JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENI
YPKES, Di manche
Quatrième année. JV° 9.
4 Mars 1866.
Le tout payable d'ayancb.
Paraissant le dimanehe.
I'ItïX »'ABOXi1E«E«T
POUR LA BELGIQUE
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L'OPMIGIV
PRIX DES A1NO.ICEII
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f. Ea réforme electorale.
Le gouvernement commence a comprendre qu'il
n'aura pas facilement raison de la vigoureuse oppo
sition que son prpjet de réforme électorale a soulevée
dans la presse libérale. VEcho du Parlement, qui
n'avait pascessé, pendant ces derniers jours, d'exal-
ter les rares mérites de la conception ministérielle et
qui ne pouvait pas comprendre qu'on différêt d'opi-
nion avec lui sur ce point, \'F.cho du Parlement dé-
clare aujourd'bui que le cabinet n'a pas la préten-
tion d'avoir fait, du premier jet, une oeuvre irrépro-
cbable en tous points et il convie tous les hom
mes de bonne volontè a recbercher avec lui les
moyens de l'améliorer.
Nous sommes loin de mettre en doute Ia sincérité
de l'appel adressé par le journal ministèriel aux lu-
mières et au patriotisme des hommes de bonne
volonté. Nous avons, au contraire, l'intime convic
tion que le ministère est anime des tneilleures inten
tions du monde et qu'il ne detnaode pas mieux que
d'introduire dans son projet les amélibrations qui lui
seront signalées. Saus doute, il a répugné longtemps
l'idée de la reforme, et nous persistons a penser
qu'en ce moment mêtne, la nécessité de réviser notre
régime électoral ne lui est pas démontrée. Mais cette
première répugnance vaincue.personne n^peutcroire
sérieusement qu'il se refuse a faire fruit des observa
tions fondées, des justes critiques dont son projet
pourrait être l'objet et qu'il mette son honneurb Ie
faire adopter lel qu'il l'a formulé, sans ajoule ni ra-
ture, comme un traité de commerce. Le ministère se
défend d'a voir eu la prétentiou de mettre au jour une
oeuvre parfaite, il appelle a la perfectionner lous les
hommes de bónne volonté. Encore une fois, nous
croyóns a la sincérité de ces declarations. Aussi, s'il
ne s'agissail entre lui et nous que de questions de
détail, de quelques lacunes a combler, de quelques
électeurs de plus a inscrire sur les listes, sommes-
ftous persuades que nous le trouverions de très-facile
composition Mais que nous importent, a nous, les
lacunes du projet ministèriel La loi sera-t-elie
meilleure quand elle aura donné acces a quelques
privilégiés de plus? Ce que nous combattons dans la
réforme, c'est la pensée même qui l'a inspirée, ce
sorit les basés sur lesquetles elle repose, et les rèsul-
fats dèsastfeux pour la liberté que son adoption de-
•vra'it né'cèssairèment entrainer. Or, sur ces points
capitauX, nous n'avons pas d'illüsion a garder, Ie
ministère se montrera inflexible etintraitablé. Le
ministère acceptera que I'on amende son oeuvre
mais, qu'tfn l'étende a'u dela des limites restreintes
qu'il lui a assignées, pouf-la transformer en Uhè vaste
et Sérieuse réforme, il n'y consentira que Ie jour oü
l'opiniou publique ne lui iaissera plus que Ie óhoix
de quitter le pouvoir ou de su'bir ses volontes.
II n'y a done rien, absolument rien a attendre,
sous ce rapport, ni de ['initiative gouvernementale ni
de la condescéndancè des hommes du pouvoir. Si
nous voulons une réforme èièctorale vraimènl digne
du rang que la Üelgique occupe parmi les nations
dèmocratiqués, c'estde nous-mêtnes, de notre volonté,
de uotré énergie qu'elle do'il sortir et qu'elle sortira.
M'ayons pas tonjO'urs les yeux vers le pouvoir
comme de petits enfants vers leurs mamans. Le pou
voir, c'est nous-mêmes habituons-nous a cette vé-
rilé, elle est autrement saine et féconde que ce vieux
préjugé dont nóüs ne sommes malhèureusement que
trop imbus ét qui consiste a considérer le gouverne
ment comme un étre en quelque sorte providentiel,
chargé de pourvoir a tous nas besoins, moraux et
matériels.L'initiative gouvernementale, c'était bon du
temps de Charlès-Quintnous sommes libres, au-
jourd'hui. A nous de montrer que le poids de la li
berté n'est pas trop lourd pour nos épaules et que
nous pouvons nous passer de tuteurs.
Quoi qu'il en soit, nous voici en préSenca d'uh pro
jet de réforme électorale formulé par le gouvernement.
Ce projet, on nous l'accordera saus peine, est abso
lument dépourvu de toüte raison d'etre, s'il n'a pas
pour but et pour résultat de réaliser les vceux que
l'opinion publique a exprimés en différentes circons-
tances el surtout depuis 1864 sur cette importante
question. Quand nous voyons, toutes les époques
de t'hiistóirè, lés gouvèrnements rebelles a toüte idéé
de réforme électorale, on n'admettra pas facilemenl,
eneffet, que le gouvernement beige propose une ré
forme de ce genre, sans mötif, Sans nécessité, pour le
plaisir. S'il a fait tant que de sortir de l'immobilité si
chère aux gouvernants, dans les pays constitutiön-
nels, c'est qu'apparemment il a constaté' ('existence
d'un mouvement réformiste assez prononcé, assez
général, pour qu'il Se croie tenu de lui donner satis
faction. Si telle n'est pas la raison de son projet, ré-
pétons-le, il n'en a pas.
Le mouvement reformisteexiste. Le gouvernement
lui-même en convient. Reste a voir si la réforme qu'il
présente répond aux voeux qu'il a la prétention de
satisfaire.
Nous n'entendons pas donner au mouvement plus
d'importance qu'il n'en comporle; mais ce qu'on ne
peut nier, c'est la signification essentiellemeüt démo-
cratique de ce mouvement. Depuis le jour oü M. De-
champs est venu assez inopinèment, il faut l'avoucr,
poser devant le pays la question de la réforme élec
torale, cette question n'a pas cessé d'être a l'ordre du
jour de la presse et des associations poliliques; plu-
sieurs Conseils provinciaux un grand nombre de
Conseils communaux en ont fait l'objet de leurs déli-
bérations, des centaines de pétitions ont été adressées
a la Chambre, des plans de réforme de toute nature
ont été proposes et, sans doute, ils n'étaient pas tous
e'galement admissibles et praticablesmais ce que I'on
peut affirmer, c'est que tous ces plans, tous ces
voeux, toutes ces deliberations s'inspiraient d'une
même pensée, ceiie de voir les classes ouvrières af-
franchies de l'ostracisme politique que la legislation
électorale actuelle fait peser sur elles et d'arriver avec
plus ou moins de rapidité a la substitution du prin
cipe de l'instructiou au principe du eens comme base
du droit d'élire. En ce qui concerne spéciaiement les
èlestions communales et provinciales, il n'y avait
pour ainsi dire qu'une seule voix, parmi les partisans
de la réforme, pour rèclamer une extension conside
rable du droit de suffrage et la reconnaissance de ce
droit au profit de tous les citoyens en état de justifier
qu'iis Savent lire et écrire.
Nous savons tout ce que I'on peut dire pour com-
battre l'extension du droit de suffrage, même pour les
élections communales et provincialesc'est un point
que nous discuterons plus tard. Pour le moment,
nous nous bornons a constater Ie fait que, dans son
ensemble, le mouvement qui poussait vers Ia réforme
avait surtout en vue d'augmenter, dans une propor
tion considerable, le nombre des électeurs provinciaux
et communaux et d'abaisser, en faveur des classes ou
vrières pourvues d'une instruction élémentaire, la
barrière que la hauteur du eens actuel maintient
comme un obstacle entre elles et le scrutin.
En presence d'un mouvement aussi nettement
marqué, Ie gouvernement avait deux partis a pren
dre il pouvait nier la nécessité d'une réforme
électorale et se renfermer daps le statu quo; ou
bien, tenant compte des faits dont il était témoin,
prendre lui-même l'iniliative d'une réforme dans le
sens dos voeux formulés par l'opinion publique.
De ces deux partis, Ie gouvernement n'a pris ni
l'un ni l'autre. Refuser toute réforme, s'esi-il dit,
c'est assurer l'adoption de la proposition de M. Guil-
lery. D'un autre cóté, concéder une extension sé
rieuse du droit de suffrage, c'est compromettre ma
majorité dans les Chambres et rendre possible l'a-
vénement d'un ministère catholique. II s'agit done
(Timaginer quelque chose qui ressemble a une ré
forme et de faire accepter ce quelque cböse par
l'opinion publique comme un premier pas dans la
voiè de ses aspirations dèmocratiqués, sauf a pro-
fiter de l'occasion pour mettre un bon clou de plus
a Uotre machine gouvernementale.
Toute la pensée du projet formulé par le minis
tère est la et nous n'aurons pas de peine a le dé-
montrer.
II y a peu de jours, M. le minislre des affaires
étrangères disait la Gbambre des représentants que
nos rapports avec la France ne laissent rien a dési-
rer et a qu'au point de vue del'industrie et du com
merce il nous reste peu de chose a faire pour amé-
liorernos relations.
Nous sommes loin de partager l'opinion de M. Ro
gier, qui se flatte de trouver tout pour le mieux.
L'honorable ministre ignore probablement que par
les derniers traitps de commerce il a placé notre in
dustrie huilière et la culture du houblon dans une
position très-précaire vis-a-vis de la France. II a
probableinent oublié les promesses qu'il a faites a la
Gbambre des représentants lors du traité avec la
Prusse concernant le droit d'entrée en France de nos
boubloüs et huiles de graines. II ne sail pas non plus
que le régime actuellement imposéa ces deux indus
tries leur est délétère et que loin de prospérer, elles
diminuent en importance.
Si M. le minislre des affaires étrangères semble
n'avoir aucune connaissance de eet état de choses^ le
commerce et l'industrie sont loin de l'ignorer mais
au lieu d'èlever des plaintes qu'on doute être écou-
lées, ils transported leur travail et leurs capitaux a
1 'étrahger, fa oü Ia fabrication procure des bénéfices.
C'est ai'b'si qü'unr grand industriel de notre arrondis-
sementjobeissanlaux saines Iois de Fintéréi bien com-