Samedi 23 Avril 1898. 10 centimes ie N°. 33e Année. N° 3334.
La guerre.
Loi flamande.
fib
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Voici done la guerre déclarée. L'Espsgne
n'a même pas voulu répondre k l'ultimatum
américain. Avant que le général Woodford
se Kit mis en devoir d'er. dormer corxirnuni
cation au ministre des affaires étrangères k
Madrid, M Gullon avait fait prévenir le mi-
nistre américain que la demarche étsit inu
tile, que les relations étaient rompu -s, qu'oo
n'avait aucune réponse k faire k la resolution
adoptée par le Congièset sanction; ée parle
Président Mac Kinley,
Bien que le premier coup de feu o'ait pas
encore élé tiré, la guerre est done ouveite
Cesoir même, nous recevrons probablemerit
la nouvelle de I'apparnion de l'eseadre a mé
ricame réunie k Key Wfst devanl la Ha
vane et dont les bkiiments temeront pioba
blement Ie bombardement en attendant le dé
barquemerit dans 1 tie que l*s Américains se
proposent, dit on, de tenter son surce point
soit sur un autre.
Nous nous abstiendrons, du resie, de toute
prévision k ce sujet, commeaussi au regard
des opérations qui vont s'engager.
L'état de guerre existant entre les Etats-
Unis et 1'Espagne aura, naturellement, pour
conséquence, une série de manifestations de
la part des puissanceseuropéeanes Celles ci,
tout d'abord, auront k se déclat er neuires el
k faire connaitre cette décision aux belligé-
rants. Elles auront k s'entendre avec ceux-ci
quant aux actes qui pourront être considérés
comme une violation de la neutralité, ainsi
qu'au regard des limites dans lesquei!es
pourra s'exereer la course maritime que les
deux Etats en guerre n'ont pas encore abolie
chez eux.
Ce dernier point préoccupe tout partieu-
lièrement les puissances européennes, en
raison des graves inconvénients que la cour
se et le droit de visite sur les bailments tra-
versant 1 Océan pourraient avoir pour le
commerce des neutres. L'ltalie a pris i'ini-
tiative de provoquer un échange de vues k
ce sujet ernre les gouvemements intéressés.
Dès maintenant, d'actifs pourparlers sont
engagés entre ces puissances k 1'eftet d'arrê-
ter les décisions k prendre au sujet de la
déclaralion de neutralité et de ses consé-
quences.
En reproduisant, d'après les Annales par-
lementaires, Ie discours de M. Struye, nous
avons omis la première partie de ce discours.
Nous combions aujourd'hui cette lacune
M. Struye. Messieurs, le projet, qui nous
est soumis,me parait, avec ses dispositions nou-
veiles, de nature a donner satisfaction k ceux
qui, comme moi, ont cru de leur devoir de ne
pas voter son texte primitif.
La Chambre, tenant sagement compte des J
critiques du Sénat, nous propose, dans i'article
2,des mesures qui, convenablement appliquées,
permettront une discussion réguliere et bieri
déliberée sur le double texte; et par I'article 7,
me semblent résolues, d'une manière pleine- j
ment satisfaisaate, les diflicullés que pouvait
présenter, pour la justice et pour ie pays, le
regime du double texte légal.
Si ces amendements ne font pas disparattre
toules les difficultés parlementaires inhérentes i
au régime, l'experience d'autres pays nous dé- 1
montre que les inconvénients, qui subsisteront
n'ont pas, en pratique, une extréme importance,
lis n'ont pas l'importance des inconvénients
qui résulteraient du refus de donner k la plus
grande partie de la nation une satisfaction, en
soi-même légitime, a laquelle elle tient comme
a I'hoiineur de sa race, et que plus des cinq
sixièmes des volants de la Chambre, dont une
vinglainede représentants wallons, veulent lui
accorder, tous convaincusque cette satisfaction,
donnée aux flamands, ne doit en rieu préjudi- i
cier aux wallons.
Dans ces conditions, ce n'est pas sans quelque j
surprise, messieurs, que j'ai entendu, la se- j
maine dernière, notre honorable vice-président,
M. Dupont, et ensuite M. Tournay se déclarer
absolument contraires a l'adoption de ce projet
de loi.
En 1897, ils nous avaient montré des disposi
tions trés conciliantes. lis déposèrent k I'article
3 nn amendement que M. Dnpont trouvait de
nature k rendre la loi acceptable. C'était une
proposition transactionnelle.
Era effet. M. Dupont, dans son discours du j
27 Janvier 1897, recommandait eet amendement
présenté déjk a la Chambre par M. de Mont- j
jiellier, et il Ie caraclérisait en disant en termes
exprès que eet araendement paralysait les
effets nuisibles de la loi Le lendemain, il le
déposait sous sa signature el celles de MM.
Magis, Tournay, Braoonier, Montefiore Levi et
NagelmSckers.
Mercredi dernier encore, notre honorable
vice-président, y covenant iricidemment, le ca
raclérisait k nouveau, dans les termes suivants:
Une proposition avait élé faite d'adopter la
loi k litre transactionnel avec un texte disant
qu'en cas de doute, Ie texte frangais ferait foi.
La Chambre avait rejeté eet amendement de i
MM. de Montpellier, Heynen et de Favereau.
Au Sénat, j'avais repris l'amendement.
L'amendement, k mon avis, comme je le dé- j
clarais, en terminant mon discours du 4 Février
1897, était fait pour enlever au projet tout ce
qui m'empêchait de le voter, et son acceptation
m'eilt déterminé k voter la loi.
Or, messieurs, je crois pouvoir démontrer
au Sénat que la portée réelle de l'amendement
de MM. Dupont et consorts et la portée de I'ar
ticle 7, qui nous est actuellement soumis, sont j
absolument identiques.
Je sais bien que l'interprétation que nous a
donnée de I'article 7 notre honoré vice-président
ne Concorde pas avec le sens que j'y attache
mais, heureusement pour moi, je ne suis point
seul k le comprendre autrement que luije me j
sais en compagnie de jurisconsultes trés dis-
tingués qui n'admettent nullement lecommen-
taire surprenant qui nous en a été fait ici. Ce j
n'est d'ailleurs pas M. de La Palisse qui a ré- j
digé I'article, mais la commission spéciale de
la Chambre, oü se sont rencontrés notamment j
MM. Beernaert, De Lantsheere et Woeste.
Je crois done pouvoir, sans présomption,
m'exprimer autrement que M. Dupont sur la
portée de I'article 7 et établir sa parfaite con
cordance avec l'amendement transactionnel que
lui-méme nous proposait.
M. Dupont. Le gouvernement avait déclaré
que, si eet amendement passait, il retirerait le
projet. Ce n'est pas du tout la même chose 1
(Pour la suite, voir notre numéro de
Mercredi.)
Discours de
Ml. Surmontde Voisberghe.
M. le baron Surmont de Voisberghe.
Messieurs, le discours que j'ai prononcé l'année
dernière a l'occasion de la discussion du projet
de loi sur t'emploi du flamand a donué lieu a
maints commentaires. 11 a été violemment at
taqué; ma pensee a été dónaturée. II est vrai i
qu'on n'a eu garde dele publier tel que je l'avais
prononcé
Cela me prouve, une fois de plus, que les
proverbes sont toujours vraisSi toute vérilé
n'est pas toujours bonne k dire, il n'y a que la
vérité qui biesse 1
Je ne compte pas medéfendre ici de tous les
reproches qui m'ont été adressés. On a, d'ail
leurs, attaqué une autre personnalité que le
sénateur et cette personnalité ne relève pas de
cette assemblée. Si mon discours n'avait eu
d'autre résultat que de faire examiner de plus
prés Ie passé et l'avenir, j'estirnerais qu'il a
produit un efft-t utile et j'en serais heureux.
L'honorable M. Picard, dans la séance d'hier,
par un de ces traits qui lui sont familiers, a
poussé la courtoisie jusqu'a m'offrir un exem-
plaire du dictionnaire de M. Bellefroid. C'est,
au point de vue du plaidoyer, quelque chose
de fort habile, mais, pour ce que j'appelerai le
procédé, c'est peut-être différent.
L'honorable membre a indiqué toute une
série de régies d'interprétention; il a fini par
conclure que le juge est quelquefois oblige
d'aller k l'enconlre des textes pour rendre son
jugement.
Quoi qu'il en soit, je me suis permis de lui
répondre que j'avais les preuves de ce que
j'avais avancé dans mon discourset que je les
fournirais.
Lorsque j'ai cité l'auleur qui devait me four-
nir cette preuve, M. Picard m'a repliqué C'est
un homme a idéés précongues 1
L'opinion est peut-être un peu rude k l'égard
d'un confrère estimé et considéré comme juris-
consulte éminent.
Je ne comptais pas apporter cette preuve
dans ce (te discussion, paree qu'on aurait pu
me faire le reproehe d'avoir voulu tournet' la
langue flamande en ridicule, ce que je n'ai ja
mais fait, quoi qu'en dise M. Picard.
M. Magis. Personne ne l'a fait 1
M. le baron Surmont de Voisberghe. Dans
cette enceinte, non, mais en dehors c'est autre
chose 1
M. Magis. Ce qui a eu lieu en dehors ne
nous regarde pas.
M. le baron Surmont de Voisberghe. Mes
sieurs, je me bornerai k lire un seul passage:
cela suffira pour vous prouver que les textes
flamands anciens n'étaient absolument pas
flamands, Si c'est la la langue juridique fla
mande, comment faut-il la juget"? Ce passage
est extrait de la Flandre libérale, qui en a
reproduit plusieurs. Ii est tiré de Grotius, que
le secrétaire de ['Académie flamande a procla-
mé être le juriste qui a employé la langue fla
mande k l'état de purelé presque absolue.
Voici eet extrait du journal que je citais
Dans un travail présenté a l'Académie fla
mande, M. De Potter, son secrétaire, a recom-
mandé la langue de Hugo De Groot comme une
source oü les praticiens du pays flamand n'au-
raient plus qu'a puiser pour s'affranchir en
même temps et du frangais, et de l'usage, en
flamand, de termes bhtards.
Sur cette recommandation, nous avons
repris Grotius pour l'étudier a ce point de vue
spécial, et nous ne nous sommes pas seulement
arrètés k ce qu'il dit lui-même de la corruption
de la langue de son temps parmi les juristes,
de la perte d'anciennes expressions de pui' néer-
landais quiétaient excellentes et qui, longtemps
abandonnées, avaient cessé d'etre comprises de
ses contemporains, et enfin de la nécessité oü
il était, pour la clarté.de les traduire en marge,
au moment oü il tentait de les remettre en
usage.
Nous avons aussi voulu nous rendre compte
de la langue employée par H. Grotius lui-même
dans des écrits judiciaires qui nous out été
conservés et qui, k la difference de son Intro
duction au droit néerlandais, composés
pour l'instruction de ses fils seulement, étaient
adressés k des magistrats dont il avait par-des-
sus tout le désir de se faire comprendre et d'ob-
tenir une décision favorable.
Ges opuscules, nous les trouvons dans le
Recueil, plusieurs fois réimprimé au xviF siècle,
des Consultatien, advysen en advertis-
sementen des jurisconsultes néerlandais (6
volumes in-4") qui sont fréquemment cités par
les auteurs du siècle suivant (Voir J. Voet ad
Pandectas). Les consultations de H. De Groot
y sont nombreuses.
Nous en pretions la plus importante (III,
pages 613-648); «Nopende 't recht de steden
competerende in cas van Judicatuyrepour
vérifïer quelle est cette langue que nous recom-
mande l'Académie flamande et dont s'enorgueil-
lissent les flamingants.
(i Le consultant y répond a des deductien
ende missiven van den Provincialen Raed...
wat de poincten aengaet die het recht concer
neren... II trouve qu'il y a voor al te no-
teeren, dat de Heeren Staten niet en mogen
werden geconsidereert sulex als sy waren geres
pecteerd ten tijde van de Princen II y pariera
done du temps oü de Prinselyke authoritheyt
is komen te cesseren et oü le pouvoir des
Etats s'estgeconsolideert
Voilk ce que nous trouvons déjk dans un
premier paragraphe de moins de dix lignes et
toute la suite est a l'avenant.
Nous avons ensuite de jurisdictie als een
van de essentieelste partye van de souveraini-
teytet le droit d'établir des juges: soo ordi-
narisse, als extraordinarisse, niet alleen by
commissien maer oock by delegatien t.
L'auteur parle ensuite de la natuyre van
souverainiteyt t, du droit van evocatie du
privilegie van niet te evoceren qui est
gelimiteert met verscheiden exceptien oü il
y a tel (i poinct applicabel tot die questien
qua l'auteur indique et oü nous n'avons pas k
nous engager.
Au paragraphe suivant, nous avons or
donnantie, gerepresenteerd, gecomposeert, ge-
constringeert, in consideratie creatie
pour creation, natiën geregeert in forme van
republycknen; politie; acten van jurisdictie te
exerceren el aussi sedentaire collegien van
Justitie outre que «geleerde personen heb
ben gemanqueert de notabelste artificien... om
de souverainiteyt. van de Staten te doen evanes-
ceren (faire évariouir).
Voilk ce qu'on peut recueilliren moins de
deux pages de texte et la dissertation de Grotius
en a vingt; de sorte qu'on y aurait de quoi
dresser tout un dictionnaire des mots bhtards
appiiqués au droit dans la Hoilande des xvc et
xvie siècles.
Dans la page qui suit, nous avons regee-
ren pour régir, usurperen pour usurper,
(i cesseren pour cesser, sustineren pour
soutenir, accorderen pour accorder, con
senteren pour consentir, renuncieeren
pour renoncer, moveren pour mouvoir,
déterminer, «dispositie, exempel, abuys,expres
consentpour conseutement exprès, in freyn
pour en train, en cours,erectie, eerste instao-
- tie, gefondeert, gelimiteert, gelransporleert,
ten reguarde van de jurisdictie, simpele com
missien, de judicatuyre van feudale saecken, de
Ecclesiaslycque jurisdictie provisoor te laten
administreeren...
j Nous y avons den legislateur au lieu de
i wetgever et le droit by preventie straffe
te decreteren ende te doen executeren et, plus
loin, suflisante notificatien pour n'avoir
geen ignorantie te pretenderen
Quelques lignes plus bas, il est parlé de let
tres qui doiventêtre gepresumeert subreptive-
lyk geobtineert tezyn om in dit proces de expe
ditie te retarderen il est expliqué comment
les magistrats devrontse reguleeren d'après
i de ordonnantiën ende resolution der Staten
respectivelyck il est rappelé que le zèle pour
la religion fut parfois un masque et que plusieurs
j daermtde couleur gaven aen hare desseyns
et que, pour le pays publique, des citoyens
furent sonder ïguominie by de magistraten
gelicentieertmême notabele personen, geen-
sins suspect (page 629). Enfin Grotius parle de
actie te institueren contre particuliere vio-
lateurs van de publycke ordre etc.
Mais nous en avons dit assez, croyons-nous,
i pour que le lecteur qui a eu la patience de nous
suivre jusqu ici conuaisse cette langue judiciaire
déjk mieux que nela connaissent ceux qui nous
la reeommandent.
Je pourrais vous en lire, k peu prés, toute une
j colonne.
Ce sont lk des mots flamandsEst-ce la la
langue flamande