JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPUE8, Bimanche
Cinquième année. N° 50.
15 Décembre 186*7.
Le tout payable d'avange.
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PBS1X U'ABUIVEHGMT
POUR LA BELGIQUE
8 francs par an; 4 fr. 50 par semestre.
Pour l'Etranger, Ie port en sus.
Un Numéro 25 Centimes,
PltlX DES AIKOSCES
ET DES RECLAMES
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Paraissant le dimanche.
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ou envois d'aryent doivent être adressés franco au bureau du journal.
X'pres, *4 Wécembre
Le ministère est en plein désarroi. Le bruit
circule a Bruxelles, et nos renseignements par-
ticuliers nous permettent d'en confirmer 1'exacti-
tude, que MM. Frère et Rogier, a la suite d'une
discussion très-vive et qui a principalement porté
sur la question de I'intervention de la Belgique
dans Ie règlement des affaires roinaines. sont
convenus de remettre tous les deux leurs demis
sions entre les mains du Roi.
Le ministre de la guerre, de son cóté, froissé
de l'attitude presque défiante que la section cen
trale a prise vis-a-vis du projet de loi sur I'orga-
nisation de l'armée, a également résolu de se
retirer.
L'émotion produite en France par Ia discussion
qui a eu lieu au Corps législatif est toujours très-
vive. On en trouvera les traces dans les journaux,
dont nous publions plus loin des extraits.
Le 5 décembre sera désormais une date fa-
meuse dans l'histoire du second empire. Les cris
de triomphe de la presse réactionnaire de toutes
les puances font ressortir la gravité douloureuse
de la déclaration de M. le ministre d'Etat. Le
temps est passé des tergiversations, des contradic
tions, des tètonnements qui ont caractérisé la po
litique du gouvernement francais depuis la paix
de Villafranca. On peut dire, selon I'expression
du Temps, que l'empire clérical est fait.
Transcrivons ici la déclaration de M. Rouher,
avec les interruptions enthousiastes de la Chara-
bre. Ce sont des paroles que nous aurons souvent
l'occasion de rappeler et qui rejettent l'empire en
arrière de seize ans, et même qui le rejettent eu
pleine restauration et jusqu'a la campagne de
1823.
II y a un dilemme, a dit M. Rouher le Pape a
besoin de Rome pour son indépendance l'ltalie aspire
a Rome, qu'elle considère comme un besoin impé-
rieux de son unité.
d Eh bien! nons le déclarons, au nom du gouver
nement franqais, l'ltalie ne s'emparera pas de Rome 1
(Applaudissements sur un grand nombre de bancs.)
Jamais....
i> Voix très-nombreusesNon 1 Jamais 1 jamais 1
Jamais la France ne supportera cette violence
faite a son honneur et a la catholicité. (Nouveaux ap
plaudissements.) Elle demande l'énergique application
de la convention du 15 septembre, et si cette conven
tion ne rencontre pas dans l'avenir son eflicacité, elle
y suppleera elle même Trés bien l très-bien Ap
plaudissements répélés.)
La coalition réactionnaire qui fit la première
expédition de Rome l'extérieur et l'intérieur
est refaite. Comme aux beaux jours de 1849, de
1850 et 1851, MM. Thiers et Berryer mènent
la majorité, et la majorité mène le gouverne
ment.
En presence de eet épanouissement de satisfac
tion des vieux partis, le parti démocratique de-
meure seul. Seul il proteste seul il continue la
lutte, fort de son droit, de ses convictions que les
événements sont impuissants a modifier, sur de
l'avenir, qui tót ou tard consacrera sa victoire
définitive.
Personne, sauf peut-ètre le principal intéressé,
nous voulons dire le gouvernement francais,
ne s'est mépris sur la portée de la victoire parle
mentaire gagnée par MM. Thiers et Berryer.
Malgré le ton superbe de M. Rouher, il est clair
que Ie gouvernement capitule. II passe sous le
joug de ce parti réactionnaire qui n'a pu lui par-
donner la campagne libératrice de 1859.
En vain M. le ministre d'Etat a-t-il pensé
masquer sa retraite par de grands éclats ora-
toiresnul ne s'y est trompé.
Jusqu'oü conduiront le gouvernement francais,
ceux qui deviennent désormais les inspirateurs de
sa politique L'avenir le dira. Dès aujourd'hui
certaines prétentions s'accentuent. M. Veuiliot
applaudit, mais crie que ce n'est pas assez. II ne
suffit pas de garantir a jamais au pape son
territoire'actuel il ne suffit pas de déclarer que
les canons rayés et les fusils Chassepot sont, quoi
qu'il arrive, au service du pouvoir temporel il
ne suffit pas que la France de 89 renie tous ses
principes, que de puissance libérale elle devienne
puissance catholique, qu'il substitue le Syllabus
a la déclaration des droits de l'homme il faut sur
le champ qu'elle somme l'ltalie de restituer au
saint-père Pérouse, Ancone et Bologne.
L'Union n'est pas moins explicite
a Ce n'est pas assez s'écrie M. de Riancey. La
co-existence de ces deux pouvoirs, dont l'un veut
absorber l'autre, n'est pas possible. M. Thiers a posé
le dilemrne, ou le maintien du pape, ou la chute de
l'unité italienne. Pas de milieu; et M. Rouher a bien
été obligé d'en convenir, puisqu'en fin de compte il
s'est déclaré pour le Pape 1
Nous soupgonnons bien un peu les motifs qui
ont déterminé le gouvernement frangais sejeter
dans les bras de la réaction cléricale. Mais qu'il y
prenne garde, son alliance avec le parti noir por
tera des fruits plus amers qu'il ne pense. Lors-
qu'on laisse prendre un seul de ses membres dans
certains engrenages, le corps suit bientót tout
entier.
La presse démocratique de Paris montre dans
ces douloureuses conjectures un accord, une una-
nimité et une énergie qui nous sont un sur garant
de 1' 'avenir. La gauche désertée par quelques uns
de ceux qui afïectaient de se confondre avec elle,
ne sera pas isolée dans le pays.
La Liberté prend acte de l'abandon fait par le
gouvernement impérial de toute sa politique de
puis la lettre a Edgard Ney, en 1849, jusqu'aux
plus récentes déclarations touchant la question
romaine; elle constate la victoire de MM. Thiers
et Berryer.
Ce qui nous a frappé, dit-elle, dans le vote d'hier,
ce qui frappera tous ceux dans la mémoire desquels
les faits se gravent ineffacablement, c'est l'identité qui
exisle entre la situation légisiative de 1867 et la si
tuation législative de 1851.
x> En 1851, quels étaient, heette époque, les grands
meneurs de la majorité? C'êtait M. Thiers, c'était
M. Berryer, et leurs amis.
En 1867, quels sont les grands meneurs de la
majorité? C'est encore M. Thiers, c'est encore
M. Berryer, et leurs amis.
Ou ces grands meneurs de la majorité l'out-ils
conduite en 1851 lis l'ont conduite a la dissolution
de l'assemblée législative; ils l'ont conduite au coup-
d'Etat du 2 Décembre. Emile de Girardin.
Le Temps n'hésite pas entre ses convictions
démocratiques et ses anciennes sympathies pour
M. Thiers. Son langage est des plus accentués.
II terraine un article intitulé I'Empire cléri
cal, par les lignes suivantes
Un fait grave domine désormais la situation. La
prépondérance du parti clérical est assurée dans les
conseils du second empire. La France de 89 n'est plus.
a Est-ce clair? disait hier M. le ministre d'Etat en
parlant de ses propres déclarations Oui, c'est clair,
trés-clair, trop clair!
Le Journal des Débats se demande pourquoi
M. Thiers demeure encore sur les bancs de ['op
position. Ce n'est évidemment plus sa place.
Le journal la France éprouve une joie sans ré
serve. Son article sur la séance du 5 décembre
se termine par cette phrase
Oh sait ce que veut la France, et dans un pays
tel que le nótre, une politique qui est une politique
qui triomphe.
C'est ce que le temps nous dira.
Nous ne ferons pas détiler sous ies yeux de uos
lecteurs les articles enthousiastes de toute la presse
clérico-gouvernementale. On devine le Iangage
que doivent tenir et les cléricaux triomphants et
les officieux haussant le ton, s'élevant jusqu'au
lyrisme, cotnme M. Bouher, pour s'attribuer tout
l'honneur de la victoire remportée par MM. Thiers
ét Berryer.
Un seul journal parmi ceux qui soutiennent
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