ORGANE CATHOLIQUE DE L'A RRONDISSEMENT. MERCREDI 15 Octobre 1879. 10 centimes le numéro. 14° année. N" 1439. ELECTION DE BRUGES. On s'abonne rue au Beurre, 66, a Ypres, et a tous les bureaux de poste du royauuie. TRIOMPHE DES GA.THOLÏQÜES. Le corps electoral de l'arroadis- sement de Bruges vient d'infliger au ministère et au libéralisme une éerasante dcfaite. M. Van Ockerhout a cié élu Sé- nateur, en remplacement de feu M. Boyaval* par mie major it de 75 voix. Voici les chifffes de l'élection Volants, 2703 Billets aimulés, 54 Billets vajables, 2G49 M. Van Ockerhout, candidat catholique, 1362 M. Feesteen, candidat gucux, 1287. Done 75 voix de majoritë pour M. Van Ockerhout. Honneur et felicitations a mos amis brugeois. Résumé politique. FRANCE. La Commune l'a emporté a Paris. Humbert, le candidat de la Commune et de Rochefort, a été élu conseiller municipal par 684 voix. Depasse en a eu 610. On sait que des poursuites judiciaires sont dirigées contre le citoyen Humbert, l'ancien membre de la Commune, élu conseiller mu- NOTÏCË la Yic de Bernadette de Lourdes, nicipal de Paris. Quelle qu'eu soit tissue, d'aucuns soutiennent qu'il ne saurait siéger au conseil municipal. 11 est inéligible, disent- ils, la loi du 7 Juillet 1874 exigeant des élus la résidance de six mois pour ceux -la mêmes qui sont nés dans la commune et qui y out satisfait a la loi de recrutement. A les entendre, le conseil de prefecture de la Seine invalidera certainement son élection. Nous en doutons bien un peu pour notre part. La République franpaise, qui tout en defendant famnistie plénière a combattu la candidature de l'ancien rédacteur du l'ère Duchênedit: M. Humbert avait commence par décli- ner la candidature, craignant, disait-il, que san échec ne fit du tort la cause de l'amnis- tie plénière; nous souhaitons très-sincère- ment que sou suceès ne la desserve pas da- vantage. Le XIX" Siècle ne prend pas l'élection du quartier Javel au tragique: C'est un petit fait, dit-il, qui peut avoir son importance. La Lantèrne quaïifie l'élection de M. Hum- bert divertissement donné la fois au minis tère et a la Chambre: Dorénavant, s'écrie-t-elle, loutes les élections, quelles qu'elles soieut, se feront sur famnistie plénière, partout les électeurs ne se donneront même pas la peine d'exami- ner les litres des candidats ils choisiront simplement celui dont le nom signifiera amnistie plénière. Le Globe recommit que l'élection de M. Humbert, au point de vue politique, a une j portee qui dépasse les limites modesles de la eirconseription municipale de Javel. Mais il n'admet pas que i'ou puisse sérieusement contester la validilé de l'élection sous pré- texte qu'il n'a pas les six mois de résidenee réglementaire. M. Humbert, dit-il, n'est pas inéligible, comme on le donne a entendre. Le caractère même de famnistie et son premier effet légal est de replacer l'homme qui en reqoit le béné- fice dans la situation exacte oü il se trouvait avant sa condamuation. Le Soleil ricane Paris administré par ceux qui font incpndié. Quelle amère ironie Le quartier de Javel aura eu la triste gloire de donner le signal de la réhabilitation officielle de la Commune. Le Siècle est vaincu par la Marseillaise fopportunisme est pattu par l'intransigeance M. Gambetta détróné par M. Blanqui. Paris, 14 octobre. Le Rappel assure qui la rentrée des Chambres, une proposition revêtue de beau- coup de signatures et tendant a accorder famnistie a tous les exclus sera déposé au bureau de la Chambre. PRUSSE. Les libéraux-nationaux de Prusse sont littéralement écrasés dans leur défaitc électorale et ils le reconnaisent eux- mêmes sans aucun subterfuge. Voici en quels termes leur principal organe, le National Zei- tung, exprime son découragement: Le par- li libéral est presque entièrement mis de cölé, dit-il. Les conser.vateurs ont la pré- pondérance si tant est qu'on puisse aiusi définir leur situation, vu la nature de leurs rapports avec le gouvernement, lis auront divers petits voeux a formuler, dont la satisfaction ne leur sera pas rofusée sans doute. Dans quelle mesure sera-t-il tenu compte du centre ultramontain?Cela dépend complétement dn chancelier de l'empire. Mais, en tons cas, les ultramontains béni- ficieront (Caprès le principe donnant don- nant. II ne pourra plus guère être question de résister avec des chances de succès a une mesure quelconque proposée par le gouvernement. Nous vivrons très-rapide- ment, comme on vit quand on respire de foxygène pur. Les frottements qui naguère encore avaient souvent pour effet de retar- der de quelques semaines i'exécution de certaines mesures ne se produiront plus. Rien n'empêchera plus le gouvernement de rendre la Prusse heureuse, maintenant que les libéraux comme nous sont écartés. L'essai de gouverner dans ces conditions est nouveau pour le prince de Bismark et pour la Prusse, et nous attendons les évé- nements qui vont se produire avec une curiosité peu ordinaire. RUSSIE. Le gouvernement russe, ayant été informé du désir dn Vatican d'en- trer en négociation pour régler d'une manière stable les affaires de l'Eglise catholique en Pologne, a répondu qu'il partageait les idéés de conciliation du Pape Léon XHI et était prêt a soumettre a un examen impartial les propositions qui seraient formulées par le Saint-Siée'e. Journal d'Ypres, Le JOURNAL, D'YPRES parait le Mercredi et lo Samedi. Le prix de l'abonnementpayable par anticipationest de 5 fr. 50 e, par an pour tout le pays; pour l'étranger, le port en sus. Les abonnements sont d'un an et se régularisent tin Decembre. Les articles et communications doivent être adressés franc de port a l'adresse ci-dessus. Les annonces coütent 15 centimes la ligne. Les reclames dans le corps du journal paient 30 centimes la ligne. Les insertions judiciaires, 1 franc la ligne. Les numóros supplé- mentaires coütent 10 francs les cent exemplaires. Pour les annonces de France et de Belgique (exceptó los 2 Flandres) s.'adresser.a 1 'Agence Iiavas Laflite, et G'e Bruxelles, 89, Marché aux Herbes, et a Paris, 8, Place de la Bourse. SUR DANS L'lNSTITUT DES SffiüRS DE NEVERS. (Extrait de VUnivers.) I. SA VOCATION. Dans la matinee du vendredi 25 septembre 1863, j'arrivais a Lourdes pour la première fois. Ge qui rn'y avait surtout attiré, c'était le désir de faire connaissance a vee Bernadette, que jc savais refugiée a l'hötel-Dieu de cette ville, chez mes excellentes soeurs de Nevers. Aussi mon premier mot a la supérieure fut ce!ui-ci Vous allez me montrer Bernadette La supérieure me répondit avec beaucoup de sens Aussitöt que vous le voudrez. Cependant, pour ne pas exposer cette petite a quelque tenta- tion do vaine gloire, peut-être ferez-vous bien d'attendre que vous la rencontriez dans la mai- son, quand vous en ferez la visite. Nous l'em- ployons a la eiusine, e'est la que vous la trou- verez. Jene pus que déférer a un avis aussi sage. Mais en jettant un «il assez distrait sur les diver ges salles de l'établissement, oü je lus d'abord conduit, j'attendajs avec impatience qu'on me lit entrer dans la cuisine. On l'avait réservée pour la fin, et elle me semblait fuir devant moi. Nous y arrivons pourtant, etau moment même oü Ton m'en ouvre la porte, mes yeux se flxent d'une manière irrésistible sur une jeune fille coiflée d'une marmotte, pauvrement vêtue et de chétive apparence, qui était assise sur un petit billot, au coin de la cheminée, et grattait tout simplement une carolte. La supérieure me dit a l'oreille C'est ea. Sans s'émouvoir m se dóranger, Bernadette continue son operation, tandis que j'ai fair de faire l'inspection du local et que j'échange quel- ques mots avec la soeur de l'emploi. Celle-ci, voyant que jefais mine de rne retirer, se .jettea mes pieds et me demande ma bénédic- tion. J'invite Bernadette a en faire autant. Elle se léve, sans mot dire, s'agenouille a son tour, baise mon anneau et retourne a sa carotte. Je sors. Cette première conversation avec la Voyante m'avait, je l'avoue, semblé courte. Je m'eflor§ai done de faire comprendre a la supérieure que je n'étais pas venu de si loin pour si peu. Elle me donna l'assurance qu'elle me l'ournirait une pro- chaine occasion de m'y reprendre. En effet, Bernadette fut adjointe a mon domes- tique pour le service de table pendant le déjeu ner. Mais ce n'était pas encore la que je pouvais avoir avec elle un entretien tant soit peu sérieux. Je n'eus rien de plus pressé, après le repas, que de prier formellement la supérieure de me l'anie- ner au parloir et de me laisser seul avec elle. Je commence, dans ce téte-a-tète, par l'inter- roger assez longuement sur le fait des appari tions, j'essaie méme de l'embarrasser a ce sujet, mais je n'y réussis aucunement. J'avais remar- qué, pendant qu'elle mé servait a table, que lo patois des Pyrónées était son langage habituel, et il m'avait semblé qu'elle compreuait fort peu le francais. Elle m'étonne maintenant par sa faci- lité a me comprendre et a me rópondre. S'expri- maut en un francais correct, clair et précis, sans chereber un instant ses mots, elle est impertur bable et rien ne l'embarrasse. On dirait que ses réponses, toujours satisfaisantes, j'aillissent tou- tes seules de ses lèvres, en quelque sorte a son insu, comme par inspiration. C'est d'ailleurs un phónomène que j'ai de nouveau constaté par la suite, chaque i'ois que je l'ai entendue fournir les explications qui lui étaient demandóes sur les apparitions de Lourdes. Ce sujet épuisé a ma pleine satisfaction je lui dis Etmaintenant, ma ehère enfant, qu'allez-vous devenir Après un moment d'hésitation Mais rien Comment rien II faut pourtant bien faire quelque chose dans ce bas monde. Eh bien, je suis cliez les chores soeurs. Sans doutc, mais vous n'y étes et ne pouvez y être que passagèrement. J'y resterai bien toujours. C'est facile a dire, mais difficile a réaliser. De ce qu'on vous a recue provisoirement, par charité, il ne faut pas co nolure qu'on vous gardera a tout jamais. Pourquoi pas Paree que vous n'êtes pas soeur et qu'il est indispensable de l'être, pour être admise a titre déflnitif dans une communauté de soeurs. II est permis, il est vrai, aux sreurs de Nevers de prendre des servantes, quand elles ne peuvent suffire, elles seules, au travail materiel, et il arrive parfois qu'elles gardent leurs servantes indéfinimentmais ici vous n'êtes pas même une domestique. Vous êtes précisément dés aujour- d'hui ce que tout a l'lieure vous prétendiez deve nir, vous n'êtes rien, et sur ce pied-la on ne fait jamais long feu nulle part. Bernadette parait pensive et ne sait plus que répliquer. Je reprends, après un moment de silence Voila que vous n'êtes plus une enfantvous seriez peut-être bien aise de trouver dans le monde un petit établissement sortable. Vivement Allpour qa non, par exemple Mais alors, pourquoi ne vous feriez-vous pas soeur? N'y avez-vous .jamais songó C'est impossible. Vous savez bien que je suis pauvre je n'aurai jamais la dot nécessaire. Cet obstacle, ma chère enfant, n'est pas si grand que vous l'imaginez. Quand des demoisel les, appartenant a une familie riche ou simple ment aisée, se présentent comme postulantes, nous exigeons d'elle un dot, et cela doit être. 11

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Journal d’Ypres (1874-1913) | 1879 | | pagina 1