JOURNAL D'YPRES ET DE I/ARRONDISSEMENT
Lk toutpatabled'avance.
YPRES, Bimanche
Troisième année.
- .V
8 JaDTier 1865.
PARAISSANT LE DIMANCHE DE CHAQUE SEÏÏAINE.
P1C1X D'ABOIMEIIIKST
POUR LA BELGIQUE
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Laissez dire, laissez-vous blAmer, mais pnbliez voire penséè.
On s'abonne d Ypres, au bureau du journal, ches Félix Lambin, imp.-lib.,
rue de Dixmude, 55.
On traite a forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres
ou envois d'argent doivent être adressés franco au bureau du journal.
La nouvelle 15co!e de filles a Ypres.
Notre Conseil communal a décrété, dans sa séance
du 15 novembre dernier, l'érection d'une école gra
tuite pour les filles et voté, 5 eet effet, un premier
crédit de 25 mille francs. Cette resolution, accueillie
par l'opinion publique avec un vif sentiment de sa
tisfaction, ne pouvait manquer d'exciter au plus haut
point l'indignation du Propagateur. Nous-mêmes.
pour avoir eu Paudace d'npplaudir aux vues dont Ie
Conseil communal s'est inspiré en cette circonstance,
nous sommes rudement pris a partie par la feuille
cléricale, qui nous accuse, dans un langage dont nous
renortcons a égaler l'urbanité, de vouloir liberaliser,
c'est-a-dire démoraliser Ia femme et de poursuivre
I'anéantissement de la religion catholique dans Ie der
nier refuge qui lui reste Ie cceur de l'épouse et de
la mère.
Le Propagateur ne laisse pas que de nous embar-
rasser un peu. Ne pas lui répondre, c'est lui donner
beau jeu et, en quelque sorte, nous lenir pour bat-
tus. D'uti autre cöté, lorsque, presses de nous dé-
fendre, nous parcourons les trois articles qu'il a bien
voulu consacxer dernièrement a la démonstration
de notre indignité, il se trouve qu'a part une foule
d'injures dont nous n'avons absolument que faire et
qui ne nous toucbent point, ces articles sont tellement
dépourvus d'idees et d'arguments, qu'on ne sail par
quel bout les prendre pour saisir quoi que ce soit
qui mérite une réponse. C'est, du reste, la manière
habituelle de notre pieux contradicteur. fsa polemique
tient moins de la discussion que du sermon, li afïïrme
volontiers il se lamente avec délices sur la perver-
sité du siècleil trouve, pour outrager ses adver-
saires, les libèrètres, une abondance puisée a des
sources iniarissables au besoio même, il a dans la
voix un certain hoquet qui ressemble assez bien a
un sanglot; bref, c'est un sermoneur d'une assez jolie
force et qui doit avoir de beaux moments auprès des
dames de la Congregation et les marguilliers de sa
paroisse; mais la dialectique, le raisonnement et la
démonstration ne sont point son fait et, après qu'il a
fini son affaire,il vous laisse aussi embarrassé pour lui
répondre que si vous ne l'aviez ni lu ni écouté.
De quoi s'agit-il cependant et qu'est-ce qui nous
vaut les injures du Propagateur? Les sceurs de La-
motte sont depuis longtemps, dans notre ville, en
possession du monopole de l'instruction des filles
pauvres. Qu'est-ce que les sceurs de Lamotte For-
ment-elles une institution purement privée De fait,
oui, car en ce qui concerne l'administration des
Diens dont elles jouissent et le système d'éducation
qu'elles pratiquent, elles échappent au controle des
pouvoirs publics. En droitnoncar les biens
qu'elles détiennent proviennent d'une fondation dont
l'administration et la surveillance appartiennent
aux hospices, c'est-a-dire a un établissement pu
blic. Après cela, que les hospices, pour des motifs
que nous n'avons pas a rechercher en ce mo
ment, aientabdiqué leur droit d'administration et de
contróle, peu importetoujours est-il vrai de dire que
les soeurs de Lamotte, jouissant de biens qui appar
tiennent un établissement public, ne peuvent être
considérées comme une institution privée.
De ce principe, que nous défions le Propagateur
de contester, découlent deux conséquences également
incontestables. La première, c'est que les Sceurs de
Lamotte sont on no peut plus mal venues a se plain—
dre de la concurrence que la mise a execution du
projet arrêté par le Conseil communal va ouvrir a
leur établissement. En effet, si l'on peut comprendre
ces plaintes de la part d'une institution privée, elles
sont tout-a-fait inadmissibles venant, d'un établisse
ment qui n'est lui-même qu'une émanation plus ou
moins régulière des pouvoirs publics et qui, dans
tous les cas, puise ses principaux moyens d'existence
dans les ressources publiques. Si les Sceurs de La
motte veulent invoquer les droits de la liberté de
l'enseignement menacés par ('organisation d'une école
communale, qu'elles commencent par se mettre en
régie vis-a-vis de la liberté en restituant aux Hospi
ces !es biens qu'elles détiennentmais, jusque la, il
est vraitnent plaisant qu'on invoque les droits de la
liberté, alors que l'on ne fait soi-même que vivre du
privilege.
Unedeuxièmeconséquence, non moins importante,
est celle-ci Aux termes de la loi du 23 septembre
1842, si chère au parti clérical, les communes ne
peuvent être dispensées de l'obligation d'ètablir elles-
mêmes une école que lorsque dans la localité il est
suffisamment pourvu aux besoins de l'enseignement
primaire par les écoles privées.Hors ce cas, la loi fait
un devoir impérieux aux communes d'ètablir des
écoles publiques ou d'en adopter qui réunissent les
conditions légales pour tenir lieu de l'école commu
nale. Or, l'école de Lamotte n'ètant pas une institu
tion privée, ni dans le sens de la loi de 1842 ni dans
le sens d'aucune loi existanle, il s'ensuit que celte
école, füt-elle la meilleure du monde, ce que nous
contestons formellement, la ville d'Ypres n'avaitque
deux partis a prendre ou bien elle devait adopter,
comme école communale, l'école des Sceurs de La-
motte, cu bien faire ce qu'ellea fait, décréter l'éta-
blissement d'une école communale proprement dite,
dirigée et subsidiée par la commune.
Tenons,pour un moment, que l'enseignement donné
par les Soeurs de Lamotte soit irréprochable et que
sous aucun rapport la ville n'aurait eu aucune bonne
raison de lui refuser son patronage le Propagateur
oserait-il aflïrmer que ce patronage ebt été accepté et
que les bonnes Soeurs auraient consenti a subir le
régime imposé aux écoles patronées par la loi de 1842
Si loin que notre pieux contradicteur pousse pnrfois
l'audace de ses affirmations, nous doutons fort qu'il
aille jusqu'a prétendre que les bonnes Soeurs se se-
raient soumises a ce régime et quant a nous, jusqu'a
ce que l'on nous ait montré en Belgique une seule
école de religieuses vivant sous le régime établi par
cette loi, nous affirmerons que, dans de semblables
conditions, les Soeurs de Lamotte n'auraient pas hé-
sité a repousser le patronage offert par la ville
d'Ypres.
Yoila done, réduites 5 leur juste valeur, les decla
mations du Propagateur. II est démontré, dès a pré
sent, qu'en instituanl Ia nouvelle école, noire admi
nistration n'a fait qu'obéir au vceu impérieux de la
loi et que les dames de Lamotte n'ont aucun grief sé-
rieux a élever de ce chef. Nous pourrions en rester
la; mais comme le Propagateur nous fournit une
bonne occasion de nous expliquer, une fois pour
toutes, sur l'instïtu tion dirigée pa rees dames, on nous
permettra de revenir sur eet intéressant sujet, au
risque de contrister, de plus en plus, l'ame sensible
de leur avocat ofïlcieux.
Dans ce siècle de fiévreuses entreprises, nous
voyons tous les jours des projets ingénieux et lucra-
tifs se réaliser. Tout en donnant au commerce de
nouveaux débouchés par les facilités de communica
tion. on spécule en outre sur la curiositè ou le goüt
des voyages des favorisés de la fortune, pour lesquels
les beautés d'un pays ou l'admiration qu'inspire
quelque grande oeuvre du génie humain, sont des
attraits irrésistibles.
Jusqu'aujourd'hui, la ville d'Ypres semblait ne
point préoccupée des moyens de sortir de sa modeste
situation. Au milieu de ce revirement général d'idées,
de goüts et de plaisirs, elle se tenait isolée. Ses pai-
sibles habitants en étaient réduits a contempler eux-
mêmes les antiques monuments de la cité et les rares
touristes qui nous visitaient, trouvaient que ce n'é-
tait la que du menu fretin a leur offrir. L'attraitde
nos campagnes verdoyantes mais plates ne pouvait
les fixer chez nous.
Heureusement, cette longue indifférence paralt
toucher a sa fin et tout indique le commencement
d'une période nouvelle. Dans un avenir rapproché,
peu de villes en Belgique, même en Europe, offriront
des attraits plus grands qu'Ypres et ses environs.
Qui n'a entendu parler des grottes de Fingal, de
Pausylippe et de celle non moins fameuse d'Antipa-
ros, dont les beautés surpassent tout ce que l'imagi-
nation humaine peut concevoir? Qui ne connalt la
grotte de Han avec ses vastes salles, ses sombres cou
loirs et ses mille images fantastiques et bizarres?
Eh bien! Ypres aura aussi sa grotte et le monde
complera une huitióme merveille
Parmi toules les vastes entreprises qu'on prête au
monde financier yprois, on ditqu'il serait sérieuse-
ment question de creuser, a l'endroit nommè le Mou
lin brülé, un tunnel-grottequi livrerait passage aux
eaux du canal de jonction de la Lys a l'Yperlée. Des
commandes importantes de bloes rocheux et grani-
tiques, de basaites, de stalactites, de stalagmites, etc.,
auraient déja été faites a des agents du gouvernement
anglais et a de grands propriétaires de grottes. II
paraftrait même que le retard apportèdans la livrai-
son de ces principaux matériaux, serait la seule
cause de la lenteur des travaux.
Le passage principal de ce tunnel-grotte s'appelle-
rait le Défilé du Diable. L'interieur serait d'une rare
beauté. Des colonnes, des obélisques, des pendentifs,
desornements de tout genre chargés de cristallisations
brillantes seraient rèunis la pour former le spectacle
le plus enchanteur que l'on puisse imaginer. Des ga
leries latérales conduisant a 1 'Autre de Pluion, au
Boudoir de Proserpine, a la Salle de Cascade, etc.
Pour rendre eet ensemble plus pittoresque le terrain
environnant la grotte serait rendu plus accidenté par