JOURNAL CYPRES DE L'ARRONDISSEMENT YPRES, Dimanche Quatrième année. N° 39. 30 Septembre 1866. Le tout payable d'avance. Paraissant le dimanche. PKIX D'ABOinEIHEiT POUR LA BELG [QUE 8 francs par an; 4 fr. 50 par semestre. Pour l'Etranger, Ie port en sus. Un Numéro 25 Centimes. PRIX DES JalNONCES ET DES RECLAMES 10 Centimes la petite ligne. Corps du Journal, 30 centimes. Laissez dire, laissez-vous blSmer, mais publiez voire pensée. On s'abonne a Ypres, au bureau du Journalchez Félix Lambin, imp.-lib., rue de üixmude, 55. On traite a forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres ou envois d'argent doivent étre adressés franco au bureau du journal. Ypres, «o Septembre i sim. Noussommes, au dire du Progrès, un journal sans doctrines politiquesNotre but est avéré nous cher- chonsa renverser le cabinet actuel dans l'espoird'être admis a partager avec le parti clérical les bènéfices de la victoire. Nous pourrions, pour toute réponse, nous borner mettre le journal des frères et amis au défi de justi- fier, par une seule lignede VOpinion, ('accusation qu'il fait peser sur elle. Mais ['occasion qu'il nous fournit de nous expliquer nettement avec ses patrons nous est vraiment trop précieuse pour que nous la laissions échapper, et puisque le Progrès feint d'ignorer qui nous sommes, nous allous le lui dire en termes si clairs et si précis, qu'il faudra bien qu'il nous entende, si mauvaise volonté qu'il y melte. Le 14 juin 1846, prés de 400 citoyens appartenant a l'élite inlellectuelle du pays se trouvaient réunis a l'hótel-de-ville de Bruxelles. Ilg s'étaient assemblés la pour affirmer, dans un programme délibéré en com- mun, les principes du libéralisme beige et aviser ensemble aux moyens de conquérir la majorité par lementaire par ['organisation d'une vaste fédération électorale. Dans son discours d'ouverture, M. Defacqz, le pré sident de l'assemblée, dépeignit, sous les plus som bres couleurs, l'avenir que la domination cléricale réservait a la Belgique. Toutes les avenues de l'au- lorité, disait-il, sont occupées par ['usurpation; tous les élémenls de la prospérite publique, l'era- seignemenl de lajeunesse, l'avenir du pays tout en- tier lui est livre. Aussi, grêce a cette influence, la nation, dont le temperament robuste aurait puisé dans le pacte social un aliment substantiel, un prin- cipe de vitalité et de croissance, n'y trouvera, dans quelque temps, qu'une nourriture indigeste qu'elle ne pourra plus supporter et que repousseront ses organes abalardis. Emus de ce renversement de l'ordre régulier, effrayés de ces conséquences inévitables et pro- chaines, tous les hommes indépendantstous les ci- toyens attachés a une nationalité minée dans sa base ont senli le besoin d'un effort qui remit les choses a leur place, qui restituót a la Constitution son vé- ritable esprit et la liberté de son développement, au pouvoir son indépendance et son action légi- times, a la religion la vénération qui lui est düe et qu'allèrenl imprudemment les intéréts mondains et passionnés auxquels on l'a mêlëe. On connatt le programme arrêté dans cette mémo- rable séance. Transcrivons-en cependanl les princi- paux articles pour l'édification du Progrès qui parait les avoir un peu perdus de mémoire. Le Congres libéral adopte, pour programme du libéralisme beige, les articles suivants Article 2. Vindépendance réelle du pouvoir ci- vil. Article 3. L'organisation d'un enseignement pu- blic a tous les degrés sous la direction exclusive de l'aulorilé civile, en donnant a celle-ci les moyens constitutioneels de soutenir la concurrence contre les établissements privés et en repoussant l'inter- vention des ministres des cultes, a titre d'autorité, dans l'enseignement organise par le pouvoir civil. Article 6. Les améliorations que réclame impé- rieusement la condition des classes ouvrière et in- digente. L'élan communiqué a l'esprit public par cette dé- claration de principes fut irrésistible Le parti cléri cal, vaincu aux élections de Juin 1847, dut céder la place a un ministère libéral dans lequel entrèrent MM. Rogier et Frère-Orban. Certes, il était permis de croire que nos nouveaux gouvernants, fidèles a la pensée du Congrès libéral, allaient s'occuper sans retard de mettre a exécution les principes auxquels ils devaient leur élévation au pouvoir et, de fait, le programme ministériel du 12 aoüt 1847 en donnait l'assurance dans des termes de nature a dissiper tous les doutes En lête de son programme politique, y est-il dit, le ministère tient a poser, en lermes explicites, le i) principe de V indépendance du pouvoir civil a tous les degrés. L'Elat est laïque. II importe de lui con- server nettement et fermement ce caractère et de ii dégager, sous ce rapport, 1'action du gouvernement par tout oü elle serait entravée. D'autre part, respect sincere pour la foi et les dogmes, protection pour les pratiques de l'ordre re- ligieux, justice et bienveillance pour les ministres des cultes agissant dans le cercle de leur mission religieuse. Ce double principe, en harmonie avec l'esprit de notreConstitution, forme la base essentielleet comme le point de depart de l'administration nouvelle. II recevra son application dans tous.les actes législa- tifs et administratifs oü il devra apparaitre, et par- dticulièrement en matière d'enseignement public. Cette promesse si formelle, on sait comment le mi nistère du 12 aoüt l'a tenue: non-seulement la loi de 1842 ne fut pas révisée, mais quand, en 1850, il eut a proposer une loi sur l'enseignement moyen, il y fit insérer une disposition particuliere en'faveur de l'en seignement religieux, disposition qui servit plus tard de base a la convention d'Anvers. Quant aux autres lois qui devaient, pour nous servir des termes du pro- gramme du 12 aoüt, dégager iaction du gouverne- ment par tout oü elle était entravée, on n'en trou ve aucune trace dans Ia lougue carrière du premier mi nistère Rogier-Frère-Orban. Le découragement ne tarda pas a se jeter parmi les libéraux. Aux élections de 1850, la majorité percjit 5 voix et aux élections de 1852, qui précédèrent de peu de temps la chute du cabinet, 12 voix. Le Progrès nous rappelait dernièrement, nous ne savons trop a propos de quoi, la Revolution francaise de 1848. Nous n'avons nulle envie de contester le'mé- rite des réformes libérales que les circonstances du moment imposèrenl au ministère. Mais combien ces réformes sont pales a cóté des miroitantes promesses que le libéralisme ministériel fit briller alors aux yeux de l'opinion publique! Qui n'a gardé le souvenir du magnifique programme qui parut, en juin 1848, sous l'égidede 1'Association libérale de Bruxelles? La pièce est vraiment curieuse et nous n'avons qu'un regret, c'est que son extréme étendue ne nous permette pas de la reproduire en entier. En voici cependanl les points principaux. Ce programme réclamait 1° La véritable pratique du gouvernement du pays par le pays 2° Un gouvernement constamment progressif; 8° L'introduction des principes démocratiques dans nos lois, en place des anciens principes aris- tocratiquesqui nous régissent encore; 4° Des économies tellement sévères qu'elles ail— lent jusqu'a la limite extréme qu'on ne pourrait franchir sans désorganiser les services publics 5° Une révision prompte, sévère et profonde n du système des charges publiques, de l'impót et de son assiette 6" Une réduction de l'armée, en vue d'un dé- sarmement général futur; 7° Proscription énergique de toute superféta- lion bureaucratique, de toute sinécure; 8° L'avancement au mérite seul et la destruc- tion du monopole de la classe aisée ou de l'in- capacité favorisée; 9° Suppression de l'impót du sel 10° Complément de la réforme postale; 11° L'introduction dans la politique, afin d'y commander, des caraclères énergiques, des hom- mes a fortes convictionsa résolutions vigou- reuses, inflexibies, marchant. droit au but; 12° Liberté et progrès partout et pour tous. L'opinion libérale, écartée du pouvoir pendant prés de trois annèes, y revient avec les événements de mai 1857. MM. Rogier et Frère-Orban, les anciens chefs du cabinet de 1848, sont de nouveau rappelés aux affaires. L'expérience du passé, les lecons de la veille, le mouvement du jour, tout va les guider et leur ser vir, disait-on. Les anciennes fautes vont étre réparées, les faiblesses et les ménagements vis-a-vis de l'ennemi renversé, mais non vaincu, vont faire place a une initiative nette et vigoureuse. Eh bien, non, cette fois encore, l'attente publique est trompée et nous voyons reprendre nouveau les anciens errements qui, en 1854, ont permis a nos ad- versaires de ressaisir la majorité. C'est la même poli tique d'hésitation et de complaisances, les mêmes fai blesses unies au même entêtement. Us ont tout oublié et rien appris. Aussi les espérances que leur avéne- ment au pouvoir avaient éveillées ne tardent -elles pas a s'evauouir et, avec elles, l'ardeur électorale qui avail produit le merveilleux résullatde 1857. Les élections de 1859, de 1862 et de 1863 diminuent successive- ment la majorité libérale au point de Ia réduire a deux voix dans la Chambre des representanls, et M. Frère- Orban lui-même est obligé de confesser qu'a aucune époque de notre histoire, le parti clérical ne lui a paru aussi puissant, aussi redoutable. Le cabinet sort cependant viclorieux de la dernière latte: gréce ala loi sur les fondations de bourses et aux révélations foudroyantes de M. Bara, il remporte, dans les dernières élections de 1866, un triomphe ines- péré une majorité de viogt voix lui est assurée jus- qu'en 1868. Mettra-t-il ces deux années profit pour donner enfin satisfaction aux voeux de ces libéraux dévoués qui, meltant de cóté leurs griefs légitimes et l'amer-

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L’Opinion (1863-1873) | 1866 | | pagina 1