pense promise el espérée avait fanatisé les aspirants-
curés. lis se ruèrent sur toute la Flandre, presses
d'enlever des voix aux libéraux et d'enroler leurs pa
rents et amis sous Ie drapeau clérical.
La calomnie, l'intrigue, la medisanceet Ie mensonge
furent employés par les oiuts du Seigneur.
Nous connaissons tel curé, francais de naissance,
nornmè par l'évêque de Bruges a une paroissë des
environs d'Ypres, qui n'a reculé devant aucun moyen
de pression sur ses ouailles-électeurs. Ne réussissait-
i! pas sur l'électeur même, il recourait a la femme,
eet être faible et confiant..... et Ie confessionnal fesait
l'affaire des cléricaux.
Un autre curé s'en est allé par les campagnes prê-
chant que Ie maintien des libéraux au pnuvoir cons-
tituait Ie retour des temps anarchiques de la Révolu-
tion francaiseet amenait l'expulsion des prêtres et la
négation de Ia propriété.
Un vicaire, du haut de la chaire de vérité, a laissé
échapper ces paroles Voter pour les libéraux,
e'est voter la mort des prêtres et des religieux c'est
fermer les églises et profaner la pe'-sonne de Jésus-
Christ; c'est empêcher l'enterrement des corps des
chrétiens et les livreren pature aux corbeaux et aux
loops, etc., etc.
Et ce jeune jouvenceau, dont Ia tonsure est encore
toute neuve.mais que l'évêque a cru assez sage pour
diriger les ames des fidèles, ne ressemblait-il pas
un maniaque lorsqu'il hurlait Chrétiens, il est
préférable de mourir que de voter pour Ie Ministre de
l'Intérieur et ses amis.
II y a un autre vicaire, plus ou moins macon, dont
l'éloquence est tout-a-fait négative, qui a voulu faire
du zèle et ne s'est monlré que ridicule. II a conduit
des électeurs. perché au haut d'une voiture et criant
a tue-tête Vivent les catholiquesl Vive la religion!
Ce lévite a sali et décbiré sa robe sacerdotale aux
ignominies électorales; sa soutane n'était plus qu'un
informe torchon.
Mais il est un digne pasteur, qui se laisse appeler
révérendsans sourciller, et dont Ie vol au billet nous
a fait songer a Cartouche, eet homme si expert dans
Ie vol a la tire. II serait vraiment utile aux cléricaux
d'être aussi adroits que les élèves du fameux chef de
bande et d'avoir des hommes assez habiles pour
prendre dans les poches, sans qu'on s'en apercoive,
thus les votes libéraux et les remplacer par des bil
lets de leur facon.
Si nous voulions continuer la nomenclature des
fails et gestes des membres du clergé dans les der-
nières éleclions, nous en remplirions beaucoup de
colonnes de notre journal. Nous nous bornons aux
fails les plus saillants et nous en tirons la cohsé-
quence que MM. les curés et vicaires travaillent a la
destruction de la religion en trompant le peuple et en
semant la haine et Ia discorde parmi les citoyens.
Lorsqu'on fait de la religion un instrument poli
tique et qu'on l'associe aux passions, aux menaces et
aux vengeances d'un parti, on finit un jour par faire
voir en elle une ennemie du peuple et de la liberté.
Le prêtre a conspué du haut d'une chaire de vérité
des personnes honorables, il a divisé les families pour
augmenter son autorité civile, il a déversé l'injure
sur des hommes pieux et respectés.
Celui auquel le Seigneur a donné Ia mission de
prêcher la paix, a poussé a la guerre. Toutes les
choses religieuses sont devenues entre ses mains des
armes sacriléges qui tourneront contre lui. II a abusé
des sacrements ainsi que de la confiance qu'il devait a
son caractère sacré. La confession n'a plus étó la
consolatrice des ames elle a servi d'instrument pour
jeter la défiance entre parents et les éloigner les uns
des a ut res.
La lutte est terminée les libéraux ont emporté la
victoire.
Depuis lors le clergé est tranquille. Le dimanche
après les éleclions, chaqtie curé a pu chanter sa
grand'messe habituellë et faire son prêche. Les bons
et braves campagnards qui onl ajoulé foi aux paroles
du prêtre courtier-électoral, ont pu faire leurs dévo-
tions sans rencontrer la moindre gêne et ne compren-
nent pas aujourd'hui pour quelle raison on a fait
courir tantde bruits. Les habitants de Poperingbe en
particulier n'y comprennent rien tous les sémina-
ristes, disent-ils, ont crié a la fin du monde si les
catholiques ne venaient au pouvoir; ils n'y sont pas
arrivés et cependant, pas plus tard que cette semaine,
ces libéraux qu on nous a fait considérer comme des
êtres sans religion, accordent des subsides a chacune
des églises de notre ville.
Qui a menli
Ce ne sont pas les libéraux, partisans du progrès
et de la liberté.
Ce sont des fanatiques poussés par l'ambition d'aug-
menter dans la hiërarchie ecclésiastique. Ils ont vu
les corrompus parvenir ils les ont suivis. Si aujour
d'hui ils subissenl la peine de leurs itifamies et de
leurs médisances en perdarit la confiance des fidèles,
ils n'ont que ce qu'ils méritënt.
Legrand malheur c'est que la religion y a perdu.
Le prêtre, en avilissant le sacerdoce, diminue la foi et
la croyance. Le peuple ne peut croire sincères aujour
d'hui des imposteurs de la veille. a Arrière, dit-il,
hommes a la langue de vipère I Vous avez flètri l'hon-
nêleté pour obtenir l'omnipotence. Que vos men-
songes retombent sur vous et les vótres. s
Voila ce qui résulte de faire de la chaire de vérité
une tribune politique, et d'abuser du caractère sacer
dotal pour tromper les électeurs.
On nous écrit de Poperinghe
Le grand jour de la lutte passé et la première im
pression produite par le triomphe de l'opinion libé
rale cd 1 méé, jetons un coup-d'oeil rétrospeclif et
examinons avec calme et impartialité les moyens que
nos adversaires ont employés pour nous combattre,
afin de prouver que, si le parti libéral n'a pas réussi
a obtenir un succès plus complet dans notre arron
dissement, nous le devons a la pression inouïe et
extra légale exercée par un clergé intolérant et fana-
tique.
C'est surtout dans le canton de Poperinghe que
ces représenlants d'un Dieu de paix et de concorde
se sont distingués. Voyez-vous, avant les élections,
ces ministres du Christ, foulant aux pieds les doc
trines professées par leur divin maitre, l'apötre de
la démocratie les voyez-vous, transformés en agents
électoraux, s'insinuant partout pour distiller le venin
et la calomnie, semer le trouble et la discorde dans
les families, menacant les uns, faisant de fallacieuses
promesses aux autres voyez-vous ces Bosco enfro-
qués, enlremêlant avec une aisance et une dextérité
parfaite le sacré et le profane, les intéréts mondins
et divins, faisant fantasmagoriquement miroitier tour
a tour les félicités du Ciel qui attendent l'électeur
docile ou montrant les horreurs d'un enfer fantai-
siste a l'électeur indécis; promettant aux incrédules
des places lucratives ou une brillante position pour
leur füs, menacant du retrait de leur clientèle les
commercants indociles; bref, mettant tout en oeuvre
sans s'arrêter au choix des moyens.
Nous les avons vus, le jour des élections, après
avoir divisé les électeurs par brigades, remplissant
le róle de chien de berger et ródant autour du trou-
peau confiéa leur sainte garde, lancant un oeil oblique
au libéral qui, sans crainte des foudres de l'enfer,
s'aventurait trop prés de la gent moutonnière et ta-
chait de ramener dans la bonne voie l'électeur four-
voyé. Nous les avons vus, escamotant des bulletins
libéraux, mais nos amis veillaient aussi et les billets
enlevés frauduleusement étaïent immédiatement et
loyalemerut remplacés. L'électeur timide était certain
de recevoir aide et protection d'hommes dévoués et
capables de déjouer les manoeuvres des conducteurs
de ce nouveau troupeau de Panurge. Nous avons vu
a l'oeuvre un fougueux vicaire de notre ville dont la
nullité ne le cède en rion a la sotte pretention, nous
l'avons surpris, enlevant un bulletin libéral dans la
salie même du scrutin, quoiqu'il n'eüt pas droit de
vote; un de nos amis, trop indulgent, car il eüt fallu
dénoncer immédiatement ce fait au bureau, s'est con
tenté de remplacer a son tour le billet escroqué, ayant
soin de s'interposer entre l'électeur et Ie vicaire pour
empêcher celui-ci de répéter le même abus.
Quelques jours avant les élections, une nuée de sé-
minaristes s'étaient abattus sur notre ville pareilsaux
corbeaux et aux vautours qui convoitent une proie;
on avait eu soin d'avancer les vacances de quelques
jours afin de permettre a ces chérubins de remplir
une sainte mission. Ges intéressants néophytes, dres
ses dans les séminaires a Ia chasse electorale, ont été
immédiatement lancés dans la campagne a la pour-
suile des électeurs. Le grand veneur, homme bien
connu par sa prestance et surtout par son orgueil, a
distribué les róles a ces limiers de nouvelle espèce;
nous devons dire, a sa louange, que le grand homme
s'est distingué dans la dernière campagne électorale
par son fanatisme de commande et surtout par son
animosité personnels contre le ministre de ('inté
rieur, dont autrefois il se flattait d'être l'ami. Autres
temps, autres nécessités nous espérons que l'évê-
ché prendra en sérieuse considération les services
rendus par le savant archéologue et que le fauteuil de
chanoine, qu'il convoke depuis longtemps, sera la
recompense de son zèle et de sa conduite.
Nous ne parierons pas des curés et des petits vi
caires qui se sont signalés dans la dernière bataille,
il faut bien qu'ils gagnent leurs épaulettes, nous ne
pourrions (Tailleurs que répéter des faits enregistrés
jöurnellëment par d'autres journaux partout les
principes préconisés par M. Malou, l'ex-évêque de
Bruges sont employés pour la plus grande édification
des fidèles et partout ils soulèven! la même repul
sion. Nous devons cependant signaler particulière-
ment notre vicaire, pitje pek, comme type de loyauté
et de bonne foi en matière électoraleune cure pour
lui, s'il vous plait?....
Voila le triste spectacle auquel il nous a été donné
d'assister ces jours derniers, voila les scènes qui se
sont déroulées sous nos yeux et ont fait monter le
rouge au front de tout honnête homme qui, inspire
de sentiments chrétiens, s'indigne de voir le róle
odieux joué par des acteurs en soutane. Nous avons
entendu des hommes connus par leurs principes ca
tholiques dire publiquement qu'a l'avenir ils ne pren-
draient plus pour intermédiaires dans l'accotnplisse-
mentde leurs devoirs religieux, ces ministres éhon-
tésqui ne s'occupent que de leurs interets mondains
et matériels et n'onl pas le moindre souci des ómes
qu'ils prétendent vouloir sauver.
Nous enregistrons a regret que la jeune génération
poperinghoise ne répond pas aux espérances que
nous avions mis en elle; il semble qu'un vent d'in-
tolérance et de crétinisme ait souffle sur notre ville.
Quand partout la jeunessë a des aspirations géné-
reuses en harmonie avec l'élévation et la noblesse des
sentiments qui forment le caractère distinctif de son
ógelorsque partout nous voyons cette jeunesse
marcher a la tête du progrès et des idèes libérales,
nous nous attristons de voir nos jeuues gens, facon-
nés dans notre collége épiscöpal, s'endormir dans
une indifference coupable ou se faire les apótres et les
promoteurs d'idées retrogrades et surannées. Ges
messieurs, grands ennemis de la discussion el de la
controverse, choisissent d'habitude le moment oü au
cun libéral ne se trouve dans leur sociétó, pour faire
sournoisement de la propagande clérieale ou pour
dénigrer nos amis politiques; nous prévenons ces
courageux pourfendeurs qu'a l'avenir, lorsqu'un fait
semblable parviendra a notre connaissance, nous
aurons soin de faire connaitre leurs noms par la voie
de la presse. Ce sera une liste curieuse a publier et
nous sommes assurés que beaucoup de ces apótres
de la foi tiendront a honneur de figurer dans les co
lonnes de nos journaux. C'est un excellent moyen de
gagner les palmes du martyre.
Espérons que le temps n'est pas éloigné ou nous
verrons surgir a Poperinghe un établissement de
struction de l'Etat qui distribuera largemenl le pain
do Ia science aux jeunes intelligences que maintenant
on cerche a étoufl'er. Alors la jeunesse de Poperin-'he
verra s'ouvrir devant elle les carrières liberates ou
industrielles tandis que maintenant notre collége épis
cöpal n'a qu'un but, preparer des adeptes en previ
sion d'un avenir politique ou fabriquer ces agents
électoraux en soutane, dontchacuna pu voir les faits
et gestes aux dernières élections.
Nous recevons la correspondance suivante qui ne
peut qu'être lue avec intérêt, surtout qu'elle émane
d'un homme respectable et visiblement affligé des ex-
cès dernièrement commis par le clergé
Westoutre, 23 aoüt «64.
Monsieur le Rédacteur,
Depuis vingt-cinq ans, je n'ai pas écrit dans les
journaux; souffrez, qu'en cette circonstance, je me
départisse de ma réserve habituelle et queje m'adresse
par vos colonnes hospitalières, a un corps qui m'af-
flige mais que j'aime.
Votre très-humble serviteur,
L. V".
Au clergé de 1'arrondissement d'Ypres
Toutes les fois qu'un homme désire quelque chose
avec déréglement, il en ressent aussitót du trouble
lui-même.
Le superbe et l'avare ne sont jamais en repos (f).
Commencez par etablir la paix en vous-même, et
vous pourrez ensuite la donner aux autres.
(1) Imitation Liv. 1, chap, vi, 1.