II parait que dans les premiers temps de sa car
rière politique, encore hesitant sans doute sur le sens
inlime de sa vocation, Mlro Jacques débuta par quel-
ques pirouettes fort drólatiques dont la description
serait des plus amusantes. Mais a tout pêche miséri-
corde. II ètait parvenu, a force de soumission et de
souplesse, a faire oublier ces écarts périlleux d'une
ardeur par trop grotesque, D'autre part, sa nullite,
sinon sa modestie, l'avait enterre vivant au beau mi
lieu de ce vulgum picus des bouches qui, dans une
assemblee, ne s'ouvrent que pour voter. II s'ètait si
bien derobe a tous les regards quequelques persounes
trompées par l'apparence crurent un instant a des
convictions libérales. L'illusion fut courte.
Comment en 1111 plomb vil l'or purs'esl-il cliangé?
G'esl ce que nous allons savoir bientót.
C'était en 1862, si nous ne nous trompons. II s'a-
gissait de procéder au renouvellement d'une parlie
de la Deputation permanente. L'habit brodé lenlait
Mtre Jacques. Oü l'ainbition va-t-elle se nicher?
La major ite du Conseil élail devenue cléricale. Avec
la sürete d'instinct du limier, il fluira la piste, il se
init sous le vent avec l'aisance et la rapidité d'une
girouette. En moins de temps qu'il ne faut pour
l'écrire, il faillilaux engagements pris dans une réu-
nion de ses anciens amis et contracta avec les deputes
de Courtrai un pacle dont un siége a la Députation
élait le but, sa moralile politique, l'enjeu.
La même majorité clericale qui écarta M. Ernest
Merghelynck de la Deputation elut M. Carpentier en
compagnie de son sosie, SI. César Van Elslaude.
II serail trop long de raconter ici la violente alter
cation qui eut lieu en pleine séance enlre le vainqueur
et le vaincu et les aménites echangées. Qu'il nous
suflise de dire que M. Carpentier fut publiquement
marqué au front du sceau des transfuges.
Les services qu'il rendit soit a l'arrondissement,
soit au canton de Messines en particulier, comme de
pute permanent, ne furent pas bien eclatants; il
semblait ne sortir de sa lethargie habiluelle que pour
se dévouer aux exigences et aux intéréts de ses nou
veau x amis, les cléricaux. C'est ainsi que, pendant la
session de 1865, il prit une part très-active a la con-
fec.ion de ce fameux rapport, véritable manifeste du
parti des ténèbres, qui ne tendait pas seulement a
refuser aux Amis du Progrès le subside de-
mandé, mais proclatnait que l'utilité des bibliothë-
ques n'est pus démontrée. Peu de semaines avant^
il etait le plus ardent próneur de M. Ghesquière, le
fanatique èchevin de Courtrai, le promoteur de la fer-
meture des theatres pendant le caréme.
L'émotion produite par la conduite de M. Carpen
tier fut telle dans notre parti qu'un journal dont on
ne saurait suspecter la moderation, I'Organe de Cour
trai, écrivait a Tous ces deputes permanents peu-
vent tenir pour certain qu'ils ne trouveront plus ja
mais UNE SEULE VOIX VRAIMENT LIBÉRALE pour
les élire. o
Pourtant eet hom mé a le cynisme d'affronter de
nouveau le jugement du corps électoral.
Que ferout les hberaux du canton de Messines
Nous l'ignorons Mais qu'ils le sachent, ils n'ont d'autre
alternative que de choisir partni eux des candidats dè-
voués ou de courber la tête sous le joug.
L'entented'une haute influence administrative avec
M. Vermeersch,anbien bourgmestre clerical de Neuve-
Eglise, président deS. Vincent-de-Paul et aujourd'hui
candidat au Conseil provincial, les sollicitations, la
pression exercée sur ce vieillard presque octogénaire
pour le determiner a accepter cette candidature et a
étanconner de son influence le succès fort chancelant
de M. Carpentier, ne sont un mystère pour personne.
Toute aussi connue est ['intervention d'une auto
rite cléricale de cette ville pour empêcher une troi-
sième candidature de se produire. A quoi bon"? M. Car
pentier cette autorite l'a declarè A DONNÈ LES
GARANTIES LES PLUS SAT1SFAISANTES. Aujour
d'hui, le clergé tout entier dans le canton de Messines
travaille avec un zèle egal pour M. Vermeersoh et
pour M. Carpentier. Celui-ci aura l'insigne honneur
d'èlre appuye lout a la fois par les cléricaux et par
l'aduiinislration... libérale. C'est mieux que l'huitre
que sedisputenl les plaideurs. La recompense de eet
éclectisme politique sera sa réélection comme membre
de la Députation permanente. L'entente est deja scel-
lée. Mtre Carpentier el ses amis, s'il se trouve en
core quelqu'un assez ébonte pour lui servir de com
pere, voteront pour le nouveau membre, la plus
fine deur des pois du clericalisme, dont la ville de
Courtrai se propose de doler la députation a cette
condition, le parti clerical assure le maintieu de
M"" Jacques a Bruges. Telles sont les conditions prin
cipals de ce inarchè doublement scandaleux.
Que le parti clérical, après tant de fanfaronnades,
s'attèle au char de certaines velléités administratives
et en subisse humblement les lois, qu'après tant de
folies équipees, il achève de s'eteindre dans le ridi
cule, c'est son affaire, et loin de nous en plaindre,
nous nous en réjouissons au contraire.
Mais nous avons le droit d'elever la voix au nom
des principes libéraux et de surveiller les intéréts de
notre parti.
Nous n'avons jamais eu la prétention d'imposer
nos idéés a nos coréligionnaires politiques, pas plus
que nous ne consentons a courber la tête sous au-
cune volonté, quelle qu'elle soit.
Mais a ceux qui se posent en guides, en chefs du
parti liberal, nous avons le droit et le devoir de de-
mander compte de leurs acles, de leur conduite, de
nous enquérir de l'usage qu'ils font de cette influence
que leur donne la confiance et plus encore l'indiffé-
rence du grand nombre.
Au nom des principes libéraux honteusement tra-
his;
Au nom des intéréts les plus sacrés de notre parti
foulés aux pieds
Au nom de son honneur et de sa considéralion pu-
blique meconnus;
Au nom de la moralité politique qui doitdominer
toutes les luttes et légitimer tous les succès;
Au nom de la dignile humaine, nous protestons de
toutes nos forces contre les ignobles et cffrontés tri-
potages que nous venons de signaler.
Comprend on maintenant le silence calcuié du li-
béral Progrès et du clérical Journal d'Ypres? Leurs
querelles ne sont qu'apparentes, pour i'occupation
des badauds. Au fond ils s'enlendent comme larrons
en foire, prés de se partager le gêteau.
Nous portons a qui que ce soit le defi de démoutrer
l'inexactitude de nos renseiguements, et nous sotn-
mons en particulier le Progrès, qui doit être au cou
rant, de nous dire quelle est la part d'intervention et
de responsabilité de chacun dans ces odieuses intri
gues. S'il continue de se renfermer dans un silence
qui ne trompera personne, nous prendrons dans huit
jours la parole a sa place et nous entrerons alors dans
des details si minutieux qu'il faudra bien que les plus
obstinés se rendent a I'évidence.
Allons, voyons, Progrès, un peu de courage. Le
liberalisme combat sous sa bannière et ne contracte
aucun pacte, écriviez-vous. Le libéralisme, soit;
mais diles-nous done s'il en est de mêine des charla
tans qui Texplcitent sous le masque?
iülsctions provinciates.
II est a moi, dit l'un.
C'est le mien, dit 1'autre.
II est liberal', vous dis-je.
Oh que nenni, man bonhommel 11 le fat, et
encore.... pas trop chaudement.
Mais, il est de 1'Assoeialion de I'Aigle d'or.
Cela est possible.
II est même membre du comité de I'Association
libérale.
Et puis, c'est tout.
N'est-ce pas assez? Comment, vous douteriez
du libéralisme de Jacques, membre du comité de
I'Association libérale d' Ypres.
J'ai, ma foi, des raisons pour en douter.
Voyons! Belles raisons, je crois.
A tout pêche, miséricorde. Jacques a pu être
empeslè de libéralisme, de doclrinarisme et de toutes
ces fausses doctrines que Notre Saint-Pere le Pope
Pie IX a condamnées dans sa dernière Encyclique. II
a pu faire parlie de I'Association liberale, être mem
bre du comité de cette Association. Tout cela peut
être vrai. Mais, Hosanna in excelsis, u'est-on pas
ctnt fois plus heureux de voir un pécheur se con-
vertir que quatre-vingt-dix-r.euf justes se sauver.
M. Carpentier a renoncè a ses erreurs, c'est M. Ie
doyen Boone qui uous le dit. Devant ce revèrend
chanoine, le candidal du commissariat d'urrondisse-
ment a promis de brüler ce qu'il a adore et d'adorer
ce tju'il a brüle.
Ah, ah, ah 1 Vous me faites rire! Et vous
croyez ces choses-la? Si M. Carpentier fesait pa-
reiile chose, il u'uurait plus qu'a se rendre a Saiul-
Laurent.
Les chefs du parti conservaleur, des prêtres
même, assurent qu'uue profession de foi a été depo-
see eutre les mains de M. Boone.
Si vous y tenez, moi je vous exhiberai une pro-
fession de foi libérale de M1'0 Jacques.
Comment, il y aurait deux professions de foi
l'une libérale, 1'autre conservatrice ou cléricale,
comme vous dites?
Certainement, ou l'un de nous se trompe.
Eh bien, quand on veut contenter tout la
monde, on finit par ne contenter persoDne.
Vieux proverbe, toujours vrai 1
Voila une conversation du genre de celles qu'on
entend, depuis quelques jours, dans le canton de
Messines.
Qu'y aurait-il de vrai dans cette profession de foi
que Mlro Jacques Carpentier aurait faite a M. le chef
du doyenné d'Ypres
Eh, bon Dieu I Notre arrondissement a Ia spécialité
des compromis; il possède des gens adroits et aptes a
se ménager des influences dans les deux camps; il
lui manquait cependant une chose un candidat libé-
ral fesant une profession de foi cléricale. Si les bruits
qui circulent dans le canton de Messines sont vrais,
si les nouvelles qu'y colportent les cléricaux sont pa-
tentes, nous avons enfin le bonheur de posséder un
libéral-clérical, personnage très-précieux si la valeur
des choses est toujours en raison directe de leur ra-
reté. N'est-ce pas vrai? Mlro Jacques.
Une nouvelle candidature vienl de surgir dans le
canton de Messines.
La ville de Warnêton, la localitè la plus populeuse
du Canton, tient a être représentée au Conseil Pro
vincial. Elle produit aujourd'hui la candidature de
M. Louis Volbrecht, qui a accepté définitivement.
Des plaintes nombreuses s'élèvent dans nos cam
pagnes sur la manière dont s'opère la vèrification des
bascules et balances.
Qu'un commercant ait une bonne bascule mais que
la marqué du poincoonage en soit disparue, lors de la
vèrification on la reconnait bonne; cependant on ne la
poinconnera pas. El pourquoi? On lui dira que cette
opération ne s'exécute qu'a Ypres ou a Courtrai.
Si cette facon d'agir est conforme aux prescriptions
du gouvernement, avouons qu'elle gêne le commerce
et entralne des difïicultés et des dópenses qu'on aurait
pu facilement lui éviler. Communiqué
Association agricole de l'arrondissement
d'Ypres.
Séance publique du Samedi 21 avril 1866.
Le premier objet a l'ordre du jour est ('acceptation
de trois nouveaux membres.
L'assemblée s'occupe ensuite de l'organisation de
l'enseignement agricole, en exécution de la circulaire
de M. le Président, du 20 mars 1866.
M. Carton entre a ce sujet dans de longs dévelop-
pements.ll a cherché, (jit-il, a rallier toutes les idees
émisesen laissant l'insiituteur libre d'agir selon les
ressources de sa localitè et les diverses circonstances.
Quatre institute.urs ont répondu a l'appelce sont
ceux de Kemmel, d'Elverdinghe, de Neuve-Eglise et
de Messines.
La grande difïiculté de la question réside dans le
fait que jusqu'ici on n'a pas pu organiser l'enseigne
ment agricole, d'abord paree qu'on n'avait pas trouve
la formule pratique. Les cours n'ètaient pas convena-
blement formules, les programmes manquaient.
II n'en est pas ainsi de la culture et de la taille des
arbres; ici le programme est fait, on n'a qu'a suivre
les devanciers. Nous en demandons bien pardon a
M. Carton, nous trouvons dans ses assertions presque
autant d'erreurs que de mots. En quoi le programme
de l'arboriculture est-il mieux formulé que celui de
lachimie, de la physique ou de toute autre science?
Tous les programmes se modifient avec l'extension des
connaissances humaines, ils sont en outre suscepti-
bles de developpeinents plus ou moins étendus selon
l'instruction du professeur et le degré d'intelligence
de ses élèves, mais il ne faudrait pas conclure de ces
eirconstaoces extérieures et variables selon les lieux
et le milieu dans lequel se pratique l'enseignement,
qu'un programme u'est pas formulé.
Le fait que les livres d'enseignement agricole fla-
mauds n'existeut pas, comme l'a rappele M. Carton
dans la suite de ses developpeinents, ne peut pas plus
logiquement conduire, a cette conclusion. Sans doute
cette absence dejbons livres flaraunds est regrettable,
mais en dehors de cette lacune assez d'ouvrages trai-