L'OPÏNION, Journal d'Ypres. flatter bassement tout le monde, sans distinction d'opinion, prêt k baiser la main, quelle quelle fut, qui luidonnerait la place tant convoitée! Ne le vi- mes-nous pas enfin, oubliant ses engagements so- lennels vis-k-vis des libéraux, accepter une nomi nation conférée par leurs adversaires? Nous ignorons pourquoi le Progrès ne s'est pas fait alors l'écho de la profonde indignation de quel- ques-uns de ses patrons et du public tout entier A notre avis,c'est avant tout chez elle que la presse locale doit veiller sur la moralité politique. II faut bien le reconnaïtre, cette moralité baisse paree que la foi s'affaiblit. Les hommes qui se sont formés, pour l'étude des grandes questions mo- dernes, un ensemble de doctrines et .de principes politiques,et dont les convictions raisonnées et pro- i'ondes vivifient le dévouement absolu aux destinées libérales dé la patrie s'aftligent de voir l'ignorance des uns, l'incurie des autres, miner la foi, pendant que l'êgoïsme et l'ambition étouffent le sentiment de la moralité Tous les efforts tentés par la grande presse libé rale pour répandre partout la lumière sur les ques tions sociales sont impuissants k lutter contre l'a- pathie du grand nombrecontre l'ignorance que nos adversaires s'acbarnent a perpétuer, en défen- dant, sous les peincs ecclésiastiques les plus sé- vères, la lecture de tout écrit qui ne porte pas le cachet de la politique cléricale la plus orthodoxe. II appartient a la presse locale de seconder ces ef forts, et nous verrions avec bonheur les associa tions libérales mettre en tête de leurs programmes la création d'un journal étendant sa spbère au-delk du cercle étroit des satisfactions personnelles. Activer ainsi la vie politique des associations, se- rait les arracher a la profonde somnolence k la- quelle elles s'abandonnent parfois jusqu'a la veille des élections, et détruire la passion immorale des intéréts individuels, ce grand levier électoral, ce puissant moyen de corruption des consciences. On verrait alors, sinon disparaitre, du moins diminuer sensiblement le nombre de ces intrigants qui se drapent dans leur prétendu libéralisme, en atten dant que leur ambition les pousse a une déshono- rante trahison; eunuques politiques dont la foi est un mystère, et dont la moralité se résumé dans la soif insatiable de parvenir par tous les moyens. Un candidal neutre! Depuis plus de quinze jours, Ton nous répète sur tous les tons un bruit que les chefs du parti clérical répandent avec un vil' empressement parmi lesélec- teurs, tant libéraux que catholiques. «Ils affirment que M. Charles Yan Reninghe se présentera aux élections de juin comme candidat neutre, et qu'il est assuré de l'appui des libéraux d'Ypres. Ce bruit témoigne tout bonnement de la crainte, fort naturelle du reste, que nos adversaires éprouvent de voir tomber dans l'arrondissement le seul et bien triste mandataire qu'ils ont conserve a la Chambre. Partout ailleurs ils relèvent la tête avec fierté, sor- tent de l'abime oil le pays les a précipités en 1857, se préparent a une lutte désespérée, et déja son- nentavec affectation le clairon de la victoire; ici, au contraire, ils sont humbles et timides. Loin de marcher au combat avec des hommes nouveaux, loin de se liguer a leurs amis pour porter le coup de grace au ministère et a la majoritéqui lesoutient, ils renoncent a leur dernier candidat et le poussent, comme un transfuge, dans le camp de leurs adver saires; mettant en poche leur drapeau suranné, ils tendent eux-mêmes la main a ces libéraux tant dé- criés ailleurs, et avouent hautement leur alliance avec les hommes qui combattent aux cötés de M. Frère-Orban. Et cependant ils ne peuvent pas avoir oublié l'hu- miliant échec de M. Jules Malou en 1859. Alors ils juraient do vénger leur défaite par le renversement du dernier des libéraux/ Aujourd'hui, muets comme des statues, ils cachent leur bonte et leur haine sous les gracieux sourires qu'ils prodi- guentaux plus détestésde leurs ennemis politiques. Autrefois ardents k toutesles luttes, s'appuyant sur une presse infatigable,'ils trouvaient des candidats pour toutes les places; aujourd'hui, sanshommes comme sans organe, vaincus et découragés, ils mettent leurs dernières espérances dans la réusite de quelque pieuse surprise. Oui, disons-le bien liaut, leurs paroles de 1857, n'étaient que des fan- faronnades; hautains et menagants après la défaite, les voilk résignés et tremblants au moment du combat. k U est done convenuque M. Van Reninghe sepré- sentera comme candidat neutre. L'histoire contem poraine parle de cléricaux déguisés sous les pseu- donymes les plus variés; nous connaissons des unionistes, des indépendants, des libéraux modé- rés, etc. Affectant un faux air de libéralisme, tous expliquent la nécessité de leur apparition par les plus séduisantes considérationsmais bientót, par leurs votes, tous sont inféodés, k la politique du clergé qui les pousse k la Chambre. Déja le pavs les connait et leur a voué le mépris qui revient ae droit k l'imposture. M. Van Reninghe ne pouvait done pas reprendre le masque troué de toutes partsses amis ont dé- couvert, exprès pour lui, quelque chose de plus nouveau, de plus grand, de plus pittoresque, en un mot, de plus digne de leur héros II sera neutre Electeurs entendez-vous N'allez done pas rechercher quelle est son opi nion sur l'interventionu du clergé k titre d'autorité dans l'instruction publique a tous les degrés, ni ce qu'il pense de l'administration de la bienfaisance publique par les congregations religieuses. Ne vous inquiétez pas de ses principes sur la main-morte - ecclésiastique, sur la chasse aux liéritages au moyen des novices, sur Ie privilége réclamé en ma- tière d'impöt par les couvents-manufactures. Sur toutes ces questions vitales, M. Van Reninghe dé- daigne de former sa convictionil est neutre Avouons que M. Van Reninghe donne le change k l'arrondissement. Reportons-nous nos' souvenirs vers les discus sions que ces grandes questions ont soulevéesdans la Chambre, nous voyons le député clérical obser ver la plus stricte neutralité. II est neutre quand il s'agit des intéréts matériels de l'arrondissement et- que les questions les plus importantes sont en jeu il est encore et toujours neutre lorsque quelque électeur réclame son intervention ou son appuipour lui-même ou pour ses amis. Jamais M. Charles Van Reninghe n'a abandonné la rigoureuse réserve que lui impose sa neutralité. Aussisa constance lui a-t-elle valu déja plus d'une palme. Mais nous dirons a ses amis que la défroque pré- tendümentneuve dont ils couvrent leur homme ne saurait le déguiser jusqu'a le rendre méconnaissa- ble, et nous ne craignons pas d'être contredit par qui que ce soit en affirmant que, s'ils comptent sur le concours des libéraux d'Ypres, ils s'exposent aux plus amères déceptions. Du reste, nous explique- rons a ce sujet toute notre pensée dans un prochain numéro. L'article qui précède était sous presse, lorsque nous regümes communication des 'renseignements suivants adressés a un journal de Mons. Nous les reproduisons in extenso en les accompagnant des reflexions du Journal de Bruges. Un nouveau journal de Mons, YOrgane, publie des nouvelles électorales de. Rrugesetde la Flandreocci dentale qui, bien qu'unpeu exagérées au fond, n'en sont pas moins vraies sur plusieurspoints. Nousdevons avouer,avec lecorrespondantdujournalmontois,qu'il y a ici un peu d'apathie et que l'on ne paraitpas assez préoccupé de parer les coups de Jarnac qu'un parti qui ne s'endort jamaispourrait porter au libéra lisme au jour du combat; mais nous devons dire que cette sécurité, qui pouvait être dangereuse a son palliatif, son correctif même, dans Fexcellence de l'esprit public, qui est dans toute la province et a Rruges surtout, éminemment libéral, ce qui n'em- pêche pas que l'on doit se tenir sur ses gardes, car le parti clérical,veille, et si au triomphe de mauvais aloi qu'il rêve a Anvers, il pouvait ajouter, par sur prise, quelques gains partiels, il se croirait bien prés de reconquérir le pouvoir, et, ne le tint-il qu'un instant, ce serait assez pour détruire beau- coup de bien et faire beaucoup de mal. Une étincelle suffit pour détruire une récolte péniblement amas- sée et affamer les populations. Veillons done au feu, l'étincelle est sous la cendre. Voici ce que dit le correspondant de YOrgane de Mons J'ai regu, d'une source bien informée, une let- tre de Rruges, qui me prouve que dans la province de la Flandre-occidentale la lutte sera bien vive. A Bruges les cléricaux travaillent sous terre avec une activité inouïe. Les libéraux habitués au triomphe, sommeillent et ne se réveilleront sans doute que lorsqu'ils s'apercevront de la certitude du naufrage, s'ils y trouvent eucore leur planche de salut, leurs forces seront bien affaiblies. On reproche au parti libéral de n'avoir k Bruges, ville flamande par excel lence, aucun organe flamand qui défende sa cause et qu'il ne songe pas a en fonder un en ce moment déja extréme. Les cléricaux ne feront pas de quar- tier s'ils triomphent, si la majorité leur est acquise au Parlement; on comprend qu'ils s'empresseront de destituer les fonctionnaires libéraux. Déja ils osent désigner un successeur au gouverneur M. Vrambout. «Les catholiques, comme de coutume, n'ont pas encore ouvertement proclamé des candidats k op- poser a MM. Devaux, de Vrière et Deridder. On parle de MM. de Tilleghem-Deman (1), ex-démo- crate-colonel-libéral, De Cock, candidat perpétuel qui ne se fatigue pas, mais dont on est toujours fa- tigué. Enfin on prononce le nom d'un troisième candidat, mais je ne veux pas vous le nommer tel- lement il prête a rire, tellement il me parait impos sible. AYpres on s'apprête k livrer une batailleacharnée. On veut coüte que coüte renverser M. Vandenpee- reboom, ministre de l'intérieur et M. de Florisonne. On leur opposera deux hommes élevés dans des bénitiers M. le vicomte du Pare, plutöt Frangais que Beige comme l'indique son nom, et M. De Necker, grand propriétaire que l'on ne connait que par ses propriétés. «A Dixmude, enfer d'opposition,M.le chevalierde Coninck de Merckem se porte candidat contre M. de Breyne. Ce nouveau venu sur le terrain poli tique jouit d'une énorme influence de fortune; j'ose- rais presque dire que sous ce rapport il est encore un dernier débrisdes anciens seigneurs. Est-il libé ral? On ne le sait pas. J'en doute d'autant plus que iafamille Van Woumen dont le chef est séna- teur clérical, déploie dès a présent tous les moyens en son pouvoir en faveur de M. de Coninck qui se dira sans doute indépendant, comme tous ceux qui, pour parvenir, veulent dépendre de tout et de rien. Qu aux prochaines luttes le libéralisme affirme done sa virilité par le choix decandidatscarréments dévoués au progrès et que les vieux surtout ne fassent pas fi des jeunesC'est la jeunesse qui re- trempe les forces du parti, ce sont les endormeurs qui le perdent. Nulle transaction honteuse avec les adhérents du passé, pas d'unionistes ou d'indépen- dants, mais guerre ouverte et acharnée k tous ceux qui ne sont pas avec nous! Dans la séance du 25 mars, fut présentée k la Chambre l'analyse d'une pétition par laquelle les membres du conseil communal d'Ypres demandent que le projet de loi relatif a la concession de che- mins de fer comprenne 4° une ligne d'Armentières k Ostende par Warneton, Messines, Ypres, Langhe- marek, Staden, Thourout et Ghistelles; 2° une ligne reliant Courtrai a Denderleeuw, et Poperinghe k Haezebrouck. M. de Florisonne, en demandant le renvoi de la pétition a la section centrale, et en exposant l'im- rnense importance que ces projets présentent pour l'arrondissement, a prouvé une fois de plus que dans toutes les circonstances il se trouve k son poste. et qu'il sait défendre avec zèle les intéréts de ses mandataires. Nous regrettons, sans en être très-étonnés ce pendant, que M. Van Reninghe ne retrouve pas la parole, alors même qu'il s'agisse d'une question oil la ville de Poperinghe est tout spécialement inté- ressée. Correspondence particuliere de L'ÖPIMON. ■■ïimgm"! Bruxelles, le 24 avril.r Je crois pouvoir vou3 annoncer avec quelque certitude, que les Eégociatiou3 relatives a la capitalisation du péage de l'Escaut sont sur le point a'abontir a une heureuse solution, et que notre gouvernement n'a pas perdu l'espoir de proeiamer l'affranchisee- ment de l'Escaut, avant la cloture de la session légialative, Vous u'ignorez pas sans doute, Mocsieur, quelle est l'impor- tsnee de cette affaire, d'abord pour le trésor, qui sera dégrevé d'une charge annuelle qui s'élève actuellement- prés de francs 2,600,000; ensuiie pour la ville d'Auvers qui verra abolirles droits de tonnage.de pilotage et de quai, qui gênent et entravent même le mouvement de navigation dont le port de notre métro- pole comiuerciale est le centre. Ils vont revenir ces temps fortu nes que la Convention nationale avait promis au port d'Anrers et qui ont eu une si courte durée. Le général Labourdonnaye fit son entree Anvers le 19 novembre 1792,et le 25 du même mois, il fit publier un déeret rendu par ia Convention nationale, qui proclamait la liberté absolue de l'Escaut. La Convention disait, dans les coasidérants de son décret que les fleuves.sont la pro- priété commune oe tousles pays qu'arrosent leurs eaux; qu'use nation ne saurait, sans injustice, prétendre oonserver seule la navigation d'un fleuve, ni empêclier les peuples qui babitent dans l'intérieur du pays, de jonir des mêinrs avactageB; qu'un tel droit était un reste des servitudes féodale-, ou tout au moins unemouoc atie odieuse que la violence seule apu établir, que la faiblesseet l'iinpuissance ont pu seules consacrer; que par consé quent ee droit peut être résigné a chaque instant, malgrê toutes les (1) Le correspondant s'est trompé, c'est de M. de Tilleghem-Goethaels qu'il est question. (Note de la Redaction.)

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L’Opinion (1863-1873) | 1863 | | pagina 2