L'ARROND
TÉLÊPHOWE 52
ai
VERIFICAT
Mercredi 27 Juin 1906
10 centimes Ie N
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j<ss ia m
du 3 au 20 Juillet 1900
La réponse de
M. Merghelynck
Le cas de M. Merghelynck
Au t Pays
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HARMONIE COMMUNALE
Grand'Place
Dimanchc l Juillet 1906
a 8 1/2 h. du soir.
Programme au prochain nume'ro.
VILLE D'YPRES
des poids et des mesures
au petit Marché au Beurre.
Nous avons re^u la réponse de M.
Merghelynck.
En la publiant, nous nous f'aisons
un devoir de remercier {'honorable
Commissaire d'arrotidisseinent de ne
nous avoir pas fait languir plus
long temps.
Voici le document
Ypres, le 25 Juin 190 G.
Monsieur éditeur
Sou» les rubriques Cela dépasse la
mesure et Paille et Poutre le Journal
d'Ypres. daus ses numéros des 16 et 20 Juiu,
reproduit une lettre confidentielle, que j'ai
adressée,sous pil fermé,k tous mes occupeurs
de la Province, pour les engager sans con-
trainte, ni menace aucunes, a voter le 27
naai pour la Liste Libérale et, prenant
texte de cette lettre, vous afiïrmez, non sans
une certaine témérité, que, paree que je
suis tonctionnaire d'un Gouvernement
Catkolique, qui me maintient dans mes
fonctions, il m'est absolument interdit d'agir
de la sorte, comme homme privé et comme
propriétaire. Pour un rien, vous me con-
testeriez le droit de voter selon ma con
science.
Je relève d'abord l'incorrection qu'il y a
de publier dans un journal, sans mon auto-
risation, une lettre personnel le adressée a
des tiers mais sans m'arrêter a cette
question de convenances, j'ai hate de vous
dire que ce que j'ai fait a été mürement
réfléchi, et que, s'il y avait de nouvelles
ólections, je n'hósiterais pas afaire de même,
avec la conviction bien arrêtée de ne contre-
venir, d'aucune manière. a la circulaire
ministérielle du 25 Juillet 1884 que vous
invoquez.circulaire qui défend aux fonction-
naires de se jater dans la mêlée des partis.
Défendre a un citoyen, füt il revêtu de
fonctions publiques, de demander paternel-
lement A ses locataires, voire même a ses
tournisseurs, que j'ai négligées en l'occur-
rence, de voter dans un sens déterminé,
serait évidemment vinculer sa liberté et
porter atteinte a ses droits les plus légiti-
mes.
Notez que, contrairement a ce que vous
déclarez, je me suis borné a m'adresser
a mes locataires, et nullement a mes
ouvriers, amis et connaissances, que je n'ai
fait ni démarches, ni visites.
Du reste, Monsieur l'Editeur, faites-vous
reproduire certain dossier d'Octobre 1887 a
propos d une question identique, me con-
cernant personnellement, et il vous sera
permis de constater que le Gouvernement
d'alors n'a pas désavoué cette manière de
voir et doit avoir décidé, de l'avis conforme
du comité consultatif de Législation, d'ad-
ministration générale et de contentieux
administratif, que le fonctionnaire, agissant
comme homme privé et comme propriétaire,
ne tombait pas sous l'application de la cir
culaire ministérielle précitée.
Si j'avais assisté k des meetings si j'avais
signé des circulaires,des affiches, des procla
mations si je fréquentais un cercle libéral
a l'instar de la plupart des fonctionnaires
de votre opinion, qui font partie du cercle
catholique si une lettre pareille a celle
reprochée avait été adressée a des personnes
avec lesquelles je suis en relations en raison
de mes fonctions, ou auxquelles j'ai pu ren-
dre service pendant une carrière de plus
de 27 ans, telles que Bourgmestres, éche-
vius, conseillers communaux, secrétaires,
receveurs, instituteurs, gardes-champêtres,
j'eu passé et des meilleurs, je comprendrais
jusqua un certain point la légitimité de vos
critiques.
Mais, comme je l'ai proclamé au Banquet
des Bourgmestres, jamais, en aucune cir
constance je n'ai usé de mes fonctions dans-
un intérêt politique auprès de qui que ce
soit, pouvant, a un titre quelconque, relever
du commissaire d'arrondissement ma
conscience est absolument tranquille et
c'est la l'essentiel.
Pour le reste, ce ne sont pas vos décla-
mations intéressées, qui ma feront dévier
de la ligne de conduite que je me sais
tracée et que j'estime être de la plusparfaite
correction et de la plus stride légalité.
Agréez, je vousprie, Monsieur l'Editeur,
l'expression de mes sentiments distingués.
Ferd. MERGHELYNCK
propriétaire a Ypres.
P. S. Si j 'ai tardé aussi longtemps de vous
adreeser la réponse que vous réclamiez,
c'est que je me proposais d'attendre qua le
sujet füt épuisó dans vos colonnes, pour
reucontrer tous vos articles a la fois ja me
suis même demandé, si, en présence de votre
déolaration (n° du 23 Juin) que vous vous
occuperiez encore de cette lettre qui vous
préoccupe tant, il n'y avait pas lieu de
surseoir encore mais vous me paraissez si
impatient que je n'ai pas voulu vous faire
languir plus longtemps.
M. Merghelynck est en aveu.
II a écrit la lettre que nous avons publiée.
II l a adressée, non seulement a ses fermiers
de l'arrondissement d'Ypres,mais a tous ceux
de la Province qui ont le bonheur de de'pen-
dre de lui.
Nous n'avons done plus besoin de produi-
re d'autres documents habemus confitentem
reum
M. Merghelynck doit s'attendre a quelques
mots de réplique de notre part. Les voici
Nous n'avons pas demandé son autorisa-
tion pour publier, dans notre Journal, sa
lettre personnelle. C'est vrai mais ayant
recu, dans notre botte, plusieurs exemplaires
de sa lettre imprimée,nous avons cru pouvoir
la publier, avec Ie postscriptum écrit de sa
main. M. Merghelynck nous pardonnera
notre incorrection d'autant plus volontiers
que ce qu'il a fait a été mürement réfléchi,
et que, s'il y avait de nouvelles él eet ions, il
n'hésiterait pas a faire de même. Dont acte.
M. Merghelynck nous dit qu'zV na pas
adressé une lettre pareille a celle reprochée,
a des personnes avec lesquelles il est en
relations en raison de ses fonctions. Nous ne
lui avons reproché rien de pareil. Du reste
ses lettres, adressées, dans un but politique,
aux BourgmestresEchevins, Conseillers
communauxsecrétaires, receveursinstitu
teursgardes champêtres eussent été des
lettres mortes. M. le commissaire d'arron
dissement le sait aussi bien que nous, et
c'est peut être pour ce motif qu'il n'a pas
demandé aux magistrats communaux, etc.
de voter dans un sens déterminé. A moins que
ses müres reflexions ne l'aient amené a se
rappeler certain dossier d'Octobre i88y, a
propos d'une question identique le concernant
personnellement.
M. Merghelynck a engage', dit-il, ses
occupeurs de la Province, sans contrainte ni
menace aucunes a voter pour la liste libérale.
II le leur a demandé pater nellement...
C'est pour cela qu'il a signé MIJNHEER
Ferdinand Merghelynck, grondeigenaar te
Yper. MENHEERE !1
Mais ce sont la les petits cötés de la ques
tion que nous avons soulevée. Mijnheer
Merghelynck est convaincu d'avoir invité ses
locataires, leurs ouvriers et leurs camarades,
a voter, dans les arrondissements de la
Provincepour la liste libérale, leur donnant
I'assurance qu'en agissant ainsi ils travaille-
raient dans l'intérêt général.
Voila la question et, a cette question,
M. Merghelynck ne répond pas un mot dans
sa lettre-réponse.
Voudrait-il nous dire, maintenant que
lelection est passée, ce qu'il entend par cet
intérêt général ('t algemeen welzijn) au nom
duquel ii s'est adressé a ses fermiers
Est-ce l'intérêt de l'agriculture, dont le
parti libéral n'a jamais eu cure jusqu'en
1884?
Est-ce l'intérêt des oeuvres agricoles, mena-
ce'es dans leur existence, par les déclarations
récentes de la gauche socialiste et radicale
dont M. Merghelynck a soutenu 1 alliance
avec les libéraux, dans les arrondissements
de notre Province
S il ne s'agissait pas de cet intérêt, quel
autre intérêt avouable pouvait bien mériter
1 intervention de M. Merghelynck dans la
lutte qui a précédé 1 election du 27 mai
L'intérêt de la Royauté.de nos institutions,
de nos libertés M. Merghelynck est, parmi
nous, le représentant du Roi. II lui a juré
fidélité il a juré obéissance a la Constitution
et aux lois du peuple beige. A-t-il pu croire,
après müre réflexion, qu'en favorisant
l'alliance libérale-radicale-socialiste, il faisait
ceuvre de loyalisme et de conservation
sociale II n'est pas assez naif pour cela I
Sur ce point les libéraux modérés de notre
Province ont pensé autrement que lui, et,
sans être fonctionnaires de l'Etat, ils se sont
séparés des cartellistei.
Non, nous n'apercevons pas l'intérêt
général 't algemeen welfljn que M.
Merghelynck a eu en vue, en incitant ses
fermiers, leurs ouvriers et camarades, a voter
pour la liste libérale sur laquelle figuraient,
a cöté de ses amis, des socialistes avérés,
républicains et révolutionnaires.
M. Merghelynck nous répondra cell.
Si non, nous lui dirons qu'il n'a songé qua
l'intérêt d'un parti pour qui l'arrivée au
pouvoir était la seule preoccupation, un
parti auquel ses alliances et ses compromis-
sions ont fait perdre toute dignité et tout
espoir de recueillir un jour la succession de
ce gouvernement catholique qui a poussé la
longanimité jusqua maintenir, depuis 22
ans, un fonctionnaire qui le combat dans
toutes les elections.
Mais que M. Merghelynck ne nous réponde
plus que pour un rien nous voudrions l'em-
pêcher de voter selon sa conscience.
C'est un fonctionnaire libéral qui nous dit
cela, un Yprois qui connaït l'histoire des
Gouverneurs et Commissaires d'arrondisse
ment catholiques brutalement destitués par
ses amis, en 1847 et cn '878 1
Les méchantes langues attribuent k l'atti-
tude de M. Merghelynck un autre mobile,
que nous croyons indigne de son caractère
Comme tous les libéraux, M. Merghelynck
croyait, dit on, que le Gouvernement catho
lique ne résisterait pas l'assaut du cartel.
Vendeur de peau d'ours, il se voyait déji
Gouverneur de cette Province oü il a tant
d'honorables fermiers, eerzame pachters.
Qu'avait-il done a risquer Sa dignité
peut-être, mais pas autre chose.
Quoi qu'il en soit, nous sommes heureux,
pour M. Merghelynck, qu'il n'ait pas été
oblige' de vivre, a Bruges, l'histoire du
Procureur Heyvaert. II lui sera plus agréable
de rester a Ypres, en attendant que, dans
23 ans, les Bourgmestres catholiques de
l'arrondissement célèbrent son jubilé de 5o
années de services loyalement rendus au
Gouvernement conservateuret que la ville
d'Ypres reconnaissante lui élève une statue
avec le concours du parti catholique.
Quelle est done la force aussi puissante
que mystérieuse qui nous pousse, nous
pauvres emigrants vers la ville, les uns un
peu plus, les autres un peu moins, a retourner
avec un élan irrésistible, i des époques
généralement périodiques, a notre lieu
d'origine
On appelle, je le crois du moins, cet état
dame tout particulier, la nostalgie du
Pays mais comme je n'ai pas eu 1'occasion
de faire, ni des études philosophiques, ni
phisiologiques, ni psycologiques, )e me
garderai bien de chercher a re'soudre ce
problème perplexe ou d'analyser les causes
déterminantes qui poussent les individus,
quelle que soit leur culture intellectuelle,
comme par une espèce de fascination, vers le
lieu oü ils ont passé leur première jeunesse,
comme je ne chercherai pas davantage a
trouver les motifs ou les causes qui poussent
le criminel vers le lieu oü il a commis son
crime.
Mais ce que je puis dire c'est que moi-même
j'obéis k cette espèce de suggestion et que
chaque année je ressens le besoin pressant et
singulièrement irrésistible d'aller, ne fut-ce
que pour vingt quatre heures, me retremper
aux bords de la petite Espierre, qui baigne
de ses eaux sottes, quelquefois impétueuses
mon village natal, et qui dans sa cours»
insensée ne permet même pas aux petitcs
JO
UBNAL
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