournai 5,42 8,86 11,29 2,40 3,39
Courtrai arr. 6,34 9.47 12,20 3,38 6,33
Courtrai dép.
Gand arr.
COURTRAI, GAND.
0,42 12,31 3,44 6,40.
8,01 1,51 5,04 7,36.
Gand dép.
Courtrai arr.
5,13
6,34
GAND, COURTRAI.
9,38 1,28 4,24
10,31
1,28
2,49
3,31
7,21.
8,42.
Eecloo-Selzaele, 5-38, 10 15, 4-22.
BRUGES, GANDBRUXELLES.
Bruges d. 6,49exp.12,34, 2,82, 3 43,ex. 6,43.
Gand a. 7,34, 1,49 4-07, 4.2S, 7,58.
Bruxelles 8,30, 4-00, 6,02, 9-31.
Bruxelles dép.
Gand arr. 6,00
Bruges 7,13
BRUXELLES, GAND, BRUGES.
8,14 11,53 3,12 exp. 4,39 exp. 3,28.
9,41 1.13 3,23 4,20 6,37 7,33.
10,34 2,38 4,37 3,11 7,22 8,33.
PAR LA
Suite. - Voir Ie numéro précédent.
Hélusle i'uisseau était lari; !e hois, tombé ré-
cemment sous la hache du biicheron ne lormait
plus que des monceaux de branches dépouillées el
prètes a éne livrées aox (lammes; le gazon, lllca-
tre des rondes enfanlmes, avail élé remplacé par
tin champ frairliement la hou ré les hosqui Is nx
niêrnes avaieol disparu et la maison chérie. avec
ses grilles et ses voleis fermés, offrail aussi I'image
de l isolemenl el de i'abaiidon.
A eelte vue la voyagruse Inissa s'éehapper de
ses yeux les plenrs depuis si longlemps conlenus
el de son coeor des regrets douloureux.
0 ma vieille maison murmura-l-elle tes
portes sont closes... as-lu oublié Ion enfant? mes
yeux ool-ils tanl pleuré depuis que j'ai passé pour
la dernière fois ton sen il bénique In n'en recon-
naisses plus le regard attendri n'esl-ce plus ma
voix qui l'appelle, mes pas qui volent vers loi 0
ma vieille maison tu as fail comme toutes choses
de ce monde; absente j'ai élé oubliée de toilu
ni'as fermé ion sein, lu as formé d'autres liens;
amsi que tu m'abrilas naguère lu en abrites une
autre atijourd'huipour elle, ingrate, lu prends
tes airs de fêle pour elle les jardins se parent de
fleurs embaumées a sa voix lout s'anime sous ton
toil, tout prend un air de vie el d'allégresse. 0
ma vieille maison dernière illusion de mon bon-
heur passé, la lille exilée ne franchira pas ton
seuil inhospitalier, elle ne viendra pas le deman-
der Qu as-lu fait du lit antique de nos pères
qu'as-tu fait de nos berceaux d'enfant, de nos
cadres vénérés, des grands fanlenils de la veillée
oil noire père s'endormait an bruit de nos chan
sons?... Adieu, ma vieille maison, adieu pour
toujonrs, car lu as tout oublié! Adieu aussima
dernière illusion! Hélusque me resle-t-il main-
teuaiil?... Adieu... s'écria-1-elle dans un sanglot.
Dieu lui cria a son lour d'une voix forte
l'éclio qui seul n'avail pas change.
En I'enlendant, l'inforlunée se laissa lomber a
genoux et voulnt élever ses mains amaigries vers
le ciel pour I'appcler a son aide; mais, brisée par
les emotions la fatigue et le besom elie n'en eut
pas la force el ghssa cvanouie stir le sol.
A ce même moinenl, l'abbé Ilenri sorlait du
prcsbvlère pour commencer la visite qu'il faisait
chaque join- a ses ouailles malheureuseset la
Providence voulnt qu'il commencal sa tournée par
le chemin sur lequel gisail presque sans vie la
pauvre abandonnée.
A sa vue, Ie bon prétreaussi effrayé qti'érnu,
car tout a la fois il rodoulait un crime et voyait
line souflYance a soulager coiirol appeler a son
aide les plus proches voisins de I'endroit et, avec
leur seconrs, Iransporla letrangère ilaus son
humble logisoil lous les soins lui furent aussilöt
prodigués par la bonne dame Marion vieille et
modeste ménagère du serviteur de Dieu.
L'inlérieur du presbytère répond. it a la simp!i-
cité de ses habitants, ear on y trouvait celte
héroïque indifférencc des choses de la lerre qui
caraclérise la vrai ministre du Très-Haul; on y
sentait le froid et la nudité du cloitre; partonl le
carreau éteridait sa surface unie tl glaeée, sauf
un étroil morceau de lisière placé d< vant le pelit
lit de bois blanc oii couchait le euré. Les murs,
badigeonnés et lilts, portaient pour tout ornement
quelques gravures religieuses encadrées de bois
noiici; il n'y avail point de glace; un grand christ
d'ébène tenail la place que la glacé aurait oecupée
au dessus d'une cheminée sans usage, dans l'alre
de laquelle tombait la pluie et soufflail la bise avec
le sans-facon des holes habitués d'un logis. Le
mobilier, i éduit au strict nécessaire, était lel encore
que l'cvait laissé le piédécesseur de l'abbé Henri.
Ec seul luxe du bon prétre, si on peul appeler
luxe line chose semblable. élait non une biblio-
thèque, le meuble auquel on donne ce nom
n'existail pas au presbytère, mais des livres
rangés sur des la biet t es de bois blanc, livres nom-
breux et choisis de lelie sorle, qu'ils déuotaient un
ami de la liltéralure et des arts.
Ce n'élait point un homme ordinaire que l'abbé
Henri. Tout a la fois simple de coeur el grand par
l'inlelligence, cequi esl rare. il était d'une piélé
profonde et d'une charilé inépuisable. Drier Dieu,
secourir les pauvres, soigner les malades, voila ses
principales occupations de cliaque jour; mais,
quand, aprèstous ces devoirs templis avecautant
de zêle que d'amour, une hem e lui reslait encore,
il la consacrait a ses livres cliéris. Alors. assis dans
son grossier fauteuil de paille, ses pieds devant un
foyer éteint, il se sentait heureux, el il suivail avec
joie ses auteurs aimés dans leur vol vers les régions
de l'infini.
L'abbé Henri était un homme de haute taille,
ma gre, d'une tenue irréprochable dans sa simpli-
litéauslère, d'une tournure disiinguée. Ses che-
veux gris el abondants encadraienl un front élevé;
ses veux noirs, profonds el médilalifs comme ceux
d'un homme ayant beaucoup rétlécbi et souffert,
élaient doux el Iristes mais des sourcils épais
donnaienl a son visage un air d austérité qui gla-
gait a la première vue et que l'expression de son
regard n'adoncissail que lentcmenl. Aussi les ha
bitants du petit village de C... avaienl-ils commeneé
d'abord par le craindre, puis a le respecter, bien
longlemps avant de pouvoir parvenir il l'aimer.
Mais sa bonté, ses soins iucessanls el sa charilé
immense avaienl fini par faire de lui le père de
tons ses paroissiens.
On le consullait sur lontes les choscs dc ce mon
de, sur les semences. sur les récoltes, sur le mo
ment de couper les foins, de renlrer Ic blé, bien
plus encore que sur les cas de conscience. Le curé,
pour parvenir plus lard a éveiller le souvenir des
intéréts spirituals dans ces ames alourdies par les
soucis du siècle, se prélail avec une bienveillance
sans égale a leurs solliciludes temporedes. Aussi
élait-il devenu l'oracle du pays, el celte phrase:
ii l'abbé Henri a dit ceciélait un jügement sans
appel.
Mais si l'abbé Henri élait l'arbitre suprème du
petit village de C..., la vieille Marion s'élail établie
de son chef son premier et unique minislre, et,
grace a sa langue infaligable el a sa ménioire il
l'aide dc laquelle elle répétait plus ou nioins cor-
reclement, dans decertaincs occasions, des phrases
prononcées un jour par son maitre, elle inspirait,
sinon aulant de respect, au moins presque aulant
de coufiance et de crainte que celui-ci.
Nous avons dit que c'élait de son chef que la
vieille Marion s'élail élablie minislre du curé, ct
cela avec juste raison car, lorsque ce bon prétre
vint remplacer sou prédéeesseur dans cette cure
modeste, il trouva la vieille Marion établie au pres
bytère.
llélas ma bonne femme, lui dit-il tristement,
mes humbles ressources, dont je dois encore la
dime a ceux qui sonl plus malheureux que moi,
ne me permelleut pas de votis garder comme ser-
vanie; cherchez done unc place ineilleure que celle
que vous perdez ici, et, en attendant, regardez-
vous cbrz moi comme chez vous c'esl malheu
reusemenl toni ce que je puis faire.
Marion haussa légèreinenl les cpauies en enten-
dant ces paroles.
Esl-ce que je vous demande rien dit-elle
alors; laissez-moi faire, car je mourrais s'il me
fallait quiller celte maison. Pensez aux pauvres
lant que vous voudrez, ce sera a moi a penser a
vous.
(a continuer).