m «UilSmê& aG A N £- Mercredi 29 Décembre 1875. 10e année. N° 1^043. i SlBUNE RÉSERVÉEO 5 5 ïs 2 >- 2J >- Le Journal parait le Mercredi et le Samedi. Les insertions coütent, 15 centimes la ligne. Les réclames et annonces judiciaires se paient 30 centimes la ligne. O/i traite forfait pour les insertions par année. Un numéro du journal, pris au Bureau, 10 centimes. Les numéros supplémentaires commandés pour articles, Réclames ou Annonces, coütent 10 fr. les 100 exemplaires. tlIKJIIVX E F E It. 1 OCTOBRE. - A 3ELGIQUE APPRÉCIÉE PAR MGR NARDI. Nardi a prononcé au Congrès catho- i'iqo de Florence un remarquable discours. Nol reproduisons, d'aprés un journal ita- 'ei quelques passages relatifs a notre pays: La Belgique, Messieurs, est un pays sin- er, el je vous dirai quelques-unes de ses icuiarités. La première est qu'il veut Egljge libre (applaudissements), sérieu- entxlibre et non par moquerie ou plaisan- e comme ailleurs. (Nouveaux applaudis- enis.) Done, en ce pays, le Pape nomme emenl les évéques, ceux-ci leurs vicaires, ^liaiioines et curés, el le gouvernement ne fn méle pas, ne peut pas s'en mèler, la ^institution le lui interdisant. (Applaudis- jments.) Quant a la nomination des évè- |ues, Je gouvernement est d'une parfaite wane foi. II lui suffit de savoir par son mi- ïistre ou d'aprés les journaux catholiques de lome, que tel jour dans un consistoire le 'ape a nornmé lel prêtre évèque de lel dio- ëse et il le croit, sans autre formalité, sans oir ni les bulles ni la teneur des bul les ni attestation du syndic ou du notaire, et il onne aussitöt au nouvel évèque sou palais ison traitement, ce qui n'est pas l'affaire es ministres, mais des ciloyens qui veulent ■je- leurs évcques et leurs curés soienl ho- irés et convenablement pourvus. ft Une autre singularité de la Belgique siste en ce que le gouvernement, dans >ays, ne croit pas ètre le seul professeur atin, de grec, d'histoire naturelle ou le, de mathématiques, de philosophie et toutes choses. Ce peuple, plongé encore s les ténèbres du moyen-age, professe LA done ce principe, que, chez lui, tout honnète homme capable d'enseigner peut le faire, et que c'est l'afTaire des pères de familie de choisir le maitre et l'école. D'aprés celte idéé erronée, les pel its fréres et lessoeurs catholiques, les séminaires épiseopaux el les colléges trés-florissants des Jésuites y en- seignenl en loute liberté et la population y va et elle en est trés-contente. Toujours fidéles a la méme idéé, les catholiques ont planlé a cólé des universilés de l'Etat leur universilé de Louvain, a laquelle, a vrai due, Ie gouvernement ne donne pas un sou, mais laisse faire, el les gouverrietnents qui laissent faire sont aujourd'hui les meilleurs. Les jeunes gens sont examinés sérieuse- ment mais imparlialement, et il en sort de trés-bons médecins, jurisconsultes, architec- les, ingénieurs, etc., recherchés et préférés a d'autres; ainsi, bien que la Belgique pos séde trois aulres universilés, cel le de Lou vain compte a elle seule 1,200 éléves, c'est- a-dire plus que les trois aulres réunies, et elle a l'honneur de servir de modèle aux nouvelles universilés catholiques de France. (Applaudissements.) Une autre idéé trés-singulière est celle qu'ont les Beiges au sujet de l'utilité et mè- me du mal de ces multitudes armées qui dévorent le coeur du pays, stérilisent la plus belle fleur des families, iuterrompent d'une maniére si dommageable les études littérai- res et scienlifiques, coupent les ailes aux professions libérales et aux beaux-arts, trans- forment FEtat en une immense caserne oü l'on cultive uniquement l'art de tuer le plus vile et a la plus grande distance le plus grand nombre possible. Les Beiges, comme les Anglais, comnie les Américains, ont le préjugé que toute celte parite de la population oisive qui est rete ntie sous les armes mine l'Etat. Aussi voil-on en Belgique les campagnes admirablement cullivées, les industries prospères, le com merce trés-tlorissant, des chariots qui vont et viennent, des machines qui travaillent, des ouvrters et des laboureurs sur pied dés six heures du matin, mais on voit trés peu de soldats. De Bruges a Charleroi el de la tt Liége, c'est-a-dire d'un bout de la Belgique a l'uutre, c'est a peine si j'en ai apercu qua- tre. (Applaudissements). Une autre singuliére idéé des Beiges, c'esl que raumöue n'appauvrit pas lout a fail. Après avoir cité loutes lesoeuvres fondées et alinientées par la charité calholique, l'ora- teur ajoute: Et tout cela ne cause absolument aucun tort aux finances de la Belgique, et partout oü se portent vos regards vous ne voyez que prospérité et bien-ètre, et il est trés- dilïïcile de rencontrer un mendiant. (Applau dissements prolongés.) Quant a la liberté individuelle, les Bei ges prétendent que, lorsqu'un homme ne fait pas de mal a aulrui, il peut faire ce que bon Int semble. Aussi comme l'on est libre d'étudier assidüment les inoyens de gagner de l'argenl aux dépens de son proehain, ou de dissiper son bien sans rien faire, tl peut tout aussi bien se faire prètre ou religieux pour prier, secourir, étudter et inslruire ses semblables. Je crois que, comme une femme pent courir Ie monde pour s'amuser, elle peut aussi se faire sceur de Charité ou de la Visitation, pour aider, élever, consoler et méme pour ceux qui ne prient pas. En ce qui concerne la propriété, les Beiges pensent quelle doit ètre sacrée pour louset toujours. lis raisonnent ainsi. Si tu prends aujourd'hui ce couvent et ces biens ou ceux de I'Eglise pour la soi-disant utilitè publique, demam tu pourras, pour la susdile utilité, venir me prendre ma maison ou mon champ, ce que je ne veux pas. Idéés stngu- lières, messieurs, très-répandues encore en Angleterre, a tel point que si par exemple, ces deux furieux mangeurs de catholiques de ce pays-la, M. Whallis el M. Newdegate, ou le signor Bara en Belgique, présenlaient a leurs parlements la proposition de prendre un couvent ou de liguider une de ces pro- priélés, leurs collègues les regarderaienl en face pour voir s'ils ont besoin d'un méde- cin. (Très-vtfs applaudisssments.) LES LIBEBTES LIBEBALES. Quelques bonnes réflexionsde M. Coomans dans ses Notes d'un flaneur: Je remarque avec une curiosilé soutenue que les plus grands parleurs de liberie sont précisémenl les gens qui veulent supprimer celle des aulres. De fait les progrés du libé ralisme se résumeni en de conlmuelles dtmi- niilions de la liberté individuelle. Ce phétio- mèue est eirarige, mats suraboudamment prouvé chez nous el ailleurs. Le libre arbitre de nos pères elail beaucoup plusetendu que le nötre, el ce qui resle de la Constitution de Bruxelles esL lom de valptr celle de Corten- berg. Dans le programme libéral tout devient obligatoire: service militaire el judiciaire, instruction scolatre, vole electoral et le reste. Et le nombre des interdictions est presque aussi grand que celui des prescriptions. A force de libéraliser les lois et les mceurs on en viendra a lier les bras et les pieds ainsi que les ames, et avant de faire un pas ou de dire un mot, leciioyen prudent devra con- sulter toutes les lois restrictives qu'on a ajoutéesaux 80,000 loisdont iI jouissail déja. Le progrés le couvre de chuines. S'il échappe a la conscription, moyennant pécune, il tombe dans la garde civique, oü l'on va fotirrer aussi les prètres, surloul le Ditnanche, a l'heure de la inesse. Avocat il ne peut refuser son ministère a qui lui en semble indigne. II doit plaider conlre sa conscience en vertu d'e la liberté libérale. Magistral s'il appuie a droite il est hué a gauche, et s'il haute i eglise il est suspect a la loge. Membre d'une association libérale il aliène sa liberté au point qu'on l'en expulse igno- minieusement s'il depose dans l'uriie un bul letin autre que celui que le club a diclé. Fonctionnaire il doit envoyer ses enfants a l'école Itbé ale sous peine d ètre dtlïamé en attendant qu'il soit destilué, comme au temps du rot Guillaume lcl'. Prètre il ne peut. avec ses amis, sortir de l'égltse el se promener dans la rue s'il redou- ti k co O k =0 Os 2= k Q O O s a cc E fc£> TJ 33 •^1 er. ra ra >- 33 •H 50 W C/2 ■—3 33 ra ■o O a 73 -4 O a i PI cd CT O G PI ra 33 ra c/a c?c O ra ra 25 H ra c/a ra 33 7-45, ^ghe- Ypres, 5-15,7-00,9-30,10-35,2-15,5-08,9-20. Ypres-Poperingfte, 6-40,9-07,12-05,3-37,6 50,8-45,9-30. Po- ghe-Hazebrouck, 7 03, 12-23, 4-17. 7-13. Ilazebrouek Poperinghe-Ypres, 8-33, 9 30, 4 10, 8-23. outers, 7-30, 12-23, 6-43. Roulers- Ypres, 9-28, 1-80, 7-80. 'Jruges, 8-48, 11-34, 1-13, 8,18, 7-36, (9-33. Lichterv.) Lichlerv.-Thourout, 4-28 m. vers Oslende. Bruges-/?o«- 23, 12-80, 8-00, 6-42. - Lichterv.-Cokrtrai, 8-25 m. 9 01, 1,30, 8,37 7,21. Courlrai 8-34, 9-49, 11-18, 2-38, 8-28, Courtrai-Ypres, 8-08, 11-02, 2-56, 8-40, 8-49. Thourout, 7-18, 12 06, 6-20, (le Samedi a 5-50 du matin jusqu'a Langhemarck). Thourout-Ypres, 9-00, 1-25, iVamedi a 6-20 du inatin de Langhemarck a Ypres). 8-Warnêton-Le Touquet-Houplines-Amezttóèree, 6-00, 10,18,12-00, 6-23,Armentières-Houplines-Le Touquel-War- -Comines 7 -25, 10,50, 4-10, 8 -40. Comines- Warnêton 8-48, m. 9-30 s. Warnêton-Cowiines 5-30, 9-80, [1- -Bruges, 8-05, 11-00, 12-35,4-40, 6-85. 9-00 s. (Lichlerv.)Bruges-Courlrai, 8-25, 12-30, 5-00, 6-42. Blankenberg.be, Heyst, (Station) 7-25, 11-08, 2-50, 7-38, (bassin) 7-31, 11-14, 2-56, 7 41. Heyst, Blankenb,Bruges, 8,25,11-23,3-30. g unster Deynze-Gatid, 5-00, 9-41, 2-15. Ingelmunster-Det/w-e, 6-10 2' cl.7-15. Gand-Dey nze-Ing el munster6-58, 0, 4-4t. Deynic Ingelmunster, 1-00. 2* cl. 8 20. ftel unster-Anseghem, 6-05, 12-55, 6-13. Anseghem-Ingelmunster, 7-42, 2-20, 7-45. htervelde-Dixmade-Furnes et Dunkerke, 6 30, 9-08, 1-33, 8-00. DiznAer&e-Furnes-Dixmude et Liclitervelde, 6-33, 11-10, 3-40, 8-00. tmude-Nóeuport,9-50,2-20,8-45. —Nieup-ZKrw, (bains) 10-45, 4-10. (ville) 7-30,12 00,4-20. i nu rout-Oslende, 4-50, 9-15, 1-50, 8-Ö5. Ostende-Thourout, 7-55, 10-10, 12 25, 6-15. laeie-Eecloo, 9-05, 1-25, 8-25. Eecloo-Setotete, 5-38, 10-15, 4-22. Gaad-Terneuzen, (station) 8-17, 12-23, 7,30. (porte d'Anvers) 8-30, 12-40. 7-43. Terneuzen-(rand, 6-00, 10-30, 440.- Selzaete-2.o4ere«, 9 04, 1-30, 8-30. (le Merer. 5-10 m.) Lokeren-Sö/xaefe, 6 00,10-28, 4 45. (Ie Mardi, 9,30.) COKHHSPOKDAWCBa. COURTRAI, BRL'XSLLES. Courtrai dep. 6,37 10,53 12,33 3,47 6,35. Bruxelles arr. 9,20 1,35 2,25 6,14 8,54. COURTRAIT0URNA1LILLE. Courtrai dep. 6,37 10,56 2,54 5,34 8,47. Tournai arr. 7,28 11,47 3,48 6,39 9,41. Lille 7,38 12,08 4,00 6,35 10,00. COURTRAI, GAND. Courtrai dep. 6,42 12,31 3,44 6,40. I Gand arr. 8,01 1,51 5,04 7,56. BRUXELLES, COURTRAI. Bruxelles dép. 5,22 8,28 12,21 5,35 6,47. Courtrai arr. 8,02 10,46 2,44 7,56 8,44. LILLE, TOURNAI, COURTRAI. Lille dép. 5,15 8,22 11,05 2,22 5,20 Tournai 5,42 8,56 11,29 2,40 8,39 Courlrai arr. 6,34 9.47 12,26 3,38 6,33 Gand dép. Courlrai arr. GAND, COURTRAt. 5,18 9,38 1,28 4,24 7,21. 6,34 10,81 2,49 5,31 8,42. BRUGES, GAND, BRUXELLES. Bruges d. 6,49exp.12,34, 2,52, 3 43,ex. 6,43. Gand o. 7,34, 1,49 4-07, 4,28, 7,58. Bruxelles 8,50, 4-00, 6,02, 9-31. BRUXELLES, "GAND, DRUGES. Bruxelles dép. Gand arr. 6,00 Bruges 7,15 8,14 9,41 10,34 11,53 1.13 3,25 2,38 4.37 3,12 exp 4,26 5,11 4,59 exp. 6 37 7,22 8,28. 7,33. 8,85. (roman de moeurs) par GUILL. LEBROCQUY. Suite. Voir lc numéro précédent. CHAP1TRE III. I. LA CHAMBRE D'UN CËLIBATAIRE. Aous relrouvons Gaspard Deslourbes cbez lui, Ijsoir. Il vient d'allumer sa iampe au pélrole. Son appartemcnl es! au premier étage, chez un jpicier. II se compose de deux places l'une, la (jjmbre a coucher 1'auue le bureau, salie de ^•eption, lout ce qu'on voudra. Nous avons consialé déja que Gaspard esl céliba- Hire ei qu'il doit avoir de. 24 a 30 ans. Vivant seul, J doil faire lui méme la majeure parlie de son jénage-, Il y lieni, du resle cela l'aide a passer le imps. El puis, il esl si minutieux II serail mal- eureux, profondement malheureux, si les choses jétaieni pas mises en place, comme il l'entend. Son piiverain plaisir, après ses classes, c'esl de tout léranger dans sa cbambre, afin d'avoir la volupté de jut remellre en place, a sa facon, a sa guise. 7 Reproduction interdile. Unvolume in-12, 158 pages, en vente cliez G. Lebroequy, libraiie, lklce de Louvain, 8, a Bruxelles, et chez Vandcr- \jhinsle Fossé, a Ypres. Prix 1 franc. Gaspart! esl maigre taille moyenne, teint ol i vat re oei I bilieux On dirail qu'il est nfftcté d'une légere jaunisse clironique. II esl blord-foncé de cheveux. Sa démarche est lente calculée réguliere on dirail les touages d'une machine. Cela contraste avec son air de jcunesse. D'autrc part, ses joues creuséos, son ceil fatigué, des rides précoces au front semblent indiquer la fatigue, le chagrin ou des passions sourdes. La lèvre esf fine el ne manque pas de distinction; il a la main aristocralique, mais il ne le sail malheureusement que trop. Ence moment, Gaspard ne ressemble plus en rien au gentleman de ce matin l'habit noir la cravate correcte el le gilet ont fait place a une espèce de sac gris sale, taillé en maniére dc robe dc chambre et qui ne lui descend guère que jusqu'aux genoux. II s'est assis dans un petit fauteuil lias presque sans pieds, placé a droite de son foyer ouvert, mais éteint éteint, pour cause, puisque la saison ne. per- mellail pas encore le leu. Mais le fauteuil était resté la par un reste d'habitude. Le feu, bien que muit, lenail la place d un amid'une vieiile connaissance. Apiès cela, il fallail bien s'asseoir quelque part, et autant valait enlre le poêlc et la grande table reclan- gulaire du milieu, que n'importe ou ailleurs. Sur celte table la Iampe allutnée tout autour des papiers, des livres de classe des devoirs d'élè, ves des plumes, des pelits ohjeis d'arl, presse- papiers en bronze, en marbre, en verre; des bolles en carton de toules les dimensions, beaucoup de boites un volume de poésies entr'ouvertdes brouillons raturés de stances manuscrites; un album plein de portraits photographies des planchettes en sapin, porlanl au milieu des rainures creuses de différenles dimensions. Deslourbes avail l'air bien próoccupé. Etait-ce la reaction du Bourgogne el du Champagne de l'après- midi élait-ce le som de ses éléves el de ses classes qui l'absorbail étaient ce ses amours étail-ee la conversation chez Detail Ie, A, la sqite de l'enlerre- ment du matin? était ce la solitude et l'ombre in- certaine des recoms de son appartement II y avail sans doule du tout a la fois, avec piépondérance de que!ques-uns des elements. Machinalement Gaspari mit la matn sur la lioile bleu rose qu'il avail déposée sur la table réclnngu- laire. II ne l'avail pas encore ouverle. II voulut voir quelles sortes de chenilles Pélronille avait recueil- lies a son intention; car la manie des papillons, il l'avail au supcrlatif. Il aunit fait cinq lieues, par le soleil le plus ardent de la canicule, pour trouver une variété nouvelle. Dans loutes les boiies qu'il avait sur sa table, il nourrissait des chenilles, el c elait touchanl a voir la sol I icilude avec laquelle il cbangeait leur lilière. En leur faveur seulement, il se résignail a souiller la purete sans lache de ses ongles chinois. II ouvrit done la boile de Pélronille el apergut, au food, sur un morceau de ronce sau- vage, une superbe chenille verte, grosse comme le doigt, hérissée de petitspois oranges et velus. II n'y avait pas s'y tromper: c'était la chenille du paon de nuit, celle qu'il cherchail en vain depms plu- sieurs années, un mythe, un merle blanc! Sa joie egalatt sa surprise. L'ayant coniemplée long- temps avec déltces, il s'appiouil a remellre le cou- vercle, quand, au fond du celui-ci, il apertjut des vers; des vers écrits en belle ronde, de la main même de Pélronille. Cetait intitulé: Le Papitlon, Gaspard lut Naitre avec Ie prinlemps, mourir avee les roses Sur l'ailc du zephir nager dans un ciel pur Balance sur Ie sein des fleurs a peine écloses, S'enivrer de parfum, de lumière et d'azui1 Secouer jeune encore ia poudre de ses alles, S'élancer comme un souflle aux voütes élernelles, Tel est du papilion le destin enchanlé II ressemble au désir, qui jamais ne se pose, El sans se salisfaire, elïleuranl toute chose, Retourne enfin au ciel chercher la volupté. Signé: Alp. de Lamarline. Quelle prevenance Quelle délicatesse de prqcé dés pensa le jouvurieeau. II se seriut mul fier de la citation. II clait fat assez pour considérer le mor ceau comme une allusion, comme une allégorie au mériie de sa propre personne. Lui aussi n'était-il pas: balance sur le sein des fleurs d peine écloses Lui aussi ne s'enivrail- il pas dn parfum, de lumière el d'azur? N'étail ce pas de lui qu'on pouvait dire qu'il s'élancait avec son ante ardenle, avec son imagination tncomprise, comme un souffle, aux rou tes élernelles II. SOI'HISMES AMOUREUX. Gaspard était doucement, agréablement ému. En ce moment, sa conscience vint lui faire d'assez durs reproches N'était-il pas bien coupable de spéculer sur le coeur de cetle volage Pélronille qui se livrait a lui avec tant d'abandon?Sa conduite vis-a-vis d'elle n'étail-elle pas de la noire duplicité? II ne voulut pas y pensermais le remords n'en persistait pas moins a l'accuser de sacrifier les sentiments les plus purs de son cceura ses intéréts égoïstes; de se laisser fasciner par la perspective d'une fortune, séduisant mirage, qui se dérobaii Sevanl ses pas, de tenir une conduite hypocrite, en affectant, devant Pélronille, des sentiments qu'il nè ressentait pas pour elle. Force fut bien a Gaspard d'entendre cette voix, et, pour se rassurer lui-même, pour se justifier 4 ses propres yeux, il se tint a peu prés ce langage: u C'esl plus fort que moi; il faut que je suive ma destinée. II faut que je fasse taire la voix de mon cceur, en presence de la voix plus auslère du devoir. L'avenir s'ouvre brillanl devant moi; je suis appelé a jouer un grand röle dans la société; ce róle, je ne puis le jouer que moyennant l'indépendance que donne la fortune... La fortune me tend les bras; Ludovica m'ai- mera, du moment que ses parents n'y mellront plus obstacle et qu'Alexandre ne sera plus la pour les éblouir. Elle dit bien que son intention est d'entrer au couvent: c'est pour mieux donner le change c'est paree qu'elle n'a pas encore osé s'avouer a elle-mê- me quel est Ie préféré de son cceur. II y a bien le cure, son confesseur, qui I'entretient dans ces sottes idéés; mais on ne me fera jamais accroire qu'avec une si brillanlo beauté, tant do santé, tant dejeunes- se, une si belle fortune en perspective, on puisse songer a aller s'enterrer vive derrière les barreaux el les murailles humides d'un cloitre. Quant a moi, je regrette de ne pouvoir m'alta- cher dés aujourd'hui a Pélronille. Si Alexandre épouse Ludovica, ou si par hasard celle-ci entrait réellement au couvent, je ne dis pas non, car je l'aime réellemenl, cette poéliqne el naïvc nature: je sens que je l'aime pour elle-même; el, si le mal heur s'attache a mes pas, elle me trouvera tout disposé a lui offrir mon cceur et ma main. Mais, pour le moment, il faut avant tout que j'obéisse a la voix des grandes destinées qui m'appellent. (.4 conlinuer.)

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Journal d’Ypres (1874-1913) | 1875 | | pagina 1