JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. YPRES, Dimancbe, PREMIÈRE AXXÉE. 20 septembre 18W. Le Journal paralt le dimanche de chaque semaine. Laissez dire, laissez-vous bldmer, niais publiez votre pensée. La liberté de la mort. Mgr Matou avait inventé la liberté de la charity M. Dechamps avait inventé la liberté dé lb chaire; M. Dumortier, lTqyenteur des massacres do Tour- nai, de Rambler, da cabinet noir de M. Hochstoyn et de son fameux discours en rëponse a M.Guillery, M. Dumortier se devait a lui-même, a sa position dans let parti catholique, d'inventer, lui aussi, Tune ou I 'autre liberté retour de Rome. ü'est une chose connue que la gaieté des fos- soyeurs. M. Dumortier, l'homme le plus jovial dela Chambre, inventa la liberté dela mort. Lc jour oil rlionorable député de Routers vint, pour la première fois devant la Chambre, réclamer en faveur des catholiques beiges la libertédela mort, le-grave M. Devaux fut pris dun fou-rireet dut quit ter la place. M. Dumor'der aime les suceès d'hilarité. Ge jour- la, il ne inanqua rien a son triomphe. M. Coomans en fut privé de sommeil pendant toute une semaine. Jalousie de métier. Depuis, la liberté de la mort a fait du chemin. De la tribune parlementaire, la question est descen- duedans la presse et,grace aux journaux, tout-puis* sants sur les imbéciles, elle est devenue une grosse affaire. Ecoutez plutöt le Bieti public, le Journal de Bruxelles et toute la sainte séquelle du parti ultra- montain l'inhumation de M. Callier dans la partie bénite du cimetière de Gand, disent-ils, est une at- teinte grave a la liberté des cultes, un véritable scandalè; M. Callier, libre penseur, devait être en- ■térré dans la partie réservée aux non-catholiques et non parmi nos morts qui dorment aux pieds de cette croix que le défunt avait reniée. Sa presence, au milieu de notre champ de repos, a nous catholi ques, est une souillure. Le coin des réprouvés était assez bon pour lui. On ne discute pas de pareilles turpitudes, mais il faut, cliaque fois qu'elles se produisent, les étaler au jour, pour la honte du parti qui en accepte la responsabilité et l'édification des honnêtes gens de toutes les opinions. Ah, messieurs du congres de Malines, vous n etes pas, dites-vous, des hommes de parti; l'amour de Dieu et du prochain, la charité envers les amis et les ennemis, tel est votre pre mier mobile,et vous poursuivezvos adversaires jus- qus dans la tombe, et la nxajesté de la mort même n'arrête pas votre haine Patience, messieurs, la lumière se fait sur vous plus que vous ne pensez.Le peuple, que vous n'avez que trop longtemps abusé de vos pieux mensonges, commence a vous connai- tre et bientöt il vous connaitra tout a fait. Nous y taclions de notre mieux, mais il faut convenir, pour être juste, que vous nous facilitez singulièrement la besogne. L'enseignement primaire. Le Journal de Charleroi annonce qu'une circu laire vient d'etre adresséc. par M. le ministre de l'intérieur a tous les instituteurs du royaume dans le but de s'enquérir des résultats obtenus jusqu'a eejour par l'applieation de la loi de 1842 sur l'en seignement primaire. Si cette demande.de renseignements signiüc que le ministère a l'io.tention de provoquer la..revision du-régime detestable sous lequel l'enseignement public a véen depuis plus de vingt ans, nous Fen félicitons hautement. La question de l'enseignement primaire est la pierre angulaire du libéralisme. Selon quelle sera résolue dans le sens de la vraie liberté ou dans le sens des pretentions émises par le clergé, le libé ralisme marchera d'un pas rapide a la conquête des esprits ou bien s'épuisefb en efforts inutiles. Le prêtre dans lecole, la est la racine dmnaL L'instituteur ne doit connaitre qu'un maitre, et ce maitre, ce n'est pas le prêtre, a qui la Constitution ne reconnait aucune qualité particulière pour s'im- niiscer dans Fenseigllemerlt donné aux lrais de l'Etat. Etrange inconsequencenous disputons au clergé Fempire des ames, nous nous étonnons de l'ascen- dant qu'il exeröe sur les générations qui s'élèvent et nousne nous apercevons pas que eet ascendant, c'est nous-mêmes qui l'avons édiflé de nos propres mains Nous ouvrons nos écoles au clergé, nous lui consé- donsle monopoled'enseigner la morale aux enfants, confessant ainsi notre impuissance a l'enseigner nous-mêmes, et plus tard, quand ces enfants sont devenus des hommes, nous nous étonnons de les trouyer rebelles il notre Voix et soumis aveuglément a la voix de ceux a qui nous avons abandonné le soin de leur educationG'est p'ar trop absurde. Qu'aurions-nous a répondre, nous le demandons, a 1'électeur qui nous diraitvous voulez que je vote pour les libéraux, mais le prêtre que vous m'avez donné pour professeur de morale m'assure que ce serait mal faire. Vous me dites que ce prê tre est un imposteur, mais alors pourquoi m'avoir livré a lui? Que dois-je croire, du prêtre dont vous m'avez ordonné de vénérer la parole, a qui vous avez remis le soin de m'apprendre mes devoirs d'homme et de citoyen, ou de vous, qui ne trouvez a vous défendre qu'en taxant de mensonge la parole de celui-la même que vous m'avez donné pour guide La loi de 1842 est sortie d'une transaction.—Soit; mais nous savons aujourd'hui ce que valent les transactions avec le parti clerical. Si la loi nouvelle doit recommencer l'expériencesi le prêtre, exclu de lecole a titre d'autorité, doit y rentrer a Litre officieux, mieux vaut encore le régime actuel. Le mal, pour être plus grand, n'en sera que plus sen sible et la nécessité d'une réforme radicale plus promptement comprise. La resistance. L'asservissement moral peut se comparer a la mort produite par le froid. Quand la force de resistance succombe, l'engourdissement fait des progrès rapi- desaux premières tortures succède i'insensibilité et il n'est plus de salutpour la victime que dans une reaction énergique. Nous, défenseurs de la raison et ennemis du joug clérical, qui nevoulons pasmourir ainsi, qui ne vou- lons pas assister, impassibles, a Fagonie d'un peu ple libre, nous dirons la vérité, pour qu'elle soit l'aiguillon qui réveille et qui stimule ceux qui dor ment d'un sommeil dangereux. Jusqu'icü'on a fondéaes crèches, des écoles gar- diennes, on a érigé des établissements d'enseigne- ment gratuit; on a, en un mot, favorisé le dévelop- pement moral de l'enfant, préparé la culture de son intelligence; puis, quand le champ était défriché et n'attendait plus que la semence, on Fa abandonné a nos ennemis,qui, toujours actifs, yont fait fructifier la graine du fanatisme et de l'intolérance. Its récol- tent maintenant d'abondantes moissons. Le mal accompli, qu'avons-nous fait pour le com- battre? Tandis que la grande fraction de notre presse frangaise défendait le principe du libre examen, la presse flamande est reslée presque tout entière li- vrée au parti catholique et cette influence funeste a envahi les Flandres, jadis si indépendantes et si fières de leurs franchises. Les associations libérales ont agi, il est vrai, mais encore dans dn cercle restreint; l'arbre n'apas poussé d'assez nombreux rameaux et les localités ru rales sont,- en grand nombre, restées en dehors de toute action. Aujourd'hui les journaux progres- sistes ysontl'objet desanathèmesdes curés etl'effroi des paroissiens, tandis que les injures des feuilles cléricales Sont lues sans dégout, presqu'avec res pect, et considérées comme de justes remonlrances aux pécheurs endurcis. L'audace du clergé croit en raison de la sournis- eiöri et de la docilité des fidèles. La cbaire de vérité s'est tranSfbrmée en tribune politique a la parole du Christ a succédé la parole du jésuite, a l'amour du prochain l'amour de la domination, et e'est a peine si un voile semble nécessaire pour dissiper eet avide égoïsme. Cette funeste situation, e'est a nous, libéraux, de la transformer. Ne craignons pas d'élever cbaire contre chaire, et, puisque la vérité et la morale ne sont plus en süreté dans les temples,unissons-nous pour leur ouvrir d'autres asilcs. Que notre voix, que la voix du libre examen s'élève partout oü s'é- lève oelle de nos adversaires, non pour détruire les convictions religieusesmais au contraire pour en- seignerle respect de la liberté de conscience et du libre arbitre.Elle aura de 1'écho, car un peuple libre est toujours avide de paroles généreuses. En écou- tant la parole du progrès, le peuple oubliera ses in- justes préventions, il s'habituera a ne voir en nous que des amis et, par ces liaisons fraternelles, se ra- nimera l'esprit d'indépendance morale et intellec- tuelle qui a élevé si haut nos vieilles communes fla- mandes. Ecrivains flamands et frangais, n'oublions pas que la presse n'est qu'une arme dangereuse et déshonorante si elle ne fait pas germer de nobles sentiments, si elle ne sert pas a éciairerles esprits, mais a les égarer. Que nos écrits, répandus dans toutes les classes de la société, y portent partout la lumière et rappellent au peuple beige que la reli- fion de ses pères n'était pas l'asservissement a la omination cléricale, mais l'amour de Dieu, de Ia familie et du pays. Education de la lemme a Poperinghe. On nous écrit de Poperinghe les excellentes re flexions qui suivent, et que nous recommandons h la sérieuse attention de ceux qui se chargent de 1 education des filles. L'administration de la ville de Poperinghe et les pères de familie ne perdront rien non plus a peser mürement les frappantes vérités signalées par notre correspondant. Monsieur le rédacteur, Dans un de vos derniers numéros vous consacriez quelques lignes ti la question la plus importante qu'il soit possible de rencontrer parmi toutes celles qui couvrent le vaste champ du progrès L'édueation de la femme. Après avoir par de bonnes raisons écarté les futiles prétextes invoqués en faveur de l'ignorance de la femme, votre estimable journal réclame pour elle, au lieu d'un semblant d'éducation, un enseignement large basé sur la sincérité historique, un en- seignement qui élève la femme au niveau moral auquel ses fa- cultés rappellent. Puisse votre appel trouver un écho dans toutes les families, et,comme un rayon de soleil,se répandre par le monde entier! A Poperinghe, 0(1 j'ai fixé ma modeste retraite, les aspirations des parents sont heaucoup moins élevées. Tous leurs vceux se- raient accomplis si tout au moins il existait ti Poperinghe une école oü leurs fdles pussent recevoir assez d'instruction pour suffire au róle plus que modeste qu'on leur réserve dans la fa milie. L'édueation des filles est ici exelusivement l'ceuvre des eou- vents. Nous jouissons done sans restriction de la liberté, défi- nie parle Congrès de Malines, et cette liberté,qui remonte aux temps les plus reeulés,ne fut jamais contrariée par le voisinage d'un établissement laïque. Dans des conditions si exceptionnei- lement favorables la liberté doit avoir produit d'exeellents ré sultats, et l'enseignement doit être porté h un haut degré de perfection D'autant plus que les couvents de Poperinghe, par leur situation favorable, sont appelés répandre Pinstructioii des filles parmi une population de 25 30 mille habitants. Cir- constance qui augmente, avec les avantages pécuniaire? des couvents, leurs devoirs vis-k-vie des families. ffcnjjfj5^\,e0S au ,?urea" du {,ournaI rlmz Fklix Tambin, imprimeur-libraire, rue tie Dixmude, no 33, eta Bruxelles Chez l'dditeur.— Prix d'abonnementpour la Belgique 8 fr. par an4 fr. 30 c. par semestrepour 20 c',~ Pri? d,es Anno"ceS et des Réclames10 c. la petite ligne; corps du journal SOcentimesle tout payable d'avance. On traite a forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres ou envois d'argent doivent être adressés fiunco au bureau du journal. YPRES, SO septembre 1863. Poperinghe, le 43 septembre 1863.

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L’Opinion (1863-1873) | 1863 | | pagina 1