ils toujours sürs des sympathies ministérielles
Pourquoi, au lieu d'appuyer les adversaires des
réformes qu'il propose, le ministère ne souffre-t-il
pas que les partisans de ces réformes viennent lui
prêter aide et assistance?
Pourquoi? Vindépendance le sait aussi bien que
nous. G'est parce que si le ministère desire certaines
réformes, il en est d'autres qu'il redoute, qu'il re
pousse et qu'il craindrait de se voir imposer par des
hommes indèpendants et amis du progrès tels que
M. Picard. Le libéralisme doctrinaire et stationnaire
l'irrite parfois, mais comme il finit toujours par cé
der, mieux vaul eucore cette résistance, pense le ca
binet, que le dévoüment inquiet et impérieux d'un
parti avec lequel il y aurait a compter tous les
jours.
Quoi qu'il en soit, l'attitude aggressive du parti
doctrinaire a Uruxelles crée au libéralisme progressif
une situation nouvelle et sur laquelle nous appelons
la sérieuse attention de nos amis politiques dans les
provinces. Grace a notre concours, les élections der-
nières ont donné a la gauche parlementaire une ma-
jorité considérable. 11 dèpendait des avancéson ne le
contestera pas, que le résultat fèt tout différentil
leur eul suffi pour cela de s'abstenir et d'abandonner
les doctrinaires a leurs propres forces. Ils n'en ont
rien faitils ont lutte avec eux, loyalement, sans ar-
rière-pensée, mettant au-dessus de leurs griefs per-
s >nnels les intéréts de la cause commune. Or, que
voyons-nous aujourd'hui G'est que le premier usage
que les doctrinaires font de la victoire a laquelle nous
avons contribué consiste précisément a nous dépouil-
ler. A 1'époque ou le parti libéral ne comptait a la
Chambre que six voix de majorité, nos doctrinaires
se seraient bien gardés de porter la main sur l'un des
sièges occupés par les libéraux avancésmais au
jourd'hui qu'ils trönent en maitres dansle Parlement,
ils jugent sans doute qu'ils n'ont plus a nous mé-
nager et qu'ils peuvent nous traiter a leur fantaisie.
Soit, c'est le droit du plus fort et nous acceptons,
sans murmurer, la dure lecon que l'Association de
Bruxelles vient de nous iufhger. Mais viennent les
élections de 1868 el les libéraux progressifs montre-
ront, nous l'espérons bien, que la lecon n'a pas èté
perdue pour eux. Quant a nous, nous nous promet-
tons d'en faire notre profit et d'y regarder a deux fois
avant de prêter encore les mains au parti doctri
naire encore une victoire comme celle de 1866 et
nous serions perdus.
Interpretations du PltOGKÈü.
11 faut croire que nos observations a propos de
l'une des dernières nominations faites dans notre
Chambre de commerce embarrassent quelque peu le
Progrès, puisqu'il ne répond a aucune de ces obser
vations et qu'il trouve plus commode de nous attri-
buer des phrases que nous n'avons pas écrites. A
en croire VOpinion, cette nomination serait illégale,
dit-il, et le voila citant avec une pédanterie comique
les termes de l'arrêté royal du 10 septembre 1841,
termes que nous connaissions depuis longtemps, n'en
déplaise a sa science.
Le Progrès retranché derrière la légalité, cela pro-
met et l'on se souvient encore des pavés que, de ce
dernier refuge, il lancait tout réceniment a la tête de
M. le ministre de l'intérieur.
On s'étonne toutefois qu'un journal qui professe la
plus profonde horreur pour nos falsifications, ne
prêche pas mieux d'exempleet qu'il s'oublie au point
d'attribuer a ses contradicteurs, pour la plus grande
facilité de sa polémique, des idéés qu'ils n'ont pas
eues.
Nous avons dit que le nouveau titulaire n'est ni
brasseur, ni agronome, qu'il est inspecteur de l'en-
seignement et a besoin de tout son temps pour rem-
plir convenablement ces utiles fonctions, qu'il est
préférable de choisir pour la Chambre de commerce,
des industriels, des commercants et des agriculteurs
nous n'avons pas écrit uu mot qui put faire douter de
la légalité de cette nomination.
Que répond le Progrès a nos reflexions? Rien. II
n'essaie même pas de justifier les qualifications de
brasseur et d'agronome octroyés par le Moniteuril
sait que c'est impossible. Aussi se contente-t-il de
dire modeslement a M. Vanbiesbrouck est ancien
négociaut. Quant être versé notoirement dans la
science industrielle el commerciale, selon les termes
de l'arrêté de septembre 1841, nous croyons que cette
notoriète ne dépasse pas les bureaux da Progrès et
ceux du commissariat d'arrondissement.
Le véritable but de cette nomination est celui que
nous avons dit et, malgré les dénégations du Progrès,
nul ne s'y trompera. Tout mauvais cas est niable et
le journal doctrinaire nous donne aujourd'hui un pen
dant a l'histoire du Bon-Pasteur.
Quant aux lêches insultes dont il accable notre cor-
respondant, pour le seul motif que celui-ci ne tombe
pas en pêmoison devaot les hauts-faits de nos poli
tiques, qu'elles retombent dans l'egoüt dont elles
sorteut, nous ne nous abaisserons pas a les rele-
ver.
Epitre d'un échevïn.
Le goül épistolaire se propage phrmi nos édilës.
Après la pittoresque missive du trés - facétieux
M. Beaucourt, voici venir, son tour, M. Gustave
de Stuers avec une épitre de sa fa^on. Nous regret-
tons que cette pièce nous ait eté remise trop tard
pour paraitre daus notre dernier numéro. Espérons
que l'honorable échevin ne nous en voudra pas et que
cette circonstance indépendante de notre volonté ne
l'einpéchera pas de nous honorer le plus souvent pos
sible de ses communications.
Ypres, le janvier 1867.
Monsieur l'éditeur,
S'il pouvait encore convenir aux rédacteurs de
I'Opinion de s'occuper de moi, veuillez les prier de
retablir dans leurs futurs articles l'orthographe de
ruon notn c'est par erreurque le Moniteur du 8 jan
vier a imprimé de Steurs au lieu de de Stuers.
Vous voudrez bien insérer cette petite lettre
dans votre prochain numéro, en laissant a mes hono-
rables contradicteurs le loisir d'entourer ma rectifi
cation d'autant d'observations qu'il leur plait; on dé-
nigre par envie, par vengeance, par intérêt, a dit
M" Bossaert dans son admirable plaidoirie du 9 jan
vier; vous ma permettrez de continuer a ne pas ré-
pondre a des attaques qui font plus de tort a ceux
qui les lancent qu'a celui qui les recoit.
n Agréez mes salutations,
Gustave de Stuers.
II est difficile de comprendre le mobile de cette
rectification. N'est-ce pas ['inverse de l'adage latin?
Ici de minimis curat prcetor. Au surplus, puisque
M. de Stuers y tient, nous confessons humblement
que nous avons failli dans l'orthographe de sou nom,
quoique en assez bonne compagnie, puisque c'est le
Moniteur, eet Evangile des dieux qu'adore M. de
Stuers, qui nous a entralné dans l'abime. II en écrira
sans doute au Journal officiel. Quoiqu'il en soit, le cas
ne nous paralt pas grave. Ah! par exemple, s'il nous
arrivait de prendre un oison pour un aigle ce serait
bien different!
Une autre remarque que nous suggère Ia lettre de
M. I'échevin, remarque que le lecteur aura faite avant
nous, c'est que l'alignement des lettres de son notn
l'absorbe complètement. Sur le fond même de nos
articles, sur ('appreciation de ses aptitudes, de ses
connaissances, des services qu'il peut rendre, pas
une réclamation, pas un mot. M. de Stuers avoue im-
plicitement que nous sommes dans le vrai. Toute
fausse modestie a part, nous le pensions bien, sans
nous altendre cependant a recevoir l'approbation de
l'intéressé même.
A la vérite M. Gustave de Stuers affirme incidem-
ment qu'on dénigre par envie, par vengeance, par
intérêt, mais ces grands mots ne sont qu'un hommage
rendu a des traditions de familie. Zoo de ouden zon
gen, zoo piepen de jongen. II est impossible a certaines
gens de ne pas attribuer généreusement aux autres
les sentiments dont ils sont eux-mêoies rongés.
M. I'échevin suit a ('occasion ce noble exemple; c'est
sa facon a lui de prouver son amour filial.
On denigre par eovie. Oui, des Omes basses, des
esprits étroits portent envie parfois a des illustra
tions, a des célébrités, voire même a des noloriétés
et, par envie, ils lesdénigrent. Est-ce bien ici le cas?
La modestie de M. de Stuers ne se refuse l-elle pas a
cette assimilation? On dénigre par intérêt. Eh! de
quel cóté done perce l'intérêt, M. I'échevin, chez ceux
qui ont sacrifié leurs anciennes relations politiques a
la défense de leurs convictions, chez ceux qui n'ont
jamais sollicité aucune fonction, aucune faveur, chez
ceux qui ont tout sacrifié au devoir de dévoiler les
intrigues et de démasquer les traitres, alors qu'il leur
eüt étè si avisé et si favorable de hurler avec les loups,
ou bieri chez celui dont la vanité fut de tout temps en
quête d'honneurs, qui ne pul jamais, depuis longues
années, dissimuler sa soif ardente d'arriver a la re
presentation nationale et qui aujourd'hui encore,
après avoir passé effrontémenl au-dessus de ceux
qui ont plus de mérites que lui, doit a l'intrigue d'oc-
cuper des fonctions pour lesquelles il n'a d'autre litre
que celui d'appartenir a une familie qui accapare
toutes les places 1
Nous pourrions pousser plus loin ce parallele. Si
cela peut vous être agréable, M. I'échevin, nous le
reprendrons.
En attendant, qu'il nous soit permis de finir par
un petit conseil, témoignage de l'intérêt que nous vous
portons. Employez vos loisirs adminislratifs étudier
le Dictionnaire de la langue francaise, vous y appren-
drez la difference qui existe entre un plaidoyer et une
plaidoirie.
IIMHIII
Conformément a ('engagement pris dans son rap
port présenté a l'assemblée générale du 28 décembre
1866, la commission directrice de la Libre pensée a
adressé aux Ghambres legislatives et a tous les Gon-
seils communaux du pays une protestation contre le
programme imposé par le gouvernement aux écoles
d'adultes. Cette pièce, datée du 20 décembre, duit
être parvenue depuis longtemps a notre administra
tion locale. Comment se fait-il douc qu'elle ne l'ait
pas encore communiquée au Conseil ou se propose-
rait-elle peul-êlre de la relegueraux oubliettes?
Voici le texte de cette pièce
Eibre Pensee. Bruxelles, le 20 décembre 1866
Messieurs,
Le gouvernement vous a invités a délibérer sur la
proposition d'établir des écoles d'adultes dans les
conditions prescrites par l'arrêté royal du 1" sep
tembre et la circulaire ministérielle du 20 octobre, ou
a placer sous le régime de ce règlement les institu
tions de l'espèce déja établies.
Sans enlrer dans l'appréciation des intentions du
gouvernement, nous croyons devoir vous conjurer de
repousser les conditions qu'il vous propose et le pro-
gramme qu'il préconise, parce que ce programma
est illégal, contraire au texte et a l'esprit de la Cons
titution parce que les consèquences qui résulte-
raientdeson adoption seraient en contradiction avec
le but a atteindre; parce que ses tendances sont
réactionnaires, en opposition flagrante avec le prin
cipe de la liberté de conscience
Nous disions que ce règlement est illégal. En effet,
Ia loi de 1842, art. 25, aulorise bien le gouvernement
a favoriser par des subsides, les diverses catégories
d'établissements d'instruction, autres que les écoles
primaires, mais nel'autorise aucunement a régler leur
organisation et leur programme. Elle ne le pouvait
d'ailleurs pas le droit de régler ('instruction pu-
blique donnée aux frais de l'Etat u'appartient qu'a la
loi. L'art. 17, 2, de la Constitution est formel a eet
égard.
Nous disons qua les consèquences qui résulteraient
de l'adoption de ce programme seraient contraires au
but a atteindre. En effet, n'est-il pas évident qu'un
grand nombre d'adultes, humiliés de se voir assimilés
a des enfants, déserteront l'école, dont la fréquenta-
tion est cependant si nécessaire a Ia propagation de
l'instruction Gar, remarquons-le, il s'agit ici d'une
aggravation a la loi de 1842, qui n'impose l'enseigne-
ment du catéchisme qu'a des enfants soumis entière-
ment a l'autorité de leurs parents, tandis que le rè
glement du ler septembre veut l'imposer aux adultes.
Déja l'opinion publique condamne l'enseignement re-
ligieux dans les écoles primaires, comme attentatoire
a la liberté de conscience et contraire a la Constitu
tion combien ne l'est-il pas plus encore, lorsqu'il
s'adresse a des adultes!
Nous disons que les tendances de ce programme
sont réactionnaires. En effet, quelle doit être la mis
sion de ('instruction publique Eclairer les esprits et
les consciencescombaltre les erreurs et les préju-
gés pacifier, éteiudre les haines religieusespropa-
ger lesidees de liberté, de justice, de fraternitél
Tout au contraire, le règlement des écoles d'adultes
ne tend qu'a enraciner les préjugés et l'intolérance
des sectes, a fomenler leurs divisions, a raffermir la
domination cléricale 1
C'est pour ces raisons, Messieurs,que Ia Libre Pen
sée, fondée pour la défense du grand principe de la li
berté de conscience, proteste contre l'arrêté du 1"
septembre et la circulaire ministérielle du 20 octobre,
et vous conjure de repousser les conditions et le pro
gramme du gouvernement.
Employez tous vos efforts a répandre les lumières,
a dóvelopper chez le peuple les sentiments d'honneur