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Mercredi 17 IVovembre 1897.
10 centimes le N°.
32e Année. IV0 3996.
q^G,A/V^
L
Les élections dans le
Grand-Duché de Bade.
La colonisation anglaise
en Afrique.
Emploi des langues
francaise, flamande
et allemande.
Aux Fils de Ia Béte
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iHs-i-A 1'
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Dans le grand-duché de Bade vien-
nent d'avoir lieu des élections qui mé-
ritent d'etre signalées. La puissance
du parti national-liberal, qui était jus-
qu'ici en majorité a la Charabre ba-
doise et abusait de sa force pour op-
primer les catholiques, a été brisée.
Les succès remportés par les catho
liques prussiens ont fini par exciter
1'émulation des catholiques badois. Ils
s'organisèrent et entamèrent la lutte
elle fut longue, mais elle vient d'abou-
tir enfin au résultat désiré, qui était
la défaite du parti national-libéral.
Les élections récentes out détruit la
majorité que possédait ce parti depuis
1871, et même autérieurement. Ce-
pendant, la législation électorale est
continuée et les circouscriptions sont
découpées de la manière la plus avan-
tageuse aux nationaux-libéraux. Cela
n'apassuffi.
Jusqu'a présent on ne connait, il
estvrai, que les résultats des élections
primaires, car le choix des députés se
fait au second degré. Mais, comrae
l'opinion des délégués est parfaitemeut
connue d'avauce, on sait déja que la
future Chambre badoise sera compo
se de vingt-sept nationaux-libéraux,
deux conservateurs, deux antisémites,
vingtetun catholiques, cinq sociali
stes, cinq démocrates et un libéral mo-
déré.
Les socialistes sont trés pen nom-
breux dans le grand-duché de Bade,
pays de petite propriété et oü l'indu-
strie ne s'est pas installée comme dans
les provinces rhénanes de la Prusse ou
en Saxe. Les candidats appartenant a
cette opinion, qui out été élus, le doi-
vent en grande partie aux catholiques,
qui avaient recu le mot d'ordre de vo
ter pour eux afin de faire échec aux
uationaux-libéraux.
Grace a cel appoint corisidérable,les
socialistes sont maitres désormais de
te capitale Carlsruhe.
ff taudrait avoir aux pieds les bot-
tes de sept lieues pour être en mesure
te suivre les pas de géant que font les
^uglais en Afrique et se transporter
uu üord au sud ou de l'ouest a 1 est de
Ce continent.
Un double fait important vient de
se produire dans la vallée du Nil. Le
général Kitchener a éprouvé le besoin
d'essayer le chemin de fer de Berber
au Gaire. II n a mis que six jours a
parcourir l'énorme distance qu'il y a
entre ces deux villes. En même temps,
cinq de nos confrères anglais partaient
également de Berber et se rendaient
paisiblement a Souakim a dos de cha-
meau
Voila done Berber en communica
tion avec la Méditerranée, d'un cóté,
et avec Souakim,de l'autre. Les hordes
du khalife ont été repoussées,et, dans
environ six mois, les Anglais seront a
Khartoum, après avoir brisé les der-
nières résistauces de la puissance, bien
déchue, du successeur du mahdi.
Leurs navires a vapeur patrouille-
ront a loisir, et sur une grande dis
tance, les deux grandes branches du
haut Nil. Un chemin de fer mettra
Khartoum a cinq jours de distance du
Gaire, et le chemin des caravanes de
Berber a Souakim sera rouvert, tandis
qu'a Kassala rleux mille hommes, sen-
tinelles avancées, surveilleront de loin
le Sud-Est.
Voila le fait aveclequelil faut dés
a présent compter. L'Angleterre aura
la militairement et commercialement
parlant, une possession splendide.
En exécution d'une decision de M.
Vandenpeereboom l'emploi des lan
gues en matière administrative sera
réglé désormais de la manière sui van-
te
•1° Dans to ut es les stations et en gé
néral dans tous les bètiments V dé
partement affectés a un service puolic,
loutes les inscriptions a demeurc seront
faites en francais et en flamand.
Dans la partie flamande du pays,
telle quelle est déterminée, par la loi
du 22 Mai 1878, en y comprenant mê
me l'arrondissement de Bruxellesle
texte flamand devra précéder le texle
francais, tandis que la priorité sera
donnée au texte francais dans la par-
tie wallonne du pays.
2° Les avis a affieher seront tous
rédigés en francais et en flamand.
3° Lorsque ces avis concerneront
exclusivement ou principalement la
partie flamande du pays, le texte fla
mand précéderale texte francais. Dans
les autres cas, le texte francais aura
la priorité sur le texte flamand.
Pour certaines localités voisines de
l'Allèmagne ou du Grand-Duché de
Luxembourg, dans lesquelles la lan-
gue allemande est généralement par-
lée, il y aura lieu d'ajouter la traduc
tion allemande aux textes francais-
flamand, tant pour les instructions a
demeure que pour les avis a aflicher.
Nous dédions au Progrès et a La
Lutte un article du Bien Public, inti-
tulé Aux Fils de la Béte. G'est une
réponse un peu longue, mais juste, a
Ia prétention de nos confrère et con-
sceur,que l'interruption de M. De Guch-
tenaere a si profondément scandalisés.
Un tas de feuilles, socialistes et doctrinaires,
n'ont pas encore pris ie temps de souffler, de
puis l'incident De Guchtenaere-Anseele. Elles
manifestent leur émotion d'après leur tempéra
ment respectifla Réforme dit des grossière-
tés; la Chronique, des polissonneriesla
Flandre libérale des soltïsesl'Etoile
crie A bas la calotte; le Vooruit se roule
en une crise d'épilepsie.
Voyons un peu ce qui se cache derrière cette
affectation de fureur. Préalablement, reprodui-
sons, d'après les Annales parlementaires,
l'interruption qui a déchainé l'orage contre
M. De Guchtenaere
M. Anseele. Messieurs, Sophie Apers
était agée de 15 ans et demi lorsqu'elle est
morte. Je souhaite tous les enfants du
peuple d' pouvoir rester i'école jusqu'ü
eet age, et je dis que les parents qui tra-
vailient -fln de pouvoir laisser leurs enfants
I'école jusque prés de 16 ans sont des
gens qui aiiuent leurs enfants, qui veulent
assurer leur avenir et que ces parents peu-
vent dédaigner les insultes d'un scribe quel-
conque de oe journal (Het Volk), qui est plus
que sale (Rires a droits).
L'article continue ainsi
v. Une institutrioe offleielle et la directrice
d'une école officielle conduisaient publique-
mentles enfants du peuple, après le drapeau
rouge, vers le puits oü fut enfouie la dé-
pouille mortelle d'un enfant mort comme
l'on enterrerait un chien mort... Rumeurs
a gauche).
M. De Guchtenaere. C'est ce que vous
faites constamment (Bruit. Les interrup
tions se croisent. M. le président parle au
milieu du bruit.)
Et voilk tout 1
II faut véritablement avoir perdu le sens du
ridicule pour riposter a M. De Guchtenaere,
comme l'a fait toute la meute de gauche, par ce
cri pousséen choeur:Vous êtes un misérable!
Miserable, pourquoi
Paree que M. De Guchtenaere a comparé la
dépouille d'une personne décédée en dehors de
la religion, a la dépouille d'un chien mort? II
n'en a rien fait, Messieurs les socialistes. C'est
lui, tout au contraire, qui vous reproche les
idéés que vous avcz sur la mort, et les manife
stations politiques anticléricales que vous orga-
nisez,.chaque fois qu'un membre de votre parti
meurt, après avoir repoussé le prêtre. Si la pre
sence du drapeau rouge ne suffit pas.a révéler
quelles sont vos intentions, le blasphématoire
discours d'adieu que vous avez fait lire par un
enfant sur la tombe de la défunte, vous démas
qué, vous juge et vous condamne.
Lorsque nous nous plagons au point de vue
positiviste, qui est le point de vue des libres-
penseurs, nous cherchons en vain une plausible
raison a la colère qui provoque, chez eux, un
parallèle tiré de Ia mort du chien.
Veuillez me dire, Monsieur Denis, vous qui
avez partagé le courroux de vos collègues,
veuillez me dire quelle est la difference entre
un homme mort et un chien mort, d'après votre
système philosophique.
Ne me répondez pas que le corps de i'homme
a été le siège d'une ame raisonnable. II n'y a
pas d'ame, d'après vous, du moins pas d'ame
qui soit distincte des organes, pas d'ame immor
telle. Ne dites même pas que I'homme se distin
gue de l'animal par le libre-arbitre. Vous savez
bien que la science contemporaine la votre
nie le libre-arbitre. 11 n'y a que l'instinct,
plus ou moins perfectionné par l'atavisme, par
l'éducation, par le milieu. Et si nous avons des
instincts qui manquent a l'animal, par contre
beaucoup d'animaux sont doués d'instinets dont
I'homme est dépourvu.
Du reste, l'hypothèse évolutionniste assigne
a rhomme et a l'animal la même origine. Ce
u'est pas M. De Guchtenaere, c'est un ex-rédac
teur de la Réforme, c'est le rectcur del'Uni-
versité socialiste, c'est M. De Greefquiproclamait
naguère dans sa le§on d'ouverture
NOUS SOMMES LES FILS DE LA BÉTE
Suivant cette thèse, s'il y avait moyen de for
mer l'arbre généalogique de M. De Greef, on
constaterail qu'il a, avec les chiens et peut-être
avec les pores car la structure des viscères
humains rappelle plus les viscères du pore que
ceux du chien un ancêtre commun. Un caprice
de la nature a fait de nous des hommes: nous
ne sommes que les parvenus du monde animal,
et des parvenus qui devons notre aiistocratie
récente a des conjonctures indépendantes de
notre volonté.
La mort nivelle toutes ces différences. Aux
yeux du savant matérialiste, elle ne laisse de
nous, comme des auimaux, que des substances
rapidement dissociées, des albuminoïdes, du
glycogène, du cholure dc sodftim, des phospha
tes, etc... le tout amalgamé de manière h devenir
au bout de peu de jours, ce que Bossuet appelle
un je ne sais quoi qui n'a de nom en aucune
langue. La nature reprend ce que nous avons
été, et elle en fait des choux ou des raves.
Voilk votre théorie, savants, votre théorie, M.
Denis! II reste un souvenir, direz-vous, une
mémoire a laquelle nous demeurons pieusement
fidèles. Mais ce souvenir, cette mémoire, ce ne
sont pas des reliques du défuntce sont des
pensées du survivant, rien de plus. Nous com-
prenons fort bien, d'ailleurs, que vous songiez
a une personne aimée, et que vous conserviez
m