La tolérance social iste
et la Religion
Nouvelles diverges
L'abbé continua sa marche vers Rosyles-
Roses, songeant k la grande misère oü il
plait k Dieu de tenir beaucoup de ses créa-
tures, et le priant d'éclairer cette bohémienne
qui, visiblement, n'avait pas de religion, et
qui, peut-étre, n'avait pas méme repu le saint
baptéme.
Mais, tout k coup, il s'avisa que ce n'étail
plus la peine d'aller k Pont-l'Archevêque,
puisqu'il n'avait plus l'argent de la cloche.
Et il revint sur ses pas.
II avait peine k comprendre, maintenant,
comment il avait pu donner k une mendiante
inconnue, k une saltimbanque, une somme
si énorme et qui ne lui appartenait point.
II pressa le pas, espérant revoir la bohé
mienne. Mais il n'y avait plus, au bord du
chemin, que le cbeval mort et la roulotle
dételée.
II médita sur ce qu'il venait de faire. II
avait, sans aucun doute, gravement péché
il avait abusé de la confiance de ses ouaill s,
détourné un dépót, commis une espèce de
vol.
Et il entrevoyait avec terreur les consé-
quences de sa faule. Comment la cacher
Comment la réparer Oü trouver cent autres
écus? Et, en attendant, que ripoidre k ceux
qui l'interrogeraient Quelle explication
donner de sa conduite Le ciel se couvrait.
Les arbres étaient d'un vert blessant et cru
sur l'horizou livide. De larges gouttes tom-
bèrent. L'abbé Corentin fut frappé de la
tristesse de la création.
II put rentrer au presbytère sans étre
aperpu.
C'est déjk vous, monsieur le curé? de-
manda sa servante, la vieille Scbolastique.
Vousn'êtes done pas allékPont-l'Archevêque?
L'abbé fit un raensonge
J'ai manqué la diligence de Rosy-les-
Roses.... Je retournerai un autre jour...
Mais, écoute, ne dis k personne que je suis
déjk revenu.
11 ne dit point sa messe le lendemain. II
resta enfermé dans sa chambre et n'osa
méme se promener dans son verger.
Mais, le jour suivant, on vint le chercher
pour porter l'extrême onction k un malade,
au hameau de Clos-Moussu.
M. le curé n'est pas rentré, dit la gouver
nante.
Scholastique se trompe me voici, dit
l'abbé Corentin.
En revenant de Clos Moussu, il rencontra
un de ses plus pieux paroissiens
Ehbien, monsieur le curé, avez-vous
fait bon voyage
L'abbé menti pour la seconde fois
Excellent, mon ami, excellent.
Et cette cloche
L'abbé fit un nouveau mensonge. Hélas!
il n'en était déjk plus k les compter.
Superbe, mon ami, superbe On la
dirait en argent fin. El quel joli son Rien
qu'en lui donnant une chiquenaude, elle tinte
si longlemps que cela n'en fluit plus.
Et quand la verrons-nous
Bientót, mon cher enfant, bientót Mais
il taut d'abord graver dans son métal son
nom de baptéme, ceux de ses parrain et
marraine et quelques versets des saintes
Eciitures... Et dame! cela demandera du
temps.
Scholastique dit l'abbé en rentrant
chezlui, si l'on vendait le fauteuil, la pen
dule et l'armoire qui sont dans ma chambre,
crois tu qu'on en tirerait cent écus
On n'en tirerait pas trois pistoles,
monsieur le curé. Car, sauf votre respect,
tout votre mobilier ne vaut pas quatre sous.
Scholastique reprit l'abbé, je ne man-
gerai plus de viande. La viande me fait mal.
Monsieur le curé, répondit la vieille
servante, tout ca n'est pas naturel, et, pour
sur, vous avez quelque chose... C'est depuis
lejour oü vous êtes parti pour Pont-l'Arche
vêque. Que vous est il done arrivé?
Elle ce harcela si fort de questions qu'il
flnit par tout lui raconter.
Ah dit-elle, cela ne m'étonne point.
C'est votre bon coeur qui vous perdra. Mais
ne vous faites point de mauvais sang, mon
sieur le curé. Je me charge d'expiiquer la
chose jusqu'k ce que vous ayez pu ramasser
eent autres écus.
Et done, Scolastique inventa des histoires,
quelle débitait k tout venantOn avait
télé la cloche neuve en l'emballant, et il fal
lait la refondre. La cloche refondue. M. le
curé avait eu l'idée de l'envoyer dans la ville
de Rome pour qu'elle fut bénie par notre
Saint Père le Pape, et c'était lk un long
voyage.
L'abbé la laissait dire, mais H était de plus
en plus malheureux Car, outre qu'il se re-
prochait ses propres mensonges, il se sentait
responsable de ceux de Scholastique, et cela
joint au détournement de l'argent des pa
roissiens, formait, k la longue, une masse
eftroyable de péchés. II fléchissail sous le
faix, et, peu k peu, une pkleur terreuse rem-
plapait, sur les j oues amaigries, les roses
rouges de son ini ocente et robuste vieillesse.
Le jour fixé pour les noces d'or du curé et
pour le baptéme de la cloche était p issé de
puis longtemps. Les habitants de Lande Fleu-
rie s'étonnaient d'un tel retardement. Des
bruits se répandaient.
II a mangé l'argent de la cloche.
Un parti se formait contre le digne desser-
vant. Quant il maichait daris la rue, il y
avait des chapeaux qui restaient sur les
tétes, et il entendait, sur son passage, des
murmures hostiles.
Le pauvre saint homme était accablé de
remords. II concevait toute Tétendue de sa
faute. II en éprouvait la plus douloureuse
attrition et pourtant, il avait beau faire, il
ne pouvait arriver k la contrition parfaite.
C'est qu'il sentait bien que cette aumóne
de l'argent d'autrui, il l'avait faite eomme
malgré lui et sans avoir méme la liberté d'y
réfléchir. II se disait aussi que cette charité
déi aisonnable avait pu étre, pour l'kme igno
rante de l'enfantdes bohémiens, la raeilleure
révélation de Dieu et le commencement de
l'illumination intérieure.Et toujours il revoy-
ait, si noirs.si doux et tout pleins de larmes,
lesyeux de la petite saltimbanque.
Cependant, l'angoisse de sa conscience
devenait intolérable Sa faute grossissait.rien
qu'en durant. Un jour, après étre resté
longtemps en prière, il résolut de se déchar-
gerde son péché en le confessant publique-
ment k ses paroissiens.
Le dimanche suivant, il monta en chaire
après l'Evangile, et, plus pkle et roidi d'un
plus sublime effort que les maityrs dans
l'arène, il commenpa
Mes chers frères, mes chers amis, mes
chers enfants, j'ai une confession k vous
faire...
A ce moment, une sonnerieclaire, limpide,
argentine, chanta dans le clccher et remplit
la vieille église... Toutes les tétes se retour-
nèrent, et un chuchotement émerveillé par-
courut les bancs des fidèles
La cloche neuve la cloche neuve
Etait-ce un miracle Et Dieu avait-il fait
apporter la nouvelle cloche par ses anges,
afin de sauver l'honneur de son charitable
ministre
Ou bien Scholastique était-elle allée con-
fier l'embarras de son vieux maitre k ces
deux dames améticaines vous savez?
Suzie et Bettina Percival, qui habitaient un
si beau chkteau k trois lieues de Lande-
Fleurie, et ces excellentes dames s'étaient-
elles arrangées pour faire k l'abbé Corentin
cette jolie surprise
A mon avis, la seconde explication souf-
frirait plus de ditficulié que la première.
Quoi qu'il en soit, les habitants de Lande-
Fleurie ne surent jamais ce que l'abbé Coren
tin avait k leur confesser.
Jules LEMA1TRE.
Du journal socialiste francais la
Pttite République
On salt que le gouvernement a formelle-
raent interdit les prières du matin et du soir
dans les écoles communales des départe.
ments.
Fort de cette décision, le préfet de l'Aube
et le préfet de la Haute-Savoie viennent de
conlraindre certains maitres de leur départe
ment k respecter cette mesure, dédaignée
jusqu'alors. De plus, le préfet de la Haute-
Savoie a exigé que les fonctionnaires en-
voient leurs enfants dans les écoles de sa
région et le maire de Besanpon a menacé de
révocation immédiate tout fonctionnaire qui
ne retirerait pas ses enfants des écoles con-
gréganistes. Puisque la lutte est ouverte
contre la réaction, au moins qu'on la rnène
iondement.
Voila qui est du moins franchement
peraécuteur.
Le crime mystérieux d'Oedelem. M Fré-
deric Hudders, marchand d'engrais k Oede-
lem, avait été trouvó assassiné il y a quel
ques semaines. Jusqu'ici, les investigations
de la justice n'avaient pas donné de résultats.
Or, cette semaine un vol avec effraction
ayant été commis k Donk, prés d'Oedelem;
on ne tarda pas k connaitre le coupable qui
n'élait autre qu'un individu demeurant k
Nieuwendorpe et ne vivant que du produit
de braconnages et de rapines. Cet individu
-fut pris dans les bois par dix gendarmes.
D'après certains indices, la justice croit
tenir l'auteur de l'assassinat d'Oedelem. J...,
cependant se prétend innocent du crime
qu'on lui impute.
Un monument u Guido Gezelle. Nous
avons annoncé qu'un comité s'était constitué
k Courtrai pour ériger sur l'une des places
de la ville un monument k Guido Gezelle.
Les premières souscriptions ont déjk don
né plus de 100,000 francs. LVxécution de
l'oeuvresera confiée au sculpteur Jules Lagae.
Le licenciement de la légion beige
Beverloo. Graves désordres. On mande de
Beverloo, le 26 Aoüt
La nouvelle officielle du licenciement de
la légion beige pour la Chine est parvenue au
colonel Bartels Satnedi dans la soirée.
Officiers, sous officiers et soldata en ont
été disespérés. Le mécontentement a été
général, et des protestations se sont élévées
de toutes parts.
Chez les sous-officiers et soldats, le mé
contentement s'esl manifesté non seulement
par des paroles, mais aussi par des actes et
des déprédations regrettables.
Après avoir brisé les carreaux de leurs
logements, its ont envahi par bandes la com
mune de Bourg Léopold, hurlantet chant int
et se livrant dans nombres d'établissements
publics k de véritables actes de brigandage.
La police locale, la gendarmerie et les
piquets de troupes ont dü intervenir avec
vigueur.
Des begarres se sont produites au cours
desquelles un soldat appelé lk pour son ser
vice, a été frappé par erreur par un gendar
me d'un coup de crosse defusil, et trés
gravement blessé.
Dimanche, k 9 heures du matin, il y a eu
un appel général dans les carrés, et immé-
diatement après les hommes ont versé enlre
les mains de l'officier payeur leurs armes et
effets d'habillement.
On espère que cette opération se sera ter-
minée le méme jour et que la légion pourra
étre licenciée entièremerit dès lundi.
Les sous officiers et soldats partiront en
congé avec solde pourquinze jours.
Quant aux engagés civils, ils ont protesté
auprès du colonel Bartels. Celui ci, qui par
sa bienvaillance avait déjk su conquérir
I estime de tous, n'apu que leur exprimer ses
regrets de ce qui arrive et leur a conseillé
de s'adresser au Comité organisateur.
Les sucres en paquets de la Raffinerie
Tirlemontoise sont les meilleurs. En vente
chez tous les épiciers.
Les fiers bras. Le Peuple a tort de
mépriser et d'injurier la justice bourgeoise.
La justice bourgeoise lui apprend la pru
dence, petit k petit, k coups de procés et en
le faisant crier. C'est peut-être trés dur, trés
cher, trés cuisant, mais ce n'est pas inutile.
A insi, le Peuple avait insinué, k la charge
d'un notable de Bois de Breux (province de
Liége) une grave accusation d'immoralité.
Invité k citer le nom du réactionnaire qu'il
désignait ainsi k l'indigriation de ses lecteurs,
le Peuple s'est d'abord dérobé.Puis, menacé
d un procés, ému par le souvenir du procés
qu'il perdit l'autre jour contre des prêtres de
Bruxelles, il relira, dans les termes piteux
qu'on va voir, son épiugle du jeu.
II nous faut revenir encore, écrit le
Peuple, sur cette affaire dont nous avons
parlé plusieurs fois et ce pour reconnailre
qu'il y a eu quelque exagération dans les ra-
contars et qu'il se pourrait fort bien, ainsi
qu'on l'a déclaré que la jeune fille fut atteinle
du mal dont on a parlé.
Cette affaire se résumé en quelques po-
tins de cabarets auxquois nous «avions tort
de donner de l'importince.
Voilk ce qui s'appelle caner, pour parler
eomme le citoyeu Demblon. Avis aux hon-
nêtes gens calomniés par les feuilles socia-
listes. Ils ont le moyeu de les metlrek raison.
II ne lient qu'k eux de donner au pays le
spectacle des fiers k bras du Peuple age-
nouillés et tremblants
Les accidents du rail. Un homme coupé
en morceauxUn terrible accident a eu
lieu samedi sur la ligne du Nord-Beige, de
Namurk Liége, k proximité de h gare de
Namèche.
Un habitant de Namèche, le nommé J. Gé-
nicot, ouvrier mapon, traversait les voies k
V