la respectueuse liberté d'appeler l'attention da gou
vernement sar un appareil électoral d'an autre
genre, infiniment plus simple que celui de Beeck
man et qui fonctionne dans notre arrondissement,
depuis tantót vingt ans, pour le plus grand avantage
des idéés Iibérales et constitutionnelles.
Nous voulons parler du reglement qui régit actuel-
lement l'Association libérale d'Ypres.
Cette machine dont l'inventeur vient encore tout
récemment de recevoir une haute marque de satisfac
tion de la part d'un gouvernement étranger, fort com
pétent en fait de machines électorales, cette machine,
disons-Dous, offre un immense avantage sur celle de
M Beeckman elle n'a qu'un seul et unique bonton,
qu'il sufiil de presser légèrement pour obtenir inst.an-
tanément l'expression compléte et inaltérable du voeu
de l'opinion publique.
Ceci parait tenir du miracle. Rien n'esl plus cer
tain cependant, et si quelques membres de nos Cham-
bres en doutaient, nos députés d'Ypres témoigne-
raient, au besoin, de notre véracite. lis en témoigne-
raient, sans doute, car tous (nous entendons les
députés libéraux) doivent leur élection au rnerveilleux
bonton.
Le bouton, cela va sans dire, est dans des mains
süres et dévouées au bien de l'Etat ne le presse pas
qui veut. Mais qu'importe L'essenliel est qu'il fonc
tionne a la satisfaction de tous les honnêtes gens.
Gróce au bouton, nous vivons ici dans une paix
profonde; tandis qu'ailleurs on discute, on s'échauffe,
on s'agite a propos d'une foule de questions sociales
ou politiques, ici nous jouissons d'une tranquillité
délicieuse que nul bruit ne vient troubler. Le moment
du scrutin est-il venu nous n'en sommes ni plus in-
quiets ni plus troublés un coup de bouton et tout est
dit.
Si excellente que soit la machine de M. Beeckman,
nous doutons fort qu'elie vaille la nótre. Que l'on con-
sidère, d'ailleurs, qu'elie ne coüterait pas un denier
l'Etat, tandis que celle de M. Beeckman menace d'ab-
sorber prés d'un million.
Nous croyons done remplir un devoir de bons ci-
toyens en invitant le gouvernement et les Chambres
a examiner la question de savoir s'il ne conviendrait
pas, avant d'allouer un subside a M. Beeckman, de
tenter l'expérience de la machine a voter qui fonctionne
dans notre arrondissement depuis une vingtaine d'an-
nées. Nous sommes convaincus que cette experience
serait de tout point favorable et qu'elie donnerait par-
tout les excellents résultats dont les libéraux yprois
s'énorgueillissent a si juste titre.
Simple rapprochement.
Le Propagateur publie dans son n° du <7, les let
tres suivantes
Ypres, le 16 Juin 1865.
Monsieur VEditeur,
Je ne suis pas abonné a votre Journal et je n'ai
point l'habitude de le lire ceci doit vous expliquer
le retard que je mets a répondre a un article con-
tenu dans le Propagateur de Mercredi 14 Juin 1865,
N° 4,977, qu'uri ami vient de me communiquer.
Cet article qui donne une narration pompeuse de
l'entrée solennelle de Monseigneur l'Évêque de Bruges
en notre ville, renferme une insinuation très-malveil-
lante a l'adresse d'un lout petit nombre d'hommes que
leur position appelait a rehausser Véclat de cette fete
et qui pour de ridicules prétexles onl jugé plus hpropos
de s'abstenir.
Je suis, Monsieur l'éditeur, au nombre de ces hom
mes, et je ne permettrai jamais que l'on qualifie de
prétextes ridiculesles motifs honorables qui ont dicté
ma conduite.
Votre correspondant, Monsieur l'éditeur, y met un
zèle par trop imprudentil devrait songer que son
insinuation doit nécessairement appeler quelques
mots d'explication.
Comine fonctionnaire public, j'ai posé un acte dont
j'assume toute la responsabilité, et pour éviter que
des interprétations malveillantes ne viennent dénalu-
rer les sentiments qui m'ont guide, je viens vous
prier, Monsieur l'éditeur, de vouloir insurer dans vo
tre prochain numéro, la lettre suivante que j'ai eu
l'honneur d'adresser a Monsieur le Doyen, pour mo-
tiver mon abstention.
Monsieur le Doyen,
En réponse a votre lettre du 28 Mai dernier, j'ai
l'honneur de vous faire connaitre, que dans ma pen-
sée, la reception a faire a Monseigneur l'Évêque de
Bruges pour sa première entrée dans sa ville d'Ypres,
constitue une cérémonie exclusivement religieuse.
A la réception qui eut lieu lors de la visiteofïicielle
faite par Monsieur le Ministre de l'intérieur le 10 aoCit
1862, le clergéa jugé convenable de s'abstenir. II a
créé a cette occasion un précédent qui sera probable-
ment invoqué dans les circonstances analogues. Vous
netrouverez done pas inauvais, Monsieur le Doyen,
que je m'abstienne, en ma qualitéde chef de corps, de
me rendre au-devant de Monsieur l'Évêque, ainsi
que vous voulez bien m'y inviter.
Un autre motif d'ailleurs m'oblige a d'écliner l'hon
neur d'assistera aucune partiede la cérémonie, et ce
motif, Monsieur le Doyen, je vous le ferai connaitre en
peu de mots
Le journal, la Patrie qui, a ce qu'il parait,
est l'organe avoué de l'evêché de Bruges se plait de
puis quelque temps aabreuver d'injures et de calom-
nies la personne de notre roi bien-aimè; en cette cir-
constance, Monsieur le Doyen, il est de mon devoir
de protester par mon abstention contre toutes les in
vectives accumulées dans ce journal.
Veuiilez agréer, Monsieur le Doyen, l'assurance de
ma plus parfaite consideration.
A. Hynderick,
Chef de la Garde civique d'Ypres.
Recevez Monsieur l'editeur, mes salutations cor-
diales.
A. HYNDERICK.
Nous ne saurions assez féliciter M. Hynderick de
sa conduite tranche et logique.
Quelle difference avec celle du Collége échevinal et
quelles amères reflexions fait naitre un simple paral-
lèle 1
Un journal clérical lance une insinuation malveil-
lante a l'adresse d'un petit nombre d'hommes que
leur position appelait, dit-il, a rehausser l'éclat de
cette fête et qui, pour de ridicules prétextesont
i jugé plus a propos de s'abstenir.
Cette phrase met en jeu toutes les autorités qui se
sont abstenues de paraitre au cortége, nulle plus ce
pendant que l'autorité communale. M. Hynderick se
sent atteint et, comme chef de la Garde civique, il
relève fièrement le gant. Les membres du Collége, au
contraire, dévorenl l'injure en silence, oubliant, ou
feignant d'oublier qu'il s'agit ici moins de leur per
sonne que du prestige de l'autorité civile et qu'a Ia
considération ou a l'abaissement de celle-ci tous les
■bons citoyens sont intéressés. Et tandis que, d'une
part, M. Hynderick affirme hautement, dans une lettre
énergique adressée a M. le doyen, les motifs honora
bles qui ont dicté sa conduite, le Collége échevinal,
d'autre part, prend un biais et la manifestation qu'il
n'ose pas faire ouvertement le premier jour, il la fait
le lendemain en cachette, comme un larron dans la
nuit. La ligne droite n'est-elle done plus en toutes
choses le plus court chemin d'un point a un autre?
Plusieurs des motifs énoncés par M. le major Hyn
derick pour justifier son abstention a la réception faite
I'évêque de Bruges, raéritent d'être remarqués
D'abord, dans sa pensée, cette réreption consti-
b tue une cérémonie exclusivement religieuse. b G'eSt
dire implicitement que l'autorité civile n'y peut occu-
per la place qui lui revient. M. Hynderick comprend
que, dans ces sortes de cérémonies, elle est forcément
reléguée au second plan et qu'elie ne peut, par con
séquent, y prendre part sans s'abaisser. Pourquoi
l'autorité communale, encore plus directement en
cause, ne l'a-t-elle pas compris a son tour?
Le chef de la Garde civique fait valoir deux autres
motifs. II rappelle que, lors de la visite ofïicielle
d faite par M. le ministre de l'intérieur, le clergé a
jugé convenable de s'abstenir, et il croit que ce-
lui-ci o a créé a cette occasion un précédent qui sera
probablement invoqué dans les circonstances ana-
Iogues. Enfin, il ajoute que l'organe avoué de
l'évêché de Bruges se plaisant depuis quelque temps
a abreuver d'injures et de calomnies la personne de
notre Roi bien-aimé, il est de son devoir de protes-
ter par son abstention contre toutes les invectives
accumulées dans ce journal.
Certes nous ne ferons pas a nos édiles l'injure de
douter de leur patriotisme et de leur attachement a la
dynastie, si pourtant cel attachement, ce patriotisme
s'étail quelque peu réveillé dans ces circonstances, ce
n'eüt pas été plus mal. Un rayon de lumière et nous
n'aurions pas assisté au sombre spectacle du chef de
la libérale cité d'Ypres aux pieds de l'inspirateur ou
du moins du protecteur avoué de la Patrie de Bruges.
Et qui done plus que M. Beke avait le droit et le
devoir de se souvenir de 1'abslention du clergé dans la
journée du 10 aoüt 1862? L'injure n'était-elle pas
faite a M. Alph. Vandenpeereboom, le plus intime
ami de M. Beke et son prédécesseur immédiat dans
les plus hautes fonctions communales
Oui, nous le savons bien, on continue de prétendre
que ee n'est pas titre de bourgmestre et d'échevin
que MM. Beke et Bourgois ont sollicité leur audience
et on ajoute, comme prétendue preuve a l'appui, qu'ils
n'ont paru ni au cortége, ni au banquet et n'ont été
recus que le lendemain. Nous répondons que lorsque
des personnages ofliciels se rendent l'audience d'un
autre personnage ofliciel et dans une circonstance
solennelle, ils y vont avec leur caractère propre de
représentants du pouvoir, quelque soit d'ailleurs l'ha-
bit dont ils sont revêtus. Personne ne s'est laissé
prendre a cette ridicule distinction, inventée après
coup, pas même l'huissier qui a annoncé, non pas
M. Beke et M. Bourgois, mais M. le bourgmestre et
M. l'échevin. Que cela plaise ou déplaise a ces Mes
sieurs, c'est bien en leur qualité ofïicielle qu'ils ont
-été recus par M. I'évêque de Bruges.
Nous disons en outre qu'il est peu digne, après
avoir publié grands renforts de tam-tam qu'on ne
prendra part aucune cérémonie, a aucune récep
tion, d'aller présenter ses hommages le lendemain,
sur la pointe des pieds et en coudoyant les murailles
dans l'espoir de'passer inapercu. Toute cette con
duite manque de franchise et nous préférons de beau-
coup celle de M. le commandant de la garde-civique
qui s'abstient le lendemain aussi bien que la veille et
ne tremble pas de soumettre au public l'appréciation
de ses actes. Les procédés sincères ne craignent pas
la publicité.
On dit encore que Ie Collége échevinal n'a pas agi
de son autorité privée et qu'il s'est conformé de tous
paints a la résolution du Conseil. Quand on aura
prouvé que la responsabilité d'une déplorable dé
marche est portée par quinze personnes au lieu de
I'étre par trois, cette démarche n'en sera pas moins
une très-grande faute. Partagée en quinze parts ou
en trois, une omelette est toujours une omelette.
Toute cette question de responsabilité est jusqu'ici
bien ténébreuse et une explication ofïicielle viendrait
fort a propos. On se gardera bien de la donner; faite
avec franchise, sans réticences, ni sous-entendus, elle
serait trop compremettante.
Le 28 mai M. le doyen écrivait une lettre au Con
seil communal pour inviter celui-ci a prendre part
la réception de Mgr I'évêque de Bruges. Cette lettre
ne fait pas partie des pièces communiquées au Con
seil dans la séanpe du 3 juin, elle fut l'objet d'une dé-
libération a huis-clos, malgré les prescriptions de la
loi qui n'ordonne le huis clos que lorsqu'il s'agit de
questions de personnes. Ce serait dans ce huis-clos
iqu'aurait été prise, s'il en fallait croire les on-dil, la
résolution que M. le bourgmestre et M. l'échevin out
exécuté avec tant de zèle. Mais on ne niera pas qu'elie
n'ait été prise sur la proposition de M. le bourgmestre
et qu'une part plus grande de responsabilité ne pèse
sur I'auteur d'une proposition que sur ceux qui la
votent. M. le bourgmestre lui-même le comprenait
fort bien, il savait ce que sa proposition av/iit d'é-
trange et, disons Ie mot, de profondément afïligeant.
Et en voici la preuve. Non-seulement il prononcait
contre toute raison le huis-clos dans la séance du
3 juin, mais de plus, dans le procés-verbal de cette
séance, lu dans celle du 17, il omettait soigneusement
de mentionner la délibération prise a huis-clos, con-
trairement tous les usages et a tous les précédents.
Ainsi, secret que rien ne justitie, omission au procés-
verbal du résultat de la délibératian, aucune explica
tion, le Progrès ne soufïlant mot, dissimulation et
mystère partout. Les inventeurs de la motion rou-
gissent de leur oeuvre. Quelle preuve plus éclatante
peuvent-ils donner de la valeur de cette oeuvre?
Quelle lecon plus rude peuvent-ils recevoir I
Chaque phrase de la lettre que nous publions
tombe sur leurs épaules de tout le poids de la vérité
et de la raison. C'est une mercuriale d'un bout a
l'autre. Non pas que nous voulions prétendre qu'en
écrivant ces deux lettres le chef de la garde-civique
ait voulu donner une lecon, même indirecte, au Col
lége échevinal, non certes. Mais qu'on Ie veuille ou
qu'on ne le veuille pas, la situation est la et la logique
des faits est bien autrement puissante que tous les
raisonnements.
Erratum.
Nous avons toujours pris le plus grand soin, tout
en jugeant impartialement les actes, de rendre hom
mage a tous les mérites. Chaque fois qu'une erreur,
même involontaire, a été commise par nous, nous
nous sommes empressés de la rectifier dans la me-