C.
I
MARIE STUART.
frG-ANf-
Samedi 16 Juin 1877.
12u année. N° 1,196.
f. journal parait Ie Mercredi et le Samedi. Les insertions coulent 15 centimes la ligne. Les réclames et annoncesjudièiaires se paieut 30 centimes la li
Un numéro du journal, pris au Bureau. 10 centimes. Les numéros supplémentaires commandés pour articles. Réclames on Annonces,
'ne. On traite a forfait pour les insertions par année.
content 10 fr. les 100 exemplaires.
C H M 1 S B» E F E K. 1 Décembre.
LES PAROLES ET LES ACTES.
Patronner le mal et y pousser sous les
apparences du bien est assez difficile en toute
chose; mais quand il s'agil de mener l'entre-
prise sur cent points différents avec l'ensem-
bl e d'un système, il y faut une souplesse ex
traordinaire. C'esl l'ceuvre du grand camé-
|éon libéral.
Parlez - lui de libertés, il les aime toutes,
et c'est mème de la que lui vient son nom
libéral, homme de la liberté. Seulement il
ne faut pas lui demander des choses coolrai-
res a sa nature, des sacrifices au-dessus de
ses forces. Avec sa supériorité native, il est
fait pour le pouvoir, et la principale liberté
est, naturellement aussi, la sienne. De sorle
que vous ne devez pas vous élonner s'il
rogne quelque peu, beaucoup mème, celle
des autres; ce sonl des nécessilés de position,
juslifiées par les exigences du bien général.
Un beau jour, si vous regardez attentive-
ment, vous verrez un magnifique despote,
la poitrine constellée de tous les ordres de
sa liberté.
II aime le droit aussi, mais celui qu'il dé-
créle lui-méme, et c'est dans cel ordre d'idées
qu'il a invenlé sa fameuse maxime: «La
force prime le droit. Les notions qui rat-
lachent les choses d'ici-bas aux choses de
plus haul, le droit a l'aulorilé divine, ces
notions sont pour lui d'un autre temps. II
tient que la loi civile, la volouté de la moitié
plus un, crée le droit et commande l'obéis-
sance absolue. N'allez pas l'entretenir de
conscience ni de prescriptions d'un ordre
supérieur. Quand il s'occupera de conscience
ce sera pour donner raison aux prétentions
absurdes deseslibres-penseurs, dontla cons-
cience n'a de repos qu'aulant que celle du
calbolique est vexée. Dans les processions,
dans les cimetiéres, sous la ch3ire par ses
mouchards et jusque dans le confessionnal,
il ira porter, et pour cause, son inquiet
amour du droit el de la loi civile, que d'au-
tres appellent son odieuse lyrannie.
La morale ne lui est pas moins chère, mais
c'est une morale sui generis, quelque chose
d'universel el d'élaslique, qui a chaque. in
dividu pour auteur et Tinslruction laique
pour véhicule. Quant a la vieille morale, a
celle qui part de Dien, Ie caméléon la lais-
sera volontiers insulter par ses scribes et
ruiner parses romans, ses Ihéatres. sa pro
paganda universellement et systémalique-
ment organisée, et il allendra les résullats
avec une philosophie parfaite.
Cede contradiction inhérente en quelque
sorle a sa nature se révèle encore dans ses
idéés stir l'ordre. Une sociélé convention-
nelle, policée, jouissant de l'ordre matériel
dont la force répond, cela suffil a son am
bition et fait l'objet de sa fierté. Mais des
doctrines subversives ont profondément re-
mué les masses; il a accepté Ie concours de
l'émeule pour la conqucle du pouvoir, et
dés ce moment vaincu par el le il devait êlre
impuissant a l'empècher de promener Ie dé-
sordredans la rue, d'allenter aux droits des
ciloyens, de huer des réprésenianls et de
faire parfois remonler les outrages jusqu'a la
royauté elle-méme.
La politique de celle école mérite égale-
ment tine mention. Elle s'est bardiment af-
firmée un jour en Belgique c'élait en
1847, croyons-nous sous le litre de poli
tique nouvelle. Agréable mélange de centra
lisation, d'exclusivisme el des bruyantes ba-
nalités du progrés, elle n'a eu de nouveau
qu'une manièi'e assez habile de masquer son
profond égoïsme derrière les idéés larges et
générenses dont elle aimait a faire étalage.
Lesysième est mort profor.dement discrédi-
lé. 1870 a vu sa chute, saluée par ce mot
qui est reslé bistorique: Le soulagement
universe/.
Mais c'est dans le domnine religienx snr-
tout que noire caméléon accomplit des pro-
diges de changement de couleur. Plein de
haine contre l'Eglise, il a sa part de tont
cequi peut dénigrer, iroubler, perséculer,
frapper sournoisement ou brulalement celle
que, dans les momenis d'abandon, il ap-
pelle l'ennemie séculaire de la Belgique et
qu'il voudrait, suivant le langage des siens,
déshonorer et élouffer dans la boue. Un
temps vient-il c'est d'ordi na ire le temps
élecloral ou l'intérèt du jour demande
que l'on se fasse accepter par un appoint
de gens sans defiance, aussilöt les babi les,
les hommes a sourdines s'efforcent de
faire laire la clarnetir.' Vous les enlendrez
alors protesler de leur respect pour la re
ligion de nos pères, de l'eslime qu'ils pro-
fessenl pour le bon prèire, et l'on sait quel
est celui qu'ils désignent sous ce tilre. Réfor
mateurs ausléres, ils ne font la guerre qu'aux
abus, et n'ont d'aulre pensee que de reslituer
le culte a sa purelé primitive.
lei cependant la lache ne laisse pas que
dedevenir ingrate. Malgré tous les efforts,
la discipline, dans les rangs des f-éres 11
amis, est loin d'èlre aussi parfaile pour
la parole que pour le vote. On n'obtient
pas le silence mème devant le scrulin, et
d'ailleurs ce qui a été éerit reste écrit. L'un
rieane, I'autre blaspheme, un autre encore
tie veul plus laisser aucune place au prèlre
dans la vie bumaine. Celui-ci recommande
onclueusement, comme armes lég alesles
arriendes, le bannissemenl, la prison; celui-
la veut arracher les arnes a l'Eglise et lui
déclarer résolüment la guerre sur le terrain
religienx. I! yen a d'incroyables, d'impossi-
bles a citer; il y en a des foules, jusqu'a ce
journal la Discussion qui s'écriait dans un
accés de cynisme Oui, nous voulous la
destruction de voire religion el nous sou-
liendrons tons ceux qui la sapenl. Con-
venoiis qu'il est assez difficile, avec un tel
passé et un tel présent, dc placer encore
convenablement le fameux respect pour
la religion de nos pèrespendant qnc le
chceur des protégés, qui sonl 1111 peu aussi
des élecleurs et des auxiliaires, ne cesse pas
de htirIerVan 'f ongediert der papen ver
lost ons vaderland.
Que tel est le libéralisme, sa trop longue
histoire parmi nous le démonlre par les
fails, par mille preuves diverses. Et de la
découlent des questions d'une importance
capitale au point de vue de notre avenir.
Esl-il vrai qu'une sociélé bien réglée n'est
possible que lorsque les grands principes
qui sont a sa base conserven! pour tons leur
véritable nature"?
Est-il vrai qu'il ne doit apparlenir ni a
la doctrine matérialiste de l'utile, ni aux
ambitions, ni aux passions antireligieuses
de faire tin objet d'exploitalion de ce qui
n'a été instilué etdonné que pour le bien?
Esl-il vrai que la libre-penséeexpres
sion finale du libéralisme, vent rayer Dieu
du programme des affaires de ce monde
Est-il vrai, dés lors, que la direction de la
chose publique ne pent apparlenir a I'école
du mensonge, qui ne se soutienl et ne donne
le change sur ses vérilables desseins qu'è
l'aide de cette perpéluelle hypocrisie que
l'on a justement appclée In piperie des
mots?
Est-il vrai enfin que la lulle, nécessaire
en lout lemps, devient un impérieux de
voir quand l'agression et le peril tnenacent
d'atteindre leur point culminant
La lulle, mais la lutte fortement organi
sée, vigilante, prudente et infaligable, la
lutte qui s'inspire do la conscience el se
relrempe en elle, voila bien le vérilable mot
de la situation. Tout nous annonce que le
devoir est compris el sera rempli avec vi-
gueur. Et pourquoi ne pas le dire? il y
a un présage de victoire decisive dans ce
mouvement d'opinion qui se manifeste de-
puis quelque temps d'une maniére si remar-
quable et qui ne fait quo s'accenlner tous
les jours davantage. Ce sera, pour le bon-
heur du pays, le triomphe du bon droit.
NOTRE PARLEMENT.
II en est du lliêalre parlementaire comme
de tons les theatres. Le public n'est pas sur
la scène ou dans les coulisses; il 11e voit ni les
ficelles que le machiniste lire ponr opéror
les changements a vue dos décors, ni les
trucs de Yimpressariani le fard on les faux
mollets des acteurs.
Essayons de l'iriilicra quelques-nns de ces
mystères.
Jusqu'au jour de l'éleclion de M. Janson,
la gaucbe n'avait que deux compélileurs
pour'l'emploi de leadér1 du fiarti, MM. Frére
et Bara; inaintènant elle en a trois. L'embar-
X
O
~'S)
a
CO
O
E-
co
UJ
as
C-
CD
O
X
ct:
73
QJ vJ
1/ JT3
-3
H
G
50
O
G
:r
co
.x
as
rn
G -—
t/i
o
G -
P3
Poperinghe- Ypres, .8^18,7-00»9.28-,tl-00v8r,18,#-08^120. Ypres-Poperinghe, «-30,9-07,1-2-07,3-07,6 50,8-45,9-50. Po-
peringhe-Hazebrouck, 6 63, 12-23,7-10. llazebrduck Poperinghe-Ypres, 8-23, 4-10, 8-25.
Yprèk-Roulërs, 7-SÓ, 12-25, C-45. Roulers- Ypres,*9-25, 1-50, 7 30.
Routers-Bruges, 8-45. 11-34. 1-13,5,16, 7-36. (9-55.| Lichtei v.) Licliterv.-TKóurout, 4-23 ni. vers Ostende. BrugesRou
lers 8-23, 12-43, 5-05, 6-42. Lichlefv.-CowWraj, 5-25 m.
Ypres-Courtrai 6-34, 9-46, 11-20, 2-33, 5-25, Courtrai- Ypres', 8-08, 11-03, "2-36, 5-40, 8-49.
Ypres-Thourout, 7-18, 12 06, 6-20, (le Samedi a 5 50 du mali» jusqu'a Laiigheiiiarck)Tliourout-\pres, 9-00, 1-23, 7-43,
(le Samedi a 6-20 Ru maiin de Langhemarck a Ypresj).
Comines-Warnêtoii-l.e loucjuêt-ilbiipfinss-Armenliêres, 6-00, 12-00, 3-35, Armenlières-lloupliiies-Le Pouquet-Warneton-
Comines 7 -23, 2,00, 4-43. Comines- Warnéton] 8 45, in 9-30 s'. (le Lundi 6-30,) Wariiêton-CowMies 5-30, 11-10, (le
Lundi 6,50..)
Courtrai Bruges, 8-03,11-00, 12-33,4-40, (Ingfel.) (?-53. 9-00 s. (Licliterv.) Bruges-Coarlrai, 8-23, 12-43, 3-05,6-42.
Bruges, Blankenb, Heyst, (Station) 7-25, 1 1 08, 2-50,-.7-33. (bassin 7-31, 11-14,2-56, 7.41, - Heyst, Blankenb, Bruges,
5-45,8,25,11-25,3-30.
higelmunster-Üeynze-Crawd, 5-00, 9-41, 2-13. Ingelinunster-Dei/are, 6-10 7-18. Gkhd-Deynie-lngelmun?ter, 6-58, 11-20,
4-41, 7-21. Deyiize-lngelmünsler1-0Ö.
lugelmunsler-.4?ise<//iewi, 6-05, 12-33, 6-13. Ansegliem-lngelmünsler, 7-42, 2-2(L 7-45.
Lichtervelde-Dixinude-Furnes et Dankerke, 6 30, 9-08, 1-33, 8-00. - OunkqrkeA' urnep-Dix
3-40, 3-00.
üixmude-Ariett/3or/,9-50,2-20,8-43. Nieup-Di.uw, 7-30,12 00,4-20.
Thourout-Os/eradé, 4-50, 9-13, 1-50, 8-03. Ostende-Thoaroal, 7-55,
tO-jlOi, 12 26, 6-13
Selzaete Eecloo, 9 05, 1-25, 8-25. Eecdoo-Selzaele,8-3.1, 10-15. 4-22.
Gand-Terneazen, (station) 8-17, 12-25, 7,30' (porte d'Anvers) 8-30, 12-40. 7-43. Terneazen-Gand, 6-00, 10-30, 440.
Selzaete-Lokeren, 9 04, I-308-30. (le Merer. 3 10 in.) L0keren-.Se/2aele, 6 00, 10-23, 4 45. (Ie Mardi, 9,30.)
COR
COURTRAI, BRUXELLES.
HEaPONDAIVCES.
BRUXELLES, COURTRAI.
Courtrai dep.
Bruxelles arr.
6,37
8,50
10,33
1,35
12,33
2,25
3,42
6,10
6,35.
8,54.
Bruxelles dep.
Courtrai arr.
5,22
8,00
8,28
10,46
12,21
2,44
5,35
7,56
6,47.
8,44.
COURTRAI, TOURNA!LILLE.
Courtrai dep. 6,37 10,56 2,34 3,34 8,47.
Tournai arr. 7,28 11,47 3,48 6,3b 9,41.
Lille - 7,38 12,08 4,00 6,35 10,00.
COURTRAI, GAND.
Courtrai dép.
Gand arr.
6,42
8,01
9,40
11,08
12,31
1,3 1
3,44
3,04
6,40.
7,36.
Lille dép.
Tournai
Courtrai arr.
Gani dép.
Courtrai arr.
LILLE, TOURNAI, COURTRAI.
5,15 8,22 1 1,05 2,22 4,45
5,42 8,56 11,29 2,40 3,39
6,34 9.47 12,20 3,38 6,33
GAND, COURTRAI.
5,15
6,37
9,38
10,36
1,28
2,54
4,24
3,34
7,21
8,47.
ixinude et [Achtervelde, 6-33, 1 I 10, i
BRUGES, GAND, BRUXELLES.
Bruges d. ü,49ex.7,04 9,39 12,34, 2-62 ex. 6,43.
Gand a. 7,34 8,19 10,54 1,49 4,u7, 7,38. 9,31.
Bruxelles 8,50 10,35 12,39 4 00. 7,13, 9-31. I >,40.
BRUXELLES, GAND, ÏRUGES.
Bruxelles dép. 7,20 8,14 11,06 1,36 3,02 ex. 4,39 ex.
G ui I arr. 6,00 8,38 9,41 1,23 3,39 4,11 6,29
Bruges 7,13 9,23 10,34 2,38 3,01 7,22
5.38
7,80
5,17
.'.O-U
Suite, Voir le numéro précédent.
Disons tout de suite que Hi. Chanlelauze peul,
sans exagéralioii. insister a bon droit sur son im
portance. Nul, en efiel, n'étail inieux placé que
Bourgoing, inédecin de la reine et maintenu prés
d'elle jiisqii'au dernier jour, quand on écartait
tons ses autres. serviteurs, pour voir de prés et
bien conler les choses (1). Rappelons aussi que Ie
livre de 51. Chanlelauze, coinme Ie journul de
Bourgoing. commence au lendemain de la décou-
verte du complot de Babington, iniaginé par Wals-
hingham avec la complicité d'Elisabelh, pour
fournir matière a un airêt de mort contre Marie
Stuart qu'on y avail impliquée bien qu'ellé y bit
absolument étrangère. Après dix huit années de
prison, et bien qu'accablée par les souffrances de
toutes sortes auxqtielles on avail compté qu'elle
ne résisterait pas, la reine d'Ecosse ne semblail
pas prés de mourir. Or, en Europe, les catholi-
ques cortimencaient a parler haul dans le sens d'une
intervention pour sa délivrance. Philippe II, sans
doule, n'avait pas besoin de ce mouvement pour
hiller ses préparatifs; mais, en France, I'indolent
Henri III semblait comprendre lui-méme qii'une
plus longue inariion lui devenait impossible. Pour
parer a ces projets, la farouche Elisabeth avail, il
Par des observations driliqlies inallaqnables
M. Chanlelauze,' en s'autorisant des indications
fonrniés par le manuscrit lui-méme, élablit qu'il
est bien de Boufgoing,
est vrai, fait later le géölier de Marie, sir Atnyas
Paillet, Int dormant a entendre quelle Irouverail
bon qu'il assassinal secrètement sa prisonnière.
Mais, ponr barbare qu'il fut, Paulel répugnait a
une telle besogne, et dés lors il fallait hater une
condamnolion plus 011 moins juridique, et c'est
pourquoi, de Chartley, Marie Stuart fut, par sur
prise, transférée a Fortheringay, oü bieiitót arri-
vèrent ses juges. II faut lire, dans M. Chantelauze,
le récit des scènes mémoiables qui se passèrent
alors. car c'esl par cede lecture seulement qu'on
pent vralment prendre I'idee du grand caractère
de Marie Stuart. Laissée a elle mème en face de ce
sanglant tribunal, dépouillée de ses papiers quelle
réclamait vainement comme nécessaires a sa dé-
fense, privée mème d'un secrétaire et ignorante,
comme elle Ie disait, des chicanes au moyen des-
quelles on espérait Tamener "a se compromettre,
elle fit si bien par ses réponsesqu'elledéconienancait
ses juges, se donnant parfois le plaisir amer de
conslater devanl enx leur faiblesse el leur confu
sion, Leur rage alors éclatait de lelie sorle que de
totlies paris, au nombre de quaranle-six qir'ils
étaient. ils lui jetaient les accusations et les injures
sans lui permetlre un seul mot de réponse, afin de
triompher |>lus süremen! de son silence. Aussi
pouvait elle dtte en toule vérité a son entourage,
au sorlir d'une de ces audiences, qu'il luv souve
a noil de la Passion de Jésus Gill ist, et qu'il luy
seinbloil, sans faire comparaison, que l'on faisoit
11 aussi en son endroit comme les juifs faisoient il
11 Jésns-Christ. qui crioient: J'olle, lulle.cntcifuje»
Néanmoins, on ne pjrvint pas plus ii l'aballre
qu'ii lui rien faire avouer de ce qu'on prélendait
mettle a sa charge. Pour la convaincre d'avoir
eomplolé la mort d'Elisabelh, 011 s'appuyait prin-
cipaleinent sur deux lettres qu'elle aurail écrites
au principal eonjuré et dont on lui montrait les
copies, ne ponvant lui représente'r I'original. Elle
Ie réclamait, au contraire, et n'eul pas de peine a
faire voir que si 011 ne pouVait pas le fournir, c'est
que la pièee était fabi iquée. lis ne I'ignoraient pas
eiix-mêmes, mais ils avaient ordre de la faire cou-
pabje, el ils laisaienl iacliement leur ceiivce d'assa-
sins. Qu'auraientrils répondu, d'ailleurs, ii celle
qui, protestant flèremenl qu elle n'acceptait point
d'etre exainiixje par eux, puisqu'elle élait reine et
non siijetle aux lois anglaises, ajontait avec I'accent
d'nne conscience qui les condamnail tons
•1 Sa Majesté répond qii'elleeStoil fillede Jacques
cinquième, Roy d'Ecosse, et pettVe-fille du Roy
Henry septiesine; que eel la ne lui pouvoit être osté
par loy et Conseil, ny monopolie, assemblée 011
jugement quelconque nv par conséquent son
droiet, quelle scavoit bien que ses enneniis et neulx
qui prélendoient la deboulter d'iceluy avoient faist
jusques icy tout ce qu'ils avoient pen par tons
moyens a eulx possibles, illégitimes, voire jusques
ii attemptei a sa vye, comuie on scayt bien qu'il y
a esté deccouvert en certains lienx et par cerlaines
personnes qu'elle nommeroit bien, s'il esloit be-
soing ou sy elle estoit en lieu oil y peust profiler
ou estre recetie, affin de la privet- et déshériler,
les iins pour eulx inêines, les autres pour faveur
ou amvtié, les autres pour affections ou factions,
les autres pour leitrs interests ou profficl particu
lier de coininodilé; mais que, nonobstant Uieu qui
est juste juge, et qui n'oublye jamais les siens,
I avoit jiiesques icy, par sa miséricorde et infinie
bonté, préservée de lont danger; qu elle espéroi'
aussi qu'il le feroit et qu'il ne la délatsseroit point;
recongnoissoit q 11 il n'estoil point inentour et qu'il
avoit proinis de ne laisser ses serviteurs au besoing;
qu il avoit estendu sa main sur elle ponr l'allliger,
mais aussy qu'il luy avoit donné eesle grüce de
patience et supporter les adversitez qu'il luy avoit
pleit lui envover, qu'elle ne demanderoit point de
vengeance, mais cju elle la laisseroil a celny qui est
le juste vengeur des innocents et de eeulx qui rn-
durent pour son nom, soubz la puissance et vo-
lunlé duquel elle se metlroit qu'elle avmoit
mieulx la fagon d Esther que de Judith, encore
que toutes deulx soient approuvées de l'Eglise;
qu'elle pryoil Dieu de faire d'elle sellon son hon
pl'aisir, a sa louange et honneur, el augmentation
de son église, en laquelle elle vouloit vivrc et mou-
rir, comme clleja avoit eslée recetie el nouri-ie el
entreteiiue el pour laquelle, comme elle avoit desj'a
proteslé plusieurs foys, elle respandroit jusqu'a la
demière goutte de son sang, qu'elle n'estoil point
pour craindre ou s'espouv,inter des menaces des
hommes, résolue de souffrir et endurer tont ce
qu'il plaira ii Dien, qu'elle ne desnicrois jamais
Jésus-Chrisl sachant bien queceulx qui ledesnyent
eu ce monde, il les desnye devant sou père et les
désavoue pour siens.
C'est pour la première fois que celle réponse
admirable parait au jour. A elle sen le, que ne ré
véle t-elle pas sur les sentiments el l'on peut dire
sur toule la vie de Marie Stuart Or, le journal de
Hourgoing en coiitienl nombre d'aulres également
inédites et qui, nous le répétons, permetient de
reconsliluur avec lenr grand caractère ces scènes
émouvantes de la prison de Fotheringay. Qu'y
a-t-il au-dessus, par exemjile-, de ces simples mots
par lesquels nous est peinte ('attitude de la reine
au moment oü 011 lui venait de lire sa condamna-
tion a mort
Icelle lene, Sa Majesté, fort constamment el
sans s'esmouvoir, respond qu'elle les remercyoit
d'une si agréable nouvelle; qu'ils luy faisoient un
grand bien de la relirer de ce monde duqüel elle
estoil trés-contente de sorlir pour la misère qu'elle
v voyoit et y estanl en conlintielles aïïlictions, ne
servant de rien et ne prolitanl a personiie.
Si courtes qu'elles soient, ees citations stiffisenl
a monlrer la grande valeur de la découverte il la
quelle MChantelauze vient d'attacher sou nom.
Nous n'ajoiiterons rien sur les qualilés personuelles
dont il fait preuve en sou livre et dont les princi
pals sonl l'élégauce et la clarté'. Totilefois, nous
ne pouvons nous dispenser de marqiier nos réser
ves au sujet des appreciations que M. Chantelauze
glisse parfois en son récit. particiilièrement en ce
qui regardele caractère et Taction de la Ligue. les
acles de la Cour romaine et la politique de Philippe
II. Pour un catliolique, plusieurs de ces remarques
sonl malsonnantes et n'auraienl pas dt'i se troiivcr
sous sa plume. En cc point, il seinble qii'1111 his-
lorien si justement pénétré du grand caraelère et
des verlus de Marie Stuart aurait pu s'iuspirer des
sentiments qu'elle mantfeslait avec tant de vigueur
et de noblesse dans la réponse que nous citons
plus bant.
(Revue littéraire). auguste roussel..