bert, dont Thucydide ditCléon, fils de Gléenète,
le plus violent des ciloyens dans toutes les cir-
Constances,était l'homme qui avait le plus d'ascen-
dant sur le peuple.
Aristophane met le peuple d'Athènes sur Ia scène,
sous les traits de Demos, vieillard irrascible et rado-
teur que sa faiblesse livre aux charlatans qui Ie fla-
gornent avec le plus d'impudence. Nicias et Démos-
thènes, conseillers du peuple, se plaignent de ce que
Cléon soit parvenu, a force d'intrigueset de bassesses,
gouverner aveuglément les Athéniens. En cherchant
se débarrasser de lui, ils découvrent un oracle an-
noncant qu'il doit être renversé par un charcutier.
Oil trouverons-nous eet homme, dit Nicias?
En voici un qui vient au marché, répond Dé-
mosthènesles Dieux nous l'envoient.
C'eSt lè que commence cette scène charmante oü
ils persuadent au charcutier qu'il estappelé a gouver
ner la République
Démosthènes. Bienheureux marchand de bou-
dinsl approche, homme chérimonte ici, toi qui nous
apparais comme le sauveur de la République
Le charcutier. Qu'est-ce? que me voulez-
vous?
Démosthènes. Viens apprendre de nous ton
bonheur et ta haute fortune... Allons, dépèce d'abord
ton attirail; ensuite adore la Terre et les Dieux.
Le charcutierVoila qui est fait. Dequoi s'a-
git-il?
a Démosthènes. Homme fortuné, homme riche,
toi qui aujourd'hui n'es rien et qui domain seras au
faite de la grandeur 1 chef de Ia bienheureuse
Athènes 1
Le charcutier. Que ne me laisses-tu laver
mes tripes et veudre mes saucisses? pourquoi te
moquer de moi?.... Dis-moi comment moi, simple
charcutier, deviendrai-je un personnage
a Démosthènes. C'est pour cela même que tu
deviendras grand, c'est-a-dire paree que tu es un
vaurien de la lie du peuple et effronté.
Le charcutier. Je ne me crois pas digne de ce
haut rang.
Démosthènes. Quoi done D'oü viens que tu
ne t'en crois pas digne? On dirait que tu as quelque
bon sentiment. Serais-tu done d'une race d'honnêtes
gens?
Le charcutier, J'en atteste les Dieux, j'appar-
tiens a la canaille.
Démosthènes. Mortel fortuné, les heureuses
qualités que tu as recues pour les affaires publiques
Le charcutier. Mais, mon cher, je n'ai pas re$u
la moindre education, si ce n'est que je sais lire, et
encore assez mal.
Démosthènes. Ceci pourrait te faire tort de
savoir lire, même assez mal. Le gouvernement po
pulaire n'appartient pas aux hommes instruits ou de
moeors irréprochables, mais aux ignorants et aux
infames.
Le charcutier.Mais j'admire comment je serai
capable de gouverner le peuple.
t Démosthènes. Rien de plus facile tu n'auras
qu'è faire ce que tu fais brouille les affaires de la
même facon que tu amalgames tes hachis, cajole le
peuple par des propos de cuisine. Tu as tout ce qu'il
faut pour entrainer la populace, voix terrible, natu
rel pervers, impudence de halle tu as toutes les
qualités nécessaires pour le gouvernement.
La comédie d'Aristophane était la lecon de ceux
qui gouvernaient au nom du peuple et du peuple lui-
même; comme les drames antiques, elle était inves-
tie d'une sorte de magistrature morale et politique.
C'est ce qui a fait dire a M. Bancel, daus un de ses
précédents entretiens, que le théatre chez les Grecs
était une tribune. La liberté d'alluresde l'auteur des
Chevaliers fait voir suffisamment que la censure, cette
déesse moderne, n'était point née Cléon lui-méme
apparait sur la scène; il ne se laisse pas supplanter
sans crier; il rappelle au peuple avec quel zèle il l'a
servi
O Peuple, peut-il y avoir un citoyen qui t'aime
plüs que moi? Tant que je t'ai conseillé, j'ai enrichi
ton trésor, extorquant aux uns, vexant, harcelant
les autres, sans jamais tenir compte des parliouliers,
pourvu que je tesois agréable.-
O Peuple, il n'y a rien la de merveilleux, dit le
charcutier, j'en ferai tout autant.
Plus loin, Cléon ajoute Je volais pour le bien
del'Etat.
Le chceur reproche au peuple sa faiblesse
O Peuple, ta puissance est grande, tous les hom
mes te craignent comme un maitre mais tu es facile
séduire, tu aimes a être flatté et être trompé;
celui qui parle te fait toujours sa dupe, et alors ton
bon sens déménage.
Et le peuple II n'y a guère de bon sens sous vos
cheveux si vous pensez que je ne sais pas ce que je
fais. C'est voloutairementque j'extravague ainsi; car
j'aime aussi a boire tout le jour et a prendre pour
chef un voleur que je nourris; et quand il est bien
engraissé, je l'immole.
Conclusion qui doit donner a réfléchir ceux qui
flattent les instincts de Ia multitude le cornice popu
laire qui les porte au Capitole les précipite aussi de
Ia roche Tarpéienne.
Le succès des démagogues est le signal de la déca-
dence d'Athènes Ie peuple s'abandonne et devient
indigne de la liberté Athènes donne le spectacle de
Rome dans sa décrépitudeelle demande du pain, des
jeux.... et un maitre.
Mais avant qu'Athènes appartienne a Philippe le
Macédonien, l'éloquence est appelée y faire enten
dre ses plus magnifiques accents.
Socrate, endormi dans l'immortalité, laisse des
disciples qui continuent contre les sophistes le com
bat du droit contre la force Xénophon, ême sage et
sensée, qui a, dit M. Bancel, la probitéde l'esprit et
l'exactitude de la mémoire, qui caractérisentles hom
mes du Nord, parle, en ces termes, des sophistes
dans VEconomique
J'admire, en vérité, ces gens qu'on appelle so
phistes, qui prétendent pour Ia plupart guider la jeu-
nesse vers Ia vertu, tandis qu'en effet ils l'éga-
rent.
Combien n'ont-ils pas publié d'écrits frivoles qui
amusent inutilement Ia jeunesse, sans lui présenter
aucun trait de vertu? Peut-être mon style est-il
dépourvu d'élégance, mais je ne suis point jaloux de
eet avantage. J'ai a coeur de tracer les legons néces
saires ceux que Ton forme a Ia vertu. Or, ce nesont
pas les mots, ce sont les principes solides qui in-
struisent. x>
En même temps qu'il est le plus grand des disci
ples de Socrate, Platon est un des plus beaux génies,
Ie plus délicat et le plus charmant esprit dont I'hu-
manité s'honore. Les anciens l'appelaient le Dieudes
philosophes; Deus ille noster, ditCicéron.
II compléte et agrandit son maitre. Dieu que de
belles choses ce jeune homme me prête, s'écrie So
crate, après avoir lu Ie Phèdrel A vingt-sept ans,
il entendit Socrate pour la première fois; il brula
aussi tót ses tragédies, qui devaient disputer le prix
aux fêtes de Bacchus et se fit le disciple de Socrate.
Grand coeur et grande intelligence a la fois, il consa-
cra un admirable discours a la défense de son maitre
et, celui-ci mort, il quitta Athènes. II alia a Mégare, a
Cyrêne, en Italië, puis en Egypte, se rendit en Sicile,
auprès de Denys-le-tyran, qui le vendit comme es-
clave, y retourna plus tard, fut chassé par Denys-le-
jeune et revint enfin a Athènes oü il se mit a enseigner
dans les jardins d'Academus.
{La suite auprochain n°.)
ACTES OFFICIEUS.
Un arrêté royal du 20 février 1865 accorde
Un subside de 9,000 francs l'administration communale
d'Ypres, pour Ia restauration du bêtiment des Halles et de Ia
salie du Magistral.
Un subside de 1,100 fr. S la même administration, pour la
décoration inférieure du bütimenl des Halles.
Instruction primaire. Le sieur Rondelle, élève diplómé
de la section normale de Bruges, sous-instituteur I'école
communale d'Ypres (garjons), a été admis au serment.
Par arrêté royal de date récente, Ie sieur J. Diegerick ar-
chiviste et bibliolhéeaire de la ville d'Ypres, est aiiforisé
porter la décoration de chevalier de 2= classe de l'ordre de
P hilippe-le-Magnanime.
Ft ITS OIVEKS.
Le mauvais temps a contrarié notre foire aux chevaux, qui
était beaucoup moins animée que celle de l'année dernière.
Un grand nombre de chevaux, et quelques-uns fort beaux
ont été présentés au concours du ler mars. Nousdonnons
plus loin le résultat de ce concours.
Les vols de nuit se multiplient d'une manière déplorable
dans nos campagnes. On en signale plusieurs commis avec
effraction.
Théatre. Au lieu d'une de ces représentations bour-
rées d'une série de nouveautés vieilles et nouvelles, Ia direc
tion a ménagé h ses habitués, I'occas.ion du Carnaval, un
drame en cinq actes et cinq tableaux. A cette beure de folie
oü on saute et on danse S qui mieux mieux, quelque joyeu-
seté ou quelque bouffonnerie de haute graisse eüt été d'un
meilleur choix.
Le public de notre théütre n'est pas très-friand de ces
pièces siniStres, semées de situations noires et sombres oü
hurlent l'adultère et le meurtre avec tout le garde-meuble du
drame, avec les pistolets et les poignards, les souterrains et
les porles secrètes. Aussi Ia salie n'était guère comble pour Ia
représentation de ce jour et bien des vides se seraient rempli»
par l'annonce de quelque spectacle d'une folie gaieté inatigu-
rant joyeusement un Carnaval déjè trop triste en notre ville.
Dans le Médecin des Enfants, M. Silvy a montré loute la
passion et l'ardeur d'un grand comédien il possède un talent
qui lui seul ferait le succès d'un mauvais ouvrage et qui a
fait la réussile de celui-ci. M. Léautaud a fait preuve de toute
Ia noblesse de caractère et la dignité de sentiment qu'exige le
personnage de Delormel, et la rondeur et la bonhomie n'ont
point manqué S M. nenrius,
M»i« Foresty, Silvy et Verteuil ont été très-satisfaisante»
dans les röles de Louise, Lucile et Toinette.
En un mot, les artistes ont pleinement justifié,comme tou
jours, les éloges et les applaudissemenls du public.
Nous appelons ['attention de Ia Direction sur l'énorme du-
réedes entr'actes, qu'aucune raison ne justitie et qui consti-
tue un légitime sujet de mécontentement du public.
La première remise des miliciens de la Ievée de 1865, est
fixée au mardi 2, mercredi 5 et jeudi 4 mai prochain.
En conséquence, les jeunes gens, dont il s'agit, seronl re-
mis h l'autorité militaire, dans l'ordre suivant t
Le 2 mai. Ceux des arrondissemenls de Bruges, Ostende
et Dixmude.
Le 5 mai. Ceux des arrondissemenls de Fumes, Courtrai
et Thielt.
Le 4 mai. Ceux des arrondissemenls de Roulers et
d'Ypres.
Les substiluants et rempla(.ants, admis pour des miliciens
de la levée de 1865, seront présenlés l'incorporation en
même temps que ces derniers.
La seconde remise des miliciens aura lieu le mercredi 31
mai suivant.
Dans cette dernière remise ne seront compris que les mi
liciens qui se trouvent dans une disposition spéciale et excep-
tionnelle et ceux appelés pour compléter le contingent assi-
gné aux communes, en remplacement des hommes qui au-
ront été renvoyés par l'autorité militaire l'examen de Ia
députation permanente,
Dans la nuit de dimanche lundi, im vol de bijouteries a
été commis Loo au préjudice des époux Boussemaere. Le»
Voleurs sont encore inconnus.
On lit dans le Memorial de Courtrai
La cause en dommages-intérêts intentêe par le sieur Van-
devenne, cabaretier Aelbeke, contre le curé de cette com
mune, pour propos calomnieux proférés en chaire, vient de
recevoir son dénoüment.
M. le juge de paix Vanderbeken, en son audience d'hler,
vient de eondamner Ie curé d'Aelbeke, 200 francs de dom
mages-intérêts et tous les frais.
i Lejugement sera publié et affiché un certain nombre
d'exemplaires dans Ia commune d'Aelbeke.
On écrit de Termonde, que Ie curé de Munck a été condamné
un an de prison et 200 fr. d'araende, pour attentats Ia pu
deur. Cette affaire a eu dans tout le pays de Waas un grand
retentissement.
Le sieur De Munck a jugé prudent de ne pas comparaitre
devant la justice. Ou assure qu'il a quitté lepays.
Les feuilles cléricales notts injurient, dit VOrganede Mons,
quand nous leur disons que le clergé fait de la religion une
marchandise, du temple une boutique. La catastrophe des
Chevalières nous a mis même de constater une fois de plus
le bien fondé de cette assertion.
M. le curé de Wiheries procédé aux funérailles de trois vic-
times de la catastrophe. On va sans doute croire qu'il s'asso-
cie l'oeuvre philanthropique entreprise dans le pays, et qu'il
abandonne le eoüt des funérailles la souscription ouverte
en faveur des malheureuses victimes de Dour. Erreur M. Ie
curé de Wiheries s'empresse d'envoyer au charbonnage des
Chevalières sa petite note, montanl soixante-quinze francs
environ, les prières coütent gros de nos jours et il a la
pieuse délicatesse d'informer son débiteur qu'on célébrera
quelques messes l'intention des trois victimes, si le char
bonnage veut ajouter une huitaine de francs.
Ce fait n'a pas besoin de commentaires, pas plus que eet
autre Un collègue de M. le curé de Wiheries a refusé, quant
lui, de procéder aux funérailles d'une des victimes, san»
être garanti du paiement des dites funérailles.
Les protestations contre la peine de mort se multiplient en
Allemagne. Après le vote de la Chambre des députés du Wur-
temberg, que nous avons mentionné, nous citerons celui dn
Landtag de Weimar. Dans sa séance du 18 février, cette
Chambre des députés s'est prononcée pour ('abolition de ia
peine de mort, la majorité de 23 voix contre 5.
On a parlé de Ia pauvreté de Proudhon. Je n'en sais pa» de
preuve plus touchanle que la letlre suivante publiée par Ia
Nouvelle Revue de Paris
Mon cher B...
En vous voyant hier, si pSle, si aballu, j'ai dans me»
préoccupations, oublié de vous demander si vous aviez
diné. Ce matin, au réveil, ce souvenir me revient et me
tourmente. Je vous envoie la moilié de ma fortune cinq
francs. Si mon grand ouvrage que je termine (De la Justice
dans la Revolution et dans l'EgUse) est arrêté, je »etai en