droit jusqu'a la rue de Dixmude, nous rencontrons Ie
couvent des Récollets, oü se conservait jadis l'image
miraculeuse de N.-D. de Thuynes, puis la brasserie
l'Agneau dont la bière nous chatouille encore agréa-
blement Ie gosier. Nous passons a la hate devant le
Mont-de-Piété et nous trouvons au Marehé au-Bois le
Béguinage dont l'intérieur, formant une vaste rue a
plusieurs rangées de maisons, est occupé par un
grand nombre de béguines. En remontant la rue de
Dixmude, nous avons a notre droite la ruelle de la
Prison religieuse. On y remarque le couvent des
Sceurs-Noires el la prison que l'évêque Maes institua
en 1608 pour servir de retraite aux prêtres trop ga
lants de son époque. Le Rossignol est une auberge de
rouliers.
Nous traversons la Grand'Place pour descendre
dans le second quartier de la ville qui conduit a la
porte de Messines. Dans la rue Saint-Jacques, laissons
a droite l'estaminet Versailles; on nous montre a
gauche l'èglise de Saint-Jacques-le-Majeur dont la
tour est inachevée, et non loin de la le jardin de la
Société les Rosiers. Que de convents dans ce quar
tierAu cimelière la maison pieuse de Sainte-Cathe-
rinetout prés de la YAbbaye des Sceurs du Rois et
presque cóte a cóte les Carmelites habitent des bóti-
ments considérables qui s'étendent jusqu'a la rue des
Chiens. Plus bas, dans la même rue, nous avons en
core les Dames Tlandaises et le couvent des Urba-
nisles ou Riches-Claires. Nous arrivons ainsi a la porte
de Messines 0(1 l'Yperlée entre en ville. La Pelle d'Or
et Neuve-Eglise sont des auberges bien fréquentées.
Remontant la rue du Sud nous rencontrons en chemin
YHótel-Dieudit Nazareth, un Hospice des Vieillards
et I'Hópital Saint.-Jean oü sont recues les vieilles
femmes. La rue Longue-des-Tuiles nous mér.e a droite
au cloitre des Capucines, dont i'église est petite, mais
belle. Vers le milieu de la rue du Sud s'èlève I'église
paroissiale de Saint Pierre, dont la tour fut incendiée
par la foudre. La construction de ce monument de
style romain, un des plus anciens de la ville, fut, au
dire de certains chroniqueurs, payée pour la majeure
partie en indulgences. II ne nous reste plusqu'a voir
Ie monastère des Capucins, dans Ia rue Sainte-Cathe-
rine, et l'hospice de la Belle, fondé au xme siècle par
Christine de Gennis et Salomon Belle pour l'entretien
d'un certain nombre de vieilles femtnes. C'est dans Ia
rue du Sud que se trouve aussi la brasserie la Cor-
neille, une ancienne maison des Templiers, au coin de
la rue des Tisserands, et la Téte d'Orla principale
hótellerie de la ville.
Visitons maintenant le quartier de Ia porte du
Temple. Depuis la Boucherie, dont la construction
date de 1530, jusqu'a la rue de Cassel, nous trouvons
d'abord le Marché au-Beurre, jadis tenu sous la voute
de Ia tour des Halles. Le Marché-au-Poisson se tient
a cóté. Au coin de la rue de l'Etoile on voit l'estaminet
l'Arbre-Sec, oü se réunissent les poissonniers. Les
marchands de beurre s'assemblent a l'estaminet Va
lenciennes. Par la rue de l'Etoile, laissant a notre
gauche dans la rue des Pauvres-Filles I'Hospice Sainie-
Elisabeth et dans la rue des Foulons VOrphelinat des
garcons, notre cicérone nous conduit au Zaelhofou se
trouve le chêteau du Comte, entouré d'eau de toutes
parts et défendu par un mur fortifié. On y pénètre
par un pont-levis. C'est la résidence du vicomte
d'Ypresel le lieu d'assemblée des magistrats, avant
la construction de la Chalellerie. Derrière la Salie se
trouve Ie cloitre des Dominicains et une blanchisserie
<d'une très-.grande étendue. Plus loin, dans la rue de
la Boule, -on admire le couvent des Jésuites. L'èglise,
;grande et-foelie, a une tour carrée dont le faitesup-
porteime superbe galerie. Lors de la suppression de
la rue des Amoureux, enclavée dans le couvent, les
religieux construisirent une petite chapelle en l'hon-
aeur de N.-D. de la Grace dite N.-D. des Remparts,
paree qu'elle est située le long des remparts de la
porte du Temple. C'est un lieu de pélérinage très-
suivi et autrefois il s'y operait, dit-on, des miracles.
A quelque distance du dernier couvent, s'élevait ce
lui des Pauvr.es-Claires et le Séminaire. Touruant le
coin de la rue de la Bouche, formé par I'auberge Ie
Cygnenous poursuivons jusqu'au bout de la rue de
la Boucherie. La on nous inontre au loin une tour
massive servant de magasin a poudre el plus prés de
noqs le Tuchlhuys, maison de correction oüsonten-
.fermès les vagabonds et les gens de mauvaise vie. Les
fainèanls y sont fouetlés et battusde verges.
II ne nous reste plus que ce dernier quartier a
parcourir celui de Ia porte d'Elvgrdinghe, situé a
l'exlreinité de la rue de ce nom. D'abord dans la rue
au Beurre et vis-a-vis la brasserie le Chameau, nous
voyons 1'égliSe Saint-Nicolas et la tour de YAbbaye de
Saint-Jean-au-Mont. Devant nous YAbbaye de Rous-
brugghe occupe tous les batiments situés a l'entrée de
la porte. Nous passons derrière le Couvent des Au-
gustinscontre le mur de I'église se trouve attaehée la
première des douze stations de la passion du Seigneur,
que les fidèles parcourent en temps de Carême. Les
Sceurs-Grises habitent la rue d'Elverdinghe qui nous
mène au Leet. C'est ici que se trouve le bassin de
l'Yperlée. Les quais qui s'étendent jusqu'au Schotland
sont reliés entre eux par des ponts en bois et en
pierres. II y règne toute l'animation des ports. Ce sont
les bateaux qui, nous arrivant de Nieuport, déchar-
gent leurs nombreuses cargaisops. Ce qui témoigne
de la grande importance de la navigation, c'est la Mai
son des bateliers, qu'on voit a l'accès de la Place et qui
futconstruite aux frais de la corporation. On y admire
les deüx bas-reliefs représentant des navires et plus
haut dans une chapelle la statue de Saint-Clément,
leur patron. Un large portail a l'abri de la pluie sert
d'entrée la maison dont les caves sont des entrepóts
pour les marchandises. Enfin voici a cóté la Cour
Sainte-Rarbe oü les membres de cette confrérie vien-
nent se divertir tous les jours. Nous nous arrêtons
ainsi a la porte de Boesinghe.
Voila ce qu'était Ypres il y a plus de 200 ans. Avec
ces quelques gros traits que nous venons de tracer,
on pourra plus ou moins se représenter la physiono-
mie générale de la ville.
P.-S. Avant de finir il nous reste a dire encore
un mot de Ia réorganisation de l'Académie des Beaux-
Arts. Puisque l'Administration fait des ameliorations
pour mettre eet établissement au niveau du progrès
social, il en est une que nous considérons comme
éminemment nécessaire. C'est celle relative a l'ensei-
gnement du dessin. Tel qu'il se donne aujourd'hui,
il est incomplet, défectueux et ne répond plus aux
besoins de notre époque. Pourquoi ne pas adopter ici
la méthode de M. Hendrickx dont les résultats heu-
reux sont constatés tous les jours, tant dans les éta-
blissements de l'Etat que dans les écoles privées. Cette
méthode si simple, qui consiste dans la pratique
main levée des éléments constitulifs du dessin avec
exclusion rigoureuse et compléte de l'équerre, de Ia
règle et des compas, a été approuvée par des autorités
irrécusables et Ie succès jugé publiquement. Et pour
bien comprendre toute l'utilité et ('importance de cette
mesure, qu'il nous soit permis de citer ici quelques
paroles du savant professeur
Dansl'cnseignementdu dessin, il faut aujourd'hui,
pour arriver a un résultat, que le professeur soit
grand artiste, et encore, dans ce cas, ne transmet-q
a ses élèves que sa manière personneile de voir et
de faire enseignement routinier et d'imitation qui
n'est basé sur aucun principe immuable, qui est
purement arbitraire, qui ne repose sur aucune
règle fixe et générale et que l'ön décore fort impro-
prementdu nom usurpé de méthode.
Ce qu'il faut done, c'est un ensmble de régies
constituent le dessin quel qu'il soit; c'est, en un
mot, une grammaire, un abècédaire du dessin, qui
en rendrait l'élude facile et les résultats assurés
et qui soit combiné de telle sorteque l'élève acquière
assez d'initiative pour se tirer d'affaire, a quelque
degré de l'enseignement qu'il termine ses études,
quelque position sociale qu'il soit appelé.
Veut-on après cela juger de l'efficacité de ces prin
cipes, qu'on demande une experience et nous croyons
que M. Hendrickx, qui prend a coeur la propagation
de sa méthode, ne la refusera pas.
ISibliographie. Enseignement professionnel.
Les nécessités de la grande lutte électorale du
11 aoüt nous ont empêché de rendre compte de plu
sieurs publications importantes, dues a la plume de
jeunes écrivains appartenant a l'arrondissement
d'Ypres.
Disons tout d'abord quelques mots d'une brochure,
publiée par MM. Annoot, Gauthy et Marchand. Elle a
pour titre Projet de réorganisation de la section
professionnelle a l'Athénée royal de Bruxelles.
L'ceuvre est précédée de Quelques considérations
générales sur VenseignementLes idéés exprimées
dans ce préambule par notre compatriote M. Annoot,
dans un style a la fois éleve et empreint d'une netteté
mathématique, méritent bien que nous nous y arrê-
tions un instant.
Tel société, tel enseignement. En d'autres termes
l'enseignement doit être approprié a l'état de la so
ciété. II serait foncièrement mauvais s'il y était con
traire. Voila la thèse posée par l'auteur. Or, conti-
nue-t-il, par la liberlé du travailqui donne pleine
carrière a toutes les puissances productives de
l'homme, joinle a Yimmense développemenl des sciences
qui mettent a sa disposition toutes les forces de Ia
nature, pour les appliquer a l'industrie, il s'est opéré
et il s'opère constamment sous nos yeux, une entière
régénération dans l'état social.
C'est aux besoins créés par cette régénération que
doit répondre l'enseignement moderne, en donnant
une place exlrêmement large aux études, qu'on est
convenu d'appeler professionnelleset qui ont spécia-
lement pour objet les langues vivantes, ainsi que
les sciences et leurs applications les plus impor-
tantes et les plus usuelles, a l'industrie, au com-
merce et aux pratiques de la vie.
Pour apprécier toute l'importance de l'enseigne
ment professionnel, il suflit de remarquer qu'il s'a-
dresse a tous ceux qui, comme les ingénieurs, les
officiers, les négociants, les induslriels, les mécani-
ciens, les cultivateurs, etc., ne se sentent pas dégout
pour l'ètude du droit, de la médecine, ou de la théo
logie; ace nombre consi lérable de jeunes gens qui,
par l'exiguité de leur fortune, sont obligés de s'em-
ployer soit dans le commerce, soit dans les adminis
trations publiques en un mot, a toute cette elasse
nombreuse de la population, designee sous le nom de
bourgeoisie, el qui, grace aux idéés iibérales, jetées
dans le monde par les xvme et xix° siècles, dispose du
présent et de l'avenir des nations.
II n'en est pas de mème de l'enseignement clas-
sique ou littéraire, appelé gónéralement les humani-
lés. Son but principal, souvent unique, est de prepa
rer les élèves a aborder les études supérieures, et
d'ouvrir ainsi a un nombre fort restreint de jeunes
gens la voie vers les carrières Iibérales. Or, si l'on
tient compte, d'une part de Ia pente sur laquelle la.
société moderne est lancée, d'autre part de cette vé-
rité incontestable que Venseignement doit être appro
prié a l'état de la société, il va de soi que le nombre-
des établissements consucrés aux humanités doit aller
en déclinant, tandis que ceux destinés a l'enseigne
ment professionnel se mulliplieront sans cesse.
Des écoles spéciales créées par l'initiative privée
Tournai, a Bruxelles, a Anvers et ailleurs, ont depuis-
longlemps cherché a répondre a cette immense néces-
sité sociale. De leur cóté, les administrations publi
ques, chargées de l'instruction des masses, com-
prennent tous les jours de plus en plus que les
études humanitaires, quelque soin que l'on mette a
les perfectionner, ne répondent plus aux besoins du
temps. Aux athénées et a la plupart des écoles
moyennes sont joints des cours professionnels. Mais ce
qui fait défaut dans la plupart des chefs-lieux d'ar-
rondissement, ce sont des établissements spéciaux,
consacrés exclusivement aux études professionnelles,
etdirigés par des professeurs spéciaux.
Vainement prétendrait-on qu'en restreignant le
nombre, aujourd'hui excessif, des colléges latins, pour
les remplacer par des colléges professionnels, on s'ex-
pose a fixer dans le système d'éducation la suprématie
ou la prédominence des intéréts matériels, et a baisser
ainsi Ie niveau moral des générations nouvelles. Nul-
lement. Car l'enseignement professionnel, au degré le
plus élevé, comprend, dans des limites même consi
dérablement élargies toutes les matières d'études
composant le programme des humanités. La seule
difference consiste en ce que, dans l'enseignement
professionnel, l'étude des langues vivantes remplace
l'étude des langues anciennes, qui font la base des
humanités. Eh bien, on peut l'afiirmer sans crainte,
autant que les humanités, les cours professionnels,
par l'étude des chefs-d'oeuvre de la littérature mo
derne, relèvent les facultés morales de la jeunesse,
éveillent et développent en elle le sentiment du beau
et l'amour du juste. Au même titre done que les hu
manités ils méritent le nom d'enseignement littéraire.
Mais en s'adressant aux neuf dixièmes de la popu
lation, ils ont l'incontestable avantage de faire sortir
les études littéraires des sphères abstraites dans les-
quelles elles se meuvent dans la plupart des colléges
latins, et de les plier aux besoins de la vie actuelle,
pour les mettre le plus possible en rapport avec
l'avenir qui s'ouvre immense devant les générations
nouvelles.
II ne faut done plus aujourd'hui que l'étude des
langues anciennes soit, comme par le passé, la base
de la presque totalité des établissements destruc
tion. Si do pareilles institutions préparent quelques
jeunes gens aux études supérieures, elles ont aussi le
tort incalculable de jeter dans le monde, dépaysés,
incapables et souvent inertes, beaucoup d'enfants de
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