Le pays est en
majorité catholique
Le lendemain de l'élection
L'Ëglise et le XIXe Siècle
Les fian^ailles du
prince Albert
Tandis que le Progrès persiste a
dire, si non a croire, que le résultat
des élections legislatives du 27 Mai est
un échec pour le parti catholique, les
organes séricux de la presse libérale
sont forcés de convenir que la pre
mière application de la R. P. prouve
que le pays est et reste en majorité
catholique.
La R. P., écrivait YEtoile k l'heure oil
le peuple beige se rendait aux urnes, est le
système qui assure le mieux la sincérité du
régime représentatif... La R. P. est un
instrument de vérité et de loyauté. C'est le
dynamomètre des partis... Le dynamo-
mètre constate la force il n'augmente pas
celle des faibles et il n'en donne pas k ceux
qui n'en ont pas.
Le dynamomètre a donné la mesure de la
force des partis, et le parti catholiq ie dé-
passe en force tous les autres réunis.
L'Etoile l'avoue
La R. P. a donné une majorité aux
cléricaux paree qu'ils en ont une dans le
corps électoral. Voilk le fait qu'il serait
puéril de dissimuler.
Leur majorité parlementaire est plus forte
que leur majorité électorale. C'est un autre
fait, tout aussi incontestable que le premier.
L'écart n'est pas considérable, mais il
existe.
La Chronique écrit
Nous pensons qu'en politique il n'est
pas sage de se faire des illusions.
Le nouveau système élec'oral a démontré
nettement que le clóricalisme est resté en
majorité dans le pays.
Cette majorité était faussée par la mau-
vaise répartition des circonscriptions élec-
torales. Le libéralisme a reconquis sa part
d'influence. Le socialisme a prouvé qu il est
une vraie force. Les petits partis honteux,
en présence de la réalité qu'on vient de con-
stater, n'ont plus qu'k rentrer dans les
rangs, k gauche ou k droite.
Mais la situation, débarrassée aujourd'hui,
autant que possible, des fictions et des men-
songes du passé, est bien telle que l'indique
l'élection le cléricalisme est en majorité
dans le pays.
A son tour, la progressiste Riforme se
rend compte parfaitement de l'importance
de la victoir remportée par nous dimanche
dernier
Chose grave, écrit-elle, la majorité ne
se compose pas, ainsi que nous 1 avions
espéré, d'éléments hétérogènes, disparates,
susceptibles de devenir un principe de dé-
chirements intestins el d'entraver Taction
gouvernementale.
Les libéraux reconnaissent done bien que
notre victoire est compléte
Le Progrès écrit
Lundi, nos concitoyens étaient en fête.
La victoire que le parti libéral venait de
remporter dans l'arrondissement avait mis
la joie au ccBur de tous les Yprois.
A 4 heures THarmonie des Anciens Pom
piers, suivie d'une foule nombreuse, a par-
couru les rues de la ville, aux accents de
joyeux pas-redoublés. C'ótait la première
fois depuis 10 ans que notre drapeau bleu
faisait sont apparition. Aussi ce vieux reve-
nant a-t-il été accueilli par de frénétiques
acclamations.
A 6 heures, la musique libérale, accom-
pagnée d'un immense cortège k la tête du
quel se trouvaient les membres du Comité
de TAssociation libérale et un grand nombre
d'amis ótrangers qui avaient tenu k venir
féliciter le jeune représentant sur qui notre
arrondissement fonde tant d'espérances, est
allé donner une sérénade au nouvel élu La
réception a été cordiale et pleine d'entrain.
Entouré de ses nombreux amis, M. Nolf a
été conduit au local de TAssociation libérale
oü en quelques paroles émues et partant du
coeur il a remercié le corps électoral et tous
ceux qui avaient apporté leur dévouement k
la cause libérale et qui avaient contribué au
triomphe de nos idéés de Justice, de Liberté
et de Fraternité. En lerminant il a renouvelé
son serment de défendre le programme li
béral et de travailler au bien-être intellec-
tuel et matériel du peuple.
Et nous, vieux lutteurs, quand nous con-
templions ce peuple Yprois généreux et
enthousiaste qui se pressait dans ia salie des
Anciens Pompiers, nous nous reportions k
quelque trente ans en arrière alors que le
parti libéral dans notre arrondissement était
dans toute sa splendeur. Nous nous rappe-
lions avec bonheur nos jours de triomphe,
nous saluions Taurore d'un avenir meilleur,
nous entrevoyions une ère nouvelle oü la
Liberté ne serait plus un vain mot, oü la
Conscience et la Pensée libres auraient enfin
retrouvé leur droit k Texistence.
Ce jour-lk, tyrans et despotes auront
vécu.
Ce jour-lk les beiges seront libres.
Ce jour-lk ce sera la délivrance.
Ainsi done, c'est une victoire que
le parti libéral a remportée le 27 Mai 1
De 1894 k 1900 ils ont perdu 2000
voix et nos adrersaires chantent vic
toire 1
Ils voient nos chiffres électoraux
monter de 1896 1900 de prés de
2000 voix, et ils triomphent
Dans les seuls cantons d'Yprea les
candidats catholiques obtiennent plus
de voix que M. Nolf dans les six can
tons de l'arrondissement, et les libé
raux jubilent
lis n'ont pas le quart du total des
voix tandis que les catholiques ont
les deux tiers de ces voix et ils entre-
voient taurore d'un avenir meilleur
Sans le secours de la R. P., nos
adversaires étaient battus comme ils
ne l'ont jamais été. Si le quorum d'un
quart avait été admis, ils mordaient
la poussière 1
II valait bien la peine vraiment de
faire apparaitre le drapeau bleu, qui
n'était plus sorti de ses plis depuis 10
ans 1
Dans dix ans, il faudra que la loi
dise que tout parti, qui obtient un
dixième du total des voix, a droit a un
siège, pour que le parti libéral yprois
soit représenté, et les libéraux procla-
meront encore le triomphe de la Jus
tiee, de la Liberté et de la Fraternité
Et dire que ces gens osent parler de
tyrans et de despotes Gomme si le
peuple ne voyait pas clair et qu'il ne
fut pas a même de discerner ses vrais
amis de ceux qui le trompent et l'abu-
sent
Triste parti libéral, va
C'est le meilleur litre que uous puissions
dormer k ces quelques lignes que nous ex-
trayons du récent volume de notre éminent
et distiugué historiën et littérateur Godefroid
Kurth L'Eglise aux tournantde l'llistoire,
et qui eu forment la conclusisn
Depuis lors, (c'est-k-dire la révolution)
TËglise catholique s'est ressaisie, si je puis
employer cette expression. On a pu croire
qu'elle dormait k l'heure oü se déchainait
la Révolution, mais il faut reconnaltre que
c'était ie sommeil de Jésus dans la barque
secouée par la tempête. Son réveil, pour
être tardif au gré de nos voeux, n'en a été
que plus fécond. Un immense mouvement de
concentration intellectuelle et sociale s'opère
sous nos yeux dans les rangs de l'Eglise
ce sont les proclomes du grand combat, le
plus gigantesque de tous ceux qu'elle aura
livrés jusqu'ici contre la puissance des té-
nèbres.
Ne nous laissons pas duper pur les appa-
rences contraires. Cerles, notre atmosphère
n'est pas moins chargée qu'k la veille de la
Révolution. J'ose même dire que celle-ci
n'a pas été précédée de symptómes aussi re-
doutables que ceux qui, sous nos yeux, sem-
blent annoncer une Révolution nouvelle. De
nos jours, on ne répondrait plus par des
sourires d'incrédulité au Cazotte nouveau
qui voudrait, sur cette fin du XIX* siècle,
tracer de Tavenir le tableau le plus sombre
et le plus désespéré.
Et cependant on se tromperait. Pourquoi?
Paree que la situation du monde chrétien
s'est profondément modifiée depuis un siècle.
Alors Tesprit révolutionnaire était jeune et
débordait de vie il venait k nous les mains
pleines de promesses de bonheur infini il
était le mattre de la terre Thumanité entière
l'acclamait les forces de la conservation
sociale lui avaient rendu les armes. Aujourd'
hui, il est vieux et déconsidéré; le mensonge
de ses promesses est un fait aussi éclatant
que la lumière du jouril est condamné
dans Tesprit de tous ceux qui pensent, il
n'est plus rien qu'une superstition k l'usage
des intelligences obscures. Alors, l'Eglise
catholique,mutilée et enchatnée, était comme
une captive que la catastrophe trouva éten-
due au pied du tróne, et qui attendait son
tour de monter sur Téchafaud aujourd'hui,
afïranchie et rendue k el'e-même, elle se
dresse comme un géant en face de la révo
lution, non seulement pour défendre contre
elle les domaines qui lui restent, mais pour
reprendre ceux qu'on lui a enlevés. Elle a
commencé par casser toutes les sentences
du philosophisme. Elle a rappelé k la vie
l'ordre des jésuites dont on lui avait imposé
la suppression.Elle a proclamé Tinfaillibiliié
de son chef. Elle a condamné k deux repr i
ses, en 1832 et en 1864, les faux dogmes de
1789. Enfin, rebktissant sur les ruines de la
cité du mensonge, elle a proclamé dans les
encycliques immortelles la constitution chré-
tiennedes Etatsde la grande charte d'affran-
chissement du travail. A la démocratie qui
prend pour base la déclaration des Droits de
l'Homme, elle oppose sa démocratie k elle,
tondéesur les paroles de TEvangile. II n'y a
pas d'autre voix que la sienne qui parle avec
autorité au genre humain. Dans l'universel
écroulement des trónes, desécoles, des doc
trines, elle est la seule force morale qui
reste debout, et son ëtonnante supériorité
s'accroit de toute la profondeur de leur chute.
Ghaque fois qu'elle élève la voix, des échos
innombrables lui répondent de tous les
points de Tunivers. II y a aujourd'hui une
pensée catholique elle mesure toutes les
idéés k la mesure de la vérité chrétienne, les
condamné si elles la combattent.les accueille
si elles ne lui sont pas hostiles. Forte et
respectée, consciente d'elle même, ellecir-
cule d'une extrémité de la terre k l'autre il
n'est plus un sophisme victorieux auquel elle
n'oppose son intrépide contradiction. Dans
la sociologie, dans la science, dans Tart,
dans toutes les manifestations de la vie intel
lectuelle et morale des peuples, la pensée
catholique s'affirme avec une force et une
énergie tous les jours croissantes. On ne la
réfute pas paree qu'elle est irréfutable. On
ne la combat que par la conspiration du
silence.
Et ce n'est pas tout. Descendant du ter
rain de la doctrine sur celui de Taction, Tes
prit catholique a entrepris de reprendre
possession de la vie publique. Les bataillons
catholiques se réorganisent; partout, une
armée de laïques se léve. Lent et long tra
vail, qui, sans doute est bien loin d'être
achevé, mais que rien ne saurait plus em-
pêcher de s'accomplirII est en trés bonne
voie dans certains pays comme la Belgique,
la Hollande, TAllemagne catholique dans
d'autres nations, ce sera la persécutiou elle-
même qui servira d'éperon aux relardatai-
res Aveugle qui s'y laisserait tromper, et
qui verrait dans la fureur et Tacharnement
des persécuteurs, autre chose que le suprème
eflort de Tiniquité sur le point d'être vaincue!
Ce qui assure le triomphe de la cause ca
tholique, au seul point de vue humain, c'est
qu'aujourd'hui, comme k toutes les époques
qui marquèrent pourelles une crise decrois-
sance, il y a entre elle et Tavenir une corres-
pondance merveilleuse. Détachaut sa cause
de celle d'une classe qui voudiait la reudre
solidaire d'elle, l'Eglise leur répond comme
auxjuifs, comme aux Remains, comme aux
féodaux, comme k tous les revenants du
passé. Elle laisse les morts ensevelir leurs
morts, et elle conclut un pacte avec les for
ces vitales du XX* siècle. Elle apporte un
programme k ces masses populaires qui se
lèvent et qui cherchent leur voie. Ce pro-
gra urne, ce n'est pas celui de la Révolution,
comme le disent ses calomniateurs, c'est
celui de TEvangile, celui de Saint-Thomas
d'Aquin, celui de Léon XIII. C'est le royaume
de Dieu ouvert k tous, oü rien n'est donné k
la naissance, ni k Targent, mais tout au mé
rite et k la vertu c'est la démocratie évan-
gélique bktie sur les pauvres et réalisant la
loi de justice el de fraternité dans une appli
cation toujours plus large du grand comman-
dement nouveau.
Au sanglant et sinistre idéal que repré-
sente le drapeau rouge surmonté du bonnet
des formats, elle oppose son incomparable
idéal d'amour de Dieu et des hommes, cou-
ronné par le signe de la croix. II ne faut
pas douter qu'il ne triomphe k la fin, quelles
quesoientles apparences contraires. Laissez
faire Tesprit du mal c'est lui-méme qui se
chargera de précipiter les événements, en
hfttant Tarrivée du jour oü Thumanité n'aura
plus de choix qu'entre la civilisation catho
lique et Tanarchie révolutionnaire. Ce jour
lk, le choix sera bientót fait.
Saluons done avec espérance et respect le
travail de fermentation qui se fait en ce
moment dans les flarics de Ia société reli^
gieuse. Ce qui germe, c'est un nouveau
printemps catholique. Les siècles ont dérou-
lé devant nous plus d'un spectacle de ce
genre. Nous venons d'en contempler quel-
ques-uns il nous aident k apprécier celui
qui se passe sous nos yeux, et qui rious
apporte une preuve nouvelle de l'indéfectible
vitalité de l'Eglise. Ils ne comprennent rien
aux eriseignements de Tnistoire, ceux que
ce spectacle épouvante, alors qu'il devrait
les rassurer. Et ceux Ik seuls pourront s'en
affliger qui sont assez malheureux pour pré-
férer les intéréts d'une classe k la cause du
du genre humain.
Lundi, k 2 heures de l'après midi, le Roi
et la Reine, le -.omte et la comtesse de Flan-
dre et le prince Albert, ont repu dans les
salons du palais de Bruxelles les félicitations
du corps diplomatique.
Tous les envoyés extraordinaires et
ministres plénipotentiaires étaient présents.
Car tous avaient voulu présenter en même
temps leurs compliments k la familie royale,
désireux d'affirmer, en cette oirconstance,