1 MOLIÈRE ET BOURDALOUE. Mercredi 3 Octobre 1877. 12' année. N° 1,227. ^Gt A N£* DE Jill'A id Z V3 O *3 =0 O fr-» CO £*3 CO Sd as AC' iRts c# rn 2 -o >- zz H 23 CTJ CO H rr r~ cr 2 co o es PI >- rc Le Journal parail le Mercredi et le Samedi. Les insertions content 15 centimes la Iigne. Les réclames et annonces judkiaires se p.iienl 50 centim e la li'gne. On traite a, forfait pour les insertions par année Un numéro du journal, pris au Bureau, 10 centimes. Les numéros supplémentaires commandos poiir articles, Béclames on Annonces, content 10 fr. les 100 ex'émplaires. H E' M I W S !F F K IS. COKHKSJPONDAWOEIS Pope- BrugeS'-Roulers, 8-25, Poperinghe-Ipm, 5-15, 7-00, 9-28, 11-00, 2-15, 5-05, 9-20. Ypres-Poperinyhe, 6-30, 9-07, 12-07, 3-57, 0-50, 8-45, 9-50. ringlie-Hazêbroück, 6-53, 12-25, 7-10. Hazebrouck-Poperinghe-Ypres, 8-25, 4-00, 8-25. Ypres-Roulers, 7-50, 12-25, 0-45. Roulers-Ypres,-9-25, 1-50, 7-50. Roulers-Bruges, 8-45, 11-34, 1-13, 5-16, 7-36 (9-55 Lichtèrvelde.) - Thöurout, 5-15 mat. vers Ostenii 12-45, 5-05, 6-42. Lichtervelde-Courtrai, 5-25 mat. Ypres-Courtrai, 5-34, 9-46, 11-20, 2-35, 5-25. Courtrai-Ypres, 8-08, 11-05, 2-56, 5-40, 8-49. Yprès-Thourout, 7-18, 12-06, 6-20, (le Samedi a 5-50 du matin jusqU'-è Langeniarck.) Thourout-Ypres, 9-00, 1-25, 7-45 (lo Samedi a 6-20 du matin de Langeniarck a Ypres). Comines-Warnêton-Le Touquet-Houplines-Armentières', 6-00, 12-00, 3-35: Armentières-Houplines-Le Touquet- Warriêton- Comines, 7-25, 2-00, 4-45. Gomines-Warnèton, 8-45 mat. 9-30 soir, (le Lundi 6-30.) Warnèton-Comines, 5 30, 11-10 (le Lundi 6-50.) Courtrai-Bruges, 8-05, 11-00, 12-35, 4-40 6-55, 9-ÖÖ soir. (Thourout.)— Bnigés-Cotirtrai; 8-25, 12-45, 5-05, 6-42. Bruges-Blankenberghe-Heyst (Station) 7-25, 9-20, 11-25, 2-50, 5-35, 7-35. 8-55. (Bassin) 7-31, 9-26,11-31, 2-56, 5-41, 7-41. 9-01. Heyst-Blankenberghe-Bruges, 5-45, 8-25, 11-25, 2-45, 5-30, 7-25. Ingelmunstér-Deynze-Gand, 5-00, 9-41, 2-15. Ingelmunster-Deynze, 6-10,7-15. - Gand-Deyilze-Ingelmunster, 6-58, 11-20, 4-41. 7-21. Deynze-Ingelmunster, 1-00. Ingelmunster-Ansegliem, 6-05, 12-55, 6-13. Ariseghem-Ingelmunster, 7-42, 2-20, 7-45. Lichtervelde-Dixmude-Furnes et Dunkerqne, 6-30, 9-08, 1-35, 8-00. Dunkerque-Furnes-Dixmude et Liclitervelde, 6-35, 11-10, 3-40, 5-00. Dixmude-Nieuport, 9-50, 2-20, 8-45. Nieuport-Dixmude', 7-30, 12-00, 4-20. Thourout-Ostende, 4-50, 9-15, 1-50, 8-05. Ost.ende-Thourout, 7-55, 10-10, 12-25,6-15. Selzaete-Eecloo, 9-05,1,25, 8-25. Eecloo-Selzaete, 5-35, 10-15, 4-22. Gand-Terneuzen (station), 8-17, 12-25, 7-30. (Porte d'Anvers) 8-30, 12-40, 7-45. Terneuzen-Gand, 6-00, 10-30, 4-40 S elzaete-Lokeren, 9-04. 1,30, 8-30 (le Mercredi, 5-10 matin). Lokeren-Selzaete, 6-00, 10-25, 4-45 (le Mardi, 9-30). COURTRAr, BRUXELLES. Gourtrai dép. 6,37 10,5.3 12,33 3,42 Bruxelles arr. 8,50 1,35 2,25 6,10 BifCXELLES, GOURTRAI'. 1 6,35. 8,54. Bruxelles dép. Gourtrai arr. 5,22 8,28 8,00 10,46 12,21 2,55 5,35 6,47. 7,56 8,44. COURTRAI, TORNAI, LILLE. LtLEE, TORNAI, COURTRAI. Courtrai dép. Tournai arr. Li Lie 6,37 9-37 10,56 2,54 5,34 8,47. 7,28 10,15 11,47 3,48 6,39 9,41. 7,42 10-42 12,08 4,00 6,37 10,04. Lillê dép. Tournai t>< Gourtrai arr. 5,15 5,42 6,42 8,12 8,56 9,49 11,05 2,21 11,32 2,10 12,31 .3,44 4,10. 5,39, 0,40. COURTRAI, GAND. GAND, CORTRAI. Gourtrai dép. Gand arr. 6,32 7,51 6-42 8,01 9,49 11,08 12,31, 3,44 1,51, 5,04 6,40 7,56 9-32. 10,20. Gand dép. Courtrai arr. 5,15 6,37 8,45 9,37 9.24 10,41 9,38 10,56 1,28 4,24 7,21. 2,54' 5,34 8,47. BRUGES, GAND, BRUXELLES. BRUXELLES, GAND, BRUGES. Bruges d. 6,49 7,04 9,39 12,34 2,52 6,43 8,43. Bruxelles dép.5,22 7,20: 7,25 9,00 11,0.6 1,35 3,02 4,5:3 5,55 5,04 8,00 8,20. Gand a. 7,34 8,19 10,54 1,49 4,07 7,58 9,20. Gand arr. 6,00 8,38 9,36 10,27 1,23 3,59 4,11 6,01 7.17 7,02 9,09 10,26. Bruxelles 8,50 10,35 12,39 4,00 7,15 9,31 10,40. Bruges 7,15 9,23 10,51 11,20 2,38 5,01 6,58 8,16-8,50 CATHOLICISME ET SOCIALISME. La presse libérale afTeete de garder le si lence sur le Congrés socialiste qui vienl d'a- voir lieu a Gand. Ceux qui tie pouvaient se dispenser d'en parler ont fait entendre la note du dédain; De prés, ont-ils dit, c'est quelque chose; de loin, ce n'est rien. Telle est l'appréciation du Journul de Gand qui s'élonne assez naïvement d'avoir vu un reporter du Times assisler a ces assises de la démagogie internationale. Nous comprenons cette attitude du libéra lisme. II a intérêt a amoindrir el même a nier Ie mouvement révoltilionnaire el socialiste qui se développe sous nos yeux. Que la ques tion sociale surgisse en elïel, qu'elle se pose ouvertement et a tous les yeux dans sa re- doutable clarlé, le libéralisme n'a qu'a plier bagage! Sa fa i I li ie politique s'ouvre a Tin* stanl méme et ses adhérents en désarroi n'ont plus qu'a grossir les forces de la resis tance conservatrice ou a suivre le courant de la démagogie. Le Timesdégagé de ces préoccupations locales de l'espril de parii, ne s'est pas tróm- pé sur l'imporlance du Congrés socialiste de Gand. Sans exagérer les proportions de cette assemblee, il y a vu, comme nous-mêmes, lin essai d'örganisation et de federation des forces qui, de loules parts, se préparenta donner l'assaut a une société basée sur la tyrannie du capital. Loin de nous de créer une célébrilé usur- pée el d'ériger un piëdestal a quelques péro- reurs de cabaret! Ma is il nous est, d'atilre part, impossible de fermer les yeux a l'évi- dence, de parlager la fausse sécurité de l'op- Un nouvel ouvrage de M. Louis Yeuillot est une bonne fortune pour le public catliolique, et pour tout le monde un événement littéraire. Dans quelques jours, la librairle Palmé fera pa- raitre une étude pleine d'intérêt, ócrite dans la laugue des maitres, sur Molière et Bourdaloue Nous publions auj.ourd'hui la preface de ce nou veau livre. PR EF A C E. II y a quelques annóes, je ne sais quel Anglais eut l'idée joviale de faire représenter a Londres une traduction complete du Tartufe. La pièco eut le même succès qu'en France, probablement par les mêmes raison». Toutes les fois que, pour une cause ou pour une autre, les libres-penseurs ont pu ameuter l'opiniou centre l'Eglise, aüssitöt a Paris et dans les provinces, le Tartufe reparait. On le joue, on en fait des éditions populaires avec préface, éclaircissements et vignettes. Dans les derniers temps de Louis-Philippe, le Tartufe eut l'honneur d'etre, avec le Juif-Errant, l'une des principales réponses de la philosopbie offi- cielle aux réclamations des catholiq'ues contre le monopole de l'enseignement. Sous la restau- ration, il était l'antidote des missions.1 La partie penseuse de la bonne bourgeoisie s'entassait au théatre pour écouter la satire des dóvots et des nobles» qui osaient suivre les prédicateurs. La, les rentiers et les négociants libéraux, leurs eommis, leurs filles, leurs épouses, troupe chaste, goütaient les leeons de la vraie morale, celle qui n'empêche point de vendre a faux poids. Je ne doute pas que le traducteur anglais de Tartufe n'ait eu la patriotique pensée de donner timisme doctrinaire et de méconrtaitre le mouvement de concentration qui s'opère partoui dans les rangs du socialisme. La po litique de ranlruche qui se cache la lëiesous l'aile pour ne point voir le peril qui appro- che, ne nous a jamais souri. L'bistoiie contemporaine est pleine d'ex* emples qui condamnent cetle coupable in souciance et ce funeste aveuglemenl. Quel gouv'ernement en Europe paraissait triieux assts, il y a trente ans, que celui de Louis-Philippe, le Nestor du consliluliona- lismè, le Napoléon de la F'aix! On faisuit des affaires, on gagnait de I'argeot, on s'a- musail: banques, journaux, theatres avaient Irouvé leur age d'or sous le régne de ce sage monarque a qui M. le comle Victor Hugo, pair de France, adressait des blasphe mes en guise d'éloges: Site, lu Providence a besom de vous! Mais, pendant que les partis s'escrimaient dans Tarène parlemen taire, pendant que M. Thiers dtspulait le pouvoir a M. Guizot, la démagogie s'empa- rait des masses et se préparait a faire expier par la Révolulion de Février 1848 les glo- rietises journées de Juillel 1830. Un beau matin, une crise ministérielle se trouva trans- formée en crise sociale, le tróne s'éeröula comme un tréleau mal élayé, et la France fut bienlót heureuse de trouver un abri dans la diclalure, de peur de périr dans Tanar- chie... En 1870, aprés un plebiscite imposant qui devail, au dire des augures politiques, cöiisolider la dynastie napoléönienne, nous avons vu se produire une debacle pire enco re. Celui qui eut, quelqfrès mois avant la Commune, prédit le retour des horreurs de 1793, se fut fait laser de maniaque réac- tionnaire. Notre siècle n'élait-il pas essen- a son pays une arme de plus contre l'agression papale. L'muvre de Molière dut prouver sufli- samment aux enfants spirituels d'Elisabeth que le Pape est un chef de bandits; *que ie cardinal YVisèman fut un traitre; que les Newman, les Maiming, les Faber, tous les nouveaux convertisf voulaient préndre le bien et la femme de leur próchain, crimes jusqu'alors inconnus dans la loyale Angleterre. En quoi pourrait autrement les intéresser cette jtrétendue comédie, si longue et si 'fausse quand le vivant esprit de ia laugue frangaisê n'y est plus J'ai vu p'our la première fois jouer le Tartufe a une époque oü, certes, je n'exigeais pas qu'un spectacle fut moral. Mais préserve, graces a Dieu, de la sotte passion des esprits forts, je me demandais ce qu'ils troUVaient d'a- musant a celui-la, et quel intérèt pouYaient pren dre des gens de leur mérite aux aventures d'un coquin maladroit comme te Tartufe, qui manque une entreprise oü les moindres bacheliers se tiendraient assurés du sucöès. Forcer la cassette d'Orgon et fasciner Elmire, la belle affaire Le monde est plein d'artistes qui font cela tous les jours, sans eau bénite. Si le personnage était un médecin, un préqepteur, un eróateur de com mandites, un intime quelconque, on ne suppor- terait pas l'invraisemblance et la monotonie de l'histoire. Tartufe se dit dévot: toute la popularitó de l'ouvrage est lü. C'est l'agrément qui subjugue le vulgaire. En consideration de eet agrément, le petit nombre des bons juges est gagnó. Tout passé, tout est bon, tout est vrai, les critiques perdent leur temps. L'effroi des faux dévots, lorsque Tartufe parut, dit un commentateur, ne laisse aucun doute sur les vrais rapports qu'il avait avec eux. Un de ces - faux dóvots fut Bourdaloue. 'ellemont loléfanl el buuumilaire? El le pro- grés moderne u'éiait il pas inseparable de la douceur des mceurs et des splendeurs raffi- nées de la civilisation?... On sail as'sez ce qui est arrivé et par quels horribles forfaits la Commune parisiennea confirmé cetle parole de Bonald: Nul people n'est plus prés d'a voir des inóeiirs féroëcs que celui qui a des mceurs volup'tueusës'. Notre situation ne devrail-elle pas nous faire réflécliir a ces precedents? Pendant que nos partis bourgeois se disputent aigre- ment la prépondérance politique, que la presse gueuse fait semblaut de s'émouvoir des progrès de la main-morte monacale, et que nos Gambetlisles en Iterbe s'écrient: le cler'gé, voila rèhiiemt! les socialistes se comptent, s'organiseni, mulliplienl les eor- téges, les meetings, les excitations de la presse, et poussent contre une société in- fectèe de misère et de catholicisme des burlenients féroces qui révèlent l'attènle d'une prochaine ctit'ée. N'est-ce pas le comble de la déraison que de détourner les yeux do ces signes du temps? N'est ce pas se montrer lout a la fois insouciant el coupable que de laisser le pee- pie s'enivrer it pleines coupes du vin de Ia révolte et de l'impiété, de rire de cette mon- strueuse ivresse et de trailer de farceurs iri- offensifs ceux qui parient de prendre des otages jusque sur le tróne et qui ïemplacent les bymnes nationaux par le Ca tra et par les litanies du pélroleII y a plus: lorsque des fails patents, publics, indéniables, at les tent que ce mouvement n'est pas local et isolé, lorsque nous voyons figurer au Con- II tónna. Sa vertu éloquente óehoua comme la raison fine de La Bruyère. - On fait, s'écriait-il, concevoir d'injustes soupcons de la vraie piété par de malignes interprétations de la fausse. Honnête homme. C'est par cette raison précisó- ment que le Tartufe sera reprósenté tant qu'il y aura sur la terre une demi-douzaine de comó- diens et assez de planches pour dresser des tré- teaux. Laissez faire les missionnaires catholiques qui, rnalgré les tribunaux des mandarinsle casse-tête des sauvages et les ministres de l'Evan- gile anglais, portent la vórité chrétienne dans la Chine, dans l'Océanie, dans les sables de l'Afrique dans les glacés de l'Hudson qu'ils y détruisent les fetiches et les idoles, qu'ils y créent une so ciété: du sein de ces peuples baptises par eux et du milieu des écoles fondées au prix de leur sang surgira quelque bel esprit qui traduira Tartufe dans la langue qu'ils auront formée, afin d'armer contre leurs successeurs la main d'un Henri VIII ou d'un Robespierre. Je ne conteste point la haute littérature qui brille dans le Tartufe mais le nerf de cette langue, cette clartó, cette verve, il n'y a pas mille francais en France capables d'en jouir vóritablement. Que reste-t-il pour les Anglais Nos libres-penseurs' n'ont pas étó moiiis fiers du triomphe obteuu par Molière chez ce peuple délicat qui apprend lo francais principalement pour lire Paul de Koek dans l'original. Je me suis laissé impatienter de quelques banalitós qui ont óté répétées k cette Occasion par les journaux les pies graves. lis ont remarqué que depuis deux cents ans les dévots n'ont pu enlever a Molière sa réputation de grand poète et de grand homme de bien car on le loue a ces deux titres. Je sais que les -< dévots (ou dit maintenant les cléricaux) sont contraints de s'in- cliner. I.'auteur de Tartufe ne conservera pas gres socialiste de Gand plus de qua run ie sociétés affiliées a I'Internationale, quand on y entend des délégués de Suisse, d'Angleter- re, de France el d'llalie, et que In chef du socialisme germanique vienl y apporter des cortseiIs et préparer Taction eoiiimnne, ne vous semble-t-il pas qu'il y a la de quoi s'é mouvoir et de quoi songer a Tavenir? II est vrai que cetle misérable et niaise insouciance de le question sociale, est dans les traditions du libéralisme. Le libéralisme et c'est la son er'reur l'ondamentale, dit Donoso Cor- tès, n'altache d'imporlance qu'aux questions socia les et religieuses, cl les n'ert ont véri ta blemen t aucurie. Et voila pourquoi Ie libéra lisme est toujours el partoul complétement éeltpsé dés qu'aparaissent sur la scène les ca pi la I isies et les socialistes, posanl au mon de leurs redoulables problèmeset le som mant de cboisir entre lours solutions contradic- toires. Eb bien! en face de ces périls, au seuil d'un avenir chargé de si formidables orages, lorsque la cause du mal apparait patente, le bon sens, la prudence, la prévoyance, les événements mêmes ne nous orient-ils pas de recourir au seiil reméde efficace, épronvé, proporlionné a la gravité el a l'étondue de la plaie? Ce retnéde c'est le catholicisme, et nous défions la science. Ia philosopbie. la politi que de nous en indiquer un autre qui puisse seulernent lui êt re compare. Sen I le catholi cisme atteint la révolulion, non seuleiiiéVil dans ses manifestations extérieure», mais dans son veritable siége, c'est-a-dire dans les profondeurs de l'ame li u ma ine. Les socia listes le savent bien el c'est pöu'rqVioi ils ré- servent a l'Eglise catholique des invectives seulernent sa réputation de très-grand poète co- mique, if gardera encore la palme de !a vertu. II y a monument, consócration, apothéöse. Tous les ans Molière est couronnó sur le théatre par la main des graces fardées; on lui décerne des poósies approuvées des distributeurs du prix Montyon; rien n'y fait. Ses admirateurs demeu- rent aussi peü redoutables pour lui que ses cri tiques. Dans le temps a peu prés quand l'Angleterre exécutait l'entreprise dont je viens do parler, une femme bardie mettait Molière en mólodrame. Non pas le Molière veritable, tel que le mpntrent ses ceuvres, plus accusatrices encore que le té- moignage de ses contemporainsmais le Molière de la légende philosophiquetendre, délicat, même pleureur. A travers les éloges que cette pièce devait nécessaireinent recevoir, la con science des feuilletons a cependant parlé. Elle a laissé deviner que la donnée du mélodrame pa raissait ridicule, elle a franchement avoué que les détails étaient incroyables. Molière étale ses mépris pour Louis XIV, fait la lecon a Condé, se propose Taffranchissemerit du peuple, prophótise, fouriérise, cabétise, et flnit par répandre sa bénédiction sur Tauditoirë: cu un mot, c'est un quaker. II a très-bien résistó a cette apologie plus cruelle que toutes les yéri- tés il est certainement indestructible. Vienne une occasion, il ne manquera pas de dire son mot contre le Syllabus. A propos de ce travestissement, un écrivain qui passait alors pour avoir des sentiments catho- licpies, et que Ton s'est naïvement étonnó de voir plus tard rópublicain et libre-penseur comme le pavé de la rue, entreprit non point de venger Molière, mais de rabaisser Bourdaloue. Après quelques sévórités apparentes pour le comédien, (lout il confesse que la vie et les moeurs ne sont de cböix. On Ta enlendul un Congrés de Gand: Les Itbéranx penvent plier el. nous les feron.s plier; les prêtres eux ne plieronl jamais. Oui, vous avez raison, fils de Bruins, les prêlres ne plieronl pas, car ils sont inflexibles comme la véritè dont ils sont les serviteurs el les organes! Vous pourrez les trainer sur la ciaie des persecutions, mais vous n'arra- cberez pas une page de leur Evangiie, vous ne supprtmerez pas un article de leur Credo. De leurs tombes meines une voix sorlira pour faire vtbrer dans les consciences fidèles les coipinandements de Dien et. fiour condamner vos injustices et vos crimes!... Nous ne savons quel avenir la Providence réserve a la société europeen ne. A consultor certains signes du temps, l'mcurable folie des gouvernements, et. la febrile agitation des peuples, il faudrail s'atiendre a de terri ble» convulsions et a de profouds déebire- ments. Mats, d'auli'e part, nous voyons la Papauté, lidèle a sa mission, montrer aux soeietés comme aux hommes la voie, la véri- té et la vie leur rappeler précisément ces devoirs publics er/vers Dieudont ('aban don est devenu, depuis prés d'un siècle, la cause de tant de malheurs et de tant de rui nes. Voila pourquoi la société moderne pent se sauver si tant est qu'elle vettille se sauver! Mais si, pour son malheur et pour le riölre, elie ne le voula.t pas, si elle s'éprenait folle- trieni du mal qui la fail mourir, si elle avait Tobslination de Papostasie, si elle était pos- sédée de la salantquc IVenésie du mal, la justice do Dieu aurait son cours et le cbati- ment s'appesenlirait sur les nations coupa- bles! On peut, déja voir <jue les bourreaux pas exactement conformes a tous les principes de la religion, de la familie et de la propriété, il flnit cependant par le mettre au-ilessus du reli- gieux que l'aveu unanime de ia 'posterité a placé dans legrand siècle au premier rang des grands caractères. II conclut que ló ferme prèdicateur de l'Evangile fut plus courtisan que l'auteur d'Amphitryon Tel est Tart de ces sages. Ils consentent a se priver de glorifier toujours et en tout le vice, mais ils s'interdissent strictement de jamais honorer sans réserve la vertu. Je ne doute pas que l'homme de lettres qui s'est montró si difficile envers Bourdaloue, ne regarde comme autant de blasphèmes les doutes que j'ai a élever sur la morale personnelle et sur la morale oflicielle de Molière. II faut, sans on tren dans le détail, que Molière clemeure lo plus honnête et même le plus vertueux homme cle son temps. II y a déja quelques annóes, j'ai voulu dire la dessus mon sentiment, que je croyais appuyé d'assez bonnes autorités. En mon ame et con science, ayant ótudió !e personnage, je ne trou- vais pas qu'il répondit a l'idée que Ton doit se faire d'un homme de bien. Ge fut une protestation comme celle cle ces pauvras chrétiens des pre miers sièclcs, qui parfois, a leiu-s risques et périls, au milieu de la foule idolatre, allaient insulten les idoles, en attendant qu'il plüt au Dieu caché de susciter une main assez forte pour les jeter bas. Mon travail parut dans 1 'Univers, et il eut le fruit que je pouvais prévoir. Gontoster la morale et la moralité de Molière Aucun impie de nos jours n'aétè plus injurié pour avoir dit ou que Dieu est le mal, ou que Dieu n'est pas, J'avoue que eet accuejl m'a encouragé. Force par le torrent des affaires quoitidienner- d'inter- rompre la démonstration commencée, j'ai tou jours eu dessein d'y revenir. J'y reviens au-

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Journal d’Ypres (1874-1913) | 1877 | | pagina 1