I.Cs hlbliotlièques de lu villc d'Yprcs.
Le remarquable rapport sur nos deux bibliothèques
présenté dans la séance du conseil communal du lö
septembre par M. Yanheule, au nom de la première
commission, mérite d'attirer particulièrement l'atten-
tion de nos lecteurs il renferme plus d'un enseigne-
ment digne d'etre médité
En premier lieu, si nous nous en tenons exclusive-
ment aux chtffres, nous voyons que la création d'une
bibliothèque populaire coüte annuellement a la ville
100 francs, puisque le subside accordé par elle, et qui
était primitivement de 1400 francs pour la bibliothèque
publique se montc aujourd'hui a fr. 1500; mais, d'autre
part, au chapitre des dépenses, il est établi que l'eyis-
tence de notre bibliothèque populaire a fait majorer de
300 francs le traitement du concierge, que le chauffage
y coüte 61 fr. 70 c. Voila pour les sommes qu'on peut
démêler avec certitude du compte dressé par la com
mission.
II est, en outre, deux autres articles, donnant une
somme globale pour les deux bibliothèques le premier,
intitulé abonnements, achats de livres et reliure est
de 412 fr 60 c. le second contributions, étrennes,
réparationsnettoyage et autres menus fraisde
fr. 102-21 c. Si, maintenant, choisissant dans le petit
nombre d'acquisitions faitescelles qui semblent tout
spécialement propres aux lectures du peuple, en laissant
au compte de la bibliothèque publique tout les abonne
ments; si, considérant que les livres donnés en lecture
a domicile, doivent se détériorer plus vite et exiger de
plus fréquentes reliures, nous attribuons a la bibliothè
que populaire 150 francs sur la première somme et la
moitié sur la seconde, on ne nous accusera pas sans
doute d'exagérer. Nous arrivons ainsi au bilan suivant
Recettes
Subside accordé par la ville a la bibliothè
que populaire. fr. 100-00
Dépenses
Traitement du concierge.
200-00
Achats de livres et reliure.
150-00
Chauffage
61-70
Contributionsetc.
50-00
Total des dépenses.
fr. <5 61-70
C'est-a-dire que l'administration
communale puise
chaque année 361 fr. 70 c. dans la caisse de la biblio
thèque publique pour entretenir la bibliothèque popu
laire.
Au moins cette bibliothèque rend-elle les services
qu'on est en droit d'attendre d'elle et la bibliothèque
publique peut-elle supporter impunément la saignée
qu'on lui fait chaque année le rapport se charge de
répondre au premier point.
Que faut-il pour qu'une bibliothèque populaire soit
réellement utile Quelle soit populaire dans le vrai
sens du mot, c'est-a-dire que ceux, dans l'intérêt des-
quels elle est eréée, y puisent pour leur intelligence et
pour leur cccur une nourriture sainevariée et abon-
dante.
Cette nourriture, oü est-elle oü sont les oüvrages
capables d'attirer les jeunes gens qui se livrent a l'étnde
des beaux-arts, aux métiers ou a l'industrie, les publi
cations utiles aux élèves de notre Académie au lieu
de ces traités instructifs avec planches, si appréciés
dans la plupart des établissements un ramassis de
productions surannées. Vous prétendez avoir fondé une
bibliothèque populaire et vous ne possédez pas seule-
ment les premiers éléments pour guider l'enfant du
peuple dans sa carrière
Non, la nourriture saine, variée et abondante, elle
n'existe pas dans notre bibliothèque le rapporteur et
avec lui toute la première commission, l'affirme, cata
logue en main. Jamais, dit-il, la bibliothèque popu
laire ne pourra rendre les services qu'on est en droit
d'attendre d'elle, aussi longtemps qu'on restera dans
cette voie. et il termine par cette phrase significa
tive Nous atom Ie nomnoue n'avons pas entore la
ohost.
Le public l'affirmerait a son tour si, au lieu de lais
ser croupir les exemplaires du catalogue sur les rayons,
quelqu'un avait le bon esprit de les rendre ;i leur desti- I
nation naturelle en les faisant distribuer a ceux qui les
demandent.
Ah I il a dü tombei comme une bombe sur la téte de
nos administrateurs ce pénible aveu On avait tant parlé
de cette bibliothèque populaire que beaucoup de gens,
séduits par un mirage trompeur, avaient cru notre ville
dotée d'une nouvelle institution. Au jour de l'inaugura-
tion, nos édiles s'étaient enivrés de tant d'encens,que la
plupart, prenant au sérieux toutes ces paroles oiseuscs,
avaient fini par s'imaginer que nous étions administrés
par de grands hommes Et puis, quelle douce satisfac
tion d'entendre dire a Ypres, voila une adininistration-
modèletoutes les creations intelligentes et libérales,
enseigneinent primaire pour les garpons etpour les filles,
écoles professionnelles.écolesdusoir, conférences, biblio
thèques populaires, y obtienuent droit de cité et le plus
chaleureux appui
Analyser tous ces mérites sans bourse délier, quelle
magnifique aubainèMais il faut aller au fond des
choses, il faut arracher le masque a tous ces mots et a
tous ces visages, il faut les exposer dans leur pitoyable
nudité.
Nous l'avons fait un jour, et l'on se souvient des
injures que cela nous a valu. Après deux ans, le rapport
vient constater offlciellement tout ce que nous avons
écrit. Allons, moniteur de l'Hótel-de-Ville, courageux
et éloquent Prot/rès, ouvrez une fois de plus votre voca
bulaire poissard et accablez maintenant de vos épithètes
malsonnantes et la première commission, et son honora
ble rapporteur,ou avouez une bonne fois que tont votre
tintamarre n'est que du charlatanisme pour attirer les
niais dans votre baraque.
Nous avons afiirmé qu'eft suivant lesmêmes eirements
on ne complètera jamais convenablement la Bibliothèque
publique le rapport le declare avec nous.
274 fr. 70 c. sont con3acrés annuellement aux achats
et aux abonnements pour les deux bibliothèques. Or, si
nous soustrayons de ce chift're, d'une part, divers oü
vrages flamands de MM. Conscience et Sniedeks, Het
hof van den keizer Theodoras et autres, acquis pour la
bibliothèque populaire et que, d'autre part, nous met-
tons parmi les abonnements diverses publications pério-
diques que la commission classe comme achats, on ne
sait trop pourquoi, comme, par exemplc, le Bulletin et
les Annates de médechic de fj and ,1e Journal de médecine,
la Belgique judiciairele Recueil des loisle Memorial
administratis les acquisitions proprement dites se ré-
duisent a deux volumes d'une lIisloi"e de la Restaura-
tion, nous ne savons laquelle, et a une Ihsloire natu
relle, contant ensemble 26 fr. 20. -26 fr. 20 c., voila
le total des richesses accumulées par la bibliothèque
publique de la ville d'Ypres en l'an de grace 1864.
N'est-ee pas a mourir de rire?
II est facile de comprendre qu'en presence d'un pareil
résultat, la première commission sent la nécessité d'un
prompt remède; d'après elle, c'estle controle du conseil.
On sait notre manière de voir a eet égard; nous
préférerions abandonner a la responsabilité de la com
mission directrice des bibliothèques le choix des livres,
a condition toutefois de composer cette commission de
personnes oft'rant toutes les garanties de connaissances
scientifiques, artistiques, littéraires et bibliographiques,
ce (]ui existe probablement ici. Le rapport se defend du
reste de vouloir exercer un controle mesquin, exigeant
des écritures journalières pour n'importe quel ouvrage.
Mais quelle que soit l'idée qu'on se forme de ce con
trole, est-ce bien la le veritable remède Que peut la
oommission directricemalgrc toute sa science et tout
son zèle, le Conseil communal lui-meme avec un budget
régulier de 1,500 francs doiit les tröis cinquièmes sont
absorbés par les frais matériels?
II v a plus. La commission directrice seinble n'être
la que pro fn-nno. Un seul individu, pour nous servir
du terme employé, arrange tout ii sa mode, les ordres
de la commission ne sont pas exécutés. Et il faut, en
effet, que le mal soit bien profond pour qu'un homme
du caractcre de M. Becuwe, membre de la commission
des bibliothèques et membre du conseil communal,
vienne declarer publiquement qu'tV s'absticndra d'assis-
ter aux reunions jusqu'a ce que d'autres mesures aient
éte' prises.
M. Yandebroucke avait raison de le dire II est
étrange qu'une commission ne puisse pas faire respecter
ses resolutions par ses employés. Oui, sans doute; mais
que de choses étranges et qu'on n'oserait même pas sup-
poser possible ailleurs, paraissent ici les plus naturelles
du monde! C'est que la ville d'Y'pres, comme le confes-
sait si naïvemeut M. le sous-préfet Carton a l'Associa-
tion libérale,*ne pcut-être comparée it aucune autre loca-
lite'.
Ainsi done, augmentation sérieuse du subside, appui
énergique prèté par le Collége échevinal a la commission
directrice, tels sont les moyens les plus sürs de relever
nos bibliothèques de leur decadence. Sur Je second point
M. le bourgmestre abonde en promesses. En adoptant
le rapport, le conseil en adopte également les observa
tions il tiendra la main a leur execution; enfin, il ne
croit pas qu'on puisse douter de sa parole.
Non certes, M. le bourgmestre est trop foncièrement
honnête pour ne pas être convaincu de ce qu'ildit. Mais
hélas I une longue experience ne nous a appris que trop
souvent que la resolution de la veille n'est pas celle du
lendemain.
Chacun sait que M. le directeur de la bibliothèque,
contre qui s'accumulent tant de griefs, est le protégé
quand même de M. Alph. Yaiulenpeereboom. Or, a qui
fera-t-il croire que M. Beke s'exposera a déplaire a M. le
ministre pour l'avantage peu profitable d'une bibliothè-
que bien tenue? A personne.
Quelqu'un demande-t-il la preuve de cette assertion?
Nous lui répondrons que ce n'est pas la première fois
que nous entendons force promesses qui restent a l'état
de promesses et que notamment les plaintes sur la direc
tion de nos bibliothèques se reproduisent inutilement
depuis trois ans, moins énergiques, il est vrai, mais non
moins fondées que cette année. De belles paroles, beau
coup d'eau bénite de cour, du clinquant a éblouir tous
les yeux; mais des ameliorations sérieuses, point. Le
public vprois est condamné pour quelque temps a
subir la dure épreuve de cette vérité profonde, dite par
un des membres les plns distin gués dc la Chambre des
Reprósentants et que nous empruntons avec M. le rap
porteur Vanheule a la discussion de la loi communale
La source de tous les obus, eest 1'esprit de familie si ac
cessible dans les administrations
Yllle d'Yprcs.
Cokseii. ('oniimi,, Séance publique du samedi
16 septembre 1865.
Suite et fin.
M. le Bourgmestre s'occupe aussi de 1'exposition uni-
verselle de Paris, et croit qu'il faudrait engager les fa-
bricants de dentelles a exposer de nouveau, si l'on ne
veut pas que les acheteurs oublient Ypres dans leurs
tournées. II voudrait une exposition collective, sans spé-
cifier de quel fabricant pro vient l'objet exposé. Dans ces
conditions, la ville pourrait intervenir au moyen d'un
subside par exemple, elle ferait faire le meuble,
ditM. le Bourgmestre. On ne lui reprochera certes pas,
de se ruiner par ses largesses. Le conseil autorise néan-
moins M. le Bourgmestre a traiter sur ce pied avec les
fabricants et passé au premier objet de son ordre du
jour la communication des pièces.
II y a en premier lieu le conflit de 1'autorité commu
nale et du département des travaux publics par rapport
a la construction des trottoirs. Tous les départements
ministériels, la justice, les finances, les travaux publics
et jusqu'a celui de l'intérieur, consultés, sont d'accord,
comme le fait connaitre une lettre de M. le Gouverneur
de la province, pour déclarer illégales les dispositions
votéespar le conseil dans sa séance du 6 décembre 1862.
M. le Bourgmestre lui-même qui avait fait sonner si
haut en maintes circonstances le bon droit de 1'adminis
tration, en est réduit a conseiller de les rapporter. C'est
dur pour les pauvres trottoirs arrêtés en si beau chemin
ils n'auront fourni une carrière ni bien longue, ni bien
brillante. II est vrai que d'autres localités ont fait tran-
cher la question par les tribunaux l'honorable magistrat
ne parait pas disposé cependant a s'aventurer jusque-la.
Quant a ce qui concerne la disparition des maisons en
saillie, les projets devront être communiqués a 1'ingé
nieur des ponts et chaussées.
Cette affaire est renvoyée de nouveau a la commission
qui s'est occupée de la construction des trottoirs, et
M. le conseiller Vanheule fait observer qu'il serait
utile de communiquer a cette commission l'état des
sommes payees par la ville aux riverains pour le terrain
des trottoirs.