victimes d'une loi inique et spoliatrice, n'avuient pas
voulu s'associer a son exécution.
Gette taclique, malheureuseraent, n'aura pas plus
de succès que les précédentes. Le soupoon est né dans
les esprits et les escobarderies jésuitiques ne parvien-
dront plus a l'en déloger. Déja la presse a leve un
coin du voile. Les rapports des commissions provin
ciates, qui bien certainement seront publiés par le
gouvernement, achèveront de mettre a nu les turpi
tudes cléricaies, et l'opinion publique, mise en pos
session de tous les éléments du débat, pourra juger
bientót, en parfaite connaissance de cause, de quel
cöté sont les voleurs de bourses et les spolialeurs du
bien des families.
Teneo lupum auribus.
II y a peu de temps, le Progrès publiait, a ('occa
sion de la mort d'un ancien échevinde la ville d'Ypres,
une notice nécrologique dans laquelle il jetait un re-
gard sur le passé. Fidéle a ses habitudes, il profile
d'une douloureuse circonstance pour lancer un de
ces aboiements hargneux dont i! possède la spécialité.
Plaisir de croquemort qu'aucun homme de goüt ne
lui enviera. Quoi d'etonnant d'ailleurs? Ne l'avions-
nous pas vu déja appètit dé chacalt exhumer
la mémoire des morts et assouvir sur leur tombe ses
instincts de haine et de vengeance 1
II ne nous convient pas, de remuer des cendres, ni
de faire de la polémique autour d'un sépulcre. Et
certes nous ne nous amuserions pas plus aujourd'hui
que précédemmenl a relever les.,... excentricitès du
Progrès, si nous ne tenions a faire part a dos lecteurs
d'une decouverte fort amusante que nous venons de
faire.
Yoici ce qu'écrit lectuellement le Moniteur de
l'Hótel-de-Ville et de la coterie dans son n° du 25
mars dernier
II (M. Iweins-IIynderick) fut successivement
réélu jusqu'en 18-48 et, a cette époque, une coalition
des cléricaux et des brouillons parvint a le faire éli-
miner du Consei).
Les brouillons, ah I voilé le grand mot, !e mot a
effet. Voila aussi la grande énigme. Nous l'avons en-
tendu si souvent ce mot, il a été appliqué a tant de
personnes et dans des circonstances si diverses que
nous ne savions plus a quoi nous en tenir. Notre per-
plexité s'aggravait tous les jours et nous avions dü
forcément renoncer a toute application. Nous con-
naissons depuis longtemps l'ultramontain, le conser-
vateur, le jesuite, l'unioniste, subdivisions diverses
de la familie clericale, le libéral modèré, le liberal
avancé, les doctrinaires et les radicaux, les vieux et
les jeunes, rameaux varies de l'arbre libéral. Mais
le brouillon oü le classer? L'embarras est d'autant
plus grand que certaines gens, qui ne sont pas préci-
sément académiciens, appellent de ce nom indistinc-
tement tous ceux assez osés pour troubler la quietude
de leur conscience satisfaile et la digestion de leur es-
tomac repu. Heureusement Tiropartiale histoire est
la, arme puissante pour la vérité, terrible contre les
faiseurs et les Bosco politiques.
Nous avons done ouvert la collection du Progrès,
de l'ancien, bien entendu, qui ne ressemble guère a
celui d'aujourd'huihourrah! nous y avons trouvé le
mot de I'énigme. Gette revue rètrospective est cu-
Granvelle qui, quoique absent, dominait l'entourage
de son souverain, par sa haine, son intolerance. II
était évident pour eux, que la tranquillité momentanée
dont jouissaient les Pays-Bas, n'etait que le sommeil
du lion. La crainte retienl les rebelles, disaient-ils les
Gueux s'attendent a voir apparaitre bientót une ar-
mée vengeresse et se tiennent calmes, prêls a recom-
mencer a la première occasion.
Philippe II promit a Marguerite de se mettre en
route pour les Flandres, mais quelque letups après, il
envoya a sa place Ferdinand Alvarez de To lede, due
d'Albe, avec ordre d'avoir raison des rebelles et
d'élouffer la révoiuiion dans le sang de ses promo-
teurs.
ü'Albe était ('homme qu'il fallait pource'a. Ancien
oapitaine de Gharles-Quint, soldat-courtisan, il ne
connaissait qu'une voix celle de son maitrequ'une
loi la discipline; qu'un pouvotr l'epée. Sa nomina
tion jeta la consternation et l'eflVoi dans notre pays.
Tous ceux qui en avaient les moyens, émigrèrent,
afin de ne pas se Irouver face a face avec le dictateur
et ses satellites.
D'Albe arriva Bruxelles le 22 aout 1567 et com
mence aussitót a agir. Une enquête sévère fut ordon-
rieuse et instructive, a plus d'un litre, si instructive
même que nous ne concevons pas que les intéressés
n'aient pas pris la precaution de détruire tous ces
vestiges Nous avons le dessein de glaner de temps a
autre dans ce champ du passé et d'en olï'rir a nos lec
teurs les fleurs les plus suaves et les fruits les plus
délicats. Contentons-nous aujourd'hui d'un premier
morceau, qui n'est pas un des moins friands.
Done foi de Progrès une coalition des cléri
caux et des brouillons parvint en 1848 a faire élimi-
ner un des échevins du 'Conseil. Foi de Progrès et
on peut bien cette fois exceptionnellement le croire
sur paroie, ear il est en situation d'être bien inforiné.
Sans doute ces brouillons, transfuges libéraux,
traltres a leur parti, qu'ils sacrifient a leurs vengean
ces personnelles et a leur ambition malséante, trou-
veront des adversaires résolus, acharnés, implacables
dans ('Association libérale et principalement dans
ceux qui l'inspirent et la dirigent. La fermeté et l'é-
nergie dans le combat sont bien les premières quali-
tés que l'on doit attendre de ceux qu'un mérite
transcendant et un libéralisme qui n'a jamais failli
imposent a toutes les volontés. On n'est pas pour
rien la fleur des poisdu libéralisme.
En ce temps-la s'était formée, a cóté de ['Associa
tion ou Union libérale, une réunion qui tenait ses
séances au Parnasse. G'est ceque le Progrès appelait
le comité clérical. Sur les quinze conseillers a élire,
cette réunion en prenait onze, plus des deux tiers,
parmi les conseillers sortants. En tête de sa liste figu-
raient notamment MM. Alph. Vandenpeerebootn,
alors premier échevin, aujourd'hni membre d'un
cabinet libéral et M. Pierre Beke, actuellement bourg-
mestrede la ville d'Ypres. A ['Association libérale, il
est vrai, avait été proposée la réélection en masse
des anciens conseillersmais des objections s'élevè-
rent contre l'un des candidats. Une proposition fut
même faite, appuyée par 25 signatures, tendant a
dégager les membres, pour uneseule candidature de
l'Association, de l'eng.sgomont d'honneur qu'ils ont
pris de voter en faveur de tous les candidats admis
par l'Association. Gette demande est basée sur le
motif que la candidature de M. lvveins-Hynderick
rencontre beaucoup de répugnance parmi la majorité
des électeurs de la ville. (1) Ainsi s'exprime le
Président de l'Association, M. Garton-Hynderick.
Gelui-ci entre dans quelques explications au
sujet de cette proposition et conclut que, si les mem
bres de l'Association, pour être consequents, feraient
bien de voter pour le second échevin, néanmoins il
n'y a pas d'obligation(2)
Remarquons en passant les réserves calculées du
Président. Au commencement des pourparlers et ne
sachant encore au juste de quel cóté le vent tournera,
il se garde bien de s'avenlurer sur un terrain qui
peut se dérober sous ses pas, il soutient discrètement,
au moins pour sauver les apparences, la candidature
qu'il a proposée. Une longue pratique et de nombreux
succès lui ont appris que les démarches ténébreuses
font plus facilement et plus sürement l'atfaire que
les plus beaux discours.
Done, pour le moment encore, s'il en faut croire
(1) Séance de VUnion libérale du 20 aoüt 1848.Compte-
rendu publié par le Progrès, 2me supplément extraordinaire
en date du 21 aoüt.
(2) Ibid.
née et tous les magistrats eurent a rendre compte de
leur attitude a l'ógard des rebelles. Les comtes d'Eg-
mont et de Hornes furent arrêtés avec beaucoup
d'autres membres de la noblesse. Quant au prince
d'Orange, il s'etait retire a l'abri de toute poursuite;
ce qui fit dire a Granveiie, alors a Rome Le Taci-
turne n'est pas prisrien n'est fait! Gran
veiie avait raison, le Tacilurne était l'ame du mouve
ment insurrectionnel.
Marguerite, persuadée qu'il n'y avait plus rien
faire pour elle en Belgique, quitla le pays au mois de
décembre suivanl. (1567.)
Conformément a des ordres venus de Bruxelles,
Pierre de Crocq, procureur général et Liévin Snouck,
conseiiler au Gonseil de Flandre, vinrent en qualité
de commissaires, prendre connaissance des fails qui
concernaient les herétiques et leurs adhérents. Arri
vés a Furnes, le 22 septembre, ils accomplirent leur
mission en vrais inquisiteurs. De Furnes, ils allèrent
a Hondschoote, et enfin a l'abbaye d'Eversam. (4 oc-
tobre.) Arrivés la, ils citèrent devant eux les princi-
paux magistrats de Ia ville de Furnes, qui eurent a
s'expliquer au sujet de la condescendence qu'ils
avaient montrée lors de i'attaque de l'église St-Denis.
M. Carton, ^es membres de l'Association, pour être
conséquents, feraient bien de voter pour le second
échevin. Bonne précaution oratoire! Malheureuse-
ment, il n'est si fin renard qui ne soit quelquefois en
défaut et bientót M. Carton laisse percer le bout de
l'oreilte. Néanmoins, continue-t-il, IL N'Y A PAS
D'OBLIGATION.
Voilii l'expression de sa véritable pensée, le sens
intime de la discussion, en un mot, la clé de toutes
les intrigues qui ont préparé l'éfection communale du
22 aoCtt 1 848.
D'ailleurs d'autres orateurs, plus jeunes et moins
expérimentés, confirmeront et renforeeront cette
pensée par des commentaires plus explicites et aussi
plus compromettants. Les gros clous après les pointes
fines et délicates.
Mais, nous dira-t-on, ce n'est la qu'une opinion
isolée, que les autres membres du comité ne partagent
pas. Geux-ci se feront un point d'honneur de défendre
jusqu'au bout tous leurs candidats sans exception
ils n'abandonneront pas un de leurs amis politiques
non-seulement leurs principes le leur défendent, mais
même leur dignité. Voyons.
Un membre prend la parole. C'esl M. Carton Ills,
le même dont les discours ont si horriblement pour-
fendu le cléricalisme en 1846. Nomtné depuis quel
que temps commissaire d'arrondissement, M. Carton
n'est pas venu se cramponner aux places lucrati-
ves (1), mais régónérer son arrondissement. La
hauteur, le dédain avec lequel il refuse a I'avance ses
services a un ministère clérical prouve que, dans ses
mains, les principes ne péricliteront pas. La suite
nous a appris s'il sait tenir parole.
Voila l'homme de la situation, celui qui saura re-
lever les courages abattus, fixer les hésitations, ré-
conforter les défaillances, enflammer les enlhousias-
mes. Plutót succomber glorieusement sur la brêche
que de voiler ses convictions un seul instant ou
d'abandonner ses amis; ce n'est pas lui qui escala-
dera Ie pouvoir par un escalier derobé.
Hé'las 1
M. Carton fils a la parole pour faire entendre
quelle prudence de lynx! que, si l'on doit
ajouter un autre nom sur la liste de la société en rem
placement de M. Iweins-IIynderick, il y a un horame
qui, il y a quelque temps, se trouvait dans nos rangs,
dóvoué, désintéressé, mais qui depuis, il faut le re-
gretter pour lui, a, par faiblesse de caractère, donné
la main a, des intrigues pour renverser d'anciens
amis. Mais malgré ses erreurs, eel homme a toutes
ses sympathies, ajoute M. Carton, et certes peut-être
y a-t-il lieu d'examiner, dans son for intérieursi
un moment de faiblesse ne doit pas être pardonné.
Cela intéresse surtout les électeurs individuellement
mais en même temps M. Carton appuie sur la neces-
sitéde s'entendre OFFICIEUSEMENT acet égard. »(2)
Les développements de M. Carton fils paraissent
si justes, ses raisonnements si peremploires a Mon
sieur son père que celui ci exprime les mêmes
idéés et rend sa pensée en flamand, (3) évidem-
ment dans le but d'être encore mieux compris.
(1) Voir sa lettre adressée au Propagateur et reproduite
dans le Progrès du 50 avril 1848.
(2) Séance de VUnion libérale du 20 aoüt 1848.Compte-
rendu publié par le Progrès, 2™e supplément extraordinaire
en date du 21 aoüt 1848.
(5) Ibid.
Lés pauvres magistrats se justifierent de leur mieux
en disant qu'il leur avait éte impossible de tenir tête
aux assaillants.
Après, vint le tour de ceux de la Chêtellenie, ac-
cusés de ne pas avoir etnpêché le pillage des églises
et inonastèresd'avoir toléré les prêches et la con
struction de temples d'avoir indiqué aux Gneux,
les lieux propres a ces constructions irnpies (sic.) Tous
crimes énormes qui impliquaient la complicité de
leurs auteurs, dans les faits et gestes de l'hérésie.
Ne sachant comment se tirer d'afiaire, car tout cela
était vrai, très-vrai, comme nous l'avons vu, les re-
présentants de la loi dans la chatellenie de Furnes
accusèrent d'Egmont, ses ordres et ses correspon-
dances, et demandèrent un délai pour juslifier, pieces
en main, la conduite qu'ils avaient dü tenir. En
consequence, le 12 octobre, un des leurs, Jean de
Wilde se rendit a Bruxelles. Ce qu'il y fit serait diffi
cile a dire, mais toujours est-il, qu'ils sortirent de
cette épreuve, lui et tous les autres, blancs comme
neige.
E. Vandiïn Busscue.
(La suite au prochain n».)