époque, et Ie journal doctrinaire en prend texte pour
accuser le candidat de l'évèefaé d'avoir renié ses an
ciennes convictions. Sans vouloir prendre parti pour
M. de Vinck dans eette affaire, on nous permettra ce-
pendant de rappeler que c'est sous ['administration
et sous l'inspiration de M. Loos, dont M. de Vinck a
été l'échevin pendant une douzaine d'années, que fut
conclue la fameuse Convention d'Anvers, qui n'exhale
pas précisément un parfum de libéralisme très-pro-
noncé.
Que nous importent, au surplus, les antécédents de
M. de Vinck Renégat ou non, l'ancien échevin d'An-
vers est le candidat du parti clérical et nous n'avons
que faire de sa voir ce qu'il fut jadis pour lui barrer
le chemin.
Ge que veut le parti clérical, on le sait le mono-
pole de l'enseignemerit, la conscience asservie a une
discipline brutale la nuit remplissant les écolesl'a-
venir étouffé dans son germe, l'homme atrophiè dans
l'enfantla science sous la crosse des évêquesl'his-
toire, complice par le silence et le mensonge, de ['in
quisition et des guerres de religion.
Ge que veut le parti clérical L'esclavage de l'Etat,
l'humiliation du pouvoir temporel, la Gité absorbée
par l'Eglise, la chaire dominant la tribune, la Consti
tution interprêtée par Escobar et appliquée par Ba-
sile.
Intolérant par essence, persécuteur, ennemi-né des
lumières, il estresté, malgré les allures démocratiques
qu'il se donne depuis quelques années, ce qu'il etait il
y a vingt ans. II a change de tactique, mais son ob-
jectif n'a point varié. Nourrissant en secret des espé-
rances qu'il n'ose avouer, il feint d'accepter la posi
tion qui lui est faite en Belgique et proclame avec
nous, plus haul que nous, les grandes libertés inscrites
flans notre pacte fondamental. Peine perdue, efforts
inutiles, hypocrisie percée a jour La Belgique a fait
du parti clérical une trop rude expérience pour qu'elle
retombe jamais sous son joug. II pourra lui arriver,
grace aux complaisances de nos doctrinaires el au
découragement que le régime des coteries sême dans
nos rangs, de ressaisir un instant le pouvoir mais ce
jour-la sera la veille d'une nouvelle chute, aussi écla
tante et, nous l'espérons bieu, plus décisive que celle
de 1857.
Les poteaux-indicateurs.
Parmi les innombrables services rendus par M. le
baron Mazeman a la chose publique, le Progrès rap-
pelle avec un noble orgueil, dans son 11° du 26 mai,
que c'est a l'insistance de notre sénateur que la Bel
gique doit de posséder des poteaux indicateurs weg-
wyzers) le long de ses routes.
En compulsant les Annates parlementair es, nous
voyons, en effet, qu'a deux reprises differentes, en
1860 et en 1862, notre honorable sénateur a appelé
sur eet important objet l'attention du departement
des Travaux publics. Toutefois, la vérité nous oblige
a reconnaltre que sa perseverance (pour nous servir
de l'expression du Progrès) s'est déployée en pure
perte en cette occasion, attendu que, de la réponse
faite par M. le ministre des Travaux publics a la pre
mière interpellation de M. le baron Mazeman, il ré-
sulle que le gouvernement n'avait pas attendu ses
recommandalions pour apprécier l'utilitè de cette
mesure, qui, a cette époque déja, était en plein cours
d'exécution.
Voici, en effet, comment s'est exprimé M. le mi
nistre des Travaux publics dans la séance du 2i fé-
vrier 1860 J'ai la satisfaction d'annoncer aux
honorables préopinants (VIM. Mazeman, de Ribeau-
court et de Sélys) que la inesure qu'ils viennenl
de recommander au gouvernement a été récem-
ment décidée en principe, un commencement
d'exécution y a rpème été donné, et dans le cou-
raut de cette année des poteaux indicateurs serout
placés dans toute la province de Brabant.
Deux ans plus lard, le 7 mai 1862, le même mi-
nislre répondant a une nouvelle interpellation de
MM. Mazeman et autres, disait a Pour couper court
a tout débat sur ce détail, je dois dire aux hono-
rabies préopinants qui se sont occupés de l'établis-
sementdes poteaux indicateurs, que la mesure est
v décrétée, qu'elle s'exécute et que les poteaux sont
jen fer. Le travail est terminé déja dans deux pro-
vinces; il pourra l'être, dans une troisième, avaut
r> la fin de l'année courante, n
N'en déplaise au Progrès, il lui faudra bien, après
cela, rayer de l'ètal de services de M. Mazeman, l'ini-
liative persévérante que le journal doctrinaire altri-
bue en cette circonstance a son candidat. M. Mazeman
aime beaucoup, énormément les poteaux indicateurs,
cela n'est pas douteux, mais il les aurait detestés au-
tant qu'il les aime, que nos routes n'en compteraient
pas un de plus ou de moins pour cela. M. Mazeman
est innocent des poteaux comme de la poudre et des
chemins de fer.
Notre sénateur aime done beaucoup les poteaux et
vraiment ilfaut lui en savoir gré. II nous souvient du
temps, et peut-étre M. Mazeman s'en souviendra-t-il
comme nous, oü beaucoup se mettaient en route et se
trouvaient 'fort embarrasses, au premier carrefour
venu, de poursuivre leur chemin. Fallait-il prendre a
droite ou bicn a gauche? Cruelle perplexité'. D'au-
cuns se tiraient d'affaire en cotoyant tant bien que
mal la route de droite et celle de gauche, tachant de
garder un just* milieu, et ce n'etaient pas les moins
bien avisés, car on en a vu arriver ainsi, et en grand
nombre, dont il eut éte difficile de dire au juste le
chemin qu'ils avaient suivi ni d'oü ils étaient venus.
Pour peu que M. Mazeman et le Progrès sollicitent
leur mémoire, ils se rappelleront certainement bien
des gens parvenus de la sorte, au mépris des axiomes
de la géomélrie sur la ligne droite, mais très-versés,
en revanche, dans la manière de tracer une circonfe-
rence autour d'un polygone.
Maintenant que nous possédons des poteaux indi
cateurs, il n'y a plus, semble-t-ii, a se tromper de
chemin. Qui veut arriver sait celui qu'il doit prendre
et n'a plus qu'a marcher droit devant soi, son choix
une fois fixé. a G'est un progrès, une amélioration
utile, a dit M. Mazeman. Nous sommes entièrement
de son avis.
II faut prendre garde, cependant, car il y a de faux
poteaux et l'on risque fort de s'égarer en suivant trop
aveuglément leurs indications. D'habiles trafiquants,
les mêmes qui, naguère, avant l'invention des po
teaux, cheminaieut si dextrement, un pied sur la
route de droite et l'autre sur la route de gauche, se
sont avisés de planter sur la voie qui conduit a leurs
boutiques des poteaux portant des indications mer-
veilleusement faites pourattirer les voyageurs novices.
C'est surtouta l'époque des élections qu'ils pratiquent
cette fraude sur une vaste échelle et nous ne saurioos,
quant a nous, trop insister auprès de nos lecteurs
pour les engager a se tenir en garde contre de pa-
reilles menées.
Le péril est d'autant plus grand et l'erreur plus
facile qu'on retrouve a peu prés les mêmes inscrip
tions sur les poteaux des deux chemins opposés. Sur
tous, sur ceux de droite comme sur ceux d9 gauche,
on voit figurer en mots magiques Liberie, égalité,
progrès, absolument comme a Cologne on voit le nom
de Jean-Marie Farina sur l'enseigne de tous les mar-
chands de parfumerie. De la, pour bien de braves
gens, un embarras cruel et trop souvent,, de plus
cruelles méprises.
Sosie, en pareil cas, se fht tiré d'affaire en s'é-
criant
Le vérilable Amphitryon
Est l'amphitryon oü l'on dine.
Mais quoi? on dine des deux cótés et, ce qui est
plus grave, on dine également bien des deux cotes.
Voila qui est bien, nous dira t-on peut-ètre mais
comment, quels signes reconnaitre les faux poteaux
des vrais
La chose ne laisse pas, nous l'avouons, que d'êlre
assez difficile. Mais, après tout, répondrons-nous, les
deux chemins qui s'ouvrent devant vous ne vous sont
pas inconnus, vous les avez parcourus plus d'une
fois, ils doivent vous être familiers. Longtemps vous
avez suivi celui de droite; il a failli vous conduire a
la main-morte, qui tapait dhr, dans son temps, toute
morte qu'elle était. Depuis, vous avez pris celui de
gauche, au boutduquel vous n'aveztrouvé que cor
ruption, hypocrisie et maquignonnage. Qa'esl-il en
core besoin de poteaux pour vous guider? Que vous
preniez a gauche ou a droite, ne savez-vous pas, a
point nommé, ce qui vous attend au bout du che
min?
Arlequin, mon ami, dit le commissaire, com
ment aimez-vous les coups de baton? Sur le dos ou
sur la plante des pieds? Monsieur le commissaire,
répond Arlequin, je n'aime les coups de baton ni sur
le dos ni sur la plante des pieds.
La réponse d'Arlequin mérite d'être approfondie et
nous conseillons fort a nos amis de la méditer. Peut-
être y trouveront-ils une règle de conduite plus sure
et plus utile a suivre que tous les poteaux du monde.
Les chiens d'attelage.
M. le baron Mazeman de Couthove, bourgmestre de
Proven el sénateur, a voté le maintien de la peine de
mort et la prorogation de la loi sur l'expulsion des
élrangers. On aurait tort, toutefois, de cónclure de
ces deux votes que la commisération n'a poitlt de
place dans son cceur car si M. le baron accepte sans
fremir la responsabilité des têtès qui tombent, si la
raison d'Etat domine en lui le sentiment de la justice,
il faut reconnaltre, par contre, que la condition sociale
des chiens d'attelage fut toujours l'objet de sa plus
vive, de sa plus toucbante sollicitüde,
A chacun sa tache dans l'élaboration du grand
oeuvre aux savants de scruter les mystères de la
création et d'asservir la nature aux volontés de
l'homme; aux philosophes de fouiller tous les recoins
de la penséeet de tracer a l'humanité les voies de sa
deslinée; aux hommes d'Etat, aux économistes de
sonder les innombrables misères sociales et d'élucider
legrand problème de l'amélioration du sort des classes
ouvrières. Plus modeste dans ses visées, M. le baron-
sénateur et bourgmestre a vouésa vie, lui, a l'affrau-
chissement des chiens d'attelage.
Nous avons sous les yeux un discours, deux dis
cours prononcés au Sénat par notre honoroble séna
teur sur cette intéressante question, et si VOpinion a
jamais regretlé d'être si petite, c'est bien aujourd'hui
qu'elle se trouve empêchée de reproduire in extenso
ces deux remnrquables morceaux d'éloquence parle
mentaire, qui rallieraient certainement a la candida
ture de M. le baron bien des sympathies attiédies.
Bornons-nous done, puisqu'il le faut, a n'en donner
qu'une courte analyse.
Après avoir rappelé qu'il existe a Bruxelles une so-
ciété proteclrice des animaux qui mérite toutes les
sympathies de Vassemblée, (ceci nous parait bien
un peu raide) l'orateur trace un tableau navrant du
sort misérable de ces pauvres animaux dont on
abuse outre mesure en leur faisant trainer des far-
deaux au-dessus de leurs forces. II proteste avec
énergie contre un pareil abus qui n'est pas en har-
monie avec les moeurs de notre temps et termine
sur cette belle maxime, digne de Pascal Celui qui
peut nourrir cinq ou six chiens a les moyensd'en-
tretenir un éne, qui est en état de rendre les mêmes
services.
Des esprits superficiels trouveront peut-êlre que
des questions de cette nature, si intéressantes qu'elles
puissent être, ne sont pas dignes d'occuper ['atten
tion d'une assemblée délibérante aussi haut placée
que le Sénat. Telle a été également, nous en conve-
nons volontiers, notre première impression a la lec
ture des deux discours pro canibus de notre séna
teur.
Pour peu qu'on y réflechisse, cependant, on s'a-
perc >it bien vite que ces deux discours ne sont pas
autre chose qu'une piquante allégorieet qu'en s'api-
toyant, comme il l'a fait, sur la condition des chiens
d'attelage, l'orateur a voulu signaler a l'attention du
pays le servage imposè au corps élecloral par le gou
vernement des coteries. Ces malheureux chiens, dont
il parle avec un intérêt si touchant, ce sönt, révé
rence gardée, les électeurs de la coterie, courbés sous
le harnais doctrinaire et attelés, ainsi que des bêtes
de trait, au char qui porie la fortune de quelques in
trigants sans convictions et sans vergogne. a L'abus
contre lequel il proteste, c'est l'indigne exploita
tion de la souveraineté nationale par une poignée
d'ambitieux et d'hypocrites, la pression des influences
partout substituée a la fibre discussion, le gouverne
ment fondé sur l'avilissement des caractères, la dé-
gradation successive et profonde des moeurs publi-
ques, en un mot, c'est le doctrinarisme sous le mas
que du libéralisme.
Reste a expliquer, et la chose nous parait malaisée,
le sens de Ia maxime qui lermine le discours parabo-
lique de M. le baron-sénateur Gelui qui peul
nourrir cinq ou six chiens a les moyens de nourrir
un ane. Le Progrès, qui est de la maison, nouS
donnera peut-étre le mol de cette apocalypse.
Séance de I'Association libérale de l'arron-
dissement d'Ypres.
L'Association libérale a été enfin convoquée le sa-
medi 25 mai. Cette convocation paraitra bien tardive
aux personnes qui se rappellent la dècision formelle
prise dans une séance précédente de réunir 1'assem*