JOUPAL D'YPRES DE L'ARROÏDISSEMENT
pi:i\ d'aboineiieut
YP11LS, Dimanche
Troisième aimée.
- JY° 30.
23 Juillet 1885
POUR LA BELGIQUE
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Un Numéro 25 Centimes.
rieix des ahho»ces
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ou envois d'argent doivent ëtre adressés franco au bureau du journal.
Les curés protestants.
Le Propagateur, en publiant dans son numéro
du 8 Juillet dernier, la protestation de MM. les cu-
rés d'Ypres contre l'inhumation sacrilege et in-
constitutionnelle d'un habitant de notre ville dans
le cimetière communal, fait suivre ce document de
quelques reflexions dont il voudra bien nous per-
mettre de lui emprunter le passage qui les ter
mine. Si les légitimes réclamations de MM. les
curés de la ville d'Ypres, dit-il, ne rencontrent
qu'indifférence auprès de qui de droit, elles trou-
veront en revanche, nous n'en doutons pas, un
écho dans tous les cceurs beiges qui ont cons^rvé
Ie culte du droit, le respect de la loi et l'amour
de notre sainte religion.
Le journal clérical aurait tort, assurément, de
donter de rémertïon produite par la publication de
la pièce curieuse a laquelle il ouvre si complaisam-
ment ses colonnes. Cette émotion est profonde et
nous ne souhaiterions rien de mieux pour le triom-
phe des idéés que nous défendons, que de la voir
s'étendre sur la sur face entière du pays. Quand le
libéralisme signale l'opinion cléricale et ses ten
dances comme un péril, non pas seulement pour
nos libertés politiques, mais pour la société mo
derne toute entière, quand il accuse le clergé de
chercher,par les influences occultes dontil dispose,
reconstruire l'ceuvre du passé et a ressusciter le
moyen ège en plein dix-neuvième siècle, combien
n'en voyons-nous pas, de ces myopes de l'intelli-
gence, qui se rient de nos alarmes et nous trai-
tent de visionnairesLe moyenêge. le clergé
maitre de l'Etat, la dime, la main morte, la cen
sure ecclésiastique, chimères que tout eela, s'é-
crient-ils, les mortssont bien morts et nulle puis
sance au monde n'est capable de les ressusciter.
Cependant, l'ceuvre cléricale se ponrsuit en si
lence. Sur tous les points du pays, s'élèvent de
vastes couvents, que viennent enrichir tour a tour
Ie repentir in extremis de quelques vieilles douai
rières cariées et l'épouvante des vieux paillards
éreintés par l'amour. Les écoles, les colléges du
clergé se multiplient a vue d'oeil. sans compter
que l'enseignement primaire donné aux frais de
l'Etat lui appartient presqu'en totalité. Grêce a
des combinaisons habiles ou l'on retrouve mêlées,
avec une puissance qui tient du génie, toutes les
sensualités féminines, depuis l'amour mystique
jusqu'a la vanité du commandement, depuis la soif
du dévouement jusqu'au besoin óejordonner et de
jouer a Madame la Conseillère ou Madame la Pré
sidente, un réseau léger, mais solide, s'étend peu
a peu sur nos femmes, nos mères et nos filles.
Avec le succès s'accruit l'audace des prétentious,
soigneusement dissimulées, il y a dix ans, sont
hautement revendiquées comme des droits abso-
lus, inhérents a l'Eglise. On trichait la loi, il y a
dix ans, pour créer des couvents, déguisés par des
procureurs madrés, sous le nom d'Associations
libres de charitê. Aujourd'hui, on dédaigne la
fraude, et c'est du baut d'une tribune aperte de
tous les points de la Belgique, qu'est tombée cette
parole impérieuse, prononcée par le premier ma
gistral du Royaume IL NOUS FAUT DES
COUVENTS
Mais ces nombreux indices et tant d'autres que
nous pourrions rappeler ne disent rien a nos con-
fiants myopestout eet immense travail moral qui
s'accomplit sous leurs yeux les laisse inattentifs ou
indifférents. Pour les tirer de leur torpeur, il faut
des faits matériels, évidents, irrécusables. Mais
aussi leur réveil est dangereux a ceux qui ont abusé
de leur sommeil crédule. Assurément,on a tort.au
Sêminaire, d'interdire la lecture du Tartuffe, car
si MM. les curés d'Ypres s'élaient rappelé la fu-
rieuse colère du bonhomme Organ sortant de des
sous la table, ils se seraient bieu gardés de publier
Uur protestation.
Oui, cette protestation a vivement ému l'opi
nion publique, Ie Propagateur a raison mais si
notre pieux confrère s'imagine que cette émotion
tournera au profit de ses amis et de lenrs vues
dominatrices, nous l'avertissons qu'il se trompe.
Grêce a Dieu, notre bonne ville d'Ypres n'est pas
pas encore assez abrutie par le joug ecclésiastique
pour qu'on puisse espérer d'elle qu'elle restera
insensible l'oulrage infligé a son premier magis
tral. Cette espérance est une injure pour tous
ceux de nous qui ont conservé au fond du cceur le
culte de cette vieille indépendmee flamande, dont
nous avons toujours été si fiers et que nous aussi,
que MM. les curés d'Ypres le sachent bien, nous
serions prèts défendre au prix de notre sang.
Quoi! quelques curés, s'arrogeant illégalement
le titre d'autorité ecclésiastique, auront l'audace de
censurer publiquement les actes de l'autorité ci
vile, la seule qu'en notre qualité de citoyens nous
soyons tenus de respecter; ils lui reprocherorit,
dans une protestation bruyante, de forfaire a la
loi et la Constitution ils pousseront l'outrage
jusqu'a insinuer que le magistral qui a posé ces
actes n'a été qu'une machine dans les mains de
quelques meneursa l'outrage de cette insinua
tion, ils ajouteront celui, plus cruel peut être, du
pardon que l'on doit aux insensés, et MM. les
curés d'Ypres et le Propagateur a leur suite, ont
pu croire que l'opinion publique allait applaudir
aux sentences de leur juridiction surannée? En
vérité, ce serait par trop d'impertinence, si ce n'é-
tait pas aussi profondément ridicule.
Nos cléricaux se défendent énergiquement de
prétendre a la domination du pouvoir civil. A les
en croire, tout ce que les iibéraux articulent
contre eux a ce sujet n'est que pure calomnie. La
voila, cependant, cette prétention, formulée dans
les termes les plus clairs, les plus précis MM. les
curés d'Ypres blêmentouverteroent le bourgmestre
pour avoir empêché a le clergé d'exercer, dans
toute Ja plénitude de son droit et de son devoir,
LA biOI DE L'ÊGLISE en matière de sêpul-
tures ecclésinstiques. Cela se trouve écrit
tout au long dans la protestation. Comprenez-
vous cela? Nous avons toujours cru qu'il n'y avait
qu'une loi en Belgique, cel le que nous fesons
nous-mêmes et que nous chargeons nos magistrats
de faire exécuter. Eh bien, nous nous trompions
il v en a encore une autre, la loi de l'Eglise, que
l'on fabrique h Rome et dont l'autorité civile est
chargée d'assurer l'exécution, sous peine d'encou-
rir les censure» ecclésiastiques. Est-ce clair?
MM. les curés d'Ypres traitent fort lestement,
comme on voit. le principe de la séparation de
l'Église et de l'État. Supposons cependant qu'è
Toccasiori de leur refus d'accorder l'homme en
question les honneurs de la sépulture ecclésias
tique, M. le bourgmestre se fut permis de leur
adresser quelque remontrance dans le genre de
cel Ie qu'ils lui ont adressée a lui-même. Mettons
que, dans la remontrance du bourgmestre, ori
rencontrêt une phrase comme celle-ci Vous
étes prêtres, messieurs, et vous ne dédaignez
pas le nom de prêtres. Aussi suis-je persuadé
que, dans cette triste affaire, vous n'avez pas
pris l'initiative et que vous dêsavouez les moyens
d'intimidation mis en oeuvre poqr jeter la ter-
reur dans les families, etc.
Entendez-vous déja les éclats d'indignation de
MM. les curés et du PropagateurDe quoi se
mêle Ie bourgmestre d'Ypres? L'Eglise accorde
ou refuse ses prières a qui bon lui semble. Elle
n'a d'ordre ni d'observalion recevoir de qui que
ce soit. La remontrance du bourgmestre viole,
au premier chef, le principe de la séparation de
l'Eglise et de l'Etat, etc. Et MM. les curés au-
raient grandement raison. Mais s'agit-il de leurs
empiétements, a eux? aussitót tout change, le
principe qu'ils auraient invoqué contre l'autorité
civile n'est plus, leurs yeux, qu'une vétille dont
il n'y a pas a tenir compte l'Eglise scule est
souver,aine.
Toutefois.que MM. les curés y prennent garde
ils pourraient apprendre, a leurs dépens, que si
grand que soit leur dédain des lois de cette pauvre
autorité civile, elles ne sont pas teliement affai-
blies et décrépites qu'on puisse impunément Ie»
braver. Ou nous nous trompons fort, ou il doity
avoir quelque part dans notre Code pênal un ar
ticle dont la fille Calliau. signalée par eux comme
entretenant des relations avec un homme marié,
pourrait se servir pour leur faire un méchant
parti. Sans mettre en doute qu'ils soient, comme
ils le déclarent, prêts a verser leur sang pour la
défense des libertés de l'Eglise, nous ne pensons
pas qu'ils se soucient le moins du monde d'aller
asseoir leurs soutanes sur les bancs de la Correc-
tionnelle, un genre de martyre pen poëtique de sa
nature et dont l'auréole n'a rien de bien enviable.
Le TOLT TAXABLE DAVANCE.