Nous avons d'abord hésité a croire a la réalité de
celte nouvelle mais, en presence des affirmations
rèitèrées de la presse indépendante et du silence per
sistant du Moniteur, Ie doute ne nous étant plus per
mis. nous voulons dire ici, franchement, sans dé-
tours, ce que nous pensons de la conduite tenue par
notre gouvernement dans cette circonstance.
Ecartons d'abord la question de légalité, qui n'a
rien a faire dans le débat. CEtoile Beige perd son
encre et son papier a démontrer, le code et les lois
militaires a la main, que Ie gouvernement a le droit
d'autoriser les officiers beiges a prendre du service a
l'étranger. Jamais personne n'a songé a contester ce
droit au gouvernement. Mais la question doit être en-
visagée de plus haut. Le droit du gouvernement étant
reconnu, il s'agit de savoir si, dans le cas dont nous
nous occupons, il en a usé d'une manière conforme
aux principes de neutralitó qui sont le fondement de
la nationalité beige, et a ce point de vue nous n'hési-
tons pas a nous prononcer contre les mesures qu'il
vient de prendre.
Nous n'avons pas rechercher ici la manière dont
le nouveau gouvernement mexicain s'est formé. Que
le suffrage universel dont il se dit issu soit le produit
de la fraude et du mensonge ou l'expression sincère
du vceu des populations, peu importe, au point de
vue oü nous nous placons. Nous ne pouvons cepen-
dant pas nous empêcher de faire observer que le jour
oü, sous la pression d'une armée étrangère, la Bel-
gique aurait a délibérer, a régistre ouvert, sur son
annexion a un pays voisin, la nationalité beige serail
en grand péril. Mais, encore une fois, peu importe le
procédé, plus ou moins régulier, qui a fonctionné au
Mexique Nous tenons le gouvernement de Maximi
lien comme régulièrement établi et Juarès, non pour
un belligérant, mais pour un rebelle.
-La Belgique se dispose done a fournir a Maximilien,
souverain légitime du Mexique, un corps d'armée
destiné a réduire ce rebelle a l'obèissance. Le peut-elle
sans violer ses devoirs de pays neulre Ge serait se
faire des devoirs qu'impose la neutralité une idéé bien
incompiète que de les réduire a l'obligation, pour les
Etats neutres, de ne point prendre parti entredeux
ou plusieurs puissances en guerre. La neutralité oblige
a beaucoup plus elle interdit, d'une manière abso-
Lue, aux puissances qu'elle protégé, de s'immiscer,
de quelque manière que ce soit, directement ou indi-
rectement, dans les affaires intérieures des gouver-
nements étrangers; elle ne leur défend pas seulement
de prendre part aux querelles qui peuvent surgir
entre ces gouvernements, elle leur preserit impérieu-
sement de ne pas intervenir dans leurs dissensions
intestines, si graves, si violentes qu'elles puissent
être et de rester sourdes a tout appel qui leur vien-
drait, n'importe de quel cóté, en vue de les réprimer,
surlout par la voie des armes.Si l'on contestait ces
principes, professes par tous les publicistes qui ont
traité la question de la neutralité, nous nous adres-
serions au bon sens public et nous lui demanderions
son avis sur la question que voici Le 23 février
4 848, Louis-Philippe, beau-père de notre Roi, élait
encore roi des Francaisles républicains contre les-
quels il défendait son tróne dans les rues de Paris
étaient, a coup sur, des rebelles. Supposons qu'au
dernier moment, se voyant abandonné par son ar
mée, Louis-Philippe se fut adressé au gouvernement
M. Joseph Baratto fut l'un des trois lauréals couron-
nes.
Depuis lors il n'a pas perdu son temps. Ce qui le
prouve, ce sont les extraits suivants de I'U?iion Cho
rale de Paris, n°' 34 et 33 du mois de janvier der
nier. On y lit a Ia page 322
3mo Concours de composition musicale. Musique
d'harmonie et de fanfares. Récapilulation résumée
de toules les séances de la commission. Première
catégorie (Fantaisie sur un motif de Mozart).
Prix unique M. Baratto de Bordeaux.
La page 323 porie Deuxième catégorie. Prix
M. Baratto déja nommé.
La page suivante analyse l'ceuvre qui a valu ces
magnifïques distinctions au composileur yprois. Nous
nous fesons un vérilable plaisir de reproduire eet
exposé.:
Première catégorie. Chant imposé de Mozarl
Non piü andrai farfallone amoroso. fNoces de Fi-
garo
De toutes les compositions envoyées pour con-
- courir dans cette catégorie, c'est incontestablement
eelle-ci qui méritait de remporter la première ré-
compense. L'auteur a su heureusement s'inspirer
beige pour en obtenirdes secours. Ces secours.aurions-
nous pu les lui accorder sans violer tous nos devoirs
de pays neutre'? Evidemment, le bon sens public
répondrail que non. Eh bien, ce que la Belgique
n'aurait pas pu faire, en 1848, en faveur de Louis-
Piiilippe, nous disons, nous, qu'elle ne peut pas le
faire, en 4 834, en faveur de Maximilien d'Autriche
nous disons que, de même qu'elle a dü assister,
muelte et impassible, a l'écroulement d'une dynastie
a laquelle elle devait, en grande partie, son existence,
de même et a plus forte raison, elle ne peut se per-
mettreaucun acte d'intervention, direct ou indirect,
en faveur de ['établissement d'une dynastie etrangère,
a laquelle elle ne doit absolument rien.
Oh, nous connaissons les prètextes dont le gouver
nement se couvrira pour justifier son injustifiable
conduite.
II n'y a, dira-t-il, aucune assimilation a établir entre
les faits qui constituent une intervention armée et
ceux que nous avons posés. Le gouvernement n'in-
tervient pas plus aujourd'hui dans les affaires
mexicaines qu'il n'intervenait naguère dans les af
faires de l'Algérie, lorsqu'il accordait aux officiers
beiges l'autorisation de prendre du service dans l'ar-
mée d'Afrique.
Ici encore, le bon sens public répondra pour nous
il dira, eet infaillible bon sens beige, qu'autre chose
est l'autorisation donnée a quelques officiers de servir
dans une armée étrangère, et qu'autre chose est d'au
toriser l'enrólement en masse de plus de deux mille
volontaires, avec leurs chefsil pronóncera sans hési-
ter que s'il n'v a pas intervention dans le premier
cas, cette intervention est manifeste dans le second.
El comment pourrait-on le contester sérieusement
Deux nations sont en guerre. L'une d'elles demande
a une troisième de lui prêler des troupes; celle-ci
s'empresse de les lui fournir. 11 ne viendra sans doute
a la pensée de personne de soutenir que cette troi
sième nation n'a pas fait acte d'intervention dans la
guerre allumée entre les deux premières; mais sup
posons que celte troisième nation, ainsi sollicitèe,
réponde Mes devoirs de pays neutre m'interdisent
de vousenvoyer des soldals; mais verfez les prendre
ehez moi. Mes casernes sont remplies de volontaires,
je les délierai de leurs engagements a la condition
qu'ils prennent du service chez vous; j'ai d'excellents
officiers, je leur permettrai de vous servir et, pour
mieux les disposer en votre faveur, je m'engagerai a
les reprendre a mon service, avec leurs grades actuels
et leurs droits d'ancienneté, dés que la guerre qui
vous oceupe sera terminée.Et l'on osera soutenir que
la nation qui aura tenu ce langage, qui aura posé ces
actes de complaisance, a respecté les devoirs de la
neutralité0 En vérité, c'est par trop espérer de la
bêtise humaine que de compter sur le succès d'aussi
misérables arguties.
(La suite au numéro prochain.)
A noire grand regret, nous avons étó forcés de re-
mettre a differentes reprises l'examen d'un intéres
sant Rapport sur I'organisation des écoles du soir, pré
senté au Cercle Commercial et industriel de Routers,
par son Président, M. Charles de Rrouckere. Mais la
question ouvrière, sous toules ses faces, a acquis une
importance trop générale pour que nous ne croyions
du theme du grand maitre, et tout en le respeclant,
ainsi qu'il doit l'être, il l'a parfaitement varié et
développé.
L'andante maëstoso, que nous trouvons au com-
mencement, est large et bien conduit; dès la hui-
tièine mesure, M. Baratto fait déja pressentir son
talent et son habiletè sous un cantabile exécuté
paria première clarinette, les saxhorns altos mur-
murent une imitation du chant imposé, préparant
bien les dévoloppements qui vont bientót suivre;
mais c'est a parlir de la vingt-qualrième que nous
adressons nos felicitations a l'auteur. II y a la une
phrase en réponse et par mouvement contraire
entre les parties chantantes et les basses d'un
style très-ample et d'une belle expression. L'in-
strumentation en est sonore et d'un grand effet,
En suivant, nous voyons avant d'arriver a l'expo-
sition franche de l'air des Noces de Figaro, une
attaque de trompette qui donne de la vie, puis, un
court rócit, fait par le bugle, qui lui-même, quel-
ques mesures après, expose la mélodie animée et
rythmée de Mozart, que nous relrouvons ensuitc
continuée par d'autres instruments d'une manière
neuve et piquanle.
pas faire plaisir a nos lecteurs en publiant aujourd'hui
le résultat de nos réflexions.
Question ouvrière.
Tel est le titre de quelques belles pages, lues der-
nièrement au Cercle commercial et industriel de Rou-
lers. Dans ces lignes, l'auteur a déposé les plus ar-
dentes aspirations de son ame vers le développement
intellectuel et moral de la classe ouvrière, dont il a
rnonfré les liens intimes avec les progrès de nos li-
bertés nationales.
Inspiré tout a la fois par une profonde pitié et par
un amour sincère pour ceux de ses semblabies
qu'une ignorance invincible plonge dans le bourbier
de la misère et du vice, le Président du Cercle dont
nous parions a fait preuve depuis longtemps d'un
devouement infatigable a Ia cause du prolétaire. Pou-
vant cetle fois invoquer a l'appui de sa thèse I'opinion
des hommes d'Elat, des philosophes et des publicistes
les plus eminents de notre époque, il ne lui a pas
fallu beaucoup d'efforls pour démontrer que de l'in-
struction des masses dépend non-seulement leur pro-
pre moralisation, mais encore le développement et
les progrès de l'industrie elle-mème.
L'ouvrier, dit-il, est la clé de voüle de l'organisa-
tion du travail industriel. A quoi servirait, en effet,
aux savants d'arracher au sein de la nature des forces
motrices encore inconnues aux mécaniciens d'inven-
ler des machines nouvellesaux industriels de décou-
vrir de précieuses innovations si, pour exécuter
leurs conceptions, ils ne renconlraient que des hom
mes a peine aussi intelligents que les machines el les—
mèmes? Autant il est infructueux de prêcher morale,
économie domestique, amour de la familie a des êtres
que l'absence de tout enseignement a laissés au niveau
intellectuel de la brute, et dont le coeur ne connüt
jamais d'autres sentiments que ceux inspires par
l'égoïsme autant, dans l'ordre matériel, les progrès
seraient irréalisables, si les lumières venant d'en haut
n'èclairaient pas les régions plus basses oü se meu-
venlles producteurs.
Ces pensées,dont nul n'osera contester ['exactitude,
montrent a tous la place si élevée qui revient au tra-
vailleur dans un état social bien organisé elles font
comprendre aux moins atteniifs la grande loi de soli-
darité qui domine, en les enchaina^t, les diverses
classes composant l'humanité, a tous elles font
toucher du doigt eet impérieux devoir de concourir
dans la mesure de nos forces aux progrès intellec-
tuels et moraux de nos semblabies. Mais a quoi abou-
tiraient ces belles vérités, si elles ne passaient pas
dans ledomaine de la réalité?
Aussi M. DeBrouckere.dont l'activilé brülante pose
le fait immédiatement après la pensée, signale-t-il
comme premier devoir aux industriels qui l'écoulent,
l'organisation de l'instruction gratuite obligatoire pour
ie prolétaire, et surtout pour l'enfant condamnó aux
travaux de l'usine.
Forcez, s'écrie-t-il, l'ouvrier a recevoir dans son
cerveau prêt a s'étoutTer cette graine précieuse de
l'instruction dont les fruits, dans l'ordre social, seronl
la conception de sa propre dignité, le sentiment de sa
grandeur, l'arnour de son indépendance, et dans
l'ordre matériel la volonté et la capacité nécessaires
pour subvenir honnêtement a une existence honnête.
Lutlez de force contre certains parents abrulisenle-
vez malgré eux leurs enfants aux ténèbres et a l'ab-
Au nombre des bonnes choses que nous croyons
devoir signaler, se remarque la modulation qui
exisle a la cent-quatrième mesure de Vallegro
conduisant en sol bémol par une marche ascen-
dante de basses et un élégant trait fait par la cla-
rinette et le premier basson dans le but de faire
entendre une dernière fois le chant donné. Cet effet
est exlrêmement doux les harpèges des deuxièmes
i> clarinettes sont heureusement agencées nous vou-
drions toutefois qu'ils ne fussent pas doublés par
i) les bassons! Cette adjonclion doit douner de la
lourdeur a l'ensemble. A partir d'ici jusqu'a la fin,
nous avons un animato chaleureux qui conserve
bien le caractère de l'idée servant de base a cette
composition, et qui la termine d'une manière bril-
lante.
Nous devons constater dans l'ceuvre de M. Ba-
ratto, une bonne entente des lois harmoniqussle
savoir spécial nécessaire pour bien inslrumenter
i> ce genre de musique, et surtout, ce qui est rare
dans ces sortes de productions, une excellente mar-
che pour le développement de ses idéés, et une
sage ordonnance comme plan.
C,M C.