JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
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VI511 ES, SIi manche y
Septième année. N° 9.
28 Février 1869
Paraissant le dimanche.
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Sndigne comédie.
Le Séuat avait rejeté le budget de la justice. En
préseucede ce vote hostile, le ministère avait choisir
entre deux partis également honorables sa retraite
ou la dissolution du Sénat.
Que le ministère eut parfaitement ledroitde garder
le pouvoir, c'est ce que personne ne pensera a con-
tester. Appuyé a la Ghambre des représentanfs sur
une majorité considérable, rien ne l'obiigeait a consi-
dérer commedéfinitive lacondamnation desa politique
par le Sénat. II pouvait trés honorablement et sans
porter aucune atteinte a sa dignité, prononcer la dis
solution du Sénat et en appeler au corps électoral.
Telle fut aussi, faut-il croire, Ia première pensée
du cabinet, car le jour même du vote du Sénat, I'Echo
du Parlement terminait son appréciation de la séance
par ces lignes significatives L'attitude injustifiable
de l'opposition au sein du Sénat, eet acte d'hostilité
i) systématique a l'égard d'un ministre qui a donné
i) tant de gages a la cause du progrès, ne peuvent
qu'affermir la confiance du pays dans les hommes
qui le gouvernent depuis bientöt douze ans.
L'Eloile beige traduisait la même impression en
termes plus formels encore II est peu problable,
disaitce journal, qu'en presence de cecoup de parti
accompli précisément la veille du jour oü la Chambre
devait aborder la discussion du projet de loi retatif
x> a la contrainte par corps, les membres du cabinet
se décident a abandonner leur jeune collègue de la
Justice, l'honorable M. Bara. Aussi sommes-nous
peut-être a la veille de la retraite du cabinet tout
entier ou d'une dissolution du Senat et d'un appel
au pays.
Le même soir, les membres du cabinet se réunis-
saient en conseil des ministres sous la présidence du
Roi pour délibérersur les mesures quecomroandaient
les circonstances.
On sait maintenant le résultatdecette délibération;
elle a abouti a l'expédient le plus ridicule et le plus
misérable dont nos Annates parlementair es aieut gardé
le souvenir. Au lieu d'accepter loyalement sa defaite
etd'en appelerauscrutin,leministère a imaginé(chose
a peine croyable) de représenter immédiatement a la
Chambre des représentants le budget rejeté par Ie
Sénat el, ce budget voté, de !e soumettre sans perdre
un instant a l'examendu Sénat oü la majorité libérale,
en garde cette fois contre toute surprise, en assure
d'avance l'adoption.
Pour dissimuler ce qu'il y a de mesquin et de peu
digne dans l'expédient auquel il a eu recours, le mi
nistère et les journaux officieux a sa suite insistent
sur le caractère tout-a-fait fortuil,accidentel, du vote
duSénatetils vontjusqu'a faire un crime a la minorité
d'avoir profité de l'absence de ses advérsaires pour
faire pièce au ministre de ia Justice.
Ceux qui adressent a la minorité du Sénat ce plai-
sant reproche n'oublient qu'une chose c'est d'indi-
quer la conduite que, d'après eux, elle aurait du
tenir. Aurait-il fallu, par hasard, qu'elle votat le bud
get On conviendra que c'eüt été pousser Irop loin Ia
naïveté. Quoi nous sommes des adversaires poli-
tiques qui nous combattons depuis vingt ans et,
paree que le hasard veut qu'un jour, moi, la minorité,
je me trouve eu situation de prendre une revanche,
il faudra que je n'en profile pas et que je me laisse
battre comme d'habitude En vérité, qu'on nous passe
le mot, c'est par trop béte
La minorité au Sénat a done usé d'un droit incon
testable et pas un homme de bonne foi n'osera nier
que, dans une situation analogue le parti libéral en
aurait fait tout autant.
On n'a pas manqué de dire, dans la Chambre et
dans Ia presse, que ce vote était un vote de sur
prise, que si tous les libéraux du Sénat avaient as-
sisté a la séance, le budget eut été adopté a 4 voix
de majorité. C'est possible, c'est même probable,
mais cela n'est point certain. De fait, plusieurs
sénateurs notoiremeot connus pour l'extrême indéci-
sion de leurs opinions politiques, et nous citerons
dans le nombre le prince de Ligne et M. le baron
Mazeman de Coulhove, n'onl pas paru a la fameuse
séance du 24 février. Qui peul affirmer d'une facon
certaine que leur présence aurait modifiè le résuïtat
du scrutin? Qui a le droit d'attester qu'ils ne se se-
raient pas abstenus
C est done sur une présomption, et rien que sur
une présomption, que le ministère s'est fondé pour
contester la légitimilé, Ia sincérité du vote émis par
le Sénat. Eh bien nous disons qu'une telle preten
tion est absolument inadmissible et que la Chambre
en l'accueillant, a accompli un véritable coup-d'Etat
parlementaire. Qu'on ne se hate pas de se rócrier et
qu'on nous ècoute
Supposons des élections pour la Chambre dans
l'arrondissement d'Ypres. Le parti clérical nefait pas
mine de prendre part a la lutte et s'abstient même de
présenter des candidats. Trompés par cette apparente
inaction, les électeurs libéraux se rendent en petit
nombre au scrutin. Mais, au tout dernier moment,
les cléricaux ont batlu le rappel des leurs et leur liste
passe tout entière a trois ou quatre voix de majorité.
Eh Luien I nous défions qui que ce soit, le Progrès lui-
même, d'oser soutenir que de telles élections de-
vraient être annullées, füt-il certain, absolument
certain que les libéraux obtiendraient une majorité
considérable a une seconde épreuve.
Et pourtant la Chambre n'a pas agi autrement,
avec cette difference, qui rend sa conduite plus in-
qualifiable encore, qu'elle ne saurait invoquer que de
simples présomptions.
Ni Ie ministère ni la majorité de Ia Chambre n'ont
pu d'ailleurs se faire illusion sur ce qu'il y a de pro-
fondémenl inconstitutioneel dans l'expédient auquel
ils ont eu recours. Le ministère, cela ne nous semble
pas douteux, aurait préféré donner suite a sa pre
mière pensée, la dissolution. Pourquoi s'esl-il arrêté?
Tout simplement paree que Ia réflexion lui est venue
et qu'il a eu peur que le verdict du corps électoral ne
tournêt a son désavantage. Nos grands hommes d'Etat
ont beau prendre des airs de rodomonts. Au fond de
l'ame, ils sentent que peu a peu le pays se retire
d'eux et qu'il peut être dangereux de lui demander
trop souvent son sentiment sur la manière dont il
est gouverné.
Pour ne parler que des électeurs de Charleroi, le
ministère sait a n'en pas pouvoir douter que si des
élections avaient lieu en ce moment dans eet arron
dissement, les deux sénateurs doctrinaires seraient
immanquablement remplacés par des sénateurs ca-
tholiques, déplacement qui suffirait pour lui enlever
sa petite majorité au Sénat. Inutile de chercher ail-
leurs les raisons qui I'ont déterminé a écarter l'idée
d une dissolution. Elle est Ia tout entière et ceux qui
connaissent la passion du pouvoir qui dévore le chef
du gouvernement n'en douteront pas. Quant
M. Bara, engagé plus persoanellement encore que
M. Frère- Orban dans ce débat, neus le plaignons
sincèrement d'avoir prêté les mains a une aussi mi
sérable intrigue. Le portefeuille de la Justice, si beau
qu'il lui paraisse, ne valait pas le prix qu'il vient d'y
mettre.
II. Xandenpeereboom et la loi de *84».
Suivant un solennel et antique usage la
Chambre a fêté le Carnaval, en recommengant
pour la centième fois un assaut d'opéra-comique
contre la loi de 1842.
Le pays a cessê d'être dupe de cette grotesque
mystification. Si l'édifice est vermoulu, si ses as
sises anti-constitutionnelles chancellent, si l'air
méphytique que Ton y respire est nuisible a la
jeune génération, que le marteau fasse son office
démolissez et tout sera dit.
C est ainsi, apparemment, que l'on procéderait
si la logique avait voix au chapitre et surtout si
I on avait cceur la mise en pratique des prin
cipes qui ont servi de marche-pieds aux cham-
bellans de la doctrine. Aux lieu et place de eet
acte de virilité et d'honnèteté-politiques, a quel
spectacle assistons-nous
Les mèmes comparses sérinnent, une ou plu
sieurs fois dans le cours de l'annéc, la même ri-
tournelle, exécutent devant la galerie les mêroes
et monotones pirouettes, puis, Ie rideau tombé,
tout rentre dans l'ordre, chacun reprend son petit