M s s ïi Ism IM Samedi 11 Décembre 1875. 10e année. N° 1,038. TRIBUNE RÉSERVÉEO z O 5° co k 2 iai»» Le Journal parail le Mercredi et le Samedi. Les insertions coülent 15 centimes la ligne. Les réclames el annonces judiciaires se paient 30 centimes la Higne. On traite d forfait pour les insei lions par année. Un numéro du journal, pris au Bureau, 10 centimes. Les numéros supplérnentaires cómmandés pour articles, Réclames ou Annonces, content 10 fr. les 100 exemplaires. C H E M I ar S I» E F E K. 1 0CT0BRE. Les personnes qui prendront un abonnement au Journal et Ypres, pour 1876, et qui nous en feront parvenir le montant, le recevront gratis jusqu'a la nouvelle année, a commencer du jour oü Ia demande et le montant nous parviendront. LE PAYS ET LES L1BÉRAUX. II est certain que jamais l'impiété ne fut plus cynique, l'immoralité plus raffinée ni plus profonde, le radicalisme plus brutal, la passion des sectaires plus violente que de nos jours. Les grand centres surtout présentenl sous 'ce rapport un spectacle véritablement afiligeant. La propagande qui s'y fait au profil des idéés libérales ne recule devant aucune extrémité, et il y a de quoi trembler a la pensée du malheur de tam de dupes qui prennent leur part de responsabilité dans ce déluge d'alhéisnie et de mauvaises mceurs qui envahit le peuple beige. D'aulre part observez ce peuple dans sa vie quotidienne, et dites si les sentiments dont il est pénétré ne légitimenl pas toutes les espérances. Nos temples sonl (rop pelits pour la foule qui s'y presse aux jours de solentiité religieuse; nos pèlerinages, contre lesquels de malbeureux fanalisés ont essayé tour a tour el sans plus de succés, le ridi cule et la violence, le sarcasme et la canne plombée, font entendre de toutes parts, avec une ferveur édifiante, les accents de la priére en commun, et il y a quelqties jours a peine un millier d'étudiants uni- versilaires, l'honneur de la jeunesse beige, allaient aux processions du jubilé, lenrs professeurs en lèle, donner le magnifique LA exemple de la foi qui s'afiirme, de la piété qui ne veut pas connaitre les lachetés du respect humain. Le pays est iibéral, nous dit-on, et la charité chrétienne le couvre d'asiles pour toutes les misères inlellectuelles et morales; il est Iibéral, et I'enseignement calholique, abandonné a ses propres ressources, élonne letranger par la vigueur de son organisa tion et par les splendides résullats qu'il ob- tient dans le domaine de la science; il est Iibéral, et toute une généralion de jeunes hommes s'élancent sur la hrèche, a la tri bune, dans la presse, dans les ehaires d'en- seignement, dans loules les conditions so- ciales, pour metlre au service de l'Eglise leur mére, si indignement oulragée, ce que le ciel leur a déparli de lalent. de dévoue- ment et d'influence; il est Iibéral, et chaque jour un nouveau Cercle calholique vient grossir les rangs de cetle Fédération lant redoutée du faux libéralisme; il est Iibé ral et il envoie une majorité conserva trice aux Chambres législatives, et l'in- domptable énergie que nos amis politiques déploient dans les cornices öte le somrneil a la loge, et tons les jours encore de nom- breux scrutins proclament des calholiques? Reconnaissons-Ie, nous serions des in- grats, si dans une situation que nos fréres des autres pays penvent nousenvier a juste litre, nous aIIions, pour une vaine cla- meur, écouter les conseils de cede espèce d'inquiéluöe qui conduit au décourage ment. Non, le pays n'est pas Iibéral, et il n'est pas sur le point de le devenir. Si les enne- inis de son bien-êlre travaillent avec une ardeur fiévreuse a ruiner les vieilles croyances et les vieiIles meetirs du même coup, c'est qu'ils savent bien que leur régtie défmitif est impossible aussi longtemps qu'ils auront devant eux ce boulevard qui necéde point. Nous avons précisémenl les mèmes raisonset de bien meilleures encore, pour èire ardents a la defense. Le devoir de la lutte oblige toujours et nous constalons avec bonheur qu'il est de mieux en mieux compris et pratiqué par les calholiques. Aimer la religion et en faire la régie de sa vie, considérer les droits du ciioyen comrne un bien précieux et les revendiquer en toute circonstance, ne connaitre ni la présomplion dans le succés, ni l'abattement dans la défaile; ètre au travail le lendernain du combat; étudier les causes de la victoire et les faules qui amènenl les revers; recommencer tou jours, persévérer et opposer a ses adver- saires la force de cetle union qui nait de la charité et qui les a étonnés si souvent, tout cela se tienl, et tout cela dans son en semble, ne l'oublions pas, renferme le se cret du triomphe. Plus on y songe et plus on reste con- vaincu que c'est calomnier la Belgique que de la dire libérale. (Idyle.) LE PRETRE CATHOLIQUE et M. l'avocat d'Elhoungne. M. l'avocat d'Elhoungne terminait sa der- nière harangue par cette prophétie vraiment digne des gueux qui l'eeoulaient: Le jour viendra od le ciloijen sera tout et oil le pré- Ire tie sera rien. A cette parole du tribun gantois, nous airaons a opposer une autre prophétie plus autorisée que la sienne: Portee inferi non prcevalebunl adversus earn, les portes de l'enfer ne prévaudront point contre l'Eglise. Le jour ou le prêlre ne serail plus rien, l'Eglise aurait cessé d'exister: or la parole de son divin Fondaleur garantil a l'Eglise une existence immortelle. Qu'est-ce en effet que le prêlre dans l'E glise? Le prêlre fait partie de la portion la plus noble du peuple chrélien, il est revètu d'une dignité si éminente qu'aucune no blesse, aucune royauté terrestrë ne peut lui ètre comparée; il est placé comme un inter médiaire entre le ciel et la (erre pour faire descendre sur les hommes les bénédiclions d'en haul el faire m'onter vers Dieu les sup plications de Ia terre. C'est par lui que l'Eglise nous éclaire, par lui qu'elle nous guide et nout instruit, e'est par la main du prêlre qu elle dispense le pardon qui apaise le remords, la nourriture divine qui sert d'alunent aux ames, le viatique qui console et soulient dans le passage du temps a l'éter- nité. Supprimer le prètre, c'est done mutiler l'Eglise dans un de ses organes essentiels, c'est la paralyser dans l'exereice de ses func tions, c'est la délruire. M. d'Elhoungne nous di ra peul-être que nous outrons le sens de ses paroles; lorsqu'il aspire aprés l'heureux momenl oü le prètre ne sera plus rieu, il demande^ uniquetnenl qu'il ne soit rien en dehors du domaine que le libéralisme prélend lui assignee. II consent a ce que le prètre, coufiné au fond d'une sacristie, y exerce encore tin petit reste d'au- torilé. Le prètre pourra, sous la haute sur veillance toutefois de l'aulorité civile, régler Ie nombre des cierges qu'on allumera a l'au- tel,réciter a la messe les prières qu'il voudra, expliquer au peuple certains dogtnes et cer- lains points de morale, jeler un peu d'eau bénite avec quelqties priéres sur les cadavres qui lui seront présenlés. Nous ne garanlis. sons pas cependant qu'avpc le lemps, le tri bun gantois ne trouve que laisser au prètre cetle part d'autorilé, c'est lui permettre d'of- fusquer le citoyen qui doit ètre tout et placer trop haut celui qui est condamné a n'ètre plus rien. Pour nous, quand nous voulons connaitre le domaine qui appartient réellement au prêlre, nous n'allons pas aux assemblées des gueux écouter les déclamaiions de leurs tri - buns, mais nous nous adressons a l'Eglise qui a requ de Jésus-Christ sa constitution et a ap pris de lui jusqu'a quel point s'étendent le pouvoir et la mission du prètre. Nous allons a elle en toute confiance, car nous savotis qu'étant infaillible, elle ne peul ni se tromper ni nons tromper sur cette grave matière. L'Eglise nous apprerid que le prêlre a le droit et la mission d'elendre sa sollicitude sur lout ce qui intéresse le bien des ames. II a le droit d'enseigner leurs devoirs non seule- ment aux humbles et aux ignorants mais aussi aux savants et aux grands de la terre; il a le droit d'exiger que les gouveruanls aussi bien que les gouvernés se conforment dans lous leurs acles publics et privés aux lots de la morale chrétienne. Ei lorsque sous prélexte d'empiélements, on veut enchainer son ministère, reslreindre sa mission, il doit ta X O ca O' c-1 co Q o «O s ■<s M 9 as ^^V/N V- Tl 50 VI ZX 73 O ?-4 C=3 a> -a 50 •o O G 73 Tl 50 2 O C/3 ■H 50 Tl C/2 H 50 ra 1 ü5 ■73 ra r- 2! H co ss: 2 S CAI O e m 50 >- Poperinghe-ÏW, 3-13,7-00,9-30,10-55,2-13,B-OS,9-20. - Ypres-Poperinghe, 0-40,9-07,12-03,3-37,6 30,8-43,9-30. - Po- pertnghe-Hazebrouck, 7 03, 12-28, 4-17, 7-13. Hazebrouck Poperinghe-Ypres, 8-38, 9-50, 4 10, 8-23. Ypres-Iioulers, 7-50, 12-25, 6-45. Roulers-Ypres, 9-25, 1-50, 7-50. Roulers-Bruges, 8-45, 11-34, 1-13, 3,15, 7-36, (9-55. Licluerv.) Lichterv.-Thourout, 4-28 m. vers Ostende. Bruges-Rotz- 7 23, Ö--25, 1-2-50, 5-00, 6-42. Lichterv.-Courtrai, 5-25 m. 9 01, 1,30, 5,37 7,21. Ypres-Courtrai 5-34, 9-49, 11-15, 2-35, 5-25, Courtrai- Ypres, 8-08, 11-02, 2-56, 5-40, 8-49. Ypres-1 hourout, 7-13, 12 06, 6 20, (le Samedi 5-50 du matin jusqu'a Langhemarck). Tuourout-Ypres, 9 00, 1-25, 7-45, (le Samedi a 6-20 du matin de Langhemarck k Ypres). Comm s-\Varnêion-Le rouquet-Houplines-.-lrwienO'ères, 6 00, 10,15, 12-00, 6-25,Armentières-Houplines-Le Touquet-War- neton-Gommes 7 -25, 10,50, 4-10, 8 -40. Comines- Warnêton 8-45, m 9-30 s. Wa rné to n -Comines 5-30, 9-50, Courtrai-Bruges, 8-05, 11-00, 12-33,4-40, 6-55. 9-00 s. (Lichterv.)Bruges-Courtrai, S-25, 12-50, 3-00, 6-42. Bruges, Blankenherghe, Heyst, (Slation) 7-23, 11 08, 2-50, 7-35, (bassin) 7-31, 11-14, 2-56, 7 41Heyst, Blankenb,Bruges, 3-45, 8,25, 11-25, 5-30. Ingelmunster Deynze-Gattd, 5-00, 9-41, 2-15. Ingelmunster-Zleynje, 6-10 2" cl., 7-15. Gand-Deynze-Ingelmunster, 6-58, 11-20, 4-41. Deynze Ingelmunster, 1-00. 2* cl. 8 20. Ingelmunster-djisej/iew, 6-05, 12-55, 6-13. Anseghem-Ingelmunster, 7-42, 2-20, 7-45. Lichtervelde-Dixirmde-Furnes et Dunkerke, 6 30, 9-08, 1-33, 8-00. jDimterA'e-Furnes-Dixmude et LichterveleLe6-33, 11 10, 3-40, 3-00. Dixmude-MeuporG9-30,2-20,8-43. Nieup-Z)ia;m, (bains) 10-45, 4-10. (ville) 7-30,12 00,4-20. 1 nouroul-Ostende, 4-50, 9-13, 1-50, 8-03. Ostende-Thourout, 7-35, 10-10, 12 25, 6-15. Selzaete Eecloo, 9-05, 1-25, 8-23. Eecloo-SeOrae(e, 5-35, 10 15,4-22. Gnnd-Terneuzen, (station) 8-17, 12-23, 7.30 (porie d'Anvers) S-30, 12-40. 7-43. Terneuzen-Gkwd, 6-00, 10-30, 440.- Selzaete-XoAerezi, 9-04, 1-30, 8-30. (le Merer. 5-10 m.) Lokeren-Safjaefe, 6 00, 10-23, 4 43. (le Mardi, 9,30.) C0R.B.ES3P03VDANCKS. COURTRAI, BRUXELLES. 8RUXELLBS, COURTRAI. Courtrai dép. Bruxelles arr. 6,37 9,20 10,33 1,33 12.33 2,23 3,47 6,14 6.35. 8,34. Bruxelles dép. Courtrai arr. 5,22 8,02 8,28 10,46 12,2t 2,44 3,33 7,36 6,47. 8,44. COURTRAI, TOURNAI, L1LLE. Courtrai dép. 6.37 10,36 2,34 3,34 8,47. Tournai arr. 7,28 II,47 3,48 0,39 9,41. Lille 7,38 12,08 4,00 6,33 10,00. L1LLE, TOtJRNAI. COURTRAI. Lille dép. 3,13 8,22 11,03 2,22 3,20 Tournai 5,42 8,56 11.29 2,40 3,39 Courtrai arr. 6,34 9.47 12,26 3,38 6,33 COURTRAI, GAND. GAND, COURTRAI. Courtrai dép. Gand arr. 6,42 8,01 12,31 1,51 3,44 6,40. 5,04 7,36. Gand dép. Courtrai arr. 5,13 6,34 9,38 10,31 1,28 2,49 4,24 3,31 7,21. 8,42. BRUGES, GAND, BRUXELLES. Bruges d. 6.49exp.12,34, 2,32, 3 43,ex. 6,43. Gand a. 7,34, 1,49 4-07, 4,28, 7,58. Bruxelles 8,50, 4-00, 6,02, 9-31. Bruxelles dép. Gand arr. 6,00 Bruges 7,13 BRUXELLES, GAND, BRUGES. 8,14 11,33 3.12 exp. 4,39 exp. 9,41 1,13 3,23 4,26 6 37 10,34 2,38 4,37 3,11 7,22 5,28. 7,33. 8,35. (roman de müeurs) par GUILL. LEBROCQÜY. Suite. Voir le numéro précédent. IV. REVUE DES TROUPES. On en était encore aux formules banales de la politesse, quand on annonca le retour de ces mes sieurs. Comme nous aurons faire la connaissance de plusieurs d'enlre eux, observons de plus prés cetix que nous aurons a rencontrer ai lieu rs C'est d'abord M. de Vaubois un type de gentil- homme de bonne souche taille élevée el droit front inlelligeut cheveux relevés naturellcmcnl bouclés et d'un blanc de neigeceil plein de finesse, lèvre souriante, démarche assurée. II a la conscience de sa valour person nel leMalgré lui, il pose lou- jours. Sa poili ine se bombe avec grace a sa boulon- nière brille un cordon rouge; sa main se pose avec nonchalance sur sa poilrine 'dans la region du gilet, a la hauteur du bras droit. On sent en lui le bourg- mestre do la commune et on flaire un reste de no blesse a trenle-deux quartiers Malheureusement, la Reproduction interdilsUn volume in-12, de 138 pages, en venle cliez G Lebrocquy, iibraite, Placode Louvain 3, a Bruxelles, el cliez andcr- ghinste-Fossc, a Ypres. Prix 1 franc. fortune n'est pas a la hauteur des litres el des pre tentions. Son üls Alexandre marche a ses cötéssalue avcc aisanee et révèle dans toute sa tournure ce qu'on appelle un beau gargon, un homme a la mode. II n'est'pas aussi grand que son père, et n'a rien des opulente» proportions de sa sceur M",e Dusabre. Taille moyenne, qnelque chose cumme cinq pieds cheveux noir de jais, yeux, moustachesbarbe, favorts idem. li a le nez aquilin les cheveux artis- lement rejetés en arrière, de fagon a découvrir un front qui ne manque pas d'ampleur. Sa cravate est irréproéhable el ses gaols immaculés. Monsieur Cumploir, petit, maigre, sec, une sorte de criquet. Toujours en mouvement, nerveux, ex tréme, l'oell vif, deint cbauve,sans fagons il sail pourtani qu'il n'est pas sans valeur sa fortune est probablement la plus solide de Bouneterre. Des actions dans les mines, des operations heureuses dans les carrières, des plantations a propos, l'ont fait, dit on, approcher du million. Et un homme qui s a p p u 11 e million, surtout s'il habile Bonneterre, représente toujours bon gré mal gré, le lingot d'or dont il est la vivanle incarnation Voici M. le capitaine Dusabre, lequel porte assez mal son nom rien de militaire, rien surtout de sabreur dans celte tournure Un corps long el qui parail énervé, des cheveux prématurémenl gris, des yeux qui liennent de l'albinos. Avec cela beaucoup de suffisance le col raide, le talon mordant le planclier Quanta M. Delaille, nous connaissons son pro fil une grossse boulc ou une tonne sur deux quilles minces. Ajoutez-y une tèle d'un volume foil res pectable, mais sons expression; deux bras qui res- semblenl a deux bouts de cable en caout-chouc; des doigls qu'un cliien mal appris prendrait pour des bouts de saucisse ou des boudins blancs. Cel hom me, ou je me liompe fort, aura la goulte avant peu, si Dieu lui prête la vie; el si, au contraire, il doil mourir bientót, c'est une victime réservée a ['apo plexie. Voyez ce teint enluminé, ces yeux injeclés, ce nez lout rouge: trop de sang. Ajoulons que De- taille a uu laible pour le Bourgogne. Que voulez- vous? II faut bien qu'on passe son temps a quelque chose. II y a encore Gaspard Destourbesqui se glisse coutme un serpent, entre les autres. II n'est ni parent ni allié. Que vielit-il faire la? Non pas qu'il y ait rien d'bétéruclile dans sa tournure. Son linge est irrcprocliable, sa cravate est d'une correc tion non paretlle; pas un cbeveu bors d'alignement; gilet blanc, pantalon et habit noirs, souliers vernis, gams jaune paille. M. Gaspard doil avoir de 24 a 39 ans, II est difficile de pijéciser; car il ne pone pas de barbe el son teint mat, sans traits bien carae- téristiques, laisse une large marge aux approxima tions. Gaspard n'est ni noble, ni rentier. Au premier aspect, on Ie prendrait pour un bureaucrale, uri fonctionnaire public. Peul-êlre est-ce stmplemeni ''officier des pompes funèbres? Erreur: celle der- nière fonclion n'exi^lc pas a Bonneterre. Gaspard Destourbes, jeune premier, célibataire, est proles- seur au collége communal da Bonneterre. II donne des lecons a un neveu de M. Comptoir, et e'esi a ce litre qu'il a ses entrées dans la maison. Il a cru faire sa cour aux Comptoir, en venant se montrer après l'enterrement. Ses yeux se promènent dislraitement et indiscrètement de Ludovica a Pétronille et vice versa. Aurail-il des intentions? Qui peut savctir? Ludovica baisse les yeux; Pétronille au contraire lui K souriten échange des regards el des gestes, avec sa désmvplture accoulumée. Ses gros parents ont eu soin de lui faire donner une éducation en dehors de tout préjugé. lis son! a la veille d'en recuetllir les fruits. Les dames n'attendaient que le retour de leurs maris respeclifs, pour se retirer. On salua les mai- tresdu logis, après avoir débilé des compliments de condoléance, toujours anciens, toujours nouveaux, el on parlit par groupes. Au tour de madame Comptoir de passer la revue. Les de Vaubois marchent majestuensement, sui- vis des Dusabre. Dans la lutie qui va s'engager, ils représenlenl l'ancienne aristocratie et l'arméc. lis ont pour eux le litre el la force; ils représentent ia loi et le droit. Aussi les traits de madame de Vau bois disent-ils assez que ce n'est pas elle qui bron- chera la première. A cólé de cette troupe d'élite, les Delaille pour raient passer pour des batter es de 48, n'élail la blonde, vaporeuse et romanesque Pétronille, qui fait un frappant contraste avec les auteurs de ses jours, et qui représente a merveille la cavalerie légère Delaille certes vaul bien un mortier monstre et Victoire, son épouse, a noblemenl rivalisé d'ar- deur, pour ne pas resler en arriére sur son chef legal. A elle la palme. Eux, uon plus, ne céderont pas; car, s'ils n'ont ni parchemins ni miltion, ils otq des pretentions a la hauteur des circonstances, et c'est assez. Quant a Gaspard Destourbes, il nous fait passa- bletncnt bien l'effel de ces troupes irrégulières ou d'un tirailleur. II y a quelque chose d'incerlain dans sa démarche. Ce soldat-la se demande ceriainement encore sous quelle bannière il doil définilivement se ranger. Les Comptoir reslent en place lis représentent la ciladelle, la- redoute qu'il la ut emporlet: redoute hérissée d'obstacles, de fossés, de canons rayés, de cbaus.se trapes, défendue par des armes qui portent loin: des billets de 1,000 francs. Ils altenden) avec confiance le momenl de l'assaul. Gare ce jour lè! La prise de Conslantine sera unjeu d'enfants, a cöté de cetle lutte décisive. Gare la mine!, car, si ede vient a souter, si le million se décide a produtre toute le force d'expansion dont il est capable, la catasliophe sera épouvanlanle, et elle pourratt bien englouiif sous ses ruines assaillants et défenseurs. Toutes ces troupes défilent lentement par le oor- ridor, el a distance respeclueuse l'une de l'autre. Tiens, la, dans l'angle de l'escalier, une petite jeune fiile, une paysanne d'environ 18 ans-, nu nee, fluelte, un souffle. On dirail qu'elle a pleuré-. En la regardant de plus prés, elle est fort joliela paysan ne, avec ses yeux bleus, ses joues rosées, ses che veux blonds qui s'écbappent d'un bonnet blanc comme neige. C'est Céline, du bücheron. Mais, comme son vctemenl est pauvre; léger, léger: on dirait qu'elle n'a sur les membres qu'un morceau de colon. C'est bien rapiécé, mais c'est propre. Céline doit ètre dans la misère et souffrir beaucoup. EHe était venue- pour chercher deux pains qu'on lui avail promts, a l'occasion de l'enterrement du vieux- el elle avail été surprise par les divers groupes dans le corridor; elle allendait timidemenl qu'ils fussent passés, Alexandre avail vu Céline et avail dardé sur elle des regards insolents; Céline avail rougi jusque der rière les oreilles et n'avait plus osé lever les yeux. C'e double regard révélail quelque mystère. II faut croire qu'Alexandre et Céline ne ss voyaient pas pour la première fois. (zi continuer.)

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