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ORGANE CATHOLIQUE DE L'A RRONDISSEMENT.
MERCREDI 16 Avril 1879.
10 centimes Ie numéro.
14® année. N° 1387.
On s'abonne rue au Beurre, 66, a Ypres, et a tous les bureaux de poste du royaurae
Résumé politique.
- Un fait domine aujourd'hui la situation;
c'est
L'ATTENTAT CONTRE
LA VIE UE L'EMPEREUR DE RÜSS1E.
Un attentat a été commis hier matin sur la
personne du Czar.
Alexandre II faisait sa promenade liabi-
tuelle du matin devant le Palais de l'état-ma-
jor; arrivé au ministère des affaires étrangè-
res, fempereur se trouva prés d'un liomme
placé vis-a-vis du batiment. Cet individu
laissa passer le souverain, mais lui tira en-
suite quatre coups de revolver. L'empereur
n'a pas été touché.
L'assassin est arrêté.
L'attentat a eu lieu a 9 heures du matin.
Ou est convaincu qu'il s'agit d'un complot
niliiliste.
On se demande avec effroi comment tout
cela tinira sur les bords de la Neva.
Depuis plusieurs jours cet attentat était
pré vu. Le mouvement niliiliste gagne toutes
les classes de la société. 11 règne une vérita-
ble terreur, même ;i la cour. On conseillait
au Czar d'uller au-dëvant du mouvement en
prenant l'initiative de mesures libérales.
Le Soir ajoute qu'il croit sa voir que, de
l'avis de certains conseillers, loute réforme
politique serait impuissante devant un mou
vement qui est absolument socialiste.
Nous pensons de même. La dynastie des
Czars est a la veille de subir les chatiments
qu'elle a attirés sur elle. Le partage de la
Pologne, l'écrasement de cette héroïque na
tion, la savante tartuferie et 1'audacieuse hy
pocrisie dont elle a fait preuve pendant la
Épisodes de la commune
0)
guerre de Tnrquie, ont amené pour elle l'heu-
re de I'expiation. Si les peuples ont, com-
me l'a dit de Maistre, les gouvernements
qu'ils méritent les gouvernements ont
aussi les peuples qu'ils méritent.
-En France, la candidature Blanqui est
le point noir. Si un homme qui a passé toute
sa vie en prison n'était pas élu et éligible
sous la République, ce serait scandaleux. Le
vieux conspirateur ne se désiste pas. 11 sera
élu et ainsi il rentrera en France malgré les
opportunist.es. Rochefort et les autres sinis-
tres personnages de la Commune ne tarde-
ront pas ii le suivre.
Le projet d'occupation mixte de la Rou-
mélie a échoué. L'Italie, dont Falliance avec
la Russie ne semble plus pouvoir être mise
en doute, a fait échouer cette combinaison.
II est certain aujourd'hui que cette puissance
a déterminé lecoup d'Etat égyptien.
D'aulre partle Montenégro place ses
agents en Turquk: sous le protectorat russe.
C'est une nouvelle source de difficultés.
En présence de Loutes ces complications,
il est presque chimérique d'espérer une ère
de paix et de tranquillité.
Pour qui réflécbit, combien les événements
donnent a penser. L'homme s'agite et Dieu le
mène, dit un vieux provcrbe.
Cela ne sera jamais plus vrai que de nos
jours.
Nos modernes faiseurs, qui ont la preten
tion de diriger les événements en dehors de
faction divine, ne sont en definitive que les
instruments de la Providence.
L'Europe et Ia société contemporaine cou
rent au-devant d'un chatiment dont elles 11e
semblent pas entrevoir l'imminence et la
gravité. Iispérons que la crise amènera non-
seulement uu progrès matériel, mais surtout
une rénovation des principes et des idees.
Ce 11'est pas un vain mot que la prière quoti-
dienne de tout chrétfen: Seigneur, que votre
règne arrive, que votre volonté soit faite
sur la terre comme au ciel.
La loi Van llumbeeck.
RAPPORT DE LA SECTION CENTRALE.
Ce document renferme quelques aveux
qu'il est bon de recueillir.
Notons tout d'abord la declaration signifi
cative placée par le rapporteur lui-même au
seuil de l'analyse qu'il fait de la réforme sco-
laire soumise aux Chambres par Ie V.*. F.-.
Van Humbeeck.
Le renversement de la loi de 1842 a lieu,
non point paree que cette mesure répond au
vceu des populations et a l'intérêt général du
pays, mais uniquement paree qu'elle est ir:-
serite au programme du libéralisme, pro-
gramme qui 11'est lui-même que Texpression
desvolontés de la Franc-maponnerie.
Aussi le grand argument de M. Olin consis-
tc-il a dire que, dès it présent, l'adhésion de
la majorité de la Chambre est acquise ;i la
réfonne scolaire au même litre qu'elle a été
acquise au discours du Tröne.
Nous sommes done en face d'un projet de
loi, exclusivement dicté par Tesprit de parti
et qui ne peut passser ii la Chrmbre que par
i un vote de gau'che eonlre droite.
Toute autre était la situation en 1842.
Le gouvernement et les Chambres ne se
sont pas p 'éoccupés, a cette époque, de sui
vre les suggestions de fesprit de parti; ils
ont voulu, avant toutes choses, pourvoir a
udgrand intérêt national et social.
Aussi la loi de '1842, présentée par ün ca
binet mixte, n'a-t-elle rencontré a la Cham
bre que trois opposants et au Sénat elle a
rallié l'unanimité des suffrages.
Les situations sont done complétement
différentes et leur contraste suffit ii indiquer
l'énorme responsabilité qu'assument lesdé-
molisseurs de la loi de 1842, non-seulément
devant l'histoire et la patrie, comme le dit M.
Olin, mais aussi devant leur conscience et.
devant Dieu.
Ce caractère partial du projet de loi s'ac-
cuse et se trahit d'ailleurs, pour ainsi dire, ii
chaque page du rapport de la section cen
trale.
Spécialement en fait d education publique,
il est naturel et rationnel de consulter les
membres du corps euseignant et les families
Journal d'Ypres
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(Extrait de la Gazette de France.)
(Suite voir numéro précédent.)
On sait trop ce que les fédérés firent des Tuile-
ries quand ils se virent contrahits de l'abandon-
ner la destruction de ce repaire de la royauté
était ce qui leur tenait le plusacoeur. Maisce
qu'on sait moins, c'est que Bergeret lui-même,
pendant que lïncendie dóvorait le chateau et
gagnait peu a peu la salie des Maróchaux oü tout
avait été disposé pour une explosion formidable,
sentit s'éveiller dans son ame d'artiste une émo-
tion esthétique semblable a celle de Néron regar
dant brüler Rome. II proposa a ses amis, qui
venaientde faire ripaille avec lui a la lueur des
nammes dans une salie de l'ancien ministère
d'Etat, d'aller fumer sur laterrasse pour jouir de
ce spectacle sublime.
Quand la coupole de la salie des Marécliaux
sauta en l'air, a une heure du matin, ce fut aux
WTome II, des Convulsions de Paris, par
Maxime Du Camp, Hachette, in-8°.
Saint-Petersbourg, 14 Avril. Des mil-
liersd'équipages et une foule immense se pres
sent devant le palais d'hiver.
Des cris dejoie sans fln o'nt éclató partout, lors-
que l'Empereur a fait en voiture découverte et
suivi par le commandant de la ville Surow, une
tournée dans les princi pales rues.
-Saint-Pétersbourg, 14 Avril, 7 h. 1/2.
L'assassin a declare se nommer Sokolow. II 11'est
pas blessé. On n'a rien trouvé sur lui (pas même
un mouchoir), sauf deux pilules contenant pro-
bablement du poison. II est agé de 27 ans; 011
croit qu'il avait un emploi au ministère des fi
nances. Les bruits qui courent a ce sujet diffé
rent.
L'Empereur s'est montré a 1 h. 22 minutes au
balcon et a été salué par l'bymne national et les
acclamations frénétiques de la foule.
L'Empereur s'est rendu ensuite a l'église de
Kasan, oü le métropolitain a prononcé les actions
de graces et la bénédietion.
applaudissements de ces dilettantes, qui crièrent:
Vive la Commune Bergeret, transporté d'en-
thousiasme, écrivit aussitót ce billet au crayon:
Les derniers vestiges de la royauté viennentde
disparaitre. Je désire qu'il en soit de même de
tous les monuments dé Paris, et il l'envoya
au Comité de salut public par son officier d'or-
donnance Thomas, un neveu du général assas-
siné le 18 Mars, lequel avait gardé de son an
cien métier de commissionnaire, l'habitude de
bien porter les lettres.
L'aimable souliait de Bergeret regut une assez
large application, et il n'a pas tenu k la Commune
qu'il ne se réalisat dans toute sou étendue. On a
mis la main, aü siége même du Comité central,
sur une pièce signée Grélier, qui proposait, en
cas de revers, d'envoyer a Versailles deux par-
lementaires pour en ramenerdes mandataires
du gouvernement auxquels on montrerait des
amas de nitro-glycérine placés sous tous les
grands quartiers conmie Dardelle a placé les
poudres aux Tuii.leries - et le pétrole préparé
pour tous les dossiers des notaires, huissiers,
avoués, tous les titres de rentes et le grand Livre.
II résulte d'une pièce authentique signée Parisel,
chef de la délégation scientifique,et trouvée
sur le bureau de Delescluze, au ministère de la
guerre, qu'011 avait fait construire des projec-
teurs a pétrole, pour en inonder nos soldats et
les brüler tout vivants mais Dombrowski était
un traitre, et son inertie calculée empêcha l'ap-
piication de ce beau plan.
Je regrette vivement de ne pouvoir suivre M.
Maxime Du Camp au Louvre, ui dans l'historique
du renversement de la colonne, ni dans le tableau
si dramatique et si poignant des derniers com
bats. 11 f'aut lire le premier de ces chapitres si
l'on veut savoir a combien de perils de toute
espèce a échappé le Louvre, comme parun mi
racle dix fois renouvelé, et ce qu'il a fallu de
vigilance, de dévouement intrépide de la part
du personnel, d'énergique decision de la part du
commandant Bernardy de Sigoyer, d'effortscom
binés de la part des soldats, des pompiers et des
Parisiens qui 11e craignirent pas de s'exposer
aux obus, pour sauver de l'incendie qui les en-
vironnait de toutes parts ces incomparables col
lections dont la perte eüt été pour la civilisation
un désastre sans équivalent. Ce chapitre du Lou
vre est l'un de ceux oü ï'auteur se montre le
plus abondamment armé de documents authenti-
quesil a eu a sa disposition, pour l'écrire, les
rapports adressés a Ia direction par les chefs de
service, et les rapports remis aux chefs de ser-
vice par les surveillants, puis diversjouruaux in-
times tenus par les fonctionuaires du Musée.
L'un des délégués de la fédération des artistes a
cru devoir ooeuper le public de sa réclamation
contre le récit de M. Du Gamp et le róle qu'il lui
taisait jouer mal lui en a pris, caril a été aussi
tót ócrasé par la production des pieces, même de
celles qui émanaient de sa main.
La semaine sanglante pendant laquelle on re
prit pied a pied les ruines de Paris a la Com
mune, coüta la vie ades milliers de fédérés, mais
a presque pas un de ces fameux généraux si bien
empanachés dont les rodomontades avaient fait
taut de fracas, lis furent les plus prompts as'óva-
der, avec les chefs de la Commune, qui, pour la
plupart, avaient pris soigneusement toutes leurs
precautions d'avance. La répression fut terrible,
surtout après les massacres d'otages et les ineen-
dies. Le soldat, exaspéré par tant d'horreurs,
fluit par se montrer sans pitié. Lés communards
l'ont accuse de férocité cet animal est fort mé-
chant, quand 011 l'atlaque il se defend. Pour
n'étre pas féroces, il eüt fallu que les soldats se
laissassent fusilier sans ri poster. Les coups de