JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
YPRES, Dimanche, PREMIÈRE AXltEE. X» 1. 26 avril 1863.
YPRES, avril ÏS6ÏI.
Nous croirions manquer a toutes nos obligations,
si nous ne commengions pas la publication de notre
Journal par un exposé de principes clair et net.
Tracer notre ligne de conduite, définir nos idéés,
marquer notre but, voila notre premier devoir; il
faut qu'avant d'avoir foi en nous le lecteur puisse
connaitre et peser nos aspirations, nos vceux, nos
tendances. Rien neclaircit du reste les situations
comme la franchise; et nous serions fachés qu'un
malentendu laissat planer, par notre faute, un nuage
quelconque sur notre pensee et mït en suspicion la
aroiture de nos intentions.
Admirateurs enthousiastes des idéés généreuses,
des grands et féeonds principes qui font la force et
la gloire du xix" siècle, partisans dévoués de notre
Constitution, égide et palladium de notre nationality
elle-même, nous consacrons nos efforts it la défense
des institutions que la Belgique s'est librement don-
nées en 1830. La proclamation franche et le déve-
loppement énergique des idéés libérales peuvent
seals donner au pays un avenir brillant et prospère,
et le maintenir au rang qui lui revient parmi les na
tions civilisées; le moven le plus efficace, le plus
infaillible d'assurer cesheureux résultats est une af
firmation éclatante et continue de ces idéés, au mo
ment surtout, moment solennel, oil la nation se pré
pare aux luttes électorales.
Qu'y a-t,-il d'ailleurs de plus noble, de plus digne
d'un grand parti, que le déploiement courageux du
drapeau en face de l'ennemi L'atonie, le marasme
n'engendrenl rien de solide, rien de durablecomme
l'a dit un grand éerivain, lutter e'est vivre; la de
sertion de i'arêne, I'abstention au moment du com
bat est un suicide.
Puisse la petite pierre que nous apportons eon-
Iribuer it rachèvement de l'édificepuisse notre coo
peration, si modeste qu elle soit, accélérer le triom-
phe complet et définitif du parti liberal dans notre
arrondissement.
A cöté des questions politiques ou administra-
tives que nous aurons occasion de trailer, nous ne
négligerons pas les intéréts matëriels. L'importancc
que ces intéréts out acquis et acquièrent encore
chaque jour, comme développement de la richesse
publique, en feraient un objet suffisamment digne
de notre sollicitude, si les sympathies que nous
inspirent, sans exception, toutes les localités de
l'arrondissement, et en particulier la ville d'Ypres,
ne nous imposaient l'examen de ces intéréts comme
un devoir sacré.
Libres de tout engagement comme de toute idéé
préconcue, ne relevant que de nos convictions et de
notre conscience, nous jugerons les actes avec im-
partialité, nous apprécierons les faits avec ealme et
moderation autant qu'avec fermeté et indépendance.
Quels que soient le terrain de la discussion ou les
incidents de la polémique, toujours nos observa
tions seront empreintes de loyauté et dictécs uni-
quement par l'intérêt général. La politique des per-
sonnalités ne nous sourit pas; toutes les convictions
sineères ont droit d'ailleurs a notre estime; et, tout
en combattant les doctrines, nous professons vo-
lontiers pour les hommes le respect auquel nous
prétendons nous-mêmes. La cause que nous soute-
nons est trop belle pour qu'il soit besoin de tremper
notre plume dans le fiel; les injures ne seront pas
nos arguments.
En résumé, secondant les efforts intelligents,
applaudissant ;'i tout ce qui peut accroitre, par des
moyens honnêtes, l'influence de l'opinion libérale et
asseoir la prépondérance incontestée des idéés
vraiment progressives, nous pouvons traduire en
deux mots notre pensée fortilier et améliorer.
La politique libérale.
La Chambre des représentants a proclamé, dans
la memorable adresse quelle a votée au Roi a l'ou-
verture de la session de 186-1, que les biens affectés
aux études et au temporel des cultes sont laïques,
et que le pouvoir civil est comptable envers la so-
ciété de leur bonne gestion.
Qu'y a-t-il au fond' de cette affirmation qui a paru
un défi, une déclaration de guerre a la minorité
parlementaire
La simple reconnaissance d'un grand principe
proclamé par le décret du 4 novembrc 1789 qui est
une loi du royaume, et que le parti clerical est tenu
de respecter jusqu a ce qu'il soit parvenu a le faire
rapporter par le législateur contemporain. En effet,
voici ce que dit ce décret
Tous les biens ecclésiastiques sont a la dispo-
sition de la nation, a la charge de pourvoir d'une
manière convenable aux lrafs du culte, a I'entre-
tien de ses ministres et au soulagement des
pauvres.
Et il n'y a pas a dire, les protestations de la
droite ne sont qu'une attaque veritable contre le
droit public et contre le droit privé du pays. Elle
doit admettre le principe, a moins de soutenir, avec
certains de ses membres, qu'il v a eu confiscation
en -1789, et dès lors on lui répondrait que si l'alié-
nation des biens du plergé au profit de la nation
est un vol, les acquéreurs sont des complices et
leurs titres des propriétés illégitimes.
Sans doute on a lais'sé dormir longtemps les prin
cipes de 1789 et dans la constitution de cette épo
que et dans la nötre; mais depnis 1847, c'est-a-dire
depuis le jour oil M. Frère-Orban a pris la parole
pour la première foisdevant notre Chambre, leparti
catholique sait, n'cn pas douter, quel est a eet
égard le but, quo poursuit l'opinion libérale.
En 1789, disait M. Frère-Orban, trois choses
essentielies qui étaient dansles mains du clergé,
ont été eonflées a la garde de l'autorité civile
c'est le temporel du culte, c'cst ('instruction, c'est
la bienfaisance publique.
A cette époque, le parti catholique niait audacieu-
sement, comme aujourd'hui, le droit du pouvoir ci
vil sur les biens affectés au culte. Mais le temps est
venu oü il faudra bien qu'il se résigrie a voir abolir
définitivement les priviléges du clergé.
Nous n'insisteronspas en ce moment sur l'ensei-
gnementavec un homme aussi intelligent et aussi
déterminé queM. Alp. Yandenpeereboomau départe
ment, de l'intérieur, graces aux mesuresque le gou
vernement est résolu de prendre, nous ne devons
pas désespérer de voir séculariser eomplètement
l'enseignëment. Reste la bienfaisance publique que
le ministère de 1857 a plus ou m'oins sécularisée,
et voici, a ce sujet, quelle sont les dispositions, ac-
tuelles du gouvernement Ce qu'il vous faut, di
sait M. Frére-Orban a la droite, ie -14 février der
nier, ce sont des fondations administrées exclu-
sivement par vous, par les congregations, par
le clergé. Vous dites que vous voulez le controle,
que vous ne le refuserez jamais.
Eh bien, nous allons avoir l'occasion de vous
voir h l'oeuvre. line loi vous est soumise; une
autre vous sera présentée bientöt. L'une concer-
concerne les fondations faites en faveur de fen-
seignement, l'autre a pour objet les fondations
concernant le temporel des cultes.
La chambre, en effet, est saisie du premier de
ces projets de loi et la section centrale qui la exa
mine a osé dire, dans son rapport, que pour résis-
ter aux associations religieuses qui revendiquent
le droit de fonder comme une liberté,les forces de
l'Etat tout entier ne sont pas de trop.
Mais tout autres sont les dispositions de la droite
il n'est pas d'effort quelle n'ait fait, dans la séance
du 27 mars dernier, pour renvoyer la discussion du
projet aux calendesgrecques. Elle voulait s'occupec
d'abord de la concession deschemins de fer. La tac-
tique, habilemcntdéjouée par M. Frère-Orban, con-
sistaitenceci: unprojetde loi surlestravaux publics
peut se discuter indéfinimentet celaen s'occupant
non-seulement des articles qui s'y trouventmais aussi
et surtout de ceux qui ne s'y trouvent pas. De telle
sorte qu'avec un peu de bonne volonté et en invo-
quant comme prétèxte les droits de la minorité que
l'on eüt représenté.s comme méconnus, il eut étf'i
impossible a la Chambre, une fois la droite en pos
session du projet, d'aborber en temps opportun la
discussion sur les bourses deludes. Mais nous le
répétons, la tactique a été déjouée et l'examen de ce
dernier projet de loi a commencé jeudi, 16.
Nous appelons au surplus l'attention de nos lee-
teurs sur notre correspondence de Bruxelles ils y
verront que la Chambre n'aura pas de temps a per-
dre avec MM. les cléricaux.
Jia moralilé politique.
La déplorable defection de M. Schollaert a pro
duit sur tous ceux qui ont conservé quelque respect
pour la moralité politique une impression d'autant
plus pénible que M. Schollaert, par son intelligence
et par son sa voir, s'était eréé une place plus mar-
quée dans l'enseignement et au barreau. L'incons-
tance de ces hommes, qui devraient donner l'exem-
ple de la fermeté et de la droiture, jette le doute et
le découragement dans les meilleurs esprits- c'est-
la un malheur public.
Et cependant la presse cléricale, aveuglée parun.
élroit. esprit de parti, se réjouit sans retenue de sa
conquête.
Les journaux libéraux, au contraire, ont protesté
energiquement, et leurs protestations trouvent un,
puissant écho dans la conscience de tons les hom
mes d'honneur, sans distinction d'opiniön. M. Schol
laert a commis une grande faute; ses palinodies
en enlevant toute créance a la sincérité de sa loi,
politique, ont terni d'avance l'éclat des plus beaux
discours que le pays est en droit d'attendre de lui.
A ce sujet, nous lisions dernièrement dans le
Progrès d'Ypres La défection de M. Schollaert
ne saurail être trop sévèrement stigmatisée, ces
trisfes et rares individualités, qui passent en' un
tour de main d'un camp dans un autre, ces Bour-
mont politiques qui retournent leurs casaques
avec la prestesse d'un pitre forain doivent être
cloués au pilori de l'opinion.
Nous nous associons acette inexorable sentence.
Nous, tenons toutetois constater que de pareiiles
individualités sont loin detre rares; l'espèce tend
malheureusement a se multiplier de plus en plu*
sous faction de fambition insatiable qui dévore le.
siècle. Pour ne citer qu'un exemple pris au milieu"
de nous, ne vimes-nous pas dernièrement un de ces
hommes, candidat pour une fonction publique pos-
tuler et accepter ie patronage des libéraux, pendant,
qu d tendait d autre part une main traitresse aux
conservateurs et paralysait ainsi les forces libérales
dont il \enait ci tout hasard implorer le secours?
Ne le vïmes-nous pas, ffévreux et agité, pareóu-
rir pendant plusieurs jours la ville et les höfels,
L'OPIMOIM
Laissez dire, laissez-vous blamer, inaia publiez rotre pensee.
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Mtranger le port en sus. lln numéro 28 c. Prix des Annonces et des Réclames JO e. la petite ligne; corps du journal 30 centimesIe tout payable d'avance.
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