JOURNAL D'ÏPRES DE L'ARRONDISSEMENI
YPRËS, iiimanche Troisième année. 4. 22 Janvier 18ö5.
Le tout payable d'avance.
Paraissant le dimanche de chaque semaine.
PKI\ D'AliOSKEllËST
POUR LA BELGIQUE
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Un Numéro 25 Centimes.
L'OPINION
PHIA »ES A.AAOSCES
ET DES RECLAMES
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i
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ILa nouvelle École de lilies a Ypres.
Les Soeurs de Marie sont, depuis un temps immé-
morial, en possession du monopole de l'enseignement
denos filles pauvres. Pourjuger de la valeur de eet
enseignement, il est un moyen plus sur que d'en
croire sur parole le Propagateur et son sermon e'est
de jeter les yeux autour de soi et de voir ce que eet
enseignement a fait de l'intelligence et de la moralité
de nos jeunes filles du people. Si cette intelligence
s'est développée, si cette moralité a granai, l'honneur
en revient lout entier aux bonnes soeurs mais si le
contraire est vrai, si l'ignorance et l'immoralité sont
en progrès dans la population feminine de nos classes
onvrières, l'enseignement des dames de Lamotte doit
être condamné et nous avons raison de demander a
la commune qu'elle leur eulève au plus tót un mono
pole qu'elles n'ont su exercerqu'au profit du mal.
Encore une fois, nous n'entendons contester ici ni
le dévouement ni la charité évangélique des bonnes
soeurs. Mais c'est préciséraent paree que nous sommes
convaincus qu'elles font tout ce qu'elles peuvent, que,
voyant le peu qu'elles font, nous demandons que
d'aulres, plus capables, sinon plus dévoués, soient
chargés de la besogne.
Mais nous poursuivons, d'après le Propagateur, un
autre but que celui de l'amélioration de l'enseigne
ment ce que nous voulons, c'est exclure l'élément
religieux de l'enseignement populaire, bannir le prêtre
de l'ecole et soustraire l'enfant a son influence légi-
time.
En ce qui nous concerne personnellement, nous
n'avous jamais fait mystère de nos idéés en matière
d'enseignement. Ces idéés, nous les avons exposées
assez souvent dans 1'Opinion pour que nous puissions
nous croire dispensés de les reproduire chaque fois
qu'il plaira au Propagateur de les denaturer. Mais il
ne s'agit pas, dans la question qu'agite le Propagateur,
de nos idees personnelles sur l'enseignement. L'école
communale, que 1'Opinion s'enafïligeou s'en réjouisse,
sera très-certainement placée sous le régime de la loi
de 1842; l'enseignement religieux y sera donné aux
enfants, sous la surveillance du clergé elle sera sou-
mise, comme celle des garcous, a l'inspection ecclé-
siastiqueen un mot, l'autorité religieuse, pour nous
servir de ('expression affectionnée par la presse clé-
ricale, l'autorité religieuse jouira, dans l'école nou
velle, de toute la prépondérance que lui assure la loi
actuelle sur l'enseignement primaire. Dés lors, que
signifient les doléances du Propagateur et les sinistres
prédictions dont il cherche a effrayer les ómes faibies
et les consciences timorées? Nous ne pouvons y voir
et le public n'y verra avec nous qu'une pitoyable ré
clame en faveur d'un établissement mis aux abois par
lacrainte d'une concurrence contre laquelle il se sent
incapable de lutter.
Si le régime de la loi actuelle ne vous suffit plus,
dirons-nous au Propagateursi vous croyez avoir
droit a une protection plus efficace, h des garanties
plus sérieuses que celles qu'elle vous accorde, osez-le
dire et déclarez que, jusqu'h ce que ces garanties
soient données au clergé, celui-ci a le droit, le devoir
de refuser son concours aux établissements destruc
tion pubüque créés par les communes. Mais si ces ga
ranties sont suffisanles a vos yeux, si la loi de 1842
donne a 1'inQuence religieuse toute la part d'autorité
a laquelle vous soutenez qu'elle a droit, vos critiques
a l'égard d'un établissement soumis au régime de
cette loi, sont parfaitement ridicules et vous ne trou-
verez pas un homme sérieux, si religieux qu'il soit,
pour les appuyer. De deux choses l'une la loi est
mauvaise ou elle est bonne. Si elle est mauvaise, le
clergé manque'a ses devoirs en s'associant a son exé-
cution. Si elle est bonne, vous êtes mal venu a con-
damner un établissement qui se soumet d'avance a
cette loi et qui ne peut se dispenser de s'y soumettre.
Mais laissons-la la nouvelle école, que les cris d'a-
larme poussés par le Propagateur ne mettent pas le
moius du monde en danger et revenons a nos bonnes
sceurs de Ste-Marie.
L'acte de fondation Lamotte porte que le personnel
attaché a l'école sera de huit religieuses. Aujourd'hui,
sous l'empire du laissez faire, laissez passer pratiqué
par l'administration des Hospices, l'école compte ni
plus ni rnoins que vingt-cinq religieuses. Et voyez le
miracle a l'époque oü elles n'étaient qu'une dizaine,
les ressources de la fondation leur donnaient a peine
de quoi vivre; le compte qu'elles remettaient annuel-
lement aux Hospices accusait un déficit permanent de
plusieurs centaines de francs. Mais dès qu'elles sont
affranchies de tout contróle, la situation change le
deficit disparail en même temps que le personnel de
1'établissemenl s'augmente de prés du double. II n'y a,
en vérité, que les congrégations religieuses pour opé-
rer de ces tours de force économiques.
Que les fidèles croyants ne voient la qu'un efi'et de
la miséricorde divine et une marque visible de la pro
tection dont elle cnuvre l'oeuvre de nos bonnes
soeurs, c'est leur affaire. Mais le Propagateur nous
permettra saris doute, a nous qui ne sommes que des
mécréants et des seeptiques, de ne pas nousoontenter
de cette explication supernaturelle. Les Hospices sont
comptables envers le pays des biens de la fondation
Lamotte. Nous demandons aux Hospices qu'ils rem-
plissent leur devoir en obligeant les bonnes sceurs
qui ne sont, après tout, que leurs mandataires, a
leur rendre compte des biens qu'elles détiennent et
de l'emploi des revenus que les biens produisent.
Nous leur demandons de tenir la main au strict ac-
complissement des intentions du fondateur, tant en ce
qui concerne Ie personnel des institutrices que pour
ce qui regarde l'enseignement lui-même. Si ce per
sonnel est trop nombreux, s'il excède, comme nous
en avons la conviction, les besoins de l'enseignement,
il y a detournement de deniers publics et les Hospices
seraient coupables de forfaiiure s'ils tardaient plus
loogtemps a sévir. Si l'enseignement est mauvais ou
tout au moins insufbsant, c'est a eux, encore une
fois, de coutraindre les soeurs a l'améiiorer et, en cas
de refus ou d'impuissance des institutrices actuelles,
de les rem placer par d'autres, plus dociles ou plus
capables. Telle est la régie de leur devoir et nulle
consideration humaine ne peut. les affranchir.
Ah, nous le savons, dans un pays infecté de cléri-
calisme comme le nólre, ces choses-la ne se font pas
sans quelque peine. On aime a se parer du titre de
liberalon affecte, vis-a-vis du clergé, des airs d'in-
dépendance; mais s'agit-il de heurter de front ses
prétentions, de porter une main hardie et résolue sur
ses privileges, vous voyez tous ces braves se cacher
les uns derrière les autres comme des écoliers surpris
en faute et si, dans le nombre, il en est un qui ose
tenir tête a I'orage clérical, tenez pour certain que
celui-Ia sera abandonné, renié par les autres et traité
de cerveau brülé, de radical, voire même de républi-
cain.
Nous savons tout cela et, néanmoins, nous ne re-
culerons pas. La loi a la main, nous nous placons en
face do l'administration des Hospices et nous la som-
mons, au nom du droit violé, au nom de la volonté
du fondateur Lamotte indignement méconnue, de se
remettre en possession des biens qui lui appartiennent
et de ne pas souffrir plus longtemps que ces biens
soient détournés de leur destination. Si les Hospices
hésitent, nous nous adresserons a la Commune et si
celle-ci nous refuse, a son tour, satisfaction, nous
porterons noire plainte jusqu'au Gouvernement lui-
même et nous la ferons retentir si loin qu'elle aura
son écho dans le pays tout entier.
Avant et après.
Au mois de rnai de l'année dernière. dans une
séance de l'Association, fut faite la proposition de
réviser le règlement. Combattue d'abord avec achar-
nement, cette proposition amendée fut finalement
adoptée a la presque unanimité des membres pré
sents. Les auteurs de l'amendement étaient inspirés
par un sentiment de conciliationce sentiment dicta
également la resolution de l'assemblée.
Malheureusement les élections du 11 aoüt, surve-
nues a l'improviste, ne permirent pas de s'occuper de
cette question aussitót qu'on l'aurait désiré. Pourtant
le comité ne perdit pas la chose de vue et, dans une
de ses réunions au commencement du mois d'aoüt,
un homme influent ayant proposé le mois de décembre
pour la convocation de l'assemblée générale et la
discussion du règlement, sa motion fut adoptée avec
enthousiasme. Nos politiques les plus intraitables
étaient devenus plus doux que des agueaux. Pour-
quoi ce qui était mauvais au mois de mai était-il de-
venu excellent au mois d'aofit.
11 est juste de dire que cette fois l'idée éwanait
d'une bouche autorisée. Ajoutons encore qu'a la veille
des élections générales on croyait avoir besoin de
toutes les forces pour la lutte et, sous l'influence de
la peur, on se montra conciliant. On le voit, Ia peur,
comme la foi, opère des miracles.
Guoiqu'il en soit, cette pensée de conciliation sem-
bla présider aux élections et il ne dèpendit pas de
nous qu'elle ne devint une réalité pour l'avenir comme
elle était une apparence pour le présent. Mais ailleurs
on en avait décidé autrement.
Nous avons dit plus haul que l'Association devait
se réunir au mois de décembre. Jusqu'a présent, pas
de nouvelles. Le danger imminent est passé, les mar-
mottes dorment.
VOpinion est venue a deux reprises troubler ce
bienheureux sommeil et rappelerau respect des en«