L'OPINION, Journal d'Ypres. ne s'agit ici que des élections communales,et dans cette appli cation restreinte il ne peut donner lieu a aueun inconvénient sérieux. En résumé, monsieur, mon opinion et celle de mes amis est qu'une assemble composée aux trois quarts de fonctionnaires plus ou moins dépendant de l'Hötel-de-Ville ne présente pas des garanties d'indépendance et d'impartialité suffisantes peur qu'on puisse, sans danger, s'en remettre exclusivemerit il elle du soin de désigner les candidate pour le conseil communal et que, dans les circonstances graves oü nous sommes, h la veiile d'une iutte qui décidera peut-être du sort du ministère, il faut écarter jusqu'au soupqon de coterie et de camaraderie, si l'on veut assurer Ie triomphe de la cause libérale par le con cours énergique et sans réserve de tous les amis de !a li- berté. Recevez, M. le rédacteur, etc. la tactipe cléricale, condamiiéB par I. Kersten. ïl vient de paraitre a Bruxelles une brochure inti- tulée les vrais et les faux lïbêraux. Get ëprit témoigne de l'extrême embarras dans lequel se trou- vent les apótres de la doctrine retrograde, si vigou- reusement prêchée au congrès de Malines. Dans cette sainte reunion il s'est troüvé des ora- teurs aveuglés par le fanatisme, qui firent entendre des lamentations dignes de Jérémie sur la tombe imaginaire, solennellement creusée pour la circon- stance a toutes nos liberies publiques. M. de Ger- lache et M. B. Dumortier', lamebrisée de douleur, montrèrent a leur auditoire épouvanté la liberté de la charité, la liberté de conscience, la liberté dis sociation expirantes au fond de la fosse; et pour sauverla socïété ils évoquèrent les ómbres maudites de la main-morte et de rancien-couvent. Le triste sujet n'était pas nouveau. Tous les di- manches il est développé aux électeurs de nos cam pagnes par les plus obscurs de nos vieux curés, et parmi les membres du pieux congrès il s'est ren contré plus d'un petit vicaire qui ne croyait enten dre que la paraphraseYle ses sermons. II faut cependant le reconnaitre, la guerre entre- prise par le clergé et ses instruments au nom de la religion catholique .contre les principes fondamen- taux de la Constitution beige produit une situation plus deplorable encore pour la religion elle-même que pour le repos du pays. Grace a la politique réactionnaire' prêchée avec succès dans les campagnes, le clergé a créé entre la ville qui étudie, qui pense, qui veut progresser, et la campagne ignorante,, pour laquelle il pense lui- même,une profonde antipathie d'idées. D'un cöté les idéés modernes, representees par les populations actives, industrielles, intelligentes, marehant a la conquête de l'avenir de l'autre les abus et les pri vileges d'autrefois, défendus par le clergé a la tête des populations ignorantes et arriérées s'obstinant a en traver Ia maróhe du progrès. Telle est la situa tion bien grave que la politique malinoise a faite a ia plus libre nation du monde! Cette situation, quelque dangereuse quelle puisse devenir, ne nous effraie pas, parce que nous avons foi dans le bon sens du peuple beige et dans le triomphe déflnitif des villes sur les campagnes. Nous ne craignons pas davantage que nos évê- ques, quoi qu'ils fassent, nous ramènent au passé, car,M. de Montalembert l'adit, ce passé est mort, bien mort, et nulle puissance hunlaine ne.pourra le ressusciter. Mais en faisant trop voir au peuple la religion et Ia foi aux prises avec la société moderne, le clergé crée un dangereux antagonisme. En jetant dans le courant irrésistible du siècle sonautorité religieuse, il pourra barrer momentanément le passage, mais non forcer le lleuve a remonter vers sa source. Celui-ci grandira, grandira encore, jusqu'a ce que l'obstacle se brise ou disparaisse sous les Hots. Yoila le danger auquel on expose trop légèrement la religion catholique Pénétré de cette vérité, M. de Montalembert a beau conseiller a l'Eglise de tendre la main a la dé mocratie, les évêques de France ont beau engager le clergé. a s'abstenir des luttes électorales, leurvoix n'aura pas d'éclio en Belgique. Dans la lutte contre le siècle, la religion est, comme elle sera toujoursj'arme de guerre de notre clergé. t Aujourd'hui, cependant, en reprenant la lutte avec une ardeur nouvelle, il essaie de cacher son arme, pour mieux la soustraire aux coups de ses adver- saires. C'est pour cela qu'avee l'auteur de la bro chure les vfais et les faux libéraux il cherche a retirer les épithètes si justes de clerical et de ca tholique, espérantainsi faire oublier que la lutte est' engagée entre la société catholique et Ia société ci vile qui veut s'affranchir de la tutelle des évêques. Elïrayé sans doutede tout le mal déja fait a la re ligion, notre clergé, par l'orgahe de Ia brochure, semble reculer devant le triomphe dont il se croit certain. Garclons-nous, dit-il, de Vécueil contre le- quel trop de précipitation pourrait nous faire échouer. Get écueil, c'est le pouvoir. Dans l'état actuel de Vopinion et des partis, les catholiques, a litre de èatholiques et de croyantspie peuvent l'ac- cepteï a aucun'prix. Eh quoidans vos églises, dans vos confession- naux, dans les families,vous n'avez cessé d'invoquer la religion catholique, la foi de vos pères,le Christ et ses apótres contre les libéraux,les francs-magons, les suppöts de l'enfer, et aujourd'hui, que vous avez la fatuité de vous croire vainqueurs ou a peu prés, vous mettez votre drapeau religieux en poche et vous dites que les catholiques a litre de catholiques et de croyants ne peuvént accepter le pouvoir a aucun prix D'oü vient cette frayeur soudaine pour les mots que hier encore vous chantiez sur tous les tons? Précisément paree si vous veniez au pouvoir vous ne trouveriez rien a faire pour la religion catholi que; parce que vous n'auriez a prendre aucune me sure pour sauver la foi de vos pères, parce que vous n'oseriez pas rétablir 1 'ancien convent, quoi- qu'au dire de M. de Gerlache il soit devenu un be- soin socialparce qu'en un mot vous seriez la preuve vivantc de vos impostures Mais, remarquez-le bien, le mal n'est pas dans les mots de clerical ou de catholique, il est dans lefait. Vous aurez beau écrire des brochures pour vous affubier de nouveaux rioms, une nouvelle défroque ne vous rendra pas méconnaissables. Tant que l'Eglise luttera contre YEtat le mal ne fera que grandir jusqu'a ce qu'il devienne peut-être incura ble. Bien plus, qu'oi que vous fassiez, et malgré vous, les épithètes de libéraux et de catholiques se trouveront saus cesse sur vos lèvres et dans vos écritsvous ne sauriez pas vous-mêmes vous en abstenir. Telle est la conséquence inévitable de l'ceuvre que vous poursuivez en plagant la lutte politique sur le terrain de la religion. Aussi l'illustre publiciste catholique, M. Kersten, après avoir fait, dans son Journal historique et litté raire, une sévère analyse de la brochure dont nous parions, l'achève-t-il par cette cruelle raillerie S'il faut absolument,et avant tout, que les funestes et stériles querelles du clerical et du liberal aient dispara, ne serait-ilpas sage de sen occuper soi- même? Tant que nous en parierons comme nous le faisons,comment pouvons-nous espérer que les au- tres garderont le silence? Or, de quoi s'occupe V'auteur de la brochure Et s'il fallait retrancher de son écril tout ce qui tient directement ou indi- reetement a la question du clerical ou du liberal., qu'en resterait-il Les receveurs des barrières comisiiiiiaies. Les recettes et les dépenses communales sont effectuées'par un comptable chargé seul, et sous sa responsabiiité, de poursuivre la rentrée de tous les revenus de la commune et de toutes les sommes a elles dues, ainsi que d'acquitter les dépenses or- donnancées par le collége des bourgmestre et éche- vins, jusqu'a concurrence des crédits accordés. Ce comptablp est le receveur communal, que la loi du 30 mars 1836, en son. article 421, déclare seul chargé et sous sa responsabiiité d'effectuer les recettes communales. Parmi ces recettes, il faut néeessairement ranger les sommes provenant de la taxe defe barrières éta- blies sur les routes vicinales. Dès lors nous ne comprenons pas comment on ait. pu établir et qu'on maintienne dans l'arrondisse- ment d'Ypres et, croyons-nous, dans d'autres arron- dissëments de laFlandre-Occidentale,des receveurs spéciaux pour la perception dc ces sommes. ïl y a la évidemment une illégalité, illégalité toute au détri ment des caisses communales; car ces receveurs spéciaux ne versent le produit pergu qu'après, bien entendu, en avoir défalqué leur pour cent. Et il est a notre connaissance que certain receveur touche annueltement des émoluments de 1,200 a 1,300 fr. Évidemment, la plus grande partie de ces bénéflees est prise sur les revenus des communes. Ne serait-il pas plus profitable,plus facile, plus lo- gique et en même temps pluslégal,de laisser toucher les sommes provenant des barrières établies sur les routes vicinales par les fonctionnaires que la loi declare seuls chargés des recettes communales? Cer- taiuement: car d'abord les fermiers de barrières, en versant directement les droits pergus entre les mains du receveur de la commune, éviteraient un voyage, souvent assez long et dispendieux, au chef- lieu d'arrondissement; ensuite, on enlèverait.a l'ad- ministration un rouage inutile qu'il faut faire dispa- raitre, parce que la loi et l'intérêt public l'exigent. La place anormale de receveur des barrières doit être supprimée, et pour cette suppression il faut mettre de cöté toute question de personnalité. CoiTcspomlance particulière de L'OPINION. La presse libérale 11e semble plus avoir, en ce moment, qu'une seule préoccupation. L'arrêt rendu par la cour de Bruxelles dans l'aflaire Keym, après le jugement du tribunal de Charleroi dans l'affaire du journal de cette ville, un nouveau jugement qui nous vient de Termonde, celui-ci, et qui a óté rendu contre un journal catholique ilamand, le Belg, sont les seuls sujets de la polémique. Une élection législative doit avoir lieu èt Nivelles le 6 de ce mois, et il s'agit de savoir si le mi nistère conservera les six voix de majorité qui lui restent ac- quises ou s'il perdra une voix qui, par sou déplacement, abais- seraitla majorité h quatre voix. Qui s'en préoccupe?Le mi nistère seui, si j'en juge par les journaux qui soutiennent la candidature de B3. Le Hardy de Beaulieu. En effet, 1 'Indépendance a bien exposé les mérites de ce candidal libéral, mais comme par acquit de conscience sim- plement et sans engager de polémique au sujet de la candida ture de M. de Meeüs.qui, par parenthèse, vient d'être autorisé it porter les insignes de l'Ordre de Pie. Quels sont les autres journaux libéraux qui s'oecupent de M. Le Hardy de Beaulieu pour le défendrc contre les attaques dont sa candidature est l'objet dans la presse cléricale Les deux frères sia- mois qui sont les organes accrédités du cabinet l'Ech» du Parlement et le Journal de Liége. Pourquoi done, comme ii l'approche de toute élection importante, la presse libérale ne se montre-t-elle pas unanime sur le terrain de la lutte pour triompher des coups de nos adversaires C'est qu'il semblerait que le gouvernement se montre insou- cieux des atteintes portóes coup sur coup h la liberté de la presse par nos cours et tribunaux. Tous les organes indépen- dants du libéralisme ont adhéré successivement ii la souscription ouverte par Xlndépendance pour mener en cassation l'affaire Keym,et uu grand nombre de partieuliers,qui comprennent que la liberté de la presse est la suprème garantie de toutes les au tres, sefontjournollement inserire pour payer leur quote-part dans les frais du pourvoi. Or il y a prés de quinze jours que !a souscription est ouverte, et ce n'est que d'hier que 1 Echo du Parlement, en rendant compte d'une brochure que vient de publier M. l'avocai Adnet, a fait pressentir l'opinion du ministère sur l'arrêt de la cour d'appel. Mais ce journal avait été en quelque sorte mis en deraeure de se prononcer, et Ton a remarqué que non-seulement il n'adhérait pas h la sous cription de la presse, mais qu'il n'en disait mot. Pour lui l'af faire importante parait être l'élection de Nivellespour nous tous, au contraire, il s'agit de savoir avant tout si la cour de cassation nous confirmera le plusimportantdenos droits cons- titutionnels. Voilk pourquoi l'on s'accupe si peu du ministère: c'est pour no point perdre de vue un intérêt d'ordre supérieur h tous les autres. Je vous ai parlé dans le temps de l'idée qu'on avait h Bruxelles d'organiser un congrès de journalistes. C'était h Tissue do l'af faire du Journal de Charleroi. On se demandait déja alors si le moment n'était pas venu d'adresser uue pétition k la Légis- lature pour la mettre en demeure de se prononcer sur la ques tion de compétence des tribunaux civils pour juger des délits de presse. li me parait assez douteux que cette idéé de con grès puisse se réaliser, car MM. les journalistes catholiques rie voudraient point sans doute se commettre avec nous, et la preuve c'est qu'h l'heure même oü, dans un mesquin intérêt de boutique, ces sacristaius et ces bedauds approuvent l'ar rêt rendu dans l'affaire Keym, nous tous, libéraux, nous nous soulevons comme un seul homme pour prendre la dé- fense du Belg catholique. Mais le noyau d'une association de journalistes est jeté et nous avons évidemment pour nous l'opinion publique tout ministère et toute majorité parlemen taire qui ne prendraient point h cceur la défense de nos droits les plus sacrés seraient un ministère sans vie et une majorité sans puissance. Les observations que j'ai faites dans ce journal au sujet de l'armement de la garde civique et du tir national sont naïve- ment confirmées par VEcho du Parlement, qui a avoué que le nombre total des tireurs ne dépassera pas, cette année, les deux tiers du chiffre de l'année dernière. II met un peu ce fS- cheux résultat sur le compte de la pluie, mais il ajoute que l'armement tardif et insuffisant de la garde civique en est la principale cause. Les préparatifs des élections communales fixées au 27 de ce mois sembient annoncer qu'elles pourraient bien se faire, dans certains grands centres de population, sur le terrain politique. La lutte sera certainement très-animée h Bruges,h Gand, Anvers et h Namur. A Bruxelles 1 'Association libérale serait disposée, dans un but de conciliation, ne pas combattre la candidature de M. Lacroix, qu'elle a eu pour adversaire acharné aux dér- nières élections législatives; mais il parattrait que beaucoup d'électeurs sont peu disposés a tenir compte de sa bonne vo- lonté h l'association, et qu'ils marcheront contre elle. Une réunion nombreuse a eu lieu hier au local du Nouveau- Monde, dans un des quartiers les plus populeux de la capitals, dans le but de délibérer sur le araetère qu'il conviendrait d'assigner aux prochaines élections. L'avis émis par un des membres du bureau provisoire, qu'il était urgent de poser sur le terrain de la lutte un programme politique, a été adopté k l'unanimité. Une seconde réunion aura lieu samedi, 3 octobre courant, au même local. Voici le programme adopté Emancipation progressive et graduelle de la commune; révision de la loi de '1842 sur l'in- struetion primaire dans le sens du voeu formulé par les con- seils provinciaux de Liége et de Brabantl'instruction obliga toire par les moyens indirects et tout en respeetant la liberté du père de familiesoumission des conseils de fabrique un -contróle sérieux réglé par une loisécularisaiion des cirae- tières décrétée par une loisystème de votation par ordre al- phabétique; extension du suffrage au moins aux capacités, la Constitution ne prescrivant un minimum de eens que pour les élections générales. Toutes ces questions ont été considérées comme touehant h des intéréts essentiellement comtnunaux et devant être mises h l'ordre du jour des prochaines élections. On a été unanimement d'avis que lameilleurefaqonde répon- dre au défi du congrès de Malines était de revendiquer haute- ment les droits de l'autorité civile en posant l'élection commu nale sur ce terrain. L'Association libérale, qui voudrait bien ne point se mêier de politique, afin de faire les élections sans bruit, acceptera- Bruxelles, le 2 octobre 1863.

HISTORISCHE KRANTEN

L’Opinion (1863-1873) | 1863 | | pagina 2