L'OPINION, Journal d'Vpres.
quilibriste qui,un pied dans un camp,unpied dans l'au-
tre,fait le grand écart par dessus les principes. Au-
jourd'hui,quela lutte est plus vive et la séparation plus
tranchée que jamais, il est indispensable de pren
dre place résolument a droite ou a gauche et l'on ne
saurait être en meme temps pour le Pape et son
pouvoir temporel d'un cöté, pour les libertés et les
institutions modernes de l'autre. C'est avec de sem-
blables compositions de conscience qu'un parti s'an-
nihile et notre patriotique cité accueillera toujours
avec froideur des choix dans lesquels elle verra bril-
ler autre, chose que la satisfaction des intéréts bien
entendus, d'un libéralisme sincèrement progressif.
Libre encore une fois au Progrès de se réjouir.
Pour nous, nous ne cesserons de déplorer la pentc
latale sur laquelle une politique étroite et mesquine
entraine Ie parti libéral dans notre arrondissement.
Les renseignemcnts que nous avions obtenus sur
la situation electorale deMessines et que nous avons
exposés dans notre chronique de dimanche dernier
nous out valu un démenti adressé au Progrès d'Ypres.
Le correspondant pense que de semblablesnouvelles
no tendent qua jeter la division entre les habitants
de sa paisible localité. II ajoute que tous les candi-
dats appartenaient a l'opinion libérale et le lecteur
peut voir par le résultat du scrutin qu'ils out obtenu
la presqu'unanimité des suffrages.
Félicitons de suite Messines du caractère paisible
de ses habitants. Nous nous ferions un crime de
troubler, au moyen de quolques renseignenients
erronés, cette tranquillité profonde qui soit dit en
passant parait ne pas résister a la moindre se-
cousse.
Pour calmer la frayeur du correspondant messi-
nois, nous accepterons pour un instant que nos ren
seignenients étaient de tout point inexacts, que ni
M. Goubau, ni M. Butaye, ni même le clergé, n'ont
songé un seul instant a combattre la liste libérale,
ni k rompre l'accord parfait établi entre toutes les
personnalités de l'endroit. Allons plus loin encore
et supposonstoujours dans l'intérêt de la tranquil
lité que M. le curé pense connne M. Goubau,
M. Goubau comme'M. Butaye, et M. Butaye comme
les nouveaux candidats au conseil communal. Certes
il nous est impossible de pousser plus loin l'horreur
de la division?... Pourvu que cela ne nousvaille pas
un nouveau démenti
Eh bien, dans cette hypothèse, qui nous parait
être celle posée par Ie correspondant du Progrès,
comment l'inexactitude de nos renseignemcnts au-
rait-elle jeté la division parnii des hdntants, unis
par les liens d'une aussi étroite communion d'idées?
Cela était impossible, car pour conserver la paix il
eüt sulïi M. Goubau de protester; personne n'eüt
suspecté sa sincérité ni son attachement h la tran
quillité publique. U Opinion en eüt done été pour ses
f'rais, sauf a elle a sen prendre a son correspondant!
Heureusement l'hypothèse posée est inexacte, et
pour ne pas faire injure aux convictions libérales de
nos amis politiques nous devons nous-mème donner
un démenti a notre contradieteur.
Non, cette union inaltérable et inaltérée n'existe
point a Messines, et point n'est a craindre que YOpi
nion aille jeter la division dans une paisible localité
qui ne connait pas les luttes politiques.
II serait inutile de rappeler ici "les vigoureuses
rencontres d'autrefois qui ont assuré dans le canton
le triomphe du libéralisme. Des fails plus récents
suffiront pour dessiller les yeux de notre contra
dieteur, qui sans s'en apercevoir dort tranquille sur
un volcan.
Au mois de juin le clergé de Messines a-t-il craint
de jeter la division dans la paisible localité conflée
a ses soins pastoraux?
M. Butaye, par antipathie pour un des candidats
de la liste libérale, n'a-t-il pas voté contre les libé-
raux, et M. Goubau, par sympathie pour un can-
didat do la liste cléricale, n'a-t-il pas voté pour les
cléricaux? Tous deux n'ont-ils pas pareouru les
campagnes, travaillé les électeurs, distribué des
billets k la barbe des libéraux de Messines? Ne se
sont-ils pas vantés,depuis, d'avoir procure a M. Van
Renynghe au moins les sept voix qui l'ont replace
dans son glorieux fauteuil de représentant?
D'autre part, nos amis ne mettaient-ils pas le zcle
le plus ardent k combattre les listes bigarrées de
MM. Goubau et Butaye au profit de la liste libérale?
Si tout cela est vrai et c'est incontestable
la division règne done depuis longtemps entre les
paisibles habitants de Messines,et YOpinion qui tend
h semer cette division se trouve en retard de be
sogne.
Et comment se fait-il que dans ce moment d'ar-
dente lutte, lorsque Messines participait a Tanima-
tron qui s'était emparée de l'arrondissement, notre
contradieteur n'ait point dénoncé au Progrès les tur
bulents qui jetaienl alors la division entre leurs
concitoyens? Avait-il une peur secrète qu'il n'é-
prouve pas a l'endroit de YOpitvon'!
Les événements ayant prouvé qu'h Messines il est
des hommes politiques qui se laissent flotter sans
réserve au gré de leurs sympathies et de leurs anti
pathies ipersonnefles, qu'y aurait-il de surprenant a
voir ces bommes combattre un ou plusieurs noms
portés sur une liste de candidats pour la commune?
Qu'y aurait-il d'étrange dans ce bruit répandu dans
le public, et qui nous fut transmis par une personne
digne de foi que M. Goubau, soutenu par M. Bu
taye, combattrait un ou plusieurs noms? Rien
vraiment.
L'article qui préeède était écrit lorsque nous avons
regit la lettre suivante de M. Ie notaire Butaye, que
nous nous empressons d'inséror dans nos colonnes.
La lettre de M. Butaye fee hu-me exactement les
mêmes idéés que celles émisos par le corrèspon-
dant du Progrès. Nous n'avons done pas y faire
d'autre réponse
Messines, 28 octobre 4863.
A M. Ic rédacteur du journal I'OPiNiOX, a Ypres.
Monsieur,
Je viens de lire dans YOpinion de dimanche dernier, sous le
titre Chronique electorale, les lignes suivantes, au sujet des
élections de Messines
Messines aura aussi son candidat catholique, M. Goubau,
qui, s'appuyant sur M. Butaye, notaire, attaque résolument
les candidats libéraux, MM. Bondue et Deeoninck.
Si eet article n'avait étéiu qu'h Messines, je n'aurais jamais
songé h y répondre, mais comme il pourrait avoir trouvé quel-
que créance aillours, je crois ne pouvoir mieux en faire res-
sortir toute la valeur, qu'en faisant connattre aux lecteurs de
YOpinion le résultat du scrutin de cette commune.
Électeurs inscrits, 93
Votants, 76, y comprisMM. le curé, le vicaire, le clerc d'é-
glise; M. Bondue, candidat libéral et marguillier d'église, 3 au-
tres marguilliers, Goubeau, Butaye, etc.
M. Deconinck a obtenu 73 voix.
M Bondue, marguillier, 71 voix.
M. Goubau n'a paseu une voix.
Ces fails prouvent done, a l'évidence, que l'auteur de l'arti
cle aurait mieux fait de classer Messines parmi les autres
communes dont il dit ignorer ce qui s'ypassc, comme si elles
se trouvaient en Chine; car il vaut mieux se taire que d'a^an-
cer des faits dénués de fondement et propres h amener des
divisions dans les communes et dans les families.
Vous voudrez bien, monsieur le rédacteur, faire insérer ces
quelques lignes dans le piusprochain numéro de votre journal,
et agréer l'assurance de ma parfaite considération.
On nous écrit dc Poperinghe, avec prière d'inser-
tion, la lettre suivante
Poperinghe, 27 octobre 1863.
Monsieur le rédacteur
La sainte Église soit louée et glorifiée
Figurez-vous qu'elle vient d'etre menacée dans sa séeurité
et dans ses droits les plus chers. Au dernier moment, nos li
béraux ont eu des velléités de faire une manifestation, si pas
de lutte, et un des leurs, M. Lecluyse, sur les instances de
ses amis, s'est déeidé hier b accepter la candidature. Toutes
nos dévotes ont frémi, non sans raison, car c'est un'homme
dangereux que M. Lecluysequerelleur, guerroyeur, pourfen-
deur, toujours le sabre au poing et l'épée b la main, enfin un
homrae terrible et de i'aspe'ct le plus martial,surtout au saut du
lit etcoiffé comme je l'ai vu de bonne heure aujourd'hui
Chose étrange, b Poperinghe, dans la ville sacro-sainte, mal-
gré les gémissements des Ames pies, maigré les prières de nos
saintes congrégations;ma!gré les exhortations de notre clergé,
qui, par mesure do precaution, depuis le samedi, parcourait
nos campagnes,le eiei dans les poches et l'enfer dans la bouche,
maigré les tournées pastorales de M. Petrus Polley, il s'est
trouvé 131 électeurs, 131 mécréants,pour acclamer le nom de
M. Lecluyse, et ce in iépendamment d'autres mécréants qui,
dans l'ignorance que M. Lecluyse acceptait la candidature, ont
donné un grandnombre de voix perdues b d'autres libéraux
qui n'étaient pas candidatsToutefois ce sont les catholiques
qui l'ont emporté, la majorité absolue étant de 172 voix.
L'intérêt que la ville aurait a changer le principe de son admi
nistration est manifeste; ie régime soporifique qui pèse sur elle
y énerve l'esprit et )e cceur.Mais puisque les intéréts mondains
sont passagers, résignons-nous et avec nos compatriot.es cléri
caux voyons, s'il se peut, le triomphe du ciel dans celui de la
raison sociale, Poltey et C°.
Après la proclamation du scrutin tout était calme, silencieux,
et ii n'y avail pas plus de bruit que M. le bourgmestre n'en fait
ii la Chambre depuis 17 ans. J'ai entendu exprimerle regret que
deux de nos édiles n'y siégènt pas k cöté de lui comme dépu-
tés de l'arrondissement. A Bruxelles on croit généralement que
M. Van Renynghe n'est qu'un corps opaque; mais si on l'y
voyait entre MM. Pharazyn et Poiley, on reviendrait vite de
cette opinion, et les journaux libéraux eux-mêmes seraient
aveuglés des rayons lumineux projetés par cette trinité qui
représente ici la foil'intelligence et Ie désintére3sement,
comme notre conseil communal représente dans son ensem
ble la lumière de la raison, ainsi qu'il le prockimait lui-même
en 1848.
Agréez, etc. x.
Correspondence particulière de l'OPMON.
Quel est le résultat des élections du 27 octobre Est-ce une
victoire, ou une défaite? Pour quiconque n'y verra que la ques
tion de partisc'est une brillantc victoire, car la ville de Mali
nes, oii la lutte était nettement posée sur la question de l'on-
seignement au lendcmain du congres, est k jamais soustraite a
l'autorité épiscopale; M. Devaux, maigré tous les efforts de la
prêtraille dirigés contre lui, est resté debout au conseil
de la ville de Bruges; k Gand, les cléricaux n'ont osé accepter
la lutte, bien qu'on les y eüt provoqués en portant sur la liste
libérale le nom d'un des plus acharnés adversaires de l'Eglise,
Mle professeur Laurent; b Namur, les libéraux ont terrassé
leurs adyersaires et sont rentrés en force au conseil; enfm,
dans plusieurs localités" moins importantes, c'est l'opinion li
bérale qui a eu le dessus.
Mais placez-vous au point de vue du gouvernement, et ditcs-
moi ce qu'il vous semble du résultat des élections h Bruxelles,
b Anvers et b Liége.
J'ai sous les yeux YEcho du Parlement, qui m'apprend que
les élections de Bruxelles ont été favorables b 1'Association li
bérale, car quatorze candidats surquinzaprésentés par elieont
passé au premier tour de scrutin, tandis que le candidat du
meeting, M. Albert Lacroix, n'a été élu que dansun scrutin de
ballottage. Ce journal ajoute, pour nous rassurer compléte-
ment, que le corps électoral s'est borné b donner un avertisse-
ment b eet honorable conseilierN'approuvant pas la con
duite qu'il a tenue au mois de juin, il n'a pas cru toutefois
qu'elle devait lui faire eneourir la peine de Télimination...
Moi qui, ne voulant voir, jusqu'au dernier moment, qu'une
question de personnes dans la lutte engagée entre Associa
tion de l'hótel des Brasseurs et le Meeting de la Louve, vous
disais que, quoi qu'il arrivat, il n'y aurait comme toujours que
des libéraux au conseil de notre commune, je pourrais peut-
être tenir le langage de YEcho du Parlement, mais appar-
tient-il b ce journal de ravaler ainsi le résultat de la journée
Les libéraux qui ont donné leurs suffrages aux candidats
de 1'Associationlibérale au mois de juin, ne peuvent
pas voter pour M. Lacroix, disait-il a la veille de la bataille,
car ce n'est pas comme administrateur qu'il veut rentrer
au conseil c'est la tête haute et sans désavouer
aucun de ses actes. Tous ses collègues auront tenu a re ster
fiièles b YAssociation libérale; tous auront accepté, favorisé
le compromis du mois de mai dernier, tous s'applaudiroat de
la réconciliation qu'il a opéróe. M. Lacroix veut rester au mi-
lieu d'eux comme un reproche vivant de leur conduite. II veut
pouvoir dire que si le corps électoral s'est prononcé en leur
faveur au mois de juin, il aura repu, k son tour, son appro-
bation au mois d'octobre C'est un appel au corps électoral
«mieux éclairé qu'il se proposede faire... C'est un désaveu
de l'élection du 9 juin qu'il veut obtenir.
C'est bien ainsi, en effet, que M. Lacroix, qui n'a cessé de
flétrir le compromis du mois de juin et qui a refusé en dernier
lieu d'accepterle patronage de 1'Association en allant défendre
sa candidature au Meeting, c'est bien ainsi,'dis-je, que M. La
croix voulait rentrer au conseil; il y est rentré «la tê.te haute
et il restera au milieu de ses collègues comme un reproche
vivant de leur conduite car il a obtenu du corps électoral
un désaveu de Tétection du 9 juin Ce sont les propres pa
roles de YEcho du Parlement; ce n'est pas moi qui aurais ja
mais songé a donner ce caractère et cette portée b l'élection
de M. Lacroix. II n'appartient done pas k ce journal de venir
prétendre aujourd'hui que, n'approuvant pas la conduite te-
nue au mois de juin par M. Lacroix, le corps électoral n'a
pas cru toutefois que cette conduite devait lui faire eneourir
la peine de Télimination.
Le corps électoral a élu M. Lacroix, maigré VAssociation li
bérale, voilb lc fait, et celui qui a dit que le Meeting avait fait
un trou au drapeau de Association ne s'est pas trompé. Aussi
les chants de triomphe de 1 'Hótel des Brasseurs avaient-ils des
accents de tristesse navrants, tandis qu'b la Louve i'enthou-
siasme était indescriptible. M. Lacroix est d'abord monté sur
une table pour remercier le meeting, et il a fait des révélations
qui ont transporté la foule.Au mois de juin, lorsqu'il s'agissait
de signer le compromis entre YAssociation et les scissionnai-
res, M. Lacroix, comme vous savez, faisait partie du comité, et
lui seul s'est énergiquement opposé k la ratification de eet
acte, dans lequel, celon lui, la dignité de 1'Association n'était
pas suffisamment sauvegardée.
Voulez-vous savoir ce que MM. Van Schoor et Goblet lui ré-
pondirentb cette époque? Qu'il pouvait ne point signer, mais
que son silence et son abstention seraient le prix du renou-
vellement de sou mandat de conseilier communal aux élections
du mois d'octobre. Or, M. Lacroix n'a cessé, depuis le mois de
juin, de protester eontre la conclusion du compromis et de le
flétrir comme un marché honteux. C'est done pour lui tenir pa
role que le comité de Tassociation a fait tout ce qu'il a pu faire
afin de i'éliminer, et certes, si M. Lacroix s'était soumis au ré
sultat du poll, son nom n'en serait pas sorti. 11 s'en est gardé,
et il a couru les risques d'un appel au corps électoral contre
Tassociation. Or, le corps électoral a hautement approuvé la
conduite deM. Lacroix, et. le Meeting triomphanta juré d'écra-
ser Tassociation pour rendre au corps électoral son indépen-
danee. Ses statuts sont imprimés et ils vont être publiés; ils
seront discutés dans une assemblée générale qui se tiendra
prochainement k la Louve.
Au point de vue du gouvernement, e'est-h-dire sur le terrain
oü YEcho du Parlement avait posé la question, on peut done
dire que les élections de Bruxelles sont peu satisfaisantes. Ce
ne serait rien si M. Lacroix seul passait par le trou fait au dra
peau de TAssociation, mais qui oserait dire que tout le corps
électoral de la capitale n'y passera pas h sa suite
A Anvers, il ne faut pas se le dissimuler, l'échcc du parti
libéral a été complot. Le Précurseur a fait tout ce qu'il était
possible de faire pour que la lutte s'ouvrit sur le terrain des
principes, ct tous ses efforts ont été vains. 11 s'agit avant tout,
disait-il, d'assurer le triomphe du parti libéral, et il se pro-
mettait, après avoir rendu co service au ministère, de lui de-
mander lasolationde la question d'Anvers. L'Escaut a répondu
que le corps électoral était an versois avant d'être libéral ou ca
tholique, et i'événement a prouvé que le Meeting est toujours
Texpression do la volonté de notre métropole commerciale. II
est évident que si les élections communales avaient été favora
bles k l'ancienne administration, la solution de la question de
la défense nationale eüt fait un grand pas.En effet, si la ville sur
le territoire de laquelle s'élèvent les deux citadelles qui sont
l'objectif de Topposition s'était résignée, la position des députés
de l'arrondissement dans les deux Chambres eüt été fort diffi
cile, sinon impossible. Au contraire, leur position vient d'être
renforcée par le renouvellement, k une majorité de 900 h 1000
voix, des mandata de tous les conseillers communaux sor-
tants.
Enfin h Liége, cette ville qui a toujours été la citadelle du
libéralisme et d'oü est parti l'homme qui a le plus brillé au Con-
grès de 1846 et qui est aujourd'hui k la tête des affairesk
Liége, dis-je, le corps électoral s'est montré très-indifférent,el
BUTAYE,
notaire ii Messines.
Bruxelles, le 31 octobre 1863.