JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPRES, Dimanche
Troisième année.
- N° 19.
1 Mai I860.
I*KIX »'AB®KSEHEiT
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Correspondance particuliere de i'OPLI'IOW.
Bruxelles 8 Mai 1865.
En dépit des bulletins rassurants publiés chaque
jour par les organes de la presse ministérielle, il n'est
malbeureusement que trop certain que la santé du
Roi decline rapidement el, qu'a moins d'une réaction
favorable, dont la science elle-même désespère, une
catastrophe est imminente. Vous le dirai-je? on n'en
est plus ici a compter sur une gnérison. Les opti-
mistes n'osent pas espérer uü-dela d'un statu quo plus
ou moins prolongé, dont I'issue fiuale n'est douteuse
pour personne, si ce n'est peut-être pour S. M. elle-
même. Le Roi, dit-on, ne croit pas a la gravité de son
mal. Sa robuste el vigoureuse nature a triomphé de
tant d'epreuves qu'il lui semble que, cette fois encore,
elle finira par prendre Ie dessus. Aussi a-t-il exigé
que l'on supprimAt du Moniteur les bulletins qui ont
paru dans les derniers jours de la semaine dernière,
pour les remplacer par les nouvelles que nous ap-
portent chaque matin, sous une forme officieuse,
VEtoile beige et Vindépendance.
A l'heure oü je vous écris, le due de Brabant n'est
pas encore de retour A Bruxelles, inais le télégraphe
nous a appris son arrivée a Messines et, selou toute
probabilité, il pourra se trouver ici demain samedi ou
dimanche. Le prince parait jouir d'un parfait état
de santé.
Le Moniteur a démenti, il y a peu de jours, les ru-
meurs qui nous sont venues des journaux etrangers a
propos du dernier voyage que S. M. a fait en Angle-
terre. Le Tempsde Paris, avait annoncé, sur la foi
d'un correspondant de Londres, que, pendant son sé-
jour en Angleterre, le Roi avait épousé morganatique-
ÉPISODES DU SEIZIÈME SIÈCLE.
I.
Election de Charles-Quint a Francfort.
En parcourant l'histoire, depuis le moment oü se
sont ferinés les grands siècles du paganisme, on suit
avec un intérêt curieux la marche, insensible d'a-
bord, ensuite rapide, de l'individualisme chez les
peuples occidentaux. Sous le soufile bienfaisant de la
parole onclueuse et convaincue du Christ, une ére
nouvelle vient de s'ouvrir pour l'humanité. Abaissée
par le matérialisme païen, elle se relève de sa chute
profonde; elle reuail en écouiant les préceptes du
régénérateur, en se fortifiant des idéés de fraternité
et de liberté que propagenl les disciples directs d'un
maitre rèvéré.
Longtemps l'homme a été la cause et le rouage
docile de la société; désormais il en veul être le but
et la principale prèoccupation. Pendant les premiers
jours de cette transformation, sa têche est dure el son
labeur est ardu il doit, au moment de ce réveil, lut-
ter conlre les derniers vestiges du despotisme ro -
main. Fort toutefois d'une cause équitable, il réclame
avec l'ardeur des néophytes, des institutions libres
qui doivent lui donner le droit de penser et d'agir
par lui même.
L'histoire nous dit combien la lutte fut difficile,
ment Mm* Mayer, décorée, pour la circonstance, du
titre de baronne d'Epinghoven. Le Moniteur prend la
peine de déclarer ce bruit entièrement denué de fon
dement. En ce qui concerne le fait du manage, il n'y
a pas de doute que ce démenti ne soit parfaitement
justifié. C'est lé, d'ailleurs, un de ces vieux canards
usés auxquels personne ne donne plus crédit, tant ils
ont barbotte dans la presse depuis cinq ou dix ans.
Mais si Ie démenti porte aussi sur Ie fait de l'anoblis-
sement de la dame, je suis obligé de dire a ceux qui
s'en sont fails les éditeurs responsables, que ('opinion
publique ne l'acceptera pas. II n'y a pas a nier que
Mmo Mayer est réellement baronne ou comtesse d'Epin
ghoven, par la grace de je nesais quel prince souve-
raiu d'Allemagne dont j'ai oublié le nom et qui a tenu
a honneur, sans doute, de marquer son nom dans
l'histoire par eet acte éclatant de sa toute puissance
issue du droit divin. Ce n'est pas, d'ailleurs,aux amis
de l'égalité qu'il appartient de s'en plaindre; ils ne
peuvent, au contraire, que s'en félicjter.
Le ministère ou, pour mieux dire, le ministre de
l'Intérieur l'a échappée belle cette semaine. Yous vous
rappelez que, lors du premier vote sur le projet de
loi sur la décentralisation administrative, M. Guillery,
aidé de quelques-uns de ses amis de la gauche et se-
condé par l'opposition cléricale tout entière, avait fait
passer, contre le gré du gouvernement, un amende
ment portant que les communes ayant une population
de 5,000 Ames seraient désormais souslraites a l'auto-
rité des commissaires d'arrondissement. C'élail un
rude coup pour le ministère, car personne n'ignore
et vous autres, Ypres, vous ignorez moins que
personne que les commissaires d'arrondissement sont
combien furent lents les progrès. Cependant lorsque
l'on louche aux dernières années du quinzième siècle
et aux premières du seizième, on s'arrête émerveillé
des coriquètes de l'individualisme.
A l'époque brillante de la Renaissance, la liberté
exisle; mais pour qu'elle soit compléte, il manque
deux choses a l'homme l'expérience de cette liberté
si chèremenl acquise et la science d'une application
juste et raisonnée. Quelques efforts encore et l'on
prévoit que cette science d'application et cette expé-
rience seront acquises l'humanité et que ceile-ci
aura promptement levé tous les obstacles qui s'op-
posent son entier développement.
L'heure est propice, en effet, pour atteindrece bul
désiré. L'Amérique a peine découverte par le Gênois
Christophe Golomb, verse a pleines mains ses abon-
dantes richesses sur la vieille Europe. Lascaris, suivi
de quelques compagnons échappés comme lui au sac
de Constantinople, vient nouvei Enée fuyant cette
Troye mo ierne, apporter dans l'antique Latium, les
debris de la civilisation grecque, y répandre ('admira
tion et le goül des arts, agiter les esprits et préparer
la grande époque de la Renaissance et de la Réforme.
A la calligraphic qui ne pouvait aider la diffusion
deslumièresjsuccède l'imprimerie, invention sublime,
puissant levier de l'intelligence, ayant pour resultat
Emancipation de la pensée et la créalion dans le
monde intellectuel d'une force invincible l'opinion
i des' agents électoraux très-actifs, très-influents et
i dont le concours, a de certains moments, décide de
I la victoire. Enlever au ministère ce puissant moyen
d'action, qui sait? sa vie pouvait en dépendre aux
élections prochaines Mais comment décider la Cham-
bre a revenir sur son premier vote? On y songea el
comme nous comptons dans Ie cabinet des hommes
d'une habileté consommée et, dans la Chambre, un
certain nombre de représentants qui n'aiment pas
faire de la peine aux hommes du cabinet, on y est
parvenu. Le moyen est curieux et vaut la peine d'être
signalé.
L'amendement de M. Guillery, est venu dire
M. A, Vandenpeereboom, ne se rattache que d'une
manière très-éloignée au projet de loi en discus
sion. C'est un projet de loi a lui tout seul et qui
n'a avec celui qui vous est soumis qu'un rapport
fort loin. Dès lors, dislrayez-le de celui-ci pour en
faire l'objet d'une loi spéciale. Ce sera infiniment plus
logique et moins embarrassant pour la Couronne, que
l'insertion dans le projet de loi de eet amendement
placerait dans l'alternative, également facheuse, de
sanctionner une loi dont certaines parties lui déplai-
sent ou de refuser sa sanction a une loi dont l'en-
semble lui parait utile aux intéréts du pays.
C'était,convenez-en, merveilleusement imaginé. La
disjonction permettait aux députés qui avaient voté
l'amendement de M. Guillery, de ne pas se déjuger, ce
qu'ils n'auraient accepté de faire qu'a Ia dernière ex-
trémité et. d'autre part, elle leur assurait la continua
tion des bonnes grAces du ministère, avantage inap
preciable Pour le ministère, la disjonction, c'était le
salutcar, (il l'a fait suffisamment entendre) l'amen
dement de M. Guillery, ainsi isolé, neserail passanc-
publique. Le commerce s'étend, la science grandit,
les Universités de Paris, d'Oxford, de Bologne, de
Leipsick, de Louvain et j'en passé des meilleures
sonlfréquenlées par une foule d'étudiantsacourus
des diverses parties de i'Europe pour écouter la pa
role des maitres. La richesse est partoutinstruction
pénètre dans les masses; chaque jour voit ,un nouvei
individu sortir de la foule des obscurs et s'asseoir au
banquet de la vie intellectuelle. Les grands s'abais-
sent; le peuple, régénéré par le travail et par la pen
sée, s'élève lentemenl. Sur les debris de la féodalité,
décimée par la hache de Louis XI, s'établissent la
bourgeoisie et le prolétarial dont quelques membres
arrivent aux plus hautes dignités du royaume, ce qui
semble donner pour caractère distinctif a cette épo
que, legalisation de toutes les classes de la société.
Enfin la vieille Eglise romaine, dernier vestige du
despotisme, alors que les ténèbres de Ia barbarie
sont dissipés, que I'Europe s'épanouit a la géné-
reuse chaleur de la civilisation, la vieille Eglise
romaine est menacèe de s'engouffrer dans l'ablme
qu'ont creusé sous ses pied$ des ministres igno
rants ou coupables. Le christianisme n'est plus a cette
époque le christianisme du Christ vicié, corrompu
par des théories absolues, ce n'est plus qu'une doc
trine officielle, un dogme immuable et imperfectible
quicondamnea l'immobilité les intelligences inquiètes,
qui frappe d'anathème la loi éternelie du progrès de