JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT YPRES, Dimanche Quatrième année. 35. 2 Septembre I860. PRIX O'lBOHMEMEIST POUR LA BELGIQUE S francs par an4, fr. 50 par semestre. Pour l'Etranger, le port en sus. Un Numéro 25 Centimes. PRIX RES AMOSCES ET DES RECLAMES 10 Centimes la petite ligne. Corps du Journal, 30 centimes. Le tout payable d'avance. Paraissant le dimanche. taissez dire, laissez-vous blèmer, mais publiez votre pensée. On s'abonne a Ypres, au bureau du Journalchez Félix Lambin, imp.-lib., rue de Oixmude, 55. On traite a forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres ou envois d'aryent doivent etre adressés franco au bureau du journal. Ypres, z Septembre a A chaque pretention nouvelle qu'élève le clergé catholique, le parti libéral jette les bauts cris et se répand en recriminations amères sur l'insatiable avi- dité de ses adversaires. Ces indignations sont assuré- ment très-sincères et, quant a nous, nous ne dou- tons pas qu'elles lui soient inspirées par le plus pur amour de l'égalité. Mais ces pretentions,ces exigences sans cesse croissantes qu'il combat aujourd'hui avec tant de vivacité, est-il bien convaincu de ne pas les avoir encouragées Que s'il interroge avec impartia- lité l'histoire de ces trente dernières années, ne trou- vera-t-il pas dans les faiblesses, dans les complai sances qu'il a eues si longlemps pour le parti clérical, la véritable raison d'être des exigences nouvelles conlre lesquelles il a tant de peine a se défendre? Le parti libéral, on le nierait en vain, a largement con- tribué a faire au clergé catholique une position excep- tionnelle dans la loi. N'est-ii pas tout naturel que celui-ci songe a en profiter pour augmenter encore la somme de ses priviléges? Faut-il s'étonner, si l'en- nemi que i'on a introduit dans la place cherche a en déloger ceux qui lui en onl confié les clefs. Le parti clérical était connu depuis longtemps. Les libéraux ne pouvaient se faire illusion sur ses vues. lis savaient que partout oft la loi a fail une place au clergé, il a prélendu régner en maitre et courber la société civile sous ses commandements. Et cependant, loin de maintenir le clergé sous I'inflexible niveau de la loi commune, commec'était leur devoir, que n'ont- ils pas fait pour lui assurer une position privilégiéet Intervention officielle dans 1'enseignemeut public, subsides de toute nature, immunilès de toute espèce, exemption de la milice, exemptions du jury, pénalités spéciales contre les outrages, personnification civile accordée a ses établissements d'instruction, traite- ments princiers pour ses bauts dignitaires, Ie clergé a tout obtenu de la bénignité libérale. Quoi de surpre- nant que l'audace du succès I'excite a demander da- vantage encore, et n'avons-nous pas mauvaise grêce, en vérilé, après avoir pendant longtemps lémoigné une condescendance a toute épreuve dans des ques tions d'une gravité capitale, a nous montrer si re- vêches a propos d'une petite affaire de proces sion Si le parti libéral désire en finir définitivement avec les prétentions cléricales, s'il ne veut pas que l'on continue a dire de lui que la guerre au clérical qu'il poursuit depuis 1857 n'est qu'une comédie donnée a l'opinion publique pour détourner son attention d'au- tres intéréts auxquels il lui répugne de satisfaire, il a autre chose a faire que de disputer a quelques prètres de Liége le droit d'organiser des processions. Qu'il use done porter une main ferme et décidée sur les pri vileges arrachés a sa faiblesse et que l'Eglise, bannie de I'Etat, cesse de s'arroger, dans la société civile, une autorité qui n'est ni dans la Constitution ni dans les aspirations du monde moderne. Voila un but digne du grand parti libéral et ie jour ou il mettra la main a l'oeuvre, notre concours ne lui inanquera pas. Mais quant a nous émouvoir beaucoup de la question des processions, nous nous en senlons incapables et nous 'aissons au Progrès le soin d'en faire une question d'Etat. RIanè, Thecell*harès. On ne saurait nier que Ie clergé catholique possède au plus haut dearé le talent de faire flèchede tout bois. Toutes les circonstanees de la vie, même les plus dou- loureuses, sont utilisées au profit de son influence, nous dirons même de sa domination. Nous avons eu dernièrement a Bruxelles et dans quelques grandes villes les processions nocturnes, organisées prétenduement dans le but de conjurer l'épidémie et qui n'avaient d'autre résultat que de répandre la terreur parmi les populations et de pré- disposer aux atteintes du choléra ceux qui se livraient a ces courses nocturnes, ouvriers, pour la plupart, faiblement nourris et exténués déja par un travail excessif. II a faliu ['intervention de I'autorile pour faire ces ser ces pèierinages. Plus tard nous avons vu et nous voyons encore le débit de l'eau de S. Ignace, autre spécifique unique contre l'atteinte du choléra. Nous ignorons si ce nouveau commerce a été lu- cratif. Toujours est-il que les annonces les plus pom- peuses et les plus attrayantes se sont étalées dans nos organes cléricaux. Mais, comme si tout cela ne suffisait pas, la chaire de vérité eile-même a été mise a contribution. Que le prêtre se serve de son influence et de sa parole pour tranquilliser les peureux, encourager les faibles, douner a tous des conseils de tempérance et d'hygiène, chacun l'approuvera. II n'en est pas de même lorsqu'il ne rnonte en chaire que dans le but de répandre l'effroi parmi les populations. II n'y a pas longtemps que, dans une commune de nos environs, avait lieu la reunion annuelle d'une Société particulière. On n'y dansait même pas; il s'a- gissait d'un concert auquel avaient été conviés les membres de la société et leur familie. Malheureuse- ment cette société a une teinte de libéralisme, de la la colère de M. le curé qui, le dimanche d'après, esca- laua bravement la chaire, annoncant avec force gestes a son auditoire terrifié que tous ceux qui avaient pris part a la fête seraient frappés du choléra comme d'un chatiment cèleste. Impossible d'en dou- ter quand M. le curé l'affirme. N'est-ce pas Dieu lui- mème qui parle par sa bouche"? Aussi plusi^urs femmes coupables tombèrent en syncope, quelques- unes furent malades pendant plusieurs jours. Cepen dant le choléra, plus sage que M. le curé, ne se rendit pas a son invitation. Comment qualifier les procédés de ce prêtre qui comprend si ètrangement sa mission'/ Et n'est-ce pas chose déplorable d'entendre tomber de Ia chaire dite de vérité, au lieu de paroles de consolation, des pro pos de haine et de menaces? Des jugements politiques. Les condamnalions rigoureuses prononcées récem- tnent contre la presse rendront, croyons-nous, quel- que aclualité a la citation suivanle que nous extrayons du Dictionnaire philosophique de Voltaire. Voici ce que pensaitdes condemnations politiques le patriarche de Ferney De tous ceux qu'on a fait périr ainsi par justice, dit-il, je ne crois pas qu'il y en ait quatre dans toute l'Europe qui eussent subi leur arrêt, si leur procés evlt duré quelque temps de plus, ou si leur partie adverse était morte d'apoplexie pendant l'instruction. Que la fistule eut gangrené le rectum du cardi nal de Richelieu quelques mois plus tót, les de Thou, les Cinq-Mars et tant d'autres étaient en liberté. Si Barnevelt avait eu pour juges autant d'arminiens que de gomaristes, il serait mort dans son lit. i) Si le connétable de Luines n'avait pas demandé la confiscation de la maréchale d'Ancre, elle n'eüt pas été brfilée comme sorcière. Qu'un homme réellement criminel, un assassin, un voleur public, un empoi- sonneur, un parricide soit arrêté, et que son crime soit prouvé, il est certain que dans quelque temps, et par quelques juges qu'il soit jugé, il sera un jourcon- damne. Mais il n'en est pas de même des hommes d'Etal donnez-leur seulement d'autres juges, ou at- tendez que Ie temps ait changé les intéréts, refroidi les passions, amené d'autres sentiments, leur viesera en süreté. Imaginez que la reine Elisabeth meurt d'une in digestion la veille de In condamnation de MarieStuart, alors Marie Stuart sera sur le tröne d'Ecosse, au lieu de mourir par la main d'un bourreau dans une chambre tendue de noir. Que Cromwel tombe seule ment malade, on se gardera bien de couper la tête a Charles ler. Des jugements ordinaires prononcés par les juges compétents contre des princes ou des hommes en place, y en a-t-il un seul qu'on eüt ou exécuté, ou même rendu, si on avait eu un autre temps choisir? Y a-t-il un seul des condamnés, immolés sous le car dinal de Richelieu, qui n'eüt été en faveur, si leur procés avait été prolongé jusqu'a la régence d'Anne d'Autriche? Le prince de Condé est arrêté sous Fran cois II; il est jugé a mort par des commissaires Francois II meurt, et le prince de Condé redevient un homme puissant. Ces exemples sont innombrables. II faut surtout considérer l'esprit du temps. On a brfilé Vanini sur une accusation vague d'atheisme. S'il y avait aujour d'hui quelqu'un d'assez pédant et d'assez sot pour faire les livres de Vanini, on ne les iirait pas, et c'est tout ce qui en arriverait. E'Échafauil et les Cultes. L'arlicle M du nouveau Code pénal porte Au- cune condamnation (a ritort) ne peut être exécutée les jours de fêtes natiouales ou religieuses, ni les dimanches. Le Code de procédure civile contient une disposition analogue en ce qui concerne la notification des exploits et l'exécution des arrêls rendus en inatière civile. Cela se comprend ce Code a éte promulgué sous l'empire du Concordat, qui avait consacró l'existence légale du culte catholique et reconnu formellemenl les quatre grandes fêtes annuelles inslituées par l'Eglise L'OPINION

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L’Opinion (1863-1873) | 1866 | | pagina 1