JOURNAL D'YPRES DE I/ARRONDISSEMENT
Le tout payable d'avance.
YPRES, ï)i manche
Sixième année. N° 33.
16 Aoüt 1868.
PUIX B'ABOMEIHEiT
POUR LA BELGIQUE
8 francs par an; 4 fr. 50 par semestre.
Pour FEtranger, le port en sus.
Un Numéro 25 Centimes
PRIX »ES '4AROXCEK
ET DES RECLAMES
10 Centimes la petite ligne.
Corps du Journal, 30 centimes.
Paraissant le dimanche.
talssez dire, laissez-vous bISmer, mais publiez voire pensée.
On s'abonne a Ypres, au bureau du Journal, chez Félix Lambin, imp.-lib.,
rue de Dixmude, 59.
On traite a forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres
ou envois d'aryent doivent étre adressés franco au bureau du journal
Ea maladie du Prince royal.
Les renseignements particuüers qui nous par-
viennent de Rruxelles sur la santé du Prince royal
sont des plus alarmants. On sait qu'è la suite
d'une consultation a laquelle ont été appelés
MM. les médecins Jecker, Spring et Henriette,
le due de Brabant avait été ramené au chêteau de
Laeken. Immédiatemerit après son retour, une
amélioration assez sensible s'était manifestée dans
i'état du jeune malade, mais cette amélioration
ne s'est pas longtemps maintenue et, dés jeudi
dernier, les choses se sont rapidement empirées
au point qu'une crise définitive et fatale est de-
venue imminente. U n'y a pas se faire illusion,
nous écrit notre correspondant, moins d'une
réaction favorable que rien n'autorise a espérer,
l'héritier présomptif du tróne est irrémédiable-
roent perdu. Un miracle de la nature pourrait
seul le sauver, car la science sedéclare impuissaote
et ne conserve aucun espoir.
Nous voudrions pouvoir révoquer en doute
l'exactitude de ces tristes «ouvelles, mais «lies ne
sont que trop bien confirmées par le langage des
journaux de Bruxelles, tous unauimes signaler
la situation du Prince comme entièrement déses-
pérée.
Une liberie nécessaire au Jovbiul d'Ypres.
La liberté nécessaire que réclame le Journal
d'Ypres, ce n'est
Ni la liberté de l'enseignement une hérésie
au premier chef,
Ni la liberté de la presse une peste et un
délire,
Ni la liberté de conscience une invention
diabolique,
Ni la liberté des cultes une suggestion de
l'enfer,
Ni aucune autre de ces abominables libertés
modernes que l'Eglise a mainte fois condamnées
et que le prochain Concile cecuménique se propose
de flétrir, une fois de plus, a la face du ciel et de
la terre.
Non. La liberté nécessaire selon notre pieux
confrère, celle qui doit nous débarrasser a tout
jamais de la lèpre du paupérisme, c'est la liberté
de fonder des convents.
Nous sommes entièrement de son avis; et com
ment ne le serions-nous pas quand nous voyons
quel degré de prospérité commerciale et indus-
trielle sont arrivés les peuples qui pratiqueut la
liberté de la cbarité telle que la comprend le
Journal d'YpresQuel spectacle plus magnifique,
plus instructif que celui que nous offrent I'Espagne
et les Etats de l'Eglise! Dans ces contrées bénies
du ciel, point de ces misères hideuses comme on
n'en voit que trop dans nos pays soi-disant indus
tries point de mendiants, point de prostitution,
aucune de ces plaies affreuses qui rongent les peu
ples travailleurs. D'innombrableslégionsde moines
noirs, blancs, bruns ou gris, pourvoient a tout.
De quoi vivent ces moines, ou ils trouvent les res
sources nécessaires pour faire face des besoins
si considérables, il n'importe l'essentiel est qu'ils
remplissent la mission dq» dévouement qu'ils se
sont imposée et il faudrait nier l'évidence pour
prétendre qu'ils ne la remplissent pas.
Mais le monde est ainsi fait aujourd'hui que
les faits les plus éclatants peuvent être impuné-
ment niés et obscurcis. Une engeance de sophistes
s'est mise en tête d'enseigner que le travail et
l'instruction sont lesseules sonrces de la richesse,
que les moines ne sont bons a rien qu'è vivre aux
dépens de la société qu'ils exploitent, et les gens
simples, séduits par leur langage artificieux, ont
fini par les croire.
Patience pourtant. L'erreur n'a jamais eu qu'un
temps et la vérité méconnue ne tardera pas re-
prendre tous ses droits. Le Journal d'Ypres le dit
avec raison l'avenir réserve au principe de la
charité libre une éclatante revanche. En atten
dant, et comme il faut bien vivre après tout, nos
bons religieux font la cbasse aux successions et
remplissent leurs besaces de lout ce qui leur tombe
sous la main. On leur en fait un crime, on les
malmène dans la presse et devant les tribunaux.
A qui Ia faute, cependant, si ce n'est la loi
ignare et inique qui leur interdit de spolier
les families pour la plus grande gloire de Diea
Quand la loi aura proclamé le principe de la cha
rité Dbre et que les couvents pourront légalement
recevoir des libêralités, il n'y aura plus de procés
de Buck possible et l'on ne verra plus, comme au
jourd'hui, un digne père jésuite obligé de resti-
tuer de misérables héritiers qui en feront vrai-
semblablement le plus mauvais usage, unesomme
d'argent qui, dans les mains de la Société de Jé-
sus, aurait été bien certainement consacrée au
soulagement de la misère.
Qui cela pourrait-il bien ètre
Nous trouvons dans un Journal de Bruxelles, le
Peuple beige, l'incroyable révélation que voici
s Le correspondant bruxellois du Journal de Char
leroi a fait dernièrement allusion a une election qui
parait préoccuper assez désagréablement nos doctri
naires.
Des renseignements que nous avons pu recueillir
sur cette délicate affaire, il résulte que, dans un ar
rondissement dont nous sommes obligés de taire le
nom, le parti doctrinaire a réussi, grdcea unefurieuse
pression sur les électeurs des campagnes, a faire en-
trer a la Chambre un certain personnage, très-haut
placé par sa position de fortune, mais que la rumeur
publique accuse depuis longtemps de se livrer a cer-
taines pratiques peu en harmonie avec la distinction
des sexes. Si une pareille infamie peut avoir une ex
cuse, disons, a la décharge des doctrinaires de l'ar-
rondissement en question, que ce personnage les me-
nacait de tourner contre eux son influence de grand
propriétaire, s'ils ne le prenaient pas pour candidat,
et qu'ils l'ont subi plutöt qu'accepté, afin d'éviter un
échec électoral que son opposition rendait a peu prés
certain. Quoi1 qu'il en soit, cette victoirea produit un
telscandale que le ministère lui-même s'en estému.et
que plusieurs représentants de la gauche,indignés,ont
hautement manifesté leur resolution de voter contre
l'admissiori du trop heureux candidat. Telles sont les
informations que nous avons rassembfées, et dont
nous pouvons garantir Ia parfaite exactitude. Elles
emportent avec elles leur enseignement et nous dis
pensent de tous autres commentaires.
Si les informations du Peuple beige sont exactes,
nous comprenons l'embarras du cabinet et l'indi-
gnation des représentants que l'on veut rendre
complices d'une aussi monstrueuse infamie. Pour
l'honneur de notre pays, nous voulons croire
pourtant que notre confrère de Bruxelles a été
mal renseigné. II nous parait impossible qu'on
trouve en Belgique un arrondissement oü un pa-
reil scandale ait pu se produire sans soulever les
protestations indignées de la conscience publique.
Que les nécessités de la lutte, que le désir de
triompher d'un adversaire puissant amènent un
parti a faire bon marché de l'incapacité politique
du candidat qu'il patrone, e'est ce qui se voit
malheureusement tous les jours et nous compre
nons qu'il est telles circonstances ou ces sortes de
transactions sont presqu'obligatoires. On veut
réussir, on a sous la main un candidat puissant
par sa position personnelle ou par ses relations de
familie; on s'en emparesanss'inquiéter beaucoup
de savoir s'il a la capacité voulue pour remplir
convenablement Ier mandat dont on veut l'investir.
Trés bien. Mais il est des choses sur lesquelles
aucune considération politique ne permet des
hommes d'honneur de transiger. Un parti qui pa-
tronerait un homme infóme comme celui dont
parle le Peuple beige serait, a nos yeux, cent fois
plus infême et plus ignominieux que son candidat
lui-même et, quoique certains doctrinaires nous
aient mainte fois édifiés sur l'élasticité de leur mo-