JOURNAL D'YPRES ET DE
YPRES, Dimanche.
Troisièaie année. ~N° 42
15 Octobre 1865.
E»RIX D'.WOSSEMfiST
POUR LA BELGIQUE
H francs par an; 4 fr. SO par semcstre.
Pour l'étranger, le port en sus.
Numero 2» Centimes.
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YPRES.
15 octobre 1865.
Tin grand malheur, c'est que M. Dechamps
ne soit pas ministre. M. Dechamps au pou-
voir, il est clair que nous n'aurions rien a re-
douter, ni des convoitises franpaises, ni des
combinaisons machiavéliques de M. de Bis-
mark sure de son existence sous la tutelle
d'un homme d'Etat qui a ses petites entrées
a l'Elysée et a Postdam, la Belgique pourrait,
en toute sécurité, se livrer au développement
de ses libertés catholiques.Tout auplus, et en
core celan'est-il pas bien certain, serait-il né
cessaire de conserver, par-ci par-la, quelques
procureurs duRoiet unpeu de gendarmerie.
Mais le malheur veut que M. Dechamps ne
soit pas ministre et, pour comble de misère, a
voir la tournure que prennent nos affaires
politiques, il devient de jour en jour moins
probable que cet excellent citoyen revienne
jamais au pouvoir. Aussi faut-il entendre ses
cris de détresse Cent mille Francais auraient
passé la frontière, An vers serait surle point
de capituler, qu'il ne crierait pas plus fort.
Prenez garde, lui dit-on de toutes parts, a
faire tout ce tapage, vous augmentez le dan
ger, s'il existe, et s'iln'existe pas, vous allez
le faire naitre mais lui, qui voit plus loin que
le vulgaire, continue de crier. Nous avions
une brochure, en voiciune seconde pour peu
qu'on le contredise encore, il en fournira une
troijsième, unë quatrième, une cinquième et
ainside suite. II écriravingt brochures, s'ille
fautquant a le réduire au silence, impossi
ble. M. Dechamps s'estmisen tête de nous
sauver, il nous sauvera malgrénous.
Encore s'il n'avait a vaincre d'autre résis-
tance que celle des libéraux, sa tentative pour
rait réussir. II y a un an, nous ne demandions
pas mieux que de lui abandonner le pouvoir et,
en ce moment même, il en est beaucoup parmi
nous qui verraient, sans trop de déplaisir, sa
rentrée aux affaires. Mais le grand obstacle,
l'obstacle insurmontable,lui vient du cöté des
cléricaux, qui ne lui pardonneront jamais de
les avoir mystifiés lors de la dernière crise mi-
nistérielle, en refusant en leur nom, et sans les
avoir consultés,le pouvoir qui leur était offert
sans condition.
Aussi, voyez quel cas les clericaux de la
vieille roche font de ses conseils et de ses aver-
tissements M. Dechamps prêche le respect
des libertés constitutionnelles et, au même
instant, ses anciens amis créent a Bruxelles un
journal, le Catholique, qui a pour mission
avouée de défendre a outrance les prétentions
ultramontaines dans ce qu'elles ont de plus
excessif.
M. Dechamps réclame de tous les partis le
respect de nos institutions, et lapressecléricale
lui répond par un déchainement de violences
inouï contre le Roi, la magistrature et tous
les pouvoirs constitutionnels.
M. Dechamps parle de conciliation, de mo-
dération le salut de la Belgique, dit-il, est a
ce prix, et, a peine sa brochure a-t-elle paru,
que voila tout le clergé, l'épiscopat en tête,qui
se léve pour jurer qu'il résistera a la loi qui
luienlève la disposition des bourses d'étude.
Son propre frère, le nouvel évèque de Namur,
l'abandonne dans le mandement qu'il vient
d'adresser auxprêtres de son diocese,M.V.De
champs les félicite hauteinent de s'être asso
ciés aux dernières protestations de son prédé-
cesseur contre des projets attentatoires aux
droits les plus sacrésreconnus par les
législations de toutes les nations chrétiennes
a et même de plus d'un peuple non chrétien.
M. Dechamps ne voit de remède a la situa
tion périlleuse oh setrouve le pays que dans
la protection assurée a tous des droits garantis
paria Constitution, et l'encre n'est pas encore
séchée sur son papier, que parait la bulle qui
appelle sur les francs-macons les rigueurs des
a Princes de la terre singuliere manière, il
faut l'avouer, de respecter le droit dissocia
tion
Done, si l'ancien député de Charleroi tient
absolument a nous sauver, qu'il commence par
amener a ses idéés les vieux de la vieilleses
anciens amis, et si, cette conversion opérée, il
faut absolument lui faire place au pouvoir pour
nous arracher au peril, nous promettoris dene
pas nousmontrer bien rigoureux sur les con
ditions que seulement il s'engage a essayer la
mise en pratique de son programme, et nous
nous tiendrons pour satisfaits et nous lui aban-
donnerons de grand cccur le's rênes du gouver
nement. Aussi bien, avons-nous peut-être be-
soin de tater quelque temps du régime clérical
pour nous remettre en goüt de la liberté.
L'union, s'écrie M. Dechamps, c'est l'union
seule qui peut nons sauver, et l'union, c'est
moi. Soit, mais de quelle union s'agit-il En
1830, libéraux et catholiques sesontunis pour
chasser l'étranger et fonder la Constitution.
Aujourd'hui que ce double but est atteint,
quelle est cette nouvelle union qu'on nous
propose au nom du salut public Quelles sont
les libertés dont nous sommes privés et que
l'union pourrait nous donner Les catholiques
ne jouissent-ils pas, comme les libéraux, du
droit d'association, de la liberté de la presse,
de la liberté descultes, de toutes les libertés
garanties par la Constitution Que leur faut-il
de plus M. Dechamps, siloquace sur d'autres
points moins importants de sa these, se ren-
ferrne, en ce qui concerne celui-ci, dans une
réserve extréme. II déplo.re bien nos querelles
religieuses, mais c'est dans des termes si
vagues qu'il n'est pas possible de saisir exac-
tement sa pensée.
Nous qui n'avons pas, comme M. Dechamps,
de bonnes raisons pour nous envelopper dans
des nuages de rhétorique, disons sans détours
sur quels points portent ces querelles reli
gieuses dont on cherche a effrayer notre pa-
triotisme. A bien compter, il en est jusqu'a
trois que l'onpourrait nornmer. C'est, d'abord,
la question des cimetières, puis celle des bour
ses d'étude et enfin le projet de loi sur le tem
poral du culte. Enlevez ces trois griefs du
bagage de l'opposition cléricale et, de toutes
ses déclamations, il ne reste absolument rien.
En d'autres termés, la Belgique, s'il faut en
croire M. Dechamps, est a deux doigts de sa
perte, parce que MM. nos cures veulent. Tes
ter maitres absolus des cimetières, des fonda-
tions de bourse et des biens de fabrique. Si
elle veut échapper aux dangers de l'annexion,
il faut, toujours d'après M. Dechamps, que
les libéraux leur fassent, sur ces trois points,
des concessions raisonnables. Sinon, tout est
perdu et nous n'avons plus qu'a attendre l'in-
vasion et tout ce qui s'en suit.
Soit, nous voici prêts a faire a MM. les
curés toutes les concessions imaginables. Tran-
sigeons, nous ne deinandons pas mieux. Que
faut-il que nous cédions et que nous cédera-
t-on en retour La est la question et, puis-
qu'on nous parle toujours d'union et de con
ciliation, elle vaut bien la peine qu'on s'y
arrête. Que M. Dechamps nous dise, par
exemple, pour ce qui regarde la question des
cimetières, quelles concessions le clergé serait
disposé a faire a la liberté des consciences et
au droit dê£ families. Jusqu'a ce jour, quenous
sachions, il n'en a formulé aucune. Toujours,
il a affirmé son droit de régler, au gré de sa
volonté et sans controle de la part de 1'aUto-
rité civile, tout ce qui concernè la matière des
inhumations, et chaque fois que 1'autorité ci
vile a refusé d'obtempérer a ses injonctions,
il a crié au scandale, a la persécution.
Même attitude dans la question des bourses
d'étude et dans celle qui concerne les biens
de fabrique. Dans 1'une comme dans l'autre,
le clergé s'est constamment posé en parti ra
dical, stipulant au nom d'un principe absolu,
supérieur a toute discussion, au nom des dog
mes. Transige-t-on avec les doguies? Nous n'o-
serions prendre sur nous de réspudre cette
question délicate, de peur de nous attirer une
mauvaise affaire avec la cour de Romec'est a
M. Dechamps, qui s'est fait l'apötre de la tran
saction, a nous éclairer surce point.
L'OPIMOll
(ill jo—
PATABLE UAVANCE.