Tribunal de la Seine. notre numéro de dimanche dernier. II s'agissait dans cette correspondance, adressêe de Bruxelles a Organs de Courtrai, d'une certaine particula- rité (c'est Ie mot dont se sert Ie correspoodant) qui serait de nature a déterminer la Chambre ne pas valider l'élection de M. Yan Merris. Le correspondant n'en disait pas davantage. En sa qualité de Ganimède du nouvel Olympe oü tróne le représentant poperinghois en compagnie de MM. Beke et Vandenpeereboom, le Progrès doit savoir a quelle particularité le journal courtraisien a voulu faire allusion et nous oomptiops bian que son numéro de mercredi nous apporterait quelques êclaircissements sur le fait si mystérieusement annoncé par VOrgane. Mais point. Ganimède est muet comme un poisson. Après cela, Ganimède est tellement absorbé, depuis quinze jours, par les apprèts du banquet royal, qu'il ne serait pas impossible qu'il eut oublié de satisfaire notre curiosité. Pouvons-nous espérer qu'il réparera son oubli dans son numéro de dimanche prochain? Que Ganimède y prenne garde son silence pour- rait être interprèté mal. A moins pourtant que ce qu'il pourrait dire ne fut encore plus compro- mettant que son silence. Question de rage. Une commission composée de MM, Vleminckx, De- paire, Uytterhoeven et Yisschers a été chargée par ie conseil supérieur d'hygiène, a la demande de M. le minislre de l'intérieur, de rechercher si des mesures générales doivent être prises soit pour prévenir les progrès de la rage soit pour prévenir les dangers de la contagion. Cette commission vient de faire son rapport, qui ne nous parait pas trés concluant. Ce document constate que la rage se dèveloppe ordinairement, sinon tou- jourssousl'influence de privations de toutes sortes, et surtout sous celle du mauvais traitement, de toute excitation un peu vive, de toute contrainte quelcon- que enfin. La commission, enconséquence, se prononce contre la muselière et croit que la meilleure garantie contre la rage, c'est la responsabilité du proprietaire du chien enragé. Si M. Yleminckx était mordu, par exernple, il s'en consolerait en songeaat qu'il a droit a une indemnité. On demande un conseil a des méde- eins, ils vous répondent comme des avocats. Quel remède y a-t-il contre la rage Un bon procés 1 II est vrai que M. Vleminckx indique un autre moyen de prévenir le mal, c'est... c'est de tuer le plus de chiens possible mais francbement, il ne fal- lait pas pour trouver cela une commission du Conseil supérieur d'hygiène. Le rapport se termine par cette réflexion conso- lante qu'en somme il n'y a pas trop de gens enragés en Belgique. On s'accordegénéralement a croire quele papen'in- vitera au concile oecuménique ni les souverains ni leurs ambassadeurs. II n'en revendique pourtant pas moins des droits qu'il a usurpesjadis, etauxquels les anciensmonarques ou princes se soumetlaient bévé- volement. Ainsi, le jour de la fête de saint Pierre, après les premières vêpres, le pape a revendiqué les redevances qui devaient élre payees a la chambre apostolique, consistant ensemble en 9,000 écus, 12 calices, 25 ciboires et 9 plateaux d'or ou d'argent, et environ 450 livres de eire blanche, de sucre ou de poivre, Leroi de Naples fievait offrir jadis une haquenée, que le saioLsiége a cessé de reclamer. Comme vassal du saint père, dont la familie Farnèse, en 1545, avait subi la suzeraineté, le due de Parme ne lui donnait pas moins de neuf mille ducats, auxquels la cour de Romea forcément renoncè mais elle entend mainte- nir ce qu'elle appelle ses droits. L'Italië nousapprend que le 28 juin, au moment oü le pape, se rendant aux premières vêpres, entrait sous la basillique pré- cedè de toute sa cour et entourè d'une foule considé- rable, Mgr Pasqualoni, procureur du tribunal de la chambre, s'est présenté et a lu la protestation sui- vante Qn avait cautuma, teas saint père, eu ce jour anniversaire, oü les feudataires de l'Eglise romaine doivent payer les redevances usuelles a la chambre apostolique, de toucher celle en reconnaissance du droit suprème et direct du saint-siege sur le duché de Parme. Mais comme ceterritoire estoccupé depuis plusieurs années par le pouvoir séculier, naai, procu reur génëral de Votre Saintetéet de la chambre apos tolique, je proteste contre cette occupation, déclare que le duché appartient de plein droit au saint-siége, et prie Votre Sainteté d'accueillir tna protestation avec bienveillance et de vouloir bien défendre ce lè- gitime droit de l'Eglise. Le pape a répondu Nous accueiilons votre protestation tout ce qui a été fait jusqu'a ce jour pour la defense de notre droit sur la possession de notre duché de Parme, nous le ratifions et le confirmons aujourd'hui, et pour revendiquer ce patrimoine des saints Pierre el Paul, fort de l'assistance de Dieu et de ces deux apótres, nous ne negligerons rien jusqu'a notre dernier sou- pir. Get acharnement a revendiquer de gothiques pré- rogatives prouve a quel point la condition de souve- rain temporel a dénaturé le pouvoir pontifical. Ce n'est plus qu'un roi, non un roi de nos jours obligé de consulter les volontés de la nation, mais, c'est un prince du moyen-êge environné de feudataires. Rome, qui repousse avec horreur la société mo derne, s'est profondément imprégnée de la société féodale. Les meilleures idéés évangéliques sont mé- connues; le servus servorum Dei n'est plus qu'une vaine formule les ultramontains vont même jusqu'a nier cette fraternitó,- cette égalité, dont la proclamation a été une des causes de la fortune du chris tianisme. Chronique judiciaire. La foule qui se presse dans la salie d'audience montre lout i'intérêt que le public attache a cette affaire. Le prévenu est un tambour-major en grande tenue, plastron rouge et croix d'honneur sur la poitrine. II a la taille de l'emploiles pieds et les mains, idem. 11 se retourne frèquemment du cóté de l'auditoire, vers lequel il lance, d'un sourire gracieux et d'une main exercee, de petites salutations amicales. M. le Président. Prosper Frottard, vous êtes ac- cusé d'avoir, dans la soirée du 10 avril, porté la main sur la joue de Modeste Billet, et cela dans des circon- stances peu compatibles avec votre position et le lieu de l'óvénement. Qu'avez-vous a répondre a cela? Prosper Frottard. Mon cher Président, je.,. M. le Président. Par respect pour vos juges, tambour-major, veuillez vous dispenser de ces ter mes affectueux dont ils se passent volontiers. Moins de familiarité, s'il vous plait, et soyez convenable. Voyons, reconnaissrz-vous avoir souffleté Billet? Prosper Frottard. Mon Président, sauf vol' res pect, Frottard se bat l'oeil de ce criquet de Billet et de tous les Billets de la terre. Le Président. Vous vous en battez l'oeil, c'est fort bien, mais vous battez aussi la joue, cela est grave, Frottard, d'autant plus grave, qu'il ressort de l'instruction que vous semblez trop compter sur votre supériorilé corporelle pour avoir raison de vos adver- saires. Ce n'est pas la première fois que vous faites appel a vos deux mètres quinze. Prosper Frottard. Erreur, mon Président, je n'ai jamais griffe une puce. Mon cceur et la mie de pain, c'est frere et sceur, Mais des maroufles, comme Billet, c'est different. Frottard est un homme d'hon neur et Billet est un lache. BilletQa a une parole comme une fusée; ca dit de ne pas vous poursuivre et v'la que ca pelotte une balan$oire a la correction- nelle. Le Président. Comment un lêche Modeste Bil let, s'il n'a pas votre taille, n'en defend pas moins courageusement ses opinionsil est notoirement connu pour un homme loyal et honnête; il est bien vu et estimé dans tout le quartier et mérite des égards a plus d'un titre. Le lèche, ce serait plutót vous, car vous savez parfaitement que Billet n'est pas de taille a lutter avec vous, a tour de bras; le lèche, ce serait vous, de vous vauter a froid de dominer physique- ment un homme qui n'atteind pas a votre coude. C'est inouï ce que vous avez fait la, surtout pour un tambour-major Prosper Frottard, Monsieur le Président, si j'ai un tort, c'est d'avoir le cceur gros comme une ci- trouille et une main qui n'obéit pas toujours ponc- tuellement ma volontè. Que youlez-vous, chacun a ses petits défauts. Moi, j'ai celui d'aimer qu'on me donne raison, comme moi-même je donne raison a tout le monde. Je ne suis pas difficile. Mais ce jour-lè, voyez-vous, j'avais un marron dans la balie, et pour m'alléger, j'étais allé jouer aux cartes. Alors, je veux qu'on me laisse la paix. V'la, quand j'avais le plus besoin de repos, que Billet m'agace mes nerfs poli- tiqnes et.... Modeste Billet. Permettez, Monsieur le Prési dent, que je fasse observer que c'est Frottard, le pre mier, qui a fanfaronné sur sa personnalité politique; je n'ai fait, moi, que remballer la blague. Prosper Frottard. 11 est insupportable, ce Bil let, avec ses interruptions. Je dis done que c'est Bil let qui a décousu mon jeu. Tenez, je suis la, il m'as- perge de vieux contes en l'air moi, qu'ai du coeur, ca me pique il est béte avec ses déductions logi- ques I Que faire, mon Président, surtout quand on ne sait que répondre? Je lui ai repassé un atout, c'est ca qu'a brouillé les cartes. Le Président. Vous reconnaissez done avoir frappé Modeste Billet Prosper FrottardOui, Monsieur le Président, mais après avoir re9u l'assurance que, la taloche donnée, il m'eüt laissé dans mes pantoufles. C'était la condition. Le Président.Assez Prosper Frottard, le tribu nal est suffisamment instruit. Après quelques propos malsonnants, vous avez menacé Billet d'un soufflet; vous vous êtes remis au jeu, sans traduire votre me nace en fait, et après un quart d'heure de réflexion, pendant lequel vous avez dressé votre plan d'attaque, vous avez repris votre menace et dit a Billet Si vous voulezpromettre devant Ia galerie de ne pas me faire faire une carmagnole devant dame Justice, je vous appliquerai la main sur la figure. Billet comptant qu'une générosité en appellerait une autre, vous a promis ce que vous demandiez. Aussitót, abusant de la grandeur d'ême de voire adversaire aussi bien que de vos muscles, vous vous êtes oublié jusqu'a faire claquer votre main sur la joue de votre magnanime contradicleur. De ^ingratitude, nul n'est l'obligé. Le tribunal saura apprecier votre conduite. A ces mots, le tambour-major pêlit, porte Ia main au ventre, jette un cri de douleur et s'aflaisse. Un désordre effroyable succède a cette scène inattendue. Le tambour-major revient bientót a lui et demande a sortir. Le pronoucé est remis huitaine. FAIT* SM VERS. Le cléricalisme applique l'hydrothérapie aux choses de la religion. Après l'eau de la Salette, qui guérit les maux du corps, voici l'eau du cceur, destinée a guérir les maux de l'ême. Cela se vend dans les bu reaux du journal I'Espérance du Peuple, de Nanles, et voici l'annonce qu'elle va publier prochainement EAU DU COEUR Larmes de la piétédu dévouement et de la sympathie. POUR BAPTÊME DE JF.UNES ARABES ET AUTRES. EN VENTE ICI. Exiger Ie cachet de l'ami de la liberté et de la vraie morale. Sérieusement, nous ne comprenons rien a ['exci tement du collaborateur sacré de YEspérance. Les dames de la Sainte-Enfance enlèvent et détien- nent les petits annamites a Saigon. L'archevêque nourrit les petits Arabes pour les baptiser. La vraie morale, selon nous, ne permet point cela. Asupposerqu'il plaise aux fibres penseursd'Egypte ou d'ailleurs de raccoter des adhérents, de se livrer a la traite des enfants catholiques pour les décatholiser, le clergé et ses coryphés ordinaires jetteraient les hauts cris. Eh bien les fibres penseurs s'abstiennent d'user de procédés aussi opposés aux principes de droit et de justice qui nous sont chers. 'Ils veulent répandre autourd'eux l'instruction sans s'inquiéter des croyan- ces des élèves, en faisant abstraction de ces croyances et en s'aitachant a réunir ce que le fanatisme sépare, prouver que les, intéréts moraux el matérielsde la grande familie humaine exigent l'apaisement des passions haineuses d'un autre age, et l'effacement des ténèbres affreux qui ont enveloppé tant de fu- reurs et tant de crimes, devant i'éblouissante lumière de la science et de la liberté. Assurément, ce ne sont pas de grands coupables et les injures de l'ultramontisme, loin de les émouvoir, deviennent pour eux ['équivalent d'un certificat de raison, de logique et de courage.

HISTORISCHE KRANTEN

L’Opinion (1863-1873) | 1868 | | pagina 2