JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT
K
YPRES, Dimanche
Deuxième année. i\° 10.
17 A Tril 1864.
Lf. tout payable D'a VANCE.
PARAISSANT LE DIMANCHE DE CHAÜUE SEMAINE.
PRIX W'AISOSIEIIEÜT
POUR LA BELGIQUE
S francs par an 4 fr. 50 par semestre.
Pour l'Etranger, le port en sus.
Un Numéro 25 Centimes.
PRIX MES ASIIOMCEü
ET DES RECLAMES
10 centimes la petite ligne.
Corps du journal,/30 centimes.
Laissez dire, taissrz-vous blSmer, mais publiez voire pensée.
On s'cibonne a Ypres, au bureau du journal, chez Félix Lambin, imp.-lib.,
rue de Dixmude, 55.
On traite a, forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres
ou envois dïargent doivent être adressés franco au bureau du journal.
E'Eglise et Ia liberté.
Jusqu'a quel point est-il permis d'aimer, sans pê
ché, Ia Constitution beige et les libertés qu'elle con-
sacre, telle est la grave question qui agite aujourd'hui
le monde catliolique ei qui menace de diviser de jour
en jour plus profondément nos adversaires. II y a
vingt-deux ans, qunrid parut cette insolente ency-
clique de Grégoire XVI, qui condamnait les libertés
que la Belgique venait d'inscrire dans son pacte fun
damental, il y eut, dans le parii catholique beige,
un moment d'hésitationCes libres institutions, qu'on
lui demandait de maudire, il avait lutté avec les li-
béraux pour les conquérir, il avait juré de les aimer
et de les d'èfendre. Rome ordonnait, il est vrai, mais
son infaillibilité, indiscutable en matière de dogme,
s'étendait-elle aux questions poliliques? Plusieurs le
niaient et s'apprètaient a la résistance. Dieu sait ce
qui serait sorti d'une pareilie situation sans les ca-
suistes. Peut-être un schisme, mais, a coup sür, une
lutte longue et afïligeante pour l'Eglise, car, qu'on ne
l'oublie pas en 1832, a l'cpoque oü Grégoire XVI
publiail son encyclique, les idéés ultramontaines, vi-
vement combaltues par Lamennais, étaient loin d'a-
voir en Belgique l'empire qu'elle ont acquis depuis;
un nombre considérable de calhoiiques, une très-
grande partie du clergé inférieur leur étaient mani-
festement hosliles. Heureusement, répétons-le, les
casuistes étaient la et, grace a une distinction tirée
du plus fin de la scolastique, tout s'arrangea le mieux
du monde. Vous entendez mal l'encyclique, dirent-ils
aux récalcitrants. II faut dislinguer. II ne s'agit pas
de condamner les libertés constitutionnelles au point
de vue relalif, au point de vue national. Comme ci-
toyens beiges, vous avez le droit de chérir et de dé-
fendre ces libertés. Ce que blame l'encyclique, ce
qu'elle demande que vous blamiez avec elle, c'est la
reconnaissance de ces mêmes libertés au point de vue
dogmatique, en tantque constituant des droits abso-
luset naturels a i'homme.
Personne ne comprit rien a cette distinction, mais
NOTICE NÉCR0L0G1QUE
sur
EE EH EVAEIER LECLERCQ.
Suite et fin.)
En 1809, étant sous-lieutenant de voltigeurs au
106" régiment, lequel faisait partie du camp d'Udine
(Frioul), il fut chargé d'aller explorer avec 60 volti
geurs el 6 hussards du 6e les environs du village
d'Atthimis, et d'y recueillir des renseignements po-
sitifs sur les intentions, Ia position et la force de l'en-
nemi. Sa mission était difficile, délicate mais il avait
pour lui une grande connaissance des localités, par-
lait fort bien la langue du pays, et était aussi adroit
que déterminé et entreprenant. II part résolument et
va faire cette reconnaissance au travers de grands
dangers. A peine est-il en route, qu'on recoit au camp
de si fêcheuses nouvelles sur les desseins de l'ennemi,
qu'on croit ce dètachement perdu les rapports par
venus faisaient présumer a bon droit qu'il n'avait pu
manquer d'être enlevé, lorsque, a la surprise de tout
comme on ne demandait pas mieux, de part et d'au-
tre, que d'en finir, les récalcitrants s'empressèrent
d'accepter une solution qui les laissait, en fait, maitres
de leurs sympathies et libres de tout engagement vis-
è-vis de Rome. La distinction fut done universelle-
ment accueillie et les catholiques beiges furent auto-
risés a défendre en Belgique la liberté de conscience et
la liberté de la presse,a la condition de les considérer,
au point de vue dogmatique, cómme une peste et
un délire.
Vingt années se sont écoulées depuis. pendant les-
quelles l'ultramontanisme a fait les progrès que l'ori
sait. Dédaignant des subtilités devenues inutiles, il
jette enfin le masque aujourd'hui et étale au grand
jour son mépris des libertés constitutionnelles. Et il
ne se contente pas de les bafouer, de les livrer au
mépris public .- reprenaot avec audace la thése de
Grégroire XVI, il affirme que ces libertés sont con-
traires au dogme, atteniatoires aux droits que
l'Eglise tient de Dieu lui-même et que nul catholique
ne peut y adhérer sans péril pour son óme. Et ce ne
sont pas quelques journaux perdus qui tiennent ce
langage c'est la Civitla Catholica, de Rome, Ie mo-
niteur de la catholicitéc'est le Monde, de Paris c'est
le Bien Public, de Gand, c'est-a-dire les organes les
plus sérieux, les plus accrédités du catholicisme po
litique. Les choses en sont venues a ce point que
Mgr le cardinal de Malines, pour calmer les inquiétu-
des de ses brebis, a cru devoir descendre dans l'arène
etexpliquer comme quoi il est permis aux catholiques
beiges d'observer la Constitution sans risquer d'être
damnés. Les deux lettres que S. E. vientde publier
sur ce sujet sont des plus curieuses et nous ne sau-
rions assez conseiller a nos Iecteurs de se les procu
rer. Mais S. E. ne s'est pas bornée a rassurer les ca
tholiques, elle a voulu donner aux libéraux un gage
de l'attachement de son troupeau aux libertés con
stitutionnelles. Le cardinal-archevêque ose prédire,
sans crainte d'être démenti par les événements,
que les catholiques ne demanderont jamais la sup-
pression des libertés que le Congrès a accordées
le camp, au lieu des premiers coureurs autrichiens,
on signala, au crépuscule du soir, Ie dètachement
francais qui arrivait, sagement conduit, par un che-
min détourné, luttant contre les eaux d'un torrent
rapide qui mouillaient les hommes jusqu'a la cein-
ture une demi-heure après, il avait ramené, aux
acclamations de la division, qui l'attendait impatiem-
ment pour battre en retraite, son dètachement sain
et sauf, moins deux hussards qui, s'étant fourvoyés,
avaient été pris. II avait rempli le but de la décou-
verte a la pleine satisfaction des généraux Seras et
Roussel, et s'était fait le plus grand honneur.
A la reprise de Codroïpo, petite ville en Italië, en
1809, las d'entendre Ie 8me de chasseurs a cheval et
le e"10 de hussards escarmourcher depuis plusieurs
heures, sans produire d'autre résultat que la perte
inutile de quelques hommes et de quelques chevaux,
il va trouver son ami le général Roussel, et, après lui
avoir développé ses pensées, il ose le prier de faire
retirer les deux régiments de cavalerie, et de ne lan
cer contre l'ennemi que les trois compagnies de volti-
aux cultes dissidents. Cette assurance nous
comble de joie, mais quelle que soit notre confiance
dans la clairvoyance et la pénélration de Mgr le car
dinal, il nous permettra de nous défier quelque peu
de ses prédictions. Nous ne pouvons pas oublier,c'est
plus fort que nous, que le Pape, une autorité infail-
lible, a condamné toutes nos libertés et que cette con-
damnation subsiste, même après toutes les protes
tations contraires de S. E. de Malines. De cette
source infecte de l'indifférentisme, a dit le Père
des fidèles, découle cette maxime absurde et erro-
nee ou plulöt ce délire, qu'il faut assurer et garan-
tir a qui que ce soit la liberté de conscience. On
prépare la voie a cette pernicieuse erreur par la
liberté pleine et sans bornes qui se répand au loin
pour le malheur de la société religieuse et civile.
De la, le changement des esprits, une corruption
plus profonde de la jeunesse, le mépris des choses
saintes et des lois les plus respectables, répandu
parmi le peuple, en un mot, le fléau leplus mortel
de la société.
Que Mgr Ie cardinal veuille nons dire comment les
catholiques beiges peuvent aimer et au besoin dé
fendre les libertés que le pape déclare être le fléau le
plus mortel de la société. Peut-être alors aurons-nous
une foi plus robuste dans ses affirmations mais jus-
que-la, qu'il nous permette de douter, sinon de leur
sincérité, du moins de leur fondement. Heureusement
pour nous, nous avons, pour nous rassurer, d'autres
motifs de sécurilé que ceux que veut bien nous don
ner Mgr le cardinal. Grêce a Dieu, la liberté est assez
vigoureuse en Belgique pour n'avoir rien a craindre
des foudres de Rome et pour pouvoir se dispenser des
permissions de MM. les évêques. Elle n'a que faire
des unes et se moque des autres.
Que noire Saint-Père en prenne done son parti et
nos saints évêques aussi les Beiges ne sont nulle-
ment d'avis de céder la moindre parcelle des libertés
qu'ils ont conquises en 4830 et ni les menaces ni les
doléances du Vatican ne modifieront sur ce point
leur inébranlable volonté. Quant a la permission
geurs du 106m", a droite et a gauche de la grande
route, celle-ci a faire garder par la cavalerie. Ce gé
néral en référa d'abord au général de division Seras,
qui approuva la proposition mis aussitóten mou
vement, les voltigeurs courent tête baissée au com
bat, ne tirent que de trés-prés, ne s'arrêtent pas, et
marchent tellement sur les talons de l'ennemi ainsi
déconcerté, qu'ils rentrent pêle-mêle dans Codroïpo.
A cette affaire, au succèsde laquelle il avait contri-
bué doublement, il montra tant d'énergie et de ta
lents, qu'il fut reconnu avoir mérité la Croix, qu'il
n'obtinl définitivement qu'a Wagram.
A la balaille de Fontana-Fredda ou Sacile (Italië),
Ie 16 avril 4809, oü il fut blessé, Ie 4 06me régiment
exécutaitla retraite en échiquier, et l'ennemi en force
avancait a grands pas. II voit lomber tout a ses cólés
le voltigeur l'Homme, qui,ayant une jambe cassée, va
rester abandonné nonobstant sa propre blessure, il
fait tout de suite les plus grands efforts pour relever
et sauver le malheureux soldatmais son acte de dé-
vouement ne peut être mis fin il perd lui-même