ORGANE CATHOLIQUE DE L'A RRONDISSEMENT.
MERCREDI 5 Novembre 1879.
10 centimes le numéro.
I4K annce. N° 1443.
On s'abonne ruo au Beurre, 6(5., a Ypres, et <k tons los bureaux de poste du rovaume.
Résumé politique.
FRANCE. Le parti républicain fran
cais est dans le dësarroi. et pour cause: les
divisions éclatent de toutes parts; la Commu
ne ressuscite et trouve aide et protection cliez
M. Gambetta mème, partisan de Tamnistie
totale; la faction socialiste rentre en scène
avec Blanqui, Louis Blanc et le congres de
Marseille; le Ministère, divisé aussi, quoique
prétendent les officieux chargés de contredire
la vérité, étale partout son impuissance et son
incapacité; les républicains modérés, tardi-
vement, mais a bon droit épouvantés, gémis
sent et orient: Au feu! Tel est l'état véritable
du parti républicain; les belles phrases et la
feinte assurance des journaux essaient en
vain de eacher la réalité des choses: le pays
sait a quoi s'en tenir.
Le mécontement grandit, en effet, chaque
jour en France, et poussc des plaintes que de
tristes maitres ne péuvént s'empêclier d'en-
tendre. On commence a demander compte de
la paix intérieure et de la prospérité promi
ses avec tant d'impudence et de présomption
au nom de la Répubhque. Depuis que la
République est passée aux mains républicai-
nes, l'anarchie est menagantë, la liberté des
catholiques est foulée aux pieds, leurs droits
sont méconnus, ils sont librement calomniés
et outragés sans frein ni mesure; et, de peur
que justice ne leur soit rendue, on refond les
juridictions devant lesquelles ils portent leurs
revendications! Tandis que Ton ramène du
bagne les fauteurs de la pire des insurrec
tions, tandis que Ton réclame pour les incen-
diaires, les assassins et leurs complices la
plénitude des droits civils et politiques, on
met hors la loi, hors du droit commun, des
Franpais coupables de se dévouer a Tensei-
gnement de la jeunesse et de lui enseigner
Tamour de TEglise et de la France.
Le conseil de l'ordre de laLégion d'hon-
neur a décidé qu'en principe les amnistiés ne
seraient pas réintégrés, mais qu'il serait fait
exception en faveur d'un d'eux, probablement
le citoyen Brissy.
PRUSSE, Le nouveau ministre des
finances du royaume de Prusse a présenté ii
la Chambre des députés le budget pour l'ex-
ercice 1880 a 188], Ce budget se solde par
un déficit de 5 millions et demi pour les be-
soins ordinaires et de 42 millions de marcs
pour Textraordinaire. Cette dernière somme,
destinée b des travaux publics productifs et
au rachat par l'Etat de lignes ferrées déjb en
exploitation, sera réalisée par un cm pruilt
dont le service est assuré. Le nouveau minis
tre des finances, M. Bitter, a fait précéder le
dépot da projet d'un exposé financier très-
approfondi, et qui a tenu toute la séance. La
lecture de ce travail consciencieux a été in-
terrompue par des marques d'adhésion fré-
quentes. Quant aux ressorces nouvelles qu'il
réclame pour maintenir le niveau entre les
recettes et les dépenses, il proposera la révi-
sionde l'impót du timbre et un impöt sur les
opérations de bourse et de banque.
Le ministre a exprimé Tespoir que l'état
des finances s'améliorerait rapidement, mal-
gré les vastes projets relatifs aux chemins
de fer.
AUTRIOHE. On dit le gouvernement
autrichien très-irrité des démonstrations du
parti de 1'Italia irredenta. On estmoins bles-
sé a Vienne des démonstrations elles-mêmes
que de la latitude et de la protection que le
ministère Cairoli semble leur accorder. On
s'accorde par suite a croire que le baron
Haymerlé ne sera pas de longtemps remplacé
a 1'ambassade d'Autriche prés le Onirinal.
ITALIË. La situation du ministère
Cairoli, a Rome, est toujours incertaine. A la
recherche d'une majorité qui lui écliappe
sans cesse, il fait des avances et des promes
ses aux différents groupes de gauche, mais
sans résultat pratique.
RUSS1E. Ene lettre adressée de St
Pétersbourg ii la Norddeutsche Allqèmeine
Zeitung met fin, par un démenti catégorique,
ii tous les bruits qu'on faisait courir, depuis
quelque temps, au sujet d'une prochaine en
trevue du Tsar et de l'Empereur Guillaume ii
Berlin. Ces nouvelles, sans cesse remises en
circulation, sont attribuées ii de simples ma
noeuvres de Bourse. Le Tsar passera la plus
grande partie du mois de Novembre it Liva-
dia; il se rendra ensuite ii Cannes pour reve-
nir a St Pétersbourg dans la première semai-
ne de décembre. On ignore s'il passera par
Berlin, soit ii Taller, soit au retour.
AFRIQUE AUSTRALE. Les jour
naux anglais viennentde rëcevoir un courrier
du Cap dont les dernières informations re-
montent au 7 Octobre. A cette date, les indi-
gènes soulevés du territoire de Basuto (voisin
duZululand) donnaient beaucoup de mal aux
troupes britanniques. Betranchés dans unc
position presque inaccessibleils les harce-
laient sans cesse. Ordre a été donné de faire
Tassaut de cette position, mais aux dernières
nouvelles Topération paraissait si périlieuse
que les troupes anglaiseS, démoralisées, refu-
saient de Tentreprendre.
Le même courrier apporte la nouvelle que
sir Garnet Wolseley a fait fusilier Dabula-
ïxianzi, frère du Roi des Zulus et ex-comman
dant en chef de ses troupes. Cette exécution
a été motivée par des tentatives d'insurrec-
tion contre Tautorité anglaise.
(Jn persomiage qui n1a besoin
de rien.
L'odieuse pression éxercée sur les pauvres
pour Thonneur et la réussite de la malheu-
reuse loi Van liumheeck, s'accentuc et s'é-
tend de jour en jour il fuut absolument
sauver la loi et les projets gueux, le libéra
lisme dut-il y sacT'iiier le dernier brinl d'hon-
néteté et le peu de semblant de respect pour
ia liberté qu'il possède encore.
Dans toutes les villes et les communes,
soumises a des administrations libërafes ou
gueuses, les membres de celles-ci rivaliseut
de zèle pour arraeher des ames k TEglise.
lei, c'est un membre du bureau de bienfai-
sance, qui abuse de Texercice de sou man
dat, conmie pour insulter h sou caractère de
fonclionnaire public. II a de plus TeÖronterie
de placer ses propres lilies dans un pension
nat dirigé par des religieuses pour qu'elles y
apprennent de bonnes manières» etd'obliger
en même temps les pauvres a envoyer leurs
lilies h Tëcoie' olïïcielle oil, selon lui, 'il n'y
a point de civilité. Yoila de la logique libé
rale, surtout pour des cervelles comme la
sienne! Mais, ce Monsieur doit bien se dis-
tinguer de quelque fagon, a eöté de ses f'rères,
déja tous célèbres, chacun h sa manière!
C'est de la pression par bëtise!
La, c'est un conseiller communal, qui se
porie ii peine sur ses longues jambes de bois,
mais se traine cependant jusqu'hla demeure
du pauvre pour lui dire, en nouveau Spartia-
te: Maintenant, c'est autre chose, ce n'est
plus vous, c'est nous qui ferons Té'ducation
des enfants du pauvre; vos enfants sont it
nous; ils iront il nos écoles, ou vous sörtirez
de notre maison!
Celui-la au moins est logique: föciié de ne
renconirer, parmi ses collègues, aucun imi-
tateur qui veuillc donner a sa lille la brilïante
education a t'ojficielle, il cherche ii former des
émules de Ja sienne parmi les classes pau
vres. C'est de la pression par dëpit!
Mais voici ie plus rernarquable de tous: il
est jeune, ayant de la marge au livre de
Tavenir; il est beau gargon, a des manières
mesurées ii l'aune et de la politesse au mëtrè;
mais, il est ambit.ieux, il veut remplir sa
marge, il veut être quelque chose: gravir les
degrés qui conduisent au conseil municipal
ou enfourcher la monture avec les épauletfes
de major de la garde civique! Aussi ne ména-
ge-t-il point sa monture, car il fait du zèle,
mais du zèle gvevx, du zèle qui va jusqu'ii
Vinsuite adressée aux nécessiteux!
Ecoutez plutót. II se présente dans une fa
milie pauvre pour enjoindre h la inère de
retirer ses enfants des écoles catholiques!
Pourquoi, Monsieur, lui dit la femme, ne
puis-je laisser mes enfants dans ces écoles,
alors que vous et les Mbéraux de votre espè-
ce, vous placez vos enfants dans les écoles
de religieuses? Ha! moi, c'est diffé
rent, dit Ie Monsieur; moi «-]e n'ai besoin de
rien. Ainsi, Monsieur, reprend la
•femme, paree que nous sommes pauvres,
nous nejouirions pas de Ia mème liberté que
vous! Paree que nous avons bespin de pain
et de secours, que vous êtes chargé de nous
distribuer, mais qui ne proviennent ni de
vous, ni des vötres, nous ne pourrions pas
élever nos enfants selon nos idéés et h notre
choix! Le Monsieur, moins aguerri a ce
genre de lutte qu'aux mouvements de parade
de Ia garde civique, s'en va tout penaud, en
donnant un dernier ordre.
Uneyoisine, k qui Ton raconta cette visite,
dit si la femme pauvre: «-Comment, vous ne
lui avez dit que cela Je lui aurais parlé au-
trement moi. Je lui aurais dit parexemple
IlaMonsieur, vous n'avez besoin de rien
Mais, si vous êtes négociantou cornmergant,
n'avez-vous pas besoin de vendre vos mar-
cbaiïdises, et de les vendre même aux catho
liques aussi bien qu'aux libéraux? N'avez-vous
pas besoiu même de vendre des soutanes aux
prêtres, et n'est-ce pas póur ce motif <}ue
vous arborez votre drapeau lorsque la proces
sion passé devant votre maison
Cependant, si vous n'avez besoin de rien,
Monsieur, que les prêtres, et tous les catholi
ques le sachent et ils n'auront qu'a passer
votre porte
Ou bien, lui aurais-je dit encore, vous
êtes peut-être dans une aisance absolue; vous
êtes riclieopulent, indépendant, pensez-
vous? Ou bien vous avez un oncle grand ri-
ciiard ou de vieilles tantes qui :t force d'ava-
rice ou d'épargues vous prépareut de vieux
jours cousus d'or, ce qui, par parenthèse,
est déja une belle couronne pour une tête am-
bitieuse. Et alors encore Monsieur
n'auriez-vous besoin de rien? Oubiiez-vous
f[ue vous avez un corps qui a besoin de tout
Si un jour une maladie contagieuse
franchit le seuil de votre maison, ce que je
ne vous souhaite pas, Monsieur, mais, si un
jour le choléra frappe un des membres de
votre familie, ou les abat tous et vous lajsse
seul debout, n'aurez-vduS pas besoin de l'as-
sistance de vos semblablés? N'aurez-vous pas
besoin alors que le pauvre vienne enlever les
cadavres de vos enfants ou de votre fem
me, qui infecteront votre maison, d'oii le
ricbe et vous même, vous aurez furN'aurez-
vous pas besoin du pauvre alors, ([ui expose-
ra sa vie pour vous, paree qu'il a besoin de
votre argent! Ha! Monsieur, neditesjamais,
je n'ai besom de rien, ni tie personne
L'homme qui croit n'avoir besoin de rien,
Journal
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