de les lui conserver; mais son coeur, mais sa raison, mais sa santé, mais toutes les forces qui pourraient en faire un ouvrier intelligent, qui lui donneraient le bien-être materiel, les jouissances de l'esprit et la vi- talité morale, tout cela qu'on le sacrifie, qu'on le dis- sipe, qu'on le jette au vent, c'est le droit du père I Le père ne pourrait toucher aux 30 francs de l'enfant, il ne pourrait lui donner un coup, il ne pourrait l'en- fermer pendant deux jours, sans s'exposer a des peines criminelles. Mais il peut détruire en lui toutes les facultés qui devaient le rendre propre au travail, a la conscience, a la liberté. Le créancier ordinaire a sur son débiteur des droits très-limités au père, il suffit de dire que son enfant lui doit 15 centimes par jour il a la contrainte par corps. Mais il ment! Cet enfant ne lui doit rien! c'est lui qui doit a l'enfant! Si, pour ne pas l'élever, il l'aban- donnait sur la voie publique, la Cour d'assises l'at- teindrait. II fait pis. 11 le garde pour l'exploiter. II estropie ses membres et sa raison. Pour 15 centimes de salaire pendant cinq ans, il voue sa vie entière a l'indigence. Et ceci ne serait pas un crime 1 Et tout un peuple assiste et laisse consommerII n'est done plus rien dont on dise que c'est lache 1 Non cela ne peut pasdurer. Si nous n'avons pas plus d'esprit que nos pères, nous avons une conscience qui parle plus haut 1'instruction est obligatoire. L'insuffisance des locaux est un crime de la nation. Quoil vous décrétez l'obligation du père, et la vötre, vous ne la remplissez pas 1 Vous avez des palais pour vos Chambres, vos ministres, vos Musées et vos Cours de justice; vous batissez des colonnes et des églises monumentales et vous n'auriez pas un abri pour le plus petit de vos enfants? Vous n'avez pas d'ar- gent?Vous mentez, comme mentait le père. Mon- trez votre caisse 160 millions! Tout estengagél Oui, vous avez tout engagé, mais pas plus que le reste, vous n'avez le droit d'oublier la dette aux en fants. Payez done sur-le-champ une dette criarde, une dette d'honneur et une petite dette. Empruntez ou privez-vous. Les hommes d'Etat se trompent sur l'étendue de leur responsabilité. 11 y a des choses dont ils devraient dire Je saurai faire cela, ou je m'en irai. L'Association libérale de Bruges a eu samedi sa séance annuelle. 11 résulte du rapport du comité que sa situation est très-prospère. Une pétition signée par un grand nombre de mem bres demande le vote par ordre alphabétique, i'em- ploi de bulletins imprimés enfin l'inscription sur les list.es électorales, pour la commune et la province, des citoyens qui, aux termes de la loi du 18 mars 1838, sont appelés a remplir les fonctions de jurés. La pétition demande aussi des modifications aux lois sur les élrangers. De toutes les associations établies dans les diffé rents chefs-lieux d'arrondissement, celle d'Ypres est la seule, croyons-nous, qui ne s'occupe jamais de l'examen d'aucune question politique. Conférences de M. ÏSA5CEL. (Suite.) Le génie de Platan est le plus naturellement dra- matique de l'antiquitéla grandeur de son style n'est égalée que par la pureté desa philosophiepar le fond de ses doctrines il est le précurseur du Chris- tianisme.Les néoplatoniciens accusèrent les chrétiens de s'être emparés de ses principes et les Pères de I'Eglise supposèrent que le fondateur de 1'Académie avait la counaissance des Ecritures. M. Bancel, en développant les idéés de Platon sur Dieu, a produit une impression profonde sur son au~ ditoire, lant sa parole éloquente s'est inspirée de la splendeur de son sujet. Le Dieu de Platon est un Dieu unique, immuable, infini et éternelêtre céleste et ineffablesource in- tarissable de l'intelligence et de l'étre avant qu'il eut fait l'univers, il étaitcar il n'a jamais eu de com mencement il existait dans les profondeurs de l'éter- nité. Egalement éternelle, la nvatière vivait avec lui, en proie a deux mouvements contradictoires, l'un, cher- chant a réunir ses partiesl'autre, les séparant a ('instant. Ainsi existaient de toute êternitê Dieu, auteur de tout bien la matière, principe de tout mal. Dieu avait résolu de former l'univers suivant un modèle immuable et parfaitquand l'heure fut venue, la sagesse éternelle donna ses ordres au chaos et aussitót toute la masse fut agitée d'un mouvement fécond et nouveau. Ainsi Dieu fit le mondeil lui donna la forme sphé- rique, la plus parfaite de toutes,et l'assujettit au mou vement circulaire, le plus convenable a sa forme; il créa une série de génies inférieurs qui il confia I'ad- ministration des astres puis, il fit l'homme, capable de distinguer le juste de l'injuste, éclairé par la rai son et la conscience. C'est ainsi que la Gréation fut engendrée par la volonté divine d'après le type que Dieu avait concu. Les idéés de Platon sur le droit et Ia société sont développées dans cet admirable dialogue de la Répu- blique, auquel, comme dit Pierre Leroux, toutes les Muses semblent avoir travaillé de concert. La cité de Platon est un idéal que, de l'aveu du philosophe, on ne peut espérer de réaliser N'exige pas de moi, dit Socrate, que je réalise d'une manière absolue, le plan que j'ai tracé; mais si nous parvenons a gouverner un Etat d'une manière qui en approche, dés lors notre but est atteint. Platon est de ces archanges qui traversent les fanges humaines sans mouiller leurs pieds d'artistesj> son nom brille cóté de ceux de Jean de Patmos, de Campanella, de Morus, de Fourrier; il semble ces poëtes que l'humanité n'a point de chalnes et que les peuples ont des ailes. Mais l'utopie d'aujourd'hui est souvent la réalité de demain; c'est ce qui fait dire a l'auteur des Rayons et des Ombres Le Poëte en des jours irapies Vient préparer des jours meilleurs, Il^est l'homme des utopies; Les pieds ici, les yeux ailleurs. C'est lui qui sur toutes les têtes, En tout temps, pareil aux prophètes, Dans sa main, oü tout peut tenir, Doit, qu'on l'insulle ou qu'on le loue, Comme une torche qu'il secoue, Faire flamboyer l'avenir Foule qui répands sur nos rêves Le doute et l'ironie A flols, Comme l'Océan sur les grèves Répand son rêle et ses sanglots, L'Idée auguste qui t'égaye A Cêtle heure encore bégaye Mais de la vie, elle a le sceau Ève contient la race humaine, Un muf l'aiglon, un gland le chêne Une utopie est un berceau! Ce n'est point a dire qu'il faille applaudir toutes les idéés de la Républiquenon; si M. Bancel avait voulu une facile victoire, il aurait pu, comme il l'a dit, protester au nom de la familie, de la propriété, de l'héritage et d'autres principes non moins respec tables, contre les erreurs du philosophetout en ré- pudiant ces théories, nées de l'exagération du prin cipe de l'unité, M. Bancel a préféré s'attacher a l'exa men de la théorie de la justice, qui est la gloire de Platon et qui lui a valu le surnom de divin. Platon n'était point de ceux qui proclament la légitimité du succès et professent que la fin justifie les moyens; il n'eut point célébré le 18 brumaire,excusé la mort du due d'Enghien et blamé la guerre d'Espagne, par cela seul qu'elle fut un échec, Adversaire implacable de l'utile et de la force, dont les sophistes voulaient faire Ia base de Ia politique, il disait avec Socrate qu'il ne souffrirait pas qu'on at- taquêt la justice devant lui sans la défendre, tanl qu'il lui resterait un souffle de vie. Un gouvernement juste est comme un homme juste, disait-il; les lois éternelles de la justice ne sont point faites uniquement, en effet, pour les peu ples, elles sont faites aussi pour les grands hommes, et l'humanité n'a pas besoin qu'on la sauve par des moyens illégitimes. L'idée du droit resplendit dans l'oeuvre de Platon il est aussi sévère pour les peu* pies qui abdiquent leur liberté que pour les tyrans qui la suppriment; le bonheur des peuples, comme celui de l'individu, lui parait inséparable de la jus tice; le juste est seul heureux le tyran triomphant n'est qu'un esclave <i soumis a la plus dure et a la plus basse des servitudes, et Ie flatteur des hom- mes les plus méchants. Jamais il ne peut assouvir ses passions Ce qui lui manque va bien au-dela de ce qu'il possèdequiconque saura voir dans Ie fond de son ême trouvera qu'elle est vraiment pauvre, toujours saisie de frayeur, toujours en proie aux douleurs et aux angoisses. Non répétons-le avec M. Bancel, Platon ne plaga point dans le succès la consecration des actions hu maines pour lui, l'homme injuste que la fortune choie et que la multitude honore demeure un homme injustele juste, au contraire, füt-il calomnié, fouetté, chargé de fers, trainé dans l'ignominie, li vré au bour- reau et attaché a la croix, rayonne de toute la lu- mière de la justice. C'est a cette école que se sont formés les Démos- thènes, les Hyperide, les Lvsias et les Lycurguemais au culte des intéréts immatériels succeda le culte de l'argent; alors la liberté déserta Athèges, entrainant avec elle l'éloquence. Ainsi la parole suit toujours le sort du droit; partout oü celui-ci est vaincu, celle-lè se tait; union noble et féconde, qui fait de l'éloquence la voix de la justice et de la liberté. M. Bancel a terminé, par ce brillant entretien, une première série de cinq conférencesabandonnant l'antiquité pour le seizième siècle, il embrassera,dans une prochainc étude, fixée au samedi 25 mars, l'é- poque de la Renaissance. Ville d'Ypres. Covsi:11. Commusal. Séance publique du Samedi 4 Mars 1S65. (Suite. M. Yanalleynes demande que le bail a contracter entre la Ville et les Hospices, pour usage de Ia prison municipale, soit de 50 ans au lieu de 15, afin que l'au- torité communale ne se trouve pas, dans peu d'an- nées, a la merci des Hospices. L'assemblée décide que la durée du bail sera réglée lorsqu'il s'agira des autres conditions et elle adhère aux conclusions du rapport ainsi modifiées. Elle ar- rêle encore le budget des Hospices et adopte, sur l'avis favorable émis par M. Bourgois au nom de la 2" commission, le cahier des charges, clauses et condi tions pour la construction d'une cuisine avec dépen dances a l'Hópital Notre-Dame. Les Hospices auront done enfin leur cuisine Qu'ils n'oublient pas le fourc'est indispensable pour faire des brioches l Nous voici arrivés, si pas a l'objet le plus impor tant de la séance, du moins celui qui a fait Ie plus de bruit. M. Boedt demande la parole pour s'opposer au huis- clos. Une lettre, destinée a être communiquée l'ad- ministration des Hospices, a été lue publiquement; il ne comprend done pas que la réponse des Hospices ne fut pas également publique. M. le bourgmestre objecte que la loi prescrit le huis-clos dès qu'il s'agit d'une question de personnes et, par une singulière contradiction, il ajoute qu'iZ est vrai que la question de personnes vient a tomber, la dette ayant été acquiltée. M. Boedt maintient néanmoins ses premières ob servations et ajoute que la lettre a laquelle il vient de faire allusion, quoiqu'étant une affaire personnelle, n'en a pas moins été rendue publique. Quoiqu'elle n'ait pas atteint complétement le but, l'interpellation de M. Boedt a eu pourtant un résultat utile. Elle a coutraint a initier l'auditoire a Ia plus grande partie du rapport et a sa discussion elle a fait avorter un projet ourdi dans l'ombre et que l'ordre du jour est venu révélerelle a empêché, en un mot» que l'on étouffat sous l'éteignoir administratif une quereile qui semble effrayer ceux-la surtout qui l'ont fait naltre. M. Lannoy demande que, puisqu'on prononce le huis-clos, les intéressés soient aussi tenus de se re- tirer. MM. Vandenboogaerde, Vandenbroucke et Beau- court quitteöt la salie. M. Beke donne lecture de la première partie de son rapport. On raconte que cette lecture a été fréquem- ment troublée par de vives interruptions et on glose beaucoup des lettres échangées entre les Hospices et leconseiller communal, lettres qui respirent, parait-il, la plus exquise délicatesse et les plus nobles senti ments. Ne désespérons pas de les voir figurer un jour dans quelque Manuel de style épistotairece seront pour les futures générations des modèles du genre. Les portes s'ouvrent de nouveau au public qui at- tendait avec impatience, au moment oü Ie rappor teur, parvenu a la fin de la première partie de son rapport, conclut qu'il est devenu inutite d'agiter la questionparee que, la dette aequittée, il n'y a plus lieu pour le Conseil de s'en prëoccuper. Reste le principe qu'il s'agit d'examiner. Les Hospices doivent-ils accueillir l'Hópital les domestiques malades?

HISTORISCHE KRANTEN

L’Opinion (1863-1873) | 1865 | | pagina 3