Entre dans la salle qui veut, certain de n'y pas
être inquiété, a moins qu'il ne soit honoré de la
haine de M. Ie président. En. vent on la preuve?
Pas plus tard que samedi nous avons apergu dans
la réunion, nous avons vu voter même des per-
sonnes qui n'ont jamais été admises par le comité
comme membres de la société. On a inscrit ces
personnes d'office sans consulter le comité et en
violation du règlement, ou leur présence ne peut
s'expliquer que par une tricherie. Que devient la
légalité dans l'un comme dans I'autre cas?
Quant a la seconde proposition de M. Carton,
le poll, I'idée est bonne en elle-mème, et nous
sommes surpris qu'il lui ait fallu vingt ans pour
la trouver. Lorsque Ton discuta la révision du
règlement, le poll faisait partie des modifications
proposées. M. Carton le combattit alors. Ema-
nant de l'opposition, I'idée était mauvaise, détes-
table M. le commissaire se I'approprie et la
déclare excellente. Vérité en dega des Pyrénées,
erreur au delè
Contradiction singulière et qui pourtant s'ex-
plique quand on se. rappelle, comme nous l'avons
dit en commengant, que, faute d'avoir indiqué le
lieu de réunion, on fut obligé de raccoler, de
cabaret en cabaret, les frères et amis. Ce poll
avait uniquement pour but de donner a toutes les
créatures le temps d'arriver.
Le poll se pratique Bruxelles, dit M. le
commissaire. C'est vraimais les billets sont
déposés dans une botte fermée d'une double clé,
comme pour les élections. Samedi nous les avons
vus jeter dans un crasseux chapeau. Supposons
qu'on n'a pas tricbé nous avons néanmoins le
droit de dire, lorsque nous voyons I'urne livrée
sans surveillance aux atteintes de ceux qu'anime
une haine implacable, que le scrutin ne présente
aucune garantie de sincérité.
Une particularité bien digne de remarque aussi
est que tous les billets étaient congus de la même
manière
Les membres sortants, excepté M. Capron,
remplacé par M. Auguste Brunfaut, M. Forrest,
remplacé par M Syx-Parret.
Cette circonstance seule prouve qu'on avait
imposé les billets.
On en distribuait d'ailleurs a l'entrée de la
salle, sans compter ceux qu'on avait colporté
domicile la veille et le jour même de la réunion.
Nous avons rcconnu dans plusieurs de ces bil
lets l'écriture d'un employé de l'Hótel-de-Ville.
L'empressement exécuter les ordres était tel
que M. Auguste Brunfaut a voté pour iui-même
et M. le président qui semblait avoir appris la
formule par cceur, tant il lisait couramment cette
fois, n'a pas rougi de déclarer valable un billet
portant entr'autres M. Syx-Paret de Messines.
Le dépouillement du scrutin a commencé
quatre heures moins un quart. Le bureau compte
et recompte les bulletins; selon l'un, il y en a 82,
83 selon I'autre; on n'est pas parvenu a savoir au
juste le cbiffre exact. Enfin, 82 ou 83, c'est le
nombre de ceux qui ont pris part au vote sur les
190 membres dont se compose l'Association. A
peine les deux cinquièmes
Un grand nombre de personnes, dégoütées des
odienx tripotages qui se trament l'Association,
s'étaient abstenues d'y paraltre, comme elles s'en
abstiennent depuis quelque temps déjè.
Disons-le toutefois, les particularités de la
séance de samedi, que nous venons de reproduire
dans leurs moindres détails, n'o'nt eu rien d'im-
prévu. Elles ne sont que la répétition, avec va-
riantes, de ce qui s'y est pratiqué de tout temps.
II n'en est pas moins bon et utile que le public soit
instruit et qu'il sache toutes les roueries jésuiti-
ques de cette Association soi-disant libérale qui
prétend imposer au corps électoral des decisions
et des candidatures toutes bèclées.
Correspondance particuliere de 1'OPISlOS.
Bruxtlles, 20 mars.
II n'y a pas dire :1e ministère vient de remporter
une magnifique victoire. Vingt-trois voix de majorité!
C'est admirable, et l'élranger qui nous regarde faire
verra bien maintenant que si uous nous chamaillons
comme chiens et chats sur la question des cimetières
ou ceile des cabaretiers, nous n'en savons pas moins
nous unir sur Ie terraiD de l'amour de la patrie,
comme dit M. Bouvier, quand les intéréts de la dé-
fense nationale sont en jeu.
M. le ministre de la guerre démontrait dernière-
ment a la Chambre qu'il faul au moins 16 mois de
service pour faire un bon fantassin. On devient excel
lent représentant en beaucoup moins de temps. Mais
aussi le service est-il infiniment plus aisé. Qu'exige-
t on-d'ün représentant? Pourvu qu'il vote au gré du
ministère et qu'il sache a propos réclamer la clóture,
on ne lui en demande pas davanlage. Or, il ne faut
pas plus de huit jours pour être parfailement dressé
cette manoeuvre élémentaire. Tandis qu'un fan
tassin....
La discussioD du budget de l'lnlérieur commencera
probablement mardi prochain. Je dis probablement
car l'heure oü je vous écris, Ia Chambre n'a pas en
core réglé son ordredujour.
La question des écoles d'adultes sera soulevée une
des premières. On se rappelle que, rejetant l'interpré-
tation donnée par M. Alph. Yandenpeereboom la loi
de 1842, le nouveau ministère a décidé que des sub
sides seraient accordés aux communes pour ['organi
sation et l'entretien de leurs écoles ti'adultes, sans
que le gouvernement .eut a se préoccuper du point de
savoir si ces écoles étaient ou nonsoumises ['inspec
tion ecclésiastique. L'épiscopat acceptera-t-il ces con
ditions nouvelles? Consentira-t-il a transiger sur une
question laquelle il attache unc importance si con
siderable. La lettre que Mgr Dechamps vienl d'adres-
ser au ministère et que Ie Journal de Bruxelles a re
produce ne s'explique pas clairement sur ce point et
l'obscuritè dont elle s'enveloppe ne laisse que trop
bien présager la réponse de l'autorité ecclésiastique
quand la question lui sera nettement posée.
Une autre question qui sera soulevée a l'occasion
du budget de ['Intérieur est celle de la légalité des
décorations civiques instituées pour récompenser les
services rendus en -temns d'épidémie et dans l'exer-
cice des fonctions communales et provinciates. Ces
decorations ont été instituées par simple arrêté royal.
Or, beaucoup de bons esprits soutiennent qu'elles ne
peuvent l'être qu'en vertu d'une loi, aux termes de
['article 76 de la Constitution.
II n'est pas probable que la Chambre, liée par les
fails accomplis, donne raison cette interpretation.
Mais on peut s'attendre a un débat très-intëressant.
J'étais bien informé quand je vous fesais pressentir
que le parti liberal s'abstiendrait probablement a
Anvers dans l'élection du 23 de ce mois I 'Association
a considéré que la session législative étant a sa fin, il
valait mieux qu'elle réservêt toutes ses forces pour la
grande lutte du mois de juin prochain. On ne connait
pas encore en ce moment le candidat definitif du parti
catholique.
Vous avez pu lire dans tous les journaux que
M. Anspach, bourgmestre de Bruxelles, vient d'assi-
gner VEspiègle devanl le tribunal civil, a raison d'une
biographie diffamatoire publiée contre lui par ce jour
nal.
Au moment même oü je vous écris, 1 'Espiègle com-
parait devant la justice. Un sentiment de delicatesse
que vos lecleurs apprécieront ne me permei pas de
vous en dire davantagemais on regreite générale-
ment que M. Anspach n'ait pas jugé a propos de
dèferer sa plainte au jury. Le jury, c'est-a-dire la
conscience publique, est le seuljuge dans des ques
tions de cette nature et M. Anspach n'avait pas
douler qu'il lui rendrait pleine et enlière justice.
Les petits journaux satyriques pullulent et je con
state a regret que peu d'entre eux méritent d'étre
lus; mais ce n'est pas une raison pour qu'on leur
fasse Ia guerre l'indifférence publique les tuera
beaucoup plus sürement que la persécution et la
violence.
II y a peu de jours, un petit journal avail afïiché
la vitrine d'un libraire de la rue des Fripiers une ca
ricature représentant le com te et la comtesse de Flan-
dre a une representation du théêtre flamand. Un
troupier s'approche et trouvant l'exhibition incon-
venante, brise la vitrine, s'empare de la caricature et
la déchire. La police s'empare du troupier, qui dé
clare qu'il fera toujours de même en pareille occasion.
Je ne le pense pas, quand il aura appris ce qu'il en
coüte.
Lesabonnés au Moniteur et aux Annates par lemen -
taires apprendront avec plaisir que l'impression et la
publication de ces deux journaux seront incessam-
ment mises en régie. Espérons que cette mesure
aura pour résultat de faire disparaitre les nom-
breux abus qui ont été si frèquemment si-nales
la Chambre et qui avaient fini par dégoüter une
foule de gens de leur abonnement a des journaux
qui, a l'instar de celui de Jéróme Palurot, ne parais-
saient que quand la direction n'avait pas autre chose
a faire.
Le Figaro est poursuivi pour son article, inti-
tulé une Maison de sages. Ferragus raconte qu'il
a été dans un pays étranger ou ies représentants
de la Nation, comme la presse, jouissent de la
plus grande liberté. Désirant assister a une des
séances de l'Assemblée, il s'est procuré une carte
et s'y rend, mais son étonnement est très-grand
car il est dans une maison de fous. II décrit lon-
guement cette maison et ses habitants sa des
cription très-transparente, s'applique au Corps-
Législatif et ses membres. C'est seulement la
fin de sa visite qu'il s'apergoit qu'il y a erreur.
On lui a donné une carte pour une autre. Au
lieu de le conduire l'Assemblée, on l'a conduit
dans un établissement de santé.
Voici quelques extraits de eet article
Je pensais que ces orateurs discutaient sur la li
berté de la presse. Leurs gestes indiquaient la néces-
sité d'un cautionnement.
Un autre, qui avait la tête rasée et la mine fa
rouche, et auquel je n'eusse pas confié grand'chose,
se frappait la poitrine et boutonnait febrilement son
habit, comme pour dire la conscience doit être mu-
rée 1 Murons-nous I murons-nous 1
J'en vis un qui, les yeux au ciel, faisant.de grands
signes de croix, s'isolait pour apprendre un beau dis
cours qu'il repétai.l en le sucant des lèvres comme
du sucre mais quand on s'approchait de eel orateur
religieux, il vous crachait au visageun autre faisait
des vers et les scandait avec des airs de tête superbes;
deux vieillards, qui avaient sans doute abuse de l'hy-
drotérapie, car leurs crênes étaient denudés, se li-
vraient a descalculs incessants, ramassaient des pe
tits cailloux qu'ils jetaient dans des poches percées,
et essayaient de metlre deux feuilles de papier en
équilibre. lis travaillaient sans doute au budget.
Uu autre jouait de la trompette avec sa main gau
che et agitait un sabre de bois avec sa main droite.
II avait un chapeau mexicain.
Deux ou trois se battaient derrière les arbres. Un
malheureux, qui avait les jambes rompues, se trai-
nait a terre el venait en rampant mordre ses col-
lègues mais ceux qu'il mordait n'y faisaient pas
attention et s'essuyaient seulei-aent la place.
Des gens a physiouomie placide, ressemblant a des
bergers d'Arcadie, faisaient des petites cocottes en
papier, que d'autres leur dérobaient et pressaient
sur leur coeur.
Quand Ferragus s'est apergu de sa méprise et
qu'il apprend qu'il est dans une maison de fous, il
cause avec le docteur de l'établissement
Et ne pourrai-je aller au Parlement?
II n'est pas en session. C'est le jour de Ia paye,
ces messieurs s'amusent.
J'en suis desolé... Pourriez-vous au moins me
montrer un de ces messieurs.
Je n'en ai plus qu'un, me répondit-ilil est