JOURML DfYPRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPRES, Dimanche
Cinquième année. N° 7
17 Féyrier 1867.
PK1X B'lBOSSEMEST
POUR LA BELGIQUE
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Un Numéro 25 Centimes.
PRIX RES AlftllONCEK
ET DES RECLAMES
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rue de Dixmude, 59.
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ou envois d'aryent doivent étre adressés franco au bureau du journal.
Ee discours de l'Empèreur.
Le discours prononcé par l'empereur des Francais
a l'ouverture de la session législative fait en ce mo
ment l'objet des commentaires de toute la presse eu-
ropéenne
Düt nolre aveu arracher un sourire de pitié aux
hommes de la haute politique, nous avouerons que
l'importance de ce document nous échappe entière-
ment et qu'après l'avoir lu et relu avec un soin scru-
puleux, nous en sommes encore a nous demander ce
qui a pu lui valoir l'honneur de fixer depuis deux
jours les regards du monde entier.
Certes, ce n'est pas une parole ordinaire que ,celle
d'un souverain qui commande a 40 millions d'hom-
mes. Malgré les échecs de sa politique en Allemagne,
en Italië et au Mexique, Napoléon 111 tient toujours
dans ses mains les destinóes de l'Europe, et l'on com-
prend sans peine que quand un homme armé d'une
puissance aussi considérable annonce qu'il va parler
de la paix et de la guerre, tous les peuples soient at-
tentifs. Mais ce que nous comprenons moins ou, pour
mieux dire, ce que nous ne comprenons point du
tout, c'est que quand il est avéré que eet homme s'est
attaché a parler pour ne rien dire, on s'acharne,
comme nous voyons qu'on le fait depuis deux jours,
a torturer le sens de ses moindres paroles pour en
tirer, chacun, des consequences au gré de ses espé-
rances ou de ses craintes.
Et vraiment, si l'on veut réfléchir un instant a la
situation faite a l'Empire par les derniers événements,
il était impossible que l'empereur tint un autre lan-
gage. En proclamarrt nettement sa volonté de main-
tenir la paix, il exposait sa politique au danger d'une
nouvelle humiliation, dans le moment même oü elle a
besoin de lout son prestige pour effacer le souvenir
des échecs récents qu'elle a subis en Europe et en
Amérique. En annoncant, au contraire, des intentions
belliqueuses, il avait la certitude ü'aller directement
l'encontre des voeux de la France qui veul la paix, et
courait le risque de se voir pris au mot par un ennemi
contre lequel il ne se juge pas en etat de lutteractuel-
lement avec avantage.
II fallait parler, cependant. Garder le silence sur
des questions qui tiennent, depuis six mois, le monde
en suspens était chose impossibie. L'empereur a fait
ce que, dans une semblable situation, tout homme
doué de quelque prudence eut fait a sa place il s'est
arrangé de facon donner raison a la fors a ceux qui
craignent et a ceux qui espèrent et a ne compromettre
en rien les desseins qu'il garde pour l'avenir, quels
qu'ils soient.
Désirez-vous la paix? Voici qui va vous satisfaire
Rieu, vous dit l'empereur, rien, dans les circon-
stances presentes, ne saurait éveiller nos inquiétu-
des et j'ai la ferme conviction que la paix ne sera
pas troublée. Ne vous hatez pas toutefois de vous
réjouir, car il ajoute quelques lignes plus basLa
France est respectée au dehorsl'armèe a montré
sa valeur, mais les conditions de la guerre étant
changées, elles exigent l'augmentation de nos forces
défensives et nous devons nous organiser de ma
li nière a être invulnérables.
La paix, qui l'aime plus que lui Je n'ai, pour-
suit-il, qu'a me louer de mes rapports avec les puis-
sances élrangères La Russie, animée d'intentions
conciliautes, est disposée a ne pas séparer ses in-
téréts, en Orient, de ceux de la France. II en est de
même de l'empire d'Autriche.... La Prusse cherche
a éviter tout ce qui pourrait éveiller nos susceptibi-
lités nationales... L'Espagne et l'Italie mainliennent
avec nous une sincère entente... Nos relations avec
les Etats-Unis sont amicales... Nos liens avec l'An-
glelerre deviennent tous les jours plus intimes. t>
Qui peut douter qu'un souverain si étroitement lié
avec toutes les puissances étrangères, ne soit animé
des intentions les plus pacifiques du monde? N'allez
pas croire, au moins, que la France abdique la pre
ponderance que le régime impérial lui a assurée en
Europe. L'Europe la regarde Les peuples voisins
ont les yeux fixés sur nous pour juger par nos ré-
solutions si l'influence de la France doit s'accroitro
ou diminuer dans le monde. Gelte influence, qui
se mesure pour les nations au nombre d'hommes
que chacune d'elles peut mettre sous les armes, a
quels desseins doit-elle eonconrir? L'Empereur n'en
dit rien, naturellement, mais souvenez-vous de la
prediction de Napoléon Ier, parlaquelle s'ouvre l'exorde
de son successeur L'agglomération des peuples
v géographiques arrivera tót ou tard par la force
des choses, ['impulsion est donnée et je ne pense
pas qu'après ma chute et la dissolution de moo sys-
tème, il y aurait en Europe d'autre grand équilibre
possible que l'agglomération et la confédération des
o grands peuples.
Tout eet amalgame d'assurances pacifiques et d'al-
lusions guerroyantes peut être extrêmeinent habile,
et nous ne fesons aucune difficulté de reconnaitre
que, la situation étant donnée, le souverain de Ia
France s'est tiré d'un mauvais pas avec une grande
dexterité; mais on voudra bien convenir aussi que
ce discours, dont on fait tant de bruit, n'a d'autre im
portance politique que par l'humiliation que son auteur
s'inflige a lui-même en recourant a de pareils subter
fuges, et qu'un gouvernement réduit a de tels expé-
dients mérite qu'on lui applique sa propre maxime et
qu'on lui dise Tu n'as plus d'influence, dans le
monde, que par le nombre de soldats que tu peux
mettre sous les armes.
Correspondance particulier# de I'OPIMIOX.
Bruxelles, 16 Février.
VAssociation libérale a triomphé, mais a quel prix?
II se raconte ici des choses tellement incroyables, que
j'hésite a vous les répéter.
L'entrée a VAssociation des 50 ou 60 membres dissi
dents du Meeting liberal n'avail pas élé vue de tres
bon ceil, cela va sans dire, par la majorité doctrinaire
de cette société. Elle ne s'était pas opposée a leur
admission, de peur d'encourir Ie reproche d'intolé-
rance; mais a peine furent-ils recus, qu'elle s'occupa
activement de renforcer ses rangs, afin de rétablir
l'èquilibre rompu au profit de l'élément avancé par le
renfortque l'entree des meetingistes venait de luiap-
porter.
Jusque-la, rien que très-Iégitime. Les doctrinaires
se sentaient menacésil était naturel qu'ils songeas-
sent a se défendre mais ce qui est moins admissible,
sont les moyens mis en oeuvre par ces messieurs pour
maintenir ieur majorité numérique. On raconte ici
que, depuis environ trois mois, VAssociation a recu
au-dela de 150 nouveaux membres, la plupart com
plement étrangers a la vie politique et amenés la
par pure obligeance personnelle pour quelques gros
hères de la Doctrine, dont ils dependent. On affirme
et l'on dit être en mesure de prouver, que les coti-
sations de ces nouveaux membres sont payées par
une caisse dont quelques personnages importants font
les fonds. On ajoute enfin, et ceci serait le comble de
l'odieux, que plusieurs de ces nouveaux venus ont
élé présentés a VAssociation a leur insu et n'ont
connu leur admission que quelques jours avant l'ou
verture da poll. Un de mes amis me disait hier avoir
eonstaté lui-même que des quittances de cotisation
avaieut été remises, acquitlées par on ne sait qui, a
des électeurs qui s'etaient trouvés, un beau matin,
tout étonnés de faire partie de VAssociation.
Ce qui est certain, ce que personne n'osera conles-
ter, c'est que, Ie jour même de la fermeture du poll,
une escouade d'é'ecteurs s'est présentée a 1'Association
sous la conduite de M. M.bien connu ici pour ses
.opinions ultra doctrinaires et que la, après les avoir
rangés en ordre de bataille, ledit M. M. les a tour
tour appelés au scrutin, en dounant leurs noms au
président, qui les voyait pour la première fois. Je dois
dire, pour l'honneur de l'assemblée, que ce spectacle
a excilé dans la salie un dégout général et que M. Wat-
teeu lui-même en a paru scandalisé. C'est trop fort,
s'est écrié M. Vanhumbeek; on ne traite pas autre-
ment les électeurs de la Campine
Et nunc erudimini! Voila les hommes qui parlent
de progrès et de liberté. Voila les grands eitoyens qui
n'ont pas,assez de vertueuses indignations pour flétrir
Ie prêtre qui mène ses paroissiens au scrutin comme
des boeufs a l'abreuvoir. Voila ces dèfenseurs de la
sincérité du gouvernement représentatif qui cassent
les élections de Bruges et de Louvain. O comédiens
que vous étesquand done le pays apprendra-t-il
a vous connaitre
En attendant, on annonce que VAssociation sera
très-prochainement appelée i) se prononcer sur la
moralité des procédés mis en oeuvre pour assurer
l'óleclion de M. Watteeu. J'avoue que ce bruit mé
parait mériter confirmation. 11 n'y a guère que M. Van
humbeek qui pourrait prendre l'initiative de cette
mesure. Or, l'énergie de M. Vanhumbeek m'inspire
une defiance que sa conduite dans les derniers temps
n'a que trop justifiée.
Mardi prochain, M.Couvreur demandera la Cham-
bre de fixer jour pour l'ouverture de la discussion du
projet de loi sur la réforme électorale Le ministère
n'osera pas combattre ouvertement cette motion. N'a-
t-il pas lui-même été un des premiers a proclamer la
nécessité de la réforme? II est done fort a croire que
la Chambre va prendre jour pour aborder cette grave
question, sauf a la majorité a jeter d'ici-la quelque
nouveau baton dans les roues de l'opposition, car la
majorité ne veut pas entendre parler de réforme et
Le tout payable d'avance.