envelopper. Mais des éclaircissements capables de
former les convictions, il n'en faut point chercher
dans le rapport. Quelques banalités, voila tout ce
qu'il contient.
11 proclame tout d'abord le choix du Collége en fa
veur de l'Esplanade, mais sans rien apporler pour
juslifier ce choix. Bien au contraire; il déclare sitn-
plement qu'on a pris l'avis de M. le colonel d'élat-
major de Sorlus sur l'emplacement choisi et sur les
plans et que quelques modifications de détail ont été
faites d'après eet avis.
Nous avons précédemment exprimé le soupcon
qu'on n'avait soumis qu'un seul emplacements 1 "ins
pection de l'autoritè supérieure; ce soupcon est de-
venu une certitude. II est avèré mainlenant, d'après
les termes mêines du rapport, que cette autorite a
été invitée a donner son avis sur une chose décidée
d'avance. Voila pourtant comment noire administra
tion désire s'éclairer. voila la loyauté de ses procédés
elle a si peu confiance dans ses idéés qu'elle met sous
le boisseau celles de ses conlradicleurs. Mais que
penser de gens qui ne peu vent triompher qu'en se
cachant
Et pourtant l'approbation de l'autoritè supérieure
jouera un grand róle dans la prochaine discussion.
Mais êtes-vous bien sürs qu'en remettant les deux
projets en regard, l'approbation serait de voire cótè.
Nous en doutons pour notre part et vous n'avez pas
le droit de vous prévaloir de cette approbation, vous
qui n'avez pas osé tenter l'épreuve. Non, cette appro
bation dont vous vous targuez ne prouve rien en fa
veur de votre projet, elle prouve beaucoup contre
voire sinceritó et voire franchise.
Revenons au rapport.
L'établissement sera permanent; il y aura trois
cibles; le reglement sera emprunté au tirde Bruxel-
les. Ce sont. la des détails d'inlérieur qui offrent peu
d'intërêt en ce moment Occupons-nous seulement
de la construction.
Un kiosquede 10 mètres de long sur 7 m. 17 c. de
large sera construit pour les lireurs. Le tir propre-
ment dit sera long de 100 mètres sur 8 m. 50 c. de
large. L'epaulement a élever du cóté de l'Esplanade
aura une hauteur de 3 m. 50 c. a 4 mètres, au pied
de eet ópaulement seront plantées des palissades qui
plus tard seront remplacées par une haie vive; c'est
la ce qui fait dire probablement au rapporteur que
le tir sera clóturé. Enfin, le kiosque sera percé de
créneaux et deux porlières seront établies devant les
tireurs. Le rapport finit en annoncant que, si l'on
évite soigneusement tout ouvrage de luxe, cela coütera
8,500 francs.
En présence de la pauvrelé de ces données, nous
n'avons pas besoin de revenir sur notre démonstra-
tion. Nous nous contentons de renvoyer le lecteur a
noire n° du 18 février. Nous maintenons tous nos
calculs et tous nos chiffres.
Dans notre projet, il y avait pavilion pour le con
cierge; loge pour les officiers, abris pour les tireurs;
celui du College ne parle que d'un kiosque.
La longueur du tir dans ce projet sera de 100 mè
tres, la Iargeur de 8 m. 50 c. La courtine, au contraire,
peut mesurer jusqu'a 180 mètres, sur une Iargeur
d'au moins 30 mètres et, en outre, nous conservons
une vaste place darmes. 180 mètres permettent d'éta-
blir plusieurs distances et, puisque l'établissement
doit être permanent, on ne verrait pas, avec notre
proposition, le tir devenu inutile, lorsque tót ou tard
l'armement de la garde civique serait amélioré, ni
les chasseurs-éclaireurs, qui tirent a un minimun de
125 mètres, forcémentexclusdans lecas d'un concours
national.
Ces inconvénients sont inévitables a l'Esplanade.
En faisant le calcul du projet de l'administration,
nous arrivions a une somme de fr. 9, 270-50 elle l'a
réduile a 8,500 francs; mais, ainsi que nous le pré-
voyions, cette reduction se fait au détriment des tra-
vaux, car elle supprime les paraballes qui sont la
précaution la plus essenlielle. Si ces paraballes étaient
inutiles quelque part, ce serait certes sur la courtine
dont la situation offre par elle-même une compléte
sécuritè et cependant nous les conservons par sur-
croitde prudence et, malgré les 150 mètres cubes de
maconnerie et 240 mètres cubes de terre pour le ta
lus de voüiement, notrechiffre ne dépasse pas 5,000
francs, e'est-a dire qu'il s'èlève a un peu plus de la
moitié de celui du Collége.
Nous devons rencontrer un dernier point du rap
port, qui a trait a la direction des projectiles. D'après
le rapporteur, le chemia de fer et la route et pro
bablement aussi la promenade publique, il ne ledit
pas sont couverts par le massif du rempart.
C'est la une simple assertion dénuée de preuve, aussi
bien que cette autre que les projectiles ne sauraient
atteindre l'ancien pavé de Poperinghe. Si toutes les
balles ne portent pas a cette distance, la chose n'est
cependant pas absolument impossible et il n'est pas
rare d'entendre aujourd'hui les balles siffler bien
loin derrière la butte.
En snpposant d'ailleurs qu'aucune balle ne puisse
atteindre a cette distance, elles retomberont en deca
de la route, dans la campagne or, il ne faut pas plus
tuer celui qui travaille aux champs que celui qui se
promène le long au pavé.
Mais n'y peuvent-elles pas atteindre? Vous n'en
étes pas vous-même persuadés, car vous ècrivez
On ne pourra que D1FFICILEMENT arriver a cette
distance. Votre phrase a la forme du doute et non
celle d'une conviction arrêtée. Cette considération
seule suffirait pour faire rejeter votre projet.
Les objections n'ont pas manqué au nótre, objec
tions prudemment verbales, qui espéraient se sous-
traire a la discussion. Nous allons examiner celles
qui sont arrivées jusqu'a nous.
Nous avons fait justice des a vantages qu'on prétend
retirer de l'approbation de l'autoritè supérieure. Ne
nous arrèlons pas d'avantage a ['accusation portee
contre nous d'avoir gonflë les chiffres pour le devis
de l'administration, d'avoir dégonfie lesnótres. Disons
simplemenl que nous maintenons touS nos calculs,
sans y rien ajouter d'une part, sans en rien retran-
cher de l'aulre et que nous sommes prêts a les discu-
ter quand on voudra. Ajoulons que sur le premier
point Ie chiffre du Collége nous donne raison et que
sur le second notre devis le rapporteur ne doit
pas se sentir trés-fort, puisqu'il évite soigneusement
d'entrer dans aucun détail el qu'il ne conleste aucune
de nos estimations.
Ces deux points écartés, ilnereste pas grand'ehose.
On a dil que l'emplacement de la courtine est dan-
gereux, parce qu'il est duns le voisinage de I'eau.
Cette observation serail juste, s'il fallait tirer dans la
direction de l'eau, mais l'eau étant a plus de 20 mètres
a la droite du tireur et les paraballes erupêchant toute
deviation du projectile, le ricochet est impossible.
Aucun emplacement n'offre plus de sécuritè que la
courtine,bordée de deuxcötés par de bautes murailles,
du troisième par l'eau si on ne connaissait son an-
cienne destination, on la croirait construite expres
pour un tir.
On a fait valoir encore en faveur du projet de l'Es
planade que les terTes ne devraient pas venir de la
Plaine d'Amour, qu'on les prendrait a pied d'oeuvre.
Nous craignons fort que par ce procédé on n'abime
cette partie de noire promenade publique, comme
déja on en a abimé plusieurs autres. Mais cela même
ne moditie en rien nos prèvisions. Car notre chiffre
estimatif est si modeste que les terres fussent-elles
prises dans le voisinage, leur chargereent, leur tran
sport et leur dèchargement, ainsi que la construction
de l'épaulement, gazonnement partiel compris, coftte-
ront au moins 1 franc le metre cube. Done, de ce
cótè, rien a changer.
Cependant, nous devons I'avouer, nous nous som
mes trompès. En calculant a fr. 9,270 50 la dépense
proposée par l'administration, nous sommes resté err-
dessous de la vérite elle est en réalite plus élevée el
1'on pourra facilements'en convaincre si l'onconsidère
qu'après avoir supprimé entre autres choses 150 mè
tres cubes de maconnerie pour les paraballes, a raison
de 16 fr. le metre cube, soit fr. 2,400 00
240 mètres cubes de terre pour le talus
de vofilement, a 80 c. le mètre cube, solt. 192 00
Et avoir en outre réduil a 4 mètres l'e
paulement, calcule par nous a une hau
teur de 6 mètres, soit une nouvelle diffe
rence en moins de 1,500 00
Le Collége échevinal opère une diminu
tion de fr4,092 00
qui, joints aux fr. 8,500 00
demandés, porterait a fr12,592 00
1'ensemble des depenses nécessaires pour
arranger le terrain de l'Esplanade dans les
mêmes conditions que celui de la courtine,
lequel ne coflierait cependant que fr. 4,950 50
Done, bénéfice reel en notre faveur, fr. 7,642 50
Nous pourrions encore invoquer Ie repos des habi
tants, la iranquillité des tireurs, la sécuritè des pro-
moneurs A quoi bon La démonstration est suffisam-
ment compléte pour ceux qui veulent être couvain-
cus et pourquoi prêcher ceux qui ne veulent pas être
convertis
Disons cependant un dernier mot d'une illusion
nourrie par Ie Collége. Nous avons entendu M. le rap
porteur assurer que le tir serait clóturé, parce qu'il
y aurait des palissades ou une haie au pied de l'épau
lement. Et l'autre cóté, qu'en ferez-vous? Ne sera-t
il pas loujours loisible aux gamins de monter sur les
remparts pour se laisser glisser dans I'enclos du tir,
a moins que vous n'y placiez un agent de police en
permanence jour et nuit
La proposition du Collége est soumiseen ce moment
a 1'examen de la commission des travaux publics et
nous faisons des voeux pour que l'intrigue ne gagne
pas la partie a défaut d'arguments. Que messieurs
les conseillers se prémunissent contre les effets de
l'entralnement. En définilive, ils ne peuvenl pas avoir
toutes les spécialités et c'est pourquoi nous insistons
pour la réunion d'une commission spéciale formée de
quelques conseillers et d'officiers appartenant aux
differents corps auxquels le tir doit servir.
Déja M. le major-commandant la garde-civique
s'est prononcé, probablement tant au nom de ses of
ficiers qu'au sien propre, en faisant parvenir un pro
jet a l'administration communale. Ce projet, qui a été
joint au dossier,choisit l'emplacement de la courtine;
il est probable qu'il ne diffère que par quelques points
de detail de celui que nous avons exposé
II est facheux que ce plan nous parvienne si tar-
divement, a dit M. le bourgmestre. Nous ne voyons
pas ce qu'il y a de facheux a cela. Puisque la question
vient d'être mise a 1'examen, il arrive au moment
opportun. Non-seulement le Conseil pourra s'en ren-
dre comple, mais Ie Collége lui-même ne saurait pré-
texter d'ignorance.
Tout Ie monde sait qu'il y a plus d'un an que le
corps d'officiers de la garde civique s'est prononcé
pour la courtine et qu'il a fait dresser alors un plan
qui fut communiqué ofjicieusement au Collége qui I'ap-
prouva Ce fut quand parurent les premiers articles
de I 'Opinion que messieurs les bourgmestre et éche-
vins changèrent leur approbation en hostilité. Sans
aucun doute, ils sont trop sensés pour se laisser aveu-
gler a ce point par la mauvaise humeur; on convien-
dra cependant que la coincidence estétrange.
Quoiqu'il en soit, M. le bourgmestre a déclaré dans
la séance du 21 avril, que ['emplacement choisi par
le Collége n'est que provisoire etque celui-ci est dispose
a se rallier a toute autre proposition qui offrirait plus
d'avantage et de sécuritè.
La garde-civique pour qui le tir est spécialement
créé, se prononcé en faveur de la courtine, le Collége
déclare publiquement n'avoir aucune préférence,
qu'est-ce qui pourrail dès lors empêcher nos conseil
lers communaux de prendre une résolulion sage et
conforme aux intéréts des contribuables
La Poste aux Lettres,
Etude économique par M. Pierre Tempels.
Victor Hugo, dans son Napoléon le Petit a compare
l'orateur au semeur, e'est-a-dire, pour emprunter
son langage poétique et imagé, a eet ouvrier mysté-
rieux qu'on voil le soir, au crépuscule, marchant a
grands pas dads les sillons et lamjanl dans l'espace,
avec un geste d'empire, les germes, les sentences, la
moisson future, la richesse de l'été prochain, le pain,
la vie.... Ce qui est vrai de l'orateur l'est aussi du
publiciste et spécialement du publiciste a la fagon de
M. Tempels. L'honorable procureur d'Ypresestun
semeur lui aussi, jetantdanslessillons de l'inteliigence
des masses quantitè d'idees neuves, marquees au
coin du meilleur bon sens pratique; germes et se
ntences aujourd'hui, moisson et richesse plus tard.
Après une étude remarquable sur l'enseignement
et la révision de la loi nationale; un livre admirable
sur l'inslruction du peuple el une judicieuse critique
de la loi sur ia milice au point de vue de certaines
exemptions, voici que, comme pour prouver que rien
n'échappe a la sagacite de son esprit d'observation et
d'examen, M. Tempels vient de publier une étude
économique sur la Posteaux lettres (1).(Bruxelles.
Lacroix et Verboeckhoveu.) Comme forme et
comme fond, eet écrit est digne de ses ainés. Même
originalilé de style et même profondeur de vues unies
a la même clarle et a la même simplicite d'exposition.
Examinant la question sous toutes ses faces, l'au-
leur la traite successivemeut au point de vue de
l'impót, du monopole, de la taxe et des relations
avec l'elranger. Sur chacun de ces points ce sont des
(1) Revue Irimestrielle, 2*>» série, t. x. (Avrii 1863