ORGANE CATHOLIQUE DE L'A RRONDISSEMENT.
MERCK EDI 12 Février 1879.
10 centimes Ie Numéro.
14p année.
N° 1360.
LES SCEURS.
On sabonne rue au Benrre, 6B, a pres, et a tous ies bureaux cle poste du rovauine
Résumé politique.
Le Silence.
Le Progrès, d'ordinaire si loquace, a
presque perdu la parole depuis quelques
semaines. Son propriétaire se repose pro-
bablement des fatigues que lui a causées
un long interim au commissariat. Les sept
mois que M. Henri Carton a élé en fonctions
n'ont pas élé une sinécure pour lui. Révi-
sion des listes éléctoiales, presentation des
bourgmestres et échevins, elections com-
munales, agrémentées d'enquêtes et d'infor-
mations; le tout a conduire et a diriger dans
le plus grand intérêt de l'opinion libérale,
voilk une partie de la besogne qui lui a
incombé. Ajoutoits-y: son successeur a for
mer, son chef de bureau a destituer, sa
lettre ii 1 Association libérale de Bruxelles a
rédiger, sa correspondance avec la Patrie
et le Journal tl' Ypres a entretenir, et nous
ne serous pas encore au bout de ses peines.
Nous concevons qn'après tatit de fati
gues M. Carton aspire au repos qu'il mérite,
mais que font ses corédacteurs?
Le Progrès n'a plus rien a mettre sous
les yeux de ses leeteurs. 11 pille dans l'un
ou l'autre torchon de trottoir, Avenir des
Flandres ou Gazette, de quoi rernplir ses
colonnes.
Nous espérions une bonne petite polé-
mique, un peu nerveuse et serrée, sur la
brutale destitution dont M. Desaegher a été
victime. La cliose s'annonpait bien. On nous
menagait dans les colonnes du Progrès de
nous fermer la bouche et de nous faire re-
produire le rapport officiel de M. Carton.
Nous n'avions annoncé la mesure prise
par M. le Commïssaire interimaire que par
un simple entrefilet. La menace du Progrès
nous mit en veine et nos articles amenèrent
une première réponse de M. Carton.
Notre espérance reslait entière; unepre-
tème
mière répöïise en invoquait une seconde,
une troisième, peut-être une correspondan
ce réguliere. Quel journal ne se serail pas
félicité de compter un homme de poids,
comme M. IL Carton, au nombré de ses
correspondants?
Mais hélas, nous en sommes toujours a la
première réponse! Voi'la qainze jours au
moins que nous Lavoris publiée avec tous
les honneurs dus a sa haute origine et de
puis lors plus rien; ni seconde, ni troisiè
me, ni rapport officiel, plus rien. M. Car
ton et son Progrès fuiènt le débat, malgré
leurs airs de matamore et leurs coups de
trompette.
Vraiment, M. Carton, cela n'est pas bien
de tromper ainsi un honnète journal qui a
eu foi en voire parole mais qui n'a pas eu
peur de vos menaces. Nous vous avons ré-
pondu et de 1 'avis général il n'est rien resté
de vos argument's. Donnez-nóus autre cho-
se; la seconde réponse que vous nous 1'ai-
siez espérer, ou votre rappoit officiel que
vous offriez par deux fois dans votre lettre.
Vous nous devez cela. La polémique ne peut
languir ainsi; elle demande une alimenta
tion réguliere que vous négligez. Si vous
continuez ii vous renfermer dans un silence
que vous croyez digne, nous serous en
droit de formuler des conclusions.
Votre attitude, si audacieuse d'abord,
si effacée ensuite, prouvera au public que
vous n'avez aucun moyen de justifier la me-
sureinique prise sur vos vives instances.
Nos conclusions seront sévères et nous
sommes certains que l'opinion publique les
ratifiera.
Elections de Warnêtoiq.
Notre Pacha est arrivé ii ses fins; il a
ti'ouvé un bourgmestre pour Warnêton?
Grace au bienveillant concours du grand
éleoteur Rolin, le verdict du corps électo-
ral de Warnétoh est méconnu et M. Desim-
pel entre au Conseil communal.
Pour allcindre ce but, on a annulé des
bulletins, validé d'autrés, rcannulé de
ceux-ci revalidé de ceux-la, fait calculs
sur calculs, efFacé, raturé, recrit et chiffré;
une salade complete; le tout basé sur
une enquête dirigée par M. Carton en per-
sonne avec étalage d'huissiers et de gen-
darmes.
Voila comment on rcspecte la volonté
des électeurs. Warnêton possède un Conseil
communal de onze membres, dont un seul
libéral. Le bourgmestre et l'échevin sor-
lants ont été réélus. La situation est claire
pour tout homme impartial: bourgmestre
et, échevins doivent étre pris dans la majo-
rité; dans le cas présent les anciens titu-
laires doivent recevoir un nouveau mandal.
On dit cependant que M. Desimpel, l'uui-
que libéral, deviendra bourgmestre.
Le Progrès riomme cela de l'adminis!ra
tion impartiale et modérée.
La politique ministérielle
EP3 FAIT u'ÉLECTIOKS.
Nous faisons suivre ici quelques èxtraits
de l'excèllent discours prononcé par M. Kcr-
Journal
res,
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La politique du cabinet Waddington se des-
sine. 11 propose aux Chaüibres uü'e amnistie
compléte en faveur des insureds de la Commune,
Le gouvernement nö reéule pas devant laréin-
tégration dans tons leurs droits civïls et politi-
ques des misérables qui out couvert Paris do
ruines et qui seront pour la France une menace
permanente de nouvelles catastrophes.
Quelques journaux parient d'un arrange
ment secret, intervene, lorsdu congres de Ber
lin, entre M. de Bismark et M. Waddington.
11 semble que le puissant Chancélier son ge a
faire de la France républicaine le satellite de sa
politique européenne. La Prusse convoite la Hol-
lande, dont la possession lui permettrait de
développér sa marine et ses relations coramer-
ciales. lille livrerait en échange nos provinces a
la France, depuis 1871 inconsolable des pertes
territoriales qu'elle a subies, et qui brüle de les
réparer, fut-ce au prix de ia justice et de l'hon-
neur.
M. le Prince de Bismarck va sörtir desa
retraite. Sa presence a Berlin est nécessaire par
suite des vives protestations que rencontrent
ses projets de loi. La Bavière et Bade ont rejèté
laloi relative a la discipline parlementaire. De
son cote le Conseil federal lui-même veut la mo-
difler complètement. Les Allemands eux-mêmes
trouvent dósagréable de porter une museliöre.
Lef? difficulties augmentent en Orient. A
Bucharest on s'entend mal avec la Russie.
Kn Afghanistan, les Anglais pougsent leurs
succes. La guerre civile et l'inactiou de la Rus
sie les servent a merveille.
Le Figaro consacre aux Sceurs hospitalières
une intéressante étude. Nous la reproduisons
pour la confusion de ces libéraux soi-disant phi
lanthropes qui, en Belglque comme en France,
s'attaclient h combattre le prêtré jüsquesurle
terrain de la cliarité et a expulser les religieuses
des hópitaux, sous prétexte de sécülarisation.
Nous ne tarderons pas a voir ces maliieureuses
idéés de proscription recevoir leur application
dans notre payspeut-ötre móme dans notre
ville.
Le conseil municipal de Paris, siégeant comme
conseil general de la Seine, vient de comrnencer
une campagne centre les religieuses institutri-
ces et les religieuses hospitalières. 11 a déja
porté un coup, qu'il voudrait mortel, aux insti-
tut rices.
Les hospitalières ont cependant conserve des
sympathies dans le conseil. Mais, en temps de
Révolution, le succes appartient toujours a la
proposition la plus radicale. II y a des systémes
d'administratiou qui apparaissent quand un peu-
ple a perdu son sang-froid et qui disparaissent
quand il l'a recouvré. La proscription des
Sceurs hospitalières fait partie du premier sys-
Déja j'avais pressenti la menacante situation
clans ma visite a Bicètre. On y préparait une
vaste école de garde-ma lades laiques. Aucun
écrivain n'a vu de plus prés que moi les Soeurs
hospitalières. Elles ont bien voulu m'accompa-
gncr dans les nombreuses visites d'liospices ou
de prisons que j'ai racontées au lecteur. J'ai
done été très-ému en apprenant que les Soeurs
de Saint-Vincent de Paul ont été renvoyées de
Fhospice de la rue de Sèvres. Le depart a été
bien triste. Elles sont parties en fiacre, deux
par deux! Le peuple, qui aime les Sceurs, ne s'est
pas apereu de ce depart ordonné en son nom. On
continue de se servir du peuple et de ne le ser-
vir point
Je use hate de rappeler que je nefaisicini
polémique ni politique. Les Sceurs out déclaré
qu'elles ne se défendraient pas. Mes études n'ont
produit de résultat que ar leur sang-froid. Je
plaide devant l'opinion publique.
Le service hospitaller cle la ville de Paris est
fait en grande partie par les religieuses. Les
Adgustinès sont attdchées a l'Hötel-Dieu, a Fhó-
pilal Lariboisière, a la Charitó, a Beaujon, etc.
Les soeurs Sainte-Marthe aux hópitaux de Saint-
Antoine, Quihze-Vingts, etc. Les soeurs de Saint-
Thomas da Villeneuve, a Fhospice des EnfantS
CJ
malades de la rue de Sèvres, etc. Enfin, les
soeurs de Saint-Vincent de Paul ont une grande
part du service des hópitaux civils et tout le
service des hópitaux militaires. On veut rempla-
cerces soeurs par des gardiennes laiques, comme
a Bicètre, k la Salpétrière, et comme dans toutes
les maisons d'accouchement. Les sceurs recoi-
vent, ehacune, deux cents francs par an. Les
laiques devront recevoir liuit cents francs par
an. Ge serait done, de la part de la ville de Paris,
une colère de six cents francs par tête de rel i-
gieuse! Le peuple parisien na trouvera-t-il pas
cela bien clier
Les sceurs de Saint-Vincent de Paul sont les
principales soeurs hospitalières. Leur maison-
mère est située, 240, rueduBa'c. La supérieure
générale, née Jubel, qui commande a 20,000 reli
gieuses. est nommée par le suffrage ii deux
degrés. G'ótait, Fan dernier, M118 Querette, soeur
de 1 evêque d'Arras. Kile est partie pour i'Afgha-
nistan! I.a maison-mère contient 200 soeurs et un
séminaire e'est le nom dont on se sert de
250 novices. La postulante entre dans la maison
de Saint-Vincent de Paul qui est la plus rappro-
cliée de son domicile. Elle y garde son costume
de vie e'est le mot dont on se sert. Au bout
de trois mois, elle est admise, comme novice, a
la maison-mère. Le trousseau est de 500 francs.
cj C
La pension est de 200 francs. Le noviciat dure de
6 h 8 mois. Alors elle prend le saint habit -
mais elle ne fait des voeux qn'après cinq ans de
ce premier degré. La seem' qui a fait ses vieux se
distingue des autres par une petite bordure de
cuivre qui entoure son crucifix, il était nécessai
re dé donnet ces détails absolument inédits. La
soeur est accusée je r'óponds pour elle a son
interrogatoire!
Jé me souviens du grand salon oh je fus requ,
Fan dernier, par la mère générale. Sur les murs,
les portraits do toutes les tnères générales! Par
los hautes fenétres, la vue d'un superbe jardin a
la francaise. Deux grands perrons y descendent.
Les vastes allées b'ordges de buis, serpentent. La
note caractéristique de ce vieil hotel qui a coute-
nu les bruits de lete du temps de Louis XIV, est
un proi'ond silence dans. une étonnante clarté.
Tout semble blanc et muet. On dirait que les
soeurs marchent sur la neige!
J'avais rencontré dans la cour Mgr Dupanloup.
II savait les soeurs menacées. II s'apprétait a les
défendre. La voix passionnée du grand évéque
manquera aux soeurs. II avait écrit avec une
incomparable éloquence sur le Christ. Son cruci
fix aurait pu lui dire remuant tout a coup la
téte comme a saint Thomas d'Aquin: Bene de
me scripsisti! Tu as bien écrit de moi! Quelles