'^M95*rC Mercredi 29 Aoüt *900 35" Annér. 10 centimes Ie (V En Chine Dernières nouvelles Au Transvaal La cloche On s'abonne rue au Beurre, 3B, k Ypres, et k tous les bureaux de poste du royaurae. Le JOURNAL D YPRES paraït le Mercredi et le Ramedi. Le prix de l'abonnemeot, payable par anticipation est de 5 fr. 50 c. par an pour tout le pays; pour l'ótranger, le port en sus. Les abonnements sont d'un an et se régularisent fin Decern bre. Les articles et communications doivent être adressés franc de port a l'adresse ci-dessus. Les annonces coütent 15 centimes la ligne. Les réclames dans ie corps du journal eoütent 30 centimes la ligne.— Les insertions judiciairesi franc la ligue. Les nuraéros supplé- mentaires coütent 10 francs les cent exemplaires. Pour les annonces de France et de Belgiquo excepté les 2 Fiandres) s'adresser A 1 'Agence Havas Bruxelles, rue de la Madeleine n° 32 et a Paris, 8, Place de la Bourse. Nouvelles de notre légation Le ministre des affaires étrangères a recti lundi après midi le télégramrae ci-dessous, daté de Pékiu le 13 aoüt et déposé a Ché-Fou le 26 Nous avons été délivrés hier après 56 jours de siège tous nos compa- triotes sout sauvés. La plupart sont trèséprouvés par les privations. Tout Pékin est occupé par les troupes étran gères qui assurent l'ordre. Sans nou velles de 1'extérieur depuis deux mois, j'attends vos instructions pour repreudre ma tache avec un nouveau zèle. J'ai télégraphié par l'entremise du Tsang-li-Yamen, les 2, 5 et 9 aoüt (Signé) Joostens, Paris, 28 aoüt. Le Siècle de ce matin publie la dépêche suivante que nous reprodui- sons a titre de curiosité et en tui lais- sant toute la responsabilité St Pétersbourg. Je vous transmets sous toutes ré serves la nouvelle suivante qui court avec persistance ici Le gouvernement aurait regu une dépêche l'informant qu'après des ba- tailles acbarnées en dedaDS des murs de Pékin, les alliés se seraient repiiés perdant 1800 hommes, la plupart Russes. Les Ghinois occupèrent des posi tions fortifiées d'oü its bombardèrent les forts des alliés d'une facon extrê- mement meurtrière. Londres, 28 aoüt. Le Morning Post publie un télé- gramme de Washington annomjant que le gouvernement a reQu une in formation directe que la Russie n'a pas déclaré la guerre a la Chine. Le Czar a l'intention d'annexer la Mand- chourieon prévoit une opposition active de la part du Japon Capture du general Ollivier Une nouvelle dépêche de Belfast, expédiée par ie maréchal Roberts bier matin, annonce un désastre imprévu pour les Boers. La colonne Ollivier, qui avait réus- si il y a un mois a s eclipser du sud- est de 1'Orange, au moment de la red- dilion de Prinsloo et a remonter vers le nord bien au dela de Bethléem, est prisonnière des Anglais. On la croyait dans le nord-est. Elle avait eu l'auda- ce de redescendre vers le sud et d'aller attaquer de trois cötés Wynburg, en- tre Bloemfontein et Kroonstadt, di- manche, après avoir attaqué la colon ne Ridley, prés de Ventersburg. Elle s'est heurtée a des forces accablantes et, après nn combat de prés d'un jour, elle a été battue hier matin lun di. Ayant jonché le terrain de ses morts, elte a fini par tomber en gran de partie aux mains de la colonne Bruce Hamilton. Ollivier et ses trois fits sont parmi les prisonniers. Le vaiilant général est lui-même blessé. On ignore encore le nombre des pri sonniers boers, et si leurs canons sont également aux mains des Anglais. Quoi qu'il en soit, ie maréchal Ro berts insiste sur l'importance de celte victoire augiaise, paree que Ollivier était Tame de la résistence dans le sud-est de i'Orange II est exact que c'est un véritable maibeur pour es Boers. Mais il ne les abaltra pas, s'il doitrendreleur situation plus difficile, en iibérant des forces angiaises pour la lutte dans le Transvaal. Gi, une nouvelle signée Jules Lemaitre,On aurait bien quelques réserves b faire concer- nant les mensonges du bon vieux curé qui en est te héros, mais ies intentions de l'auteur sont si bonnes et son his.loriette si gentiment contée La petite paroisse de Lande-Fleurie avait i une vieille cloche et un vieux curé. La cloche était si fêlée qee sa sonuerie i ressemblait b une loux de vieille femme, qui faisait mal k entendre et qui attristait les i laboureurs et les bergers répandus dans les champs. Le curé, l'abbé Corentin, était solide j encore, rnalgré ses soixante-quinze ans. II j avait une figure d'enfant, ridéc, mais rose, encadrée de cneveux blancs pareils aux écheveaux que filaient les bonnes femmes de Lande Fleurie. Et il était adoré de ses ouail- les cause de sa bonhomie et de sa grande charité Comme l'époque approchait oü i'abbé Corentin devait accomplir la cinquaniième année de son sacerdoce, ses paroissiens résolurent de lui offrir un cadeau d'impor- tance pour fêter eet ariniversaire. Les trois marguilliers firent secrèlement la quête dans toutes les maisons, et, quand ils eurent réuni cent écus, ils les portérent i au curé, en le priant d'aller b la ville et d'y choisir lui-même une cloche neuve. Mes enfants, dit l'abbé Corentin, mes j chers enfants... c'est évidemment le bon I Dieu qui... pour ainsi dire... en quelque i manière... Et il n'en put dire plus long, tant il était I ému. II ne sut que murmurer Nunc dimittis servum tuum, Domine, secundum verbum tuum in pace. Dès le Iendemain, l'abbé Corentin se mi1 en route pour acheter la cloche. II devai1 faire b pied deux lieues de pays, jusqu'au bourg de Rosy-les Roses, oil oassait la dili gence qui menait b la bonne ville de Pont- l'Arohevêque, chef-lieu de la province. II faisait beau. La vie des arbres, des oiseaux et des plantes utiles ou agréables bruissait sous le soleil des deux cótés du che- min. Et le vieux curé, la tête déjb pleine des carillons futurs, marchait allègrement en louant Dieu, comme saint Francois, de la gaielé de la création. Comme il approchait de Rosy-les-Roses, il vit, sur le bord de la route, une voiture de saltimbanque dételée. Non loin de cette voi ture, un vieux cheval était couché sur le flanc, le quatre jambes allongées et raidies, les cerceaux des cótes et les os pointus de la croupe crevant ia peau usée, du sang au na- seaux, la tête éi orme et les yeux blancs. Un vieii homme et une vieille femme, vê- tus de haillons bizarres et de maillots de co- ton rosatre étoilés de reprises étaient assis au bord du fossé et pleuraient sur le vieux cheval mort. Une fille de quinze ans surgit du fond du fossé et courut vers l'abbé en disant La charité, monsieur le curé la cha rité, s'il vous plait 1 La voix était rauque et douce b la fois et modulait sa prière comme une chanson de zingara. L'enfant, dont la peau avait la cou leur du cuir fraichement tanné, n'était vêtue que d'une chemisette sale et d'un jupon rouge mais elle avait de trés larges pru nelies noires e', veloutées et les lèvres com me des bigarreaux mürs ses bras jaunes étaient tatoués de fleurs bleues et un cercle de cuivre retenait ses cheveux noirs, étalés en éventail de chaque cólé de son visage maigre,comme cela se voit aux figures égyp- tiaques. L'abbé, ralentissant sa marche, avait tiré de son porte monnaie une pièce de deux sous. Mais, ayant rencontré les yeux de l'enfant, il s'arrêta et se mit b l'interroger. Mon frère, expliqua-t-elle, est en pri son, paree qu'ona dit qu'il avait volé une poule. C'est lui qui nous faisait vivre et nous n'avons pas mangé depuis deux jours. L'abbé remit les deux sous dans sa bourse et en tira une pièce blanche. Moi, continua t-elle, je sais glonger et ma mère dit la bonne aventure. Mais on ne nous permet plus de faire notre métier dans les villes et dans les villages, paree que nous sommes trop misérables. Et maiute- nant.voilb que notre cheval est mort.Qu'est- ce que nous allons devenir? Mais, demanda l'abbé,ne pourriez-vous point chercher de l'ouvrage dansle pays Les gens ont peur de nous et nous jet tent des pierres. Puis, nous n'avons pas ap- pris b travaiHernous ne savons faire que des tours. Si nous avions un cheval et un peu d'argent pour nous habiller, encore nous pourrions vivre de notre état... Mais il ne nous reste plus qu'b mourir. L abbé remit la pièce blanche dans sou porte-monnaie. Aimes-tule bon Dieu? demanda til. Je i'aimerai s'il nous vient en aide, dit l'enfant. Labbé sentait b sa ceiniure le poidsdu sac ou étaient ies cent écus de ses paroissiens. La mendiante ne quittait point le sairit prêtre des yeux, de ses yeux de tzigane que les prunelies emplissaient tout entiers. Il questionna Es-tu sage Sage fit la tzigane avec étonnement, car elle ne comprenait pas. Dis Mon Dieu, je vous aime L enfant se taisait, des larmes pleins les yeux. L'abbé avait défait les boutons de sa soutane et ramenait le gros sac plein d'argent. La tzigane attrapa le sac d'un geslede singe et dit Monsieur le curé, je vous aime. Et elle senfuit vers les deux vieux qui, sans bouger, pleuraient sur le cheval mort. T

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Journal d’Ypres (1874-1913) | 1900 | | pagina 1