erreurs qu'ils aaroDt a comballre, c'est a-
dire contre les séductions du sensualisme et
contre les piéges du libéralisme! Dieu nous
préserve des hommes de plaisir et des scep-
tiques! Ce sont, l'histoire I'aUeste, les pré-
curseurs de toutes les décadences. Le monde
et PEglise ont besoin de convictions qui
s'affirment, de coeurs qui se sacrifient et de
courages qui persévérent. II y a dans le
corps cathoiiqueenseignant assez de science,
d'intelligence et d'abnégalion pour préparer
une moisson qui réalise et mème qui dépas-
se ces espérances!
LE CONSE1L PROVINCIAL ET LES BOURSES
D'ÉTUDE.
Nos adversaires ne veulent rien compren-
dreaux motifs qui ont guide le conseil pro
vincial de la Flandre occidentale dans la
repartition des bourses d'étude entre les
différents élablissements d'inslruction de la
province: poureux, il n'y a que Pathenée
de Bruges seul il a droit aux subsides,
seul il est apte a recevoir des faveurs offici-
elles. Ne leur parlez pas d'équité el de justice
distributive ces principes ne leur touchent
guére; ne leur prouvez pas que les ècoles
moyennes d'aulres villes ont aulanl de droits
que l'alhenée brugeois a des bourses formées
au moyen des deniers de tous, ce raisonne-
ment, ils n'osenl pas mème l'aborder.
El ils n'ont pas tout a fait lort en gardanl
le silence sur ce pointen effet, il n'y a guére
moyen de dire au public: PalbenéedeBruges
eoüle 100,000 francs par an aux contribua-
bles, et it ne produit pas grand'chose, land is
que le collége Sl-Louis ne leur coüte pas un
sou,et forme beaucoup d'excellents élèves.
Done, l'alhenée a seul droit aux bourses
provinciates, et Ie collége n'a droit a rien.
Ce raisonnemenl serail par trop clair, et nos
adversairesonl bien garde de le tenircepen-
dantil est la conclusion nette de leur polé-
mique boiteuse.
Si encore les charmants enfants de l'alhe
née étaient des prodiges de science, des
modèles de docilté, il y aura it une circon-
slancequi alténuerail quelque peu le raison
nemenl absurde de nos conlradicteurs; mais
hélas! les concours généraux prouvent que,
dans eet établissement, les études baissent
d'année en armée. Quanta la discipline, elle
est fort malade.
Nous avons appris que, parmi les fugilifs
du pensionnat, il s'en est trouvé deux qui se
sont dcrobés la nuit du grand carnaval pour
se rendre aux bastringues de la ville. II est
vrai que, quand un parti politique considère
les bals populaires,offerls par les édi les a leurs
administrés, comme un moyen de moraliser
les masses, on ne saurait ètre trop rigide
envers les futurs pionniers de la civilisation
moderne.
Aussi le Journal de Bruges estime l-il que
dans les infractisns a la discipline de l'athe-
née, il n'y a pas de quoi fouetter un chat,
et que celte école devient par la mème de
plus en plus digne de la confiance du public.
Laissons-lui cetle consolation elle est si
naïveque personne ne lui en disputera Tin-
ven lion ni le gout.
Quant a la décision du conseil provincial,
elle est irréprochable a tous les points de vue,
et il faut seulement regrelter que, dans l'in-
térèt de la justice distributive, elle n'a it pas
élé prise plus lót.
KULTURKAMPF.
Le parti gueux poursuit sa campagne en
faveur de la proposition de loi annoncée par
M. Frère-Orban, et tendanl a rendre incapa
ble de jouir d'un Irailemenl a charge de
l'Etat, les minislresdu culle condamnés pour
certains délits a specifier.
Sous un spécieux prétexte de moralité pu-
blique, ce projet ne cherche qu'a introduire
le principe anti-constuulionne! de l'immix-
tion de l'Etat dans la nomination el l'instal-
lation des ministres du cullc. C'est un pre
mier pas dans la voie des empiéiemenls du
pouvoir civil dans le domaine ecclésiastique.
Voila pourquoi cette proposition est com-
battue par lous ceux qui entrevoient le fon I
des plans du libéralisme.
Les Conseils provinciaux de Liége et du
Brabant, ou le libéralisme doinine, dépassant
les hornes de leur mandat, se som associés
a cette machination de parti.
Au Conseil du Brabant, deux orateurs de
la ininorilé calholique ont parfaitemern refu
te les arguties des meneurs hbéraux. M.
l'oüflel s'est placé spécialement au point de
vue du droit, et M. le baron de Vinck a ré-
duit a sa juste valeur un fait (fait unique et
isolé) dont se prévalent nos adversaires pour
colorer cette nouvelle violation des droits
constitulionnels de l'autorité ecclésiastique.
Voici comment s'exprime fhonorable M.
de Vinck:
Nous voulons caractériser ce qui est au
fond de voire proposition. Derrière la ques
tion que vous soulevez, il y a la question du
clergéque vous visez directement sans con-
tesle, et c'est pourquoi nous réclamons l'ordre
du jour.
Messieurs, il est assezdangereux d'attaquer
les grandes institutions. Rappelez-vous la
révolulion francaise. On a commencé, sous
prétexte d'abus, par miner le clergé et la
cour; puis on a trainé dans la boue Louis XVI
et Marie-Antoinetle; et puis, un beau jour est
survenue la constitution civile du clergé,
comme consequence, et comme remède a
tous les abus qu'on avail signalés el décou-
verts.
Le clergé fut anéanti et balayé par la
lourmente révolutiormaire. Cela est de l'his
toire ancienne, mais cela peu redevenir de
l'histoire moderne. Méfiez-vous done des
motions dans le genre de celles de la propo
sition Mosselman.
Cetle manière détonrnée de vous en
prendre aux anges déchus du clergé peut
mener un jour au renversement total du
clergé.
Vous n'ctes pas les invenleurs du système.
Lulher et Calvin en ont usé avant vous. Mais,
du reste, quoi que vous fassiez, c'est vous
qui vous userez a lutte. Les révolutions peu-
venl abattre les institutions catholiques, mais,
comme le dit quelque part, dans un de ses
ouvrages, noire honorable collëgue M. Ti-
berghien, les institutions catholiques renais-
senl toujours après la lourmente, et. ordinai
rement el les renaissent plus fortes et plus
vivaces qu'auparavant.
Ce n'est done pas un acte d'habilelé de
votre part de pousser les choses a l'exirème
el il n'y avait cerles pas nécessité d'amener
cette question sur le lapis.
Quel est le fail en cause Le voici
II s'agit d'un misérable qui a occupé les
fonctions de curé dans le Luxembourg, son
nom a été dit a la Chambre.
Ce curé a élé condamrié, en 1863, a vingt
deux peines différentes. Le tribunal a parfai-
tement bien fait de flétrir des acles qui,
quoiqu'ils ne fussent pas rangés dans les
fails de la derniére immoralité, n'en étaient
pas moins des faitsde lubricité.
Condamné par le tribunal, il s'en alla
purger sa contumace en France la guerre
franco-priissienne survinta ce moment, eet
homme s'engagea dans les ambulances de
l'armée francaise, et la son dévouemenl, son
zéle, son abnegation poussés jusqu'a l'héroïs-
me, lui valurenl les témoigriages les plus
honorables de ses chefs militaires;eet homme
en risquant chaque jour sa vie, eten courant
au-devant de la mort, semblait demander
aux champs de balaille de trancher par
l'oubli une vie souillée par un arrét du tri
bunal. La mort ne voulut pas de lui. Sa con
tumace purgée, il revinl cinq ans aprés en
Belgique,il se jeta aux genoux de son évèque
en criant grace, et en invoquaut comme
preuve de repentir el comme gage d'une
conduite meilleure les actions d'éclal et le
dévouement accomplis sur les champs de
balaille. Alors son évêque, confiant dans le
repentir de eet homme, espérant dans sa
conversion, lui donna la plus pauvre cure
du Luxembourg. Le Christ sur la croix avait
bien pardonné a Madeleine.
Dans celte petite commune, au fond du
Luxembourg, il se trouva appelé a desservir
en mème temps une petite chapelle, el de ce
chef on lui avail accordé un jour une indem-
nité de 100 francs qui avait été inscrile au
Moniteur.
Un homme dur et impiloyable se ressou-
vinl du nom de ce prêlre qui, un jour, avait
failli; il le dénonca a la vindicte publique,
il jeta la pierre au condamné, et alors ce
malheureux, continuant la vie d'expialion
que lui infligeait eet homme dur et impi
loyable, se démit des fonctions qu'il rem-
plissail dans la plus |iauvre paroisse du
Luxembourg, aujourd'hui, il habite pauvre
et sans ressources chez des parents plus pau-
vres que lui.
Voila les faits tels qu'ils se sont passés;
s'il ne s'agissait que d'accabler de mon mé
pris et de ma réprobation les acles d'irnmo-
ralité des prètres qui oublient leurs devoirs,
croyez bien que je crierais vengeance aussi
fort que vous tous. Mais ce qui excite au
jourd'hui voscoléres, c'est ce pardon accordé
par l'évêque au prètre coupable. Vous pre-
nez pour une bravade des lois civiles ce
qui n'esl qu'un excés de bonté el de charilé
de la part d'un membre du bant clergé.
Et je fais observer ici, messieurs, que les
errerrients qui excitent lant votre courroux
quand ils émanent d'un évêque, que ces erre-
menls se retrouvent égalemenl chez les
déposilaires de l'autorité civile, et qu'ils ne
sont pas, comme vous sembleriez le croire,
une spécialité du haul clergé.
J'ai ici en mains un document officiel, oü
je trouve qu'un instiluleur civil, deux fois
condamné par le tribunal, s'est attiré une
troisième condemnation dans un eridroit oü
on l'avail inslallê comme instiluleur commu
nal, et même dans l'espace d'un an.
Vous voyez done bien que les évèques ne
sont pas seuls appelés a subir vos critiques.»
LES CONSERVATEl'RS EN FRANCE.
Les journaux francais nous apporlent le
lexte des deux allocutions prononcées par
le maréchal Mac-Mahon, lors de son passage
a Bourges.
Elles se résumenl dans celte double affir
mation: a l'extérieur nous voulons la paix;
a l'inlérieur nous poursuivons le maintien et
la défense de l'ordre social par la coalition
de toutes les fractions du parti conservateur
contre le radicalisme.
Ce programme n'est pas one proclamation
de principes, il n'est pas une solution, c'est
lout au plus un expédient, et son seul mérite,
mais e'en est un, est d'etre le mol de la
situation. Mol insufïïssant et terne; situa
tion triste et abaissée
II peul se faire en effet qu'une nation soit
assez malade el que son énergie vitale soit
assez complélemerit paralysée pour qu'il soit
impossible de lui demander un acte viril et
vraiment réparateur.
Tel parait ètre l'état de la France a l'heure
oü nous sommes.
Toute la question est même de savoir si
les fractions diverses de l'opinion conserva
trice auxquelles s'adresse le maréchal, au-
ront assez d'intelligence politique et de fer-
meté pour se rallier, méme a l'expédient
qu'il leur propose.
Ni les légitimisles, ni les orléanistes, ni
les bonapartistes, ni les républicains modé-
rés ne sont en élat a eux seuls de faire pré-
valoir aujourd'hui la solution qu'ils regar-
denl comme la meilleure. On peut regrelter
cette situation; mais, a moins de nier l'évi-
dence, a moins d'allribuer a un parti ou a
un homme quelconque une puissance sou-
daine et vraiment miraculeuse, il nous sem-
ble impossible de méconnailre l'impuissance
mementanée de chacun des partis dynasti-
ques cherchant a faire prévaloir ses vues
propres et son programme particulier.
Seule la Révolution atnène en ligne des
forces aveugles, mais nombreuses, brulales
et pleines d'impétuosité, sur lesquelles la
République radicale comple pour amener la
défaile simultanée de ceux qu'elle nommedé-
daigneusement les anciens partis.
On peut croire sans doule que ces espé
rances sont exagérées; mais eet optimisme
implique évidemment la possibililé d'opposer
au flot monlanl de la démagogie une résis-
tance bien concertée el bien unie.
La done est pour la France, non pas la
question de 1880 nous vivons en un
temps oü d'aussi lointaines prévisions ne
sont pas permises mais la question de
dernain.
Nous voudrions pouvoir dire que cette
question sera résolue en faveur de l'ordre
social mais nous ne savons pas nous faire
illusion au point de méconnailre combien les
divisions des groupes conservateurs rendent
Tissue de la lutte douteuse et aecroissent les
chances de la Révolulion. On peut l'affirmer
avec assurance si d'ici a un tnois, l'union
sérieuse et efpcace des conservateurs n'est
pas faite, la redoutable parlie engagée par
l'acte solennel du 16 mai est une parlie per
due. L'histoire tiendra comple au maréchal
Mac-Mahon de sa courageuse initiative; mais
elle accusera sévérement les diverses influen
ces qui ont amené en France la perle du sens
pratique et d'un esprit public, digne de ce
nom. II ne restera plus alors aux conser
vateurs d'aulre espérance que la réalisation
de cetle parole de Joseph de Maistre La
nation francaise ne sail revenir a la vérité
qu'aprés avoir épuisé Terreur. On pouvait
croire cependant que la Commune de 1871
aurait rendu superflue cette nouvelle et pro-
babiemeni très-sinislre expérience.
(Bien Public).
derrière la ligne de la Janlre. Le quartier
général du grand-due Nicolas, qui éiait a
Tirnova, a été porté en arrière a Biela oü se
trouve maintenant le généralissime russe.
Les troupes du général Gourko, qui avaienl
passé les Balkans ont dü rélrogader égale-
ment; elles ont abandonné leurs positions
avaneées a Yéni Saghra, a Eski Saghra et sur
la ligne de chemin de fer de Jamboli a An-
drinople pour se rctrancher dans les défilés
dont elles s'étaienl emparées il y a quinze
jours.
Cess faits qui nous sont donnés par une
dépêche quasi officielle de Bucharest, indi-
quent clairement toute la gravité de l'affaire
de Plevna et démonlrent l'importance de la
vicloire d'Osman pacha.
La retraite du général Gourko, de la vallée
de la Tundja, a permis aux corps d'armée de
Suleyman et de Réoul pacha de se rejoindre
ils ont pu réoccuper Eski-Saghra. C'est du
moinsce qu'annoncent plusieurstèlégrammes
de Constantinople,
En revanche, dans les environs de Rousl-
chouk, le sort des armes ne parait pas avoir
élé favorable a l'armée oltomane. L'engage-
ment, commencé le 27 juillel de ce cóté,
s'est lerminé le 29, au dire de dépêches re-
cues par des journaux de Paris et de Londres,
par une compléte dèrotile des forces d'Eyoub
pacha. D'aprés le correspondanl a Bucharest
du Times, les Turcs auraient perdu 30 ca
nons et on leur aurait fait cinq mille prison-
niers. Jusqu'ici il n'y a pas de confirmation
officielle de ces fails.
D'Asie-Mineure on annonce un mouvement
en avant de la division russe qui se trouvait
dans les environs d'Ardahan. Elle serait déja
arrivéea Pennek, a quelques lieues au nord
d'Olti el du camp retranché de Bardess. Un
combat a dü avoir lieu de ce cóté. Les dépê
ches de source turque disent que Hassein-
Fami et Edhem pacha ont repoussé l'attaque
des Russes.
REVUE POLITIQUE.
L'échec subi par les Russes a Plevna est
confirmé de tout point et aggravé par les
dernières informations qui nous arrivent du
theatre de la guerre. Non seulement Osman
pacha a maintenu sa position a Plevna et
repoussé toutes les attaques de l'aiie droite
russe engagée, parait-il, tout entiére dans
cette balaille, mais encore d a forcé le géné
ral Krudener a se replier en lui infligeant des
pertes énormes.
Par le fail de ce grave échec, le centre
russe même est dans une position des plus
critiques. On annonce déja qu'd se replie
GRËVES AUX ÉTATS-UNIS.
Les journaux de gauche paraissent avoir
eu grand souci d'épargner a leurs lecleurs la
connaissance de certains faits qui se produi-
sent en ce moment dans la grande Répu
blique. Les journaux conservateurs n'ont
pas les mèmes raisons pour dissimuler des
événements qui portent avec eux un sérieux
enseignemenl, encore bien qu'ils ne soienl
pas pour inspirer un violent arnour du gou
vernement de la démocratie. On sail que
des grêves ont éclalé, aux Etats-Ums, parmi
les employés inférieurs el les mécaniciens
des chemins de fer, qui, soutenus dans un
grand nombre de villes par la population
ouvriére, étaient encore, a la date du 24
juillel, complélement maitres de plusieurs
vdles, notamment d'lndianapolis el deTerre-
Haule (Indiana) de Colombus (Ohio)de
Ruffalo, etc.
Dans d'autres endroits, ce n'est pas sans
de sanglantes lulles que les grévistes ont
reculé. A Reading, une véritable balaille
s'est engagée le long de la voie du chemin
de fer, et les troupes fédérales ont en sept
hommes tués et trenle blessés. A Pittsburg
des incendies avaient déja été allumés quand
les soldats se sont rendus maitres de la ville.
A San Francisco, un meeting d'une dizaine
de mille hommes environ a votédes mesures
violentes dirigees contre les Chinois, si nom-
breux en Californie et si détestés des ouvriers
europèens, qui voient en eux des concur
rents terribles a cause des salaires minimes
dont ils se contenlent. A la suite de ce mee
ting, le quartier chinois a été envahi. On
commencait a y mettre le feu; une maison
élait déja en Dammes, quand la police est
parvenue a disperser les emeuliers.
Les troubles ont repris avec violence dans
la nuit du 23 au 26 juillel. L'émeute s'est
terminée par un conflit entre la troupe et un
corps de constables spéciaux. Plusieurs mai-
sons chinoises ont été délruites; il y a eu des
incendies, il en est résullé des pertes consi-
dérables. Six cents émeutiers se sont retran-
chés sur une colli ne, ils ont, aprés un combat
énergique, élé faits prisonniers. II y a eu
beaucoup de tués et de blessés. A minuit
l'émeute était dispersée.
Dans la nuit du 24 au 23 juillet, la grève
a commencé sur lous les chemins de fer par-
tant de Chicago. Les iusurgés ont arrèlè les
transports, ce qu'ils ont fait égalamenl dans
plusieurs aulres villes. Les émeutiers s'élaient
rendus maitres ;d'une grande partie du dis
trict sud du Chicago. Les affaires ont été
suspendues et l'ordre a été donrié aux mem
bres du Board of Trades de se réunir en
armes, sous les ordres du maire. A onze heu-
res environ, de fréquenles escarmouches ont
démonlré que la police ne suffissait pas
a ;dominer l'émeute. La foule augmentait
d'heure en heure. Le maire envoya un régi
ment pour renforcer la police el denianda
l'assislance des troupes fédérales, qui lui ful
immédiatement accordéc, el des troupes ré-
gulières parlirenl avec du canon dans |a
direction du district oü l'ordre élait trouble.
La cavalerie fit une charge générale contre
les émeutiers. L'infanterie de sou cóté,
marcha contre eux, et l'artillerie ouvrit |e
feu avec de la mitraille. L'émeute finit par
se disperser. On évalue a 130 le nombre des
tués et des blessés.
La grève américaine peut ètre considérée
comme terminée, disent les dépêches de-
puis plusieurs jours. Moins optimisles que
Agence Uavas, nous craignons que de gra
ves eonflits ne troublent, pendant quelque
temps encore plusieurs Etats de l'Union
américaine, mais, en admettant que l'ordre
soit rétabli ou a la veille d'ètre rétabli au
dela de l'Ailantique, il reslerail encore a re-
chercher quelles auront élé les conséquences
de cette grève, quel mal elle aura fait, pen
dant ses huit jours d'existence, et quelles
réflexions une crise si terrible inspire a lous
les esprits impartiaux, en Europe ou aux
Etats-Ums.
Un des principaux organes financiers des
Etats-Unis, le New-York Journal of com
merce, estime que la grève des ouvriers de
chemins de fer a déja fait perdre aux com
pagnies plus de 26 millions de dollars ou
104 millions de francs\! II ajoute qu'il est
impossible de calculer les pertes éprouvées
par les parlieuliers dont les marchandises
ont été détruiles ou le commerce interrompu,
Quelque éloquents qu'ils soient, ces chiffres
donnent une idéé très-incomplèle des résul-
lats de la gréve; a cóté des pertes subies par
les compagnies, ou les commercanls et in-
duslriels, il y a celles, bien autrement con-
sidérables, qu'éprouveront les consomma-
tenrs, et en première ligne les ouvriers.
Privées de leurs communications avec les
Etats de l'Ouest qui les nourrissenl, les gran
des villes de l'Est ont été menacées de la
famine: la viande a manqué a New-York, le
charbon a St-Louis, le blé dans divers ports
de l'Allanlique; aussitöt, la valeur de toutes
les denrées s'est accrue d'une facon prodi-
gieuse; a New-York, par exemple, le prix
de la tonne de charbon a augmenté de 30 °/0
en vingt-quatre heures. Ces prix ne resteront
sans doule pas aussi élevés, mais ils se main-
liendront certainement au-dessus de leur
ancien niveau: la difference, représentant les
frais de la grève, sera supporlée, pour une
forte partie, par les ouvriers et les prolélai-
res. lis se plaindronlmais ne pourra-t-on
pas leur répondre, en leur traduisant la
phrase Patere legem quam ipse fecisti?
A cóté des conséquences économiques, il
faut médiler les enseignemenls moraux et
poliltques qui ressorlent de ces graves événe
ments.
Dans un remarquable article, VEcotwmisl,
de Londres, a fait observer combien les par
tis politiques, lors des luttes pour l'élection
présidentielle, avaient surexcité les passions
populates, mème les plus dangereuses. Les
poliliciens ont répélé bien haul que les lois
actuelles n'éiaienl failes que pour les riches
et opprimaient les pauvres. C'était/ower avec
la dynamite sociale, selon l'énergique ex
pression du Times. On vod aujourd'hui les
résullats de cetle imprudence. Les journaux
amérieains persistent cependant a soutenir
que les socialistes et les communistes sord
encore peu nombreux aux Etats-Unis; s'ils
sont peu nombreux, il n'en est pas moins
vrai qu'ils ont fail de grands progrés depuis
peu de temps. Dans plusieurs insurrections
récentes, notamment a Baltimore, on a vu
les grévistes faire appel a l'inlervenlion du
gouvernement, afin qu'il obligeat les com
pagnies et les industriels a accroitre les sa
laires et a améliorer la conduite du travail-
leur. Des prétentions de ce genre, émises
par les socialistes europèens, n'avaient peul-
èlre jamais été formulées jusqu'ici par des
ouvriers amérieains.
Mais l'attiludedes classes moyennes el su
périeures, pendant la grève, n'a pas élé
moins digne d'ailenlion que celle des classes
ouvriéres. On vante souvent l'énergie de
tous les bons citoyens de l'Union cette
fois, ils n'ont fait preuve, au moins pendant
les premiers jours que d'indifférence et
d'apathie; les milices ont souvent refusé de
I utter pour le rélablissement de l'ordre; par-
fois mème elles out fait cause commune avec
les grévistes. II est arrivé alors ce qu'on voit
trop souvent dans noire pays: c'est surlout
1'ineriie des conservateurs qui a ;fait la force
des brouillons.