Le lit de Procnsle. Notre dernière élection provinciale fail au Progrès l'effet du lit de Procuste. II n'y peut penser saus ga- gner la chair de poule, on ne peut lui en parler sans qu'il ait des crispations de nerfs. Aussi sommes-nous bien prés de nous reprocher notre cruauté. G'est dur, ma foi, de voir ainsi une position se re- tourner du jour au lendemain, êlre obligé d'accep- ter le choix d'autrui quand on avail pris depuis long- temps l'habitude d'imposer le sien, obéir quand on n'avait jamais fait que commander, se trainer péni- blement la remorque apres avoir pendant lant d'années donné le ton, devenir de mailre valet, c'est dur et sa colère se comprend. II ne nous pardonne pas d'avoir exposé la situation, tiré des conséquences et exprime des esperances pour l'avenir. Nous n'avons fait pourtant qu'imprimer ce que chacun ici voit el dit, tant la signification de l'élection du 24 mai est claire, tant aussi l'humiliation de notre détestable coterie cause de joie partout. Aussi allions-nous laisser au Progrès pour mau- dire ses juges autant de temps qu'il en eht désiré, s'il ne nous avail contraint lui-mêmeè signaler quelques nouveaux tours jésuitiques que le compère vient de tirer de sa besace. S'il faut l'en croire, notre élection provinciale prouve une fois de plus l'influeuce de l'Association libérale dans noire ville. o Pareil aux augures de l'antiquité, Ie Progrès pen dant qu'il tracait ces lignes n'aura pu se regarder sans rire. Chacun ne sait-il pas, en effet, que l'élu ètait le eandidat patronné par le Cercle commercial? Chacun ne sait-il pas que nos matadors déclament fréquemment contre ce Cercle, qu'ils avaieut en vue pour l'élection du 24 un autre eandidat berné de pro messes depuis dix ans, qu'ils n'ont cede que par peur de la lutte, faisant de nécessité vertu et préférant abandonner ceux qui s'étaient trop naïvemeul fiés a leur bonne foi plutót que de subir un échec person nel? L'Association, toujours docile, est entrée dans leurs vues et a consenti complaisamment a masquer leur défaite. C'est lè ce que le Progrès appelle une influence qui dirige. A ce compte, ce n'est plus le timon qui dirige la voiture, mais la cinquième roue qu'elle tralne après elle. a Ce n'est pas, écrit encore ce journal, en se lan- §ant dans des exagérations que l'on gagne la confiance du corps èlectoral, comme ce n'est pas en jouant le róle de la mouche du coche, que l'on fait progresser l'esprit public il faut pour cela travailler sani re- lache et avancer d'un pas lent, si vous voulez, mais sür; c'est ce que nous avons fait dans le passé et ce que nous nous cfïorcerons de continuer dans l'ave nir. 6 Comment! quand on vous rappelle vos professions de foi et vos promesses et qu'on les pèse dans la ba lance a cóté de vos actes, on se lance dans des exa gérations Vous prétendez que vous avez avancé d'un pas lent, mais sur. Vous avez beau bourdonner et vous heurter la tête.a toutes les vitres, corame le hanne- ton, vous avez un fil a la patte. Ce fil, c'est le passé de vos patrons. Ce passé tout entier proteste contre vos audacieuses assertions. Quand ils n'étaient rien, ces patrons, et qu'ils voulaient devenir quelque chose, ils laogaient les programmes les plus colorés, votaient au Congrès libéral la secularisation de l'enseignement et tous les principes libéraux, puis, parvenus a l'hó- tel-de-ville et dévoilant leurs convictions pauachées, ils négociaient secrètemenl avec l'évêque la fusion de nos deux colléges, c'est-a-dire l'absorption de l'ensei gnement laïque par la soutane au ministère, ils créaient les écoles d'adultes, aggravation, selon l'ex- pression de M. Frère Orban, de la Ioi de 1842 qu'ils promeltaient solennellement en 1846 de faire réviser, jelant, par leurs manoeuvres, la jeunesse beige tout entière dans les bras du clerge. „Si c'est la avancer, Progrès, de quel cóté portez- vous done la figure? Et cependant, oui, vous avez jivancé d'un pas lent, non pour faire progresser l'esprit public, mais dans l'inlérêt de voire ambition insatiable. Vous avez fait vólre celte pensée d'un grand écri- vain Les bêtes plates s'introduisenl partout il y avail des punaises dans le lit de Louis XIV. Selon les circonstances, tantöt en rampant comme un reptile nous avons déja usé de cette comparai- son, c'est la seule qui vous convienue et tantót en vous dressant hideux dans votre orgueil, vous avez insensiblement accaparé toutes les places que vous convoitiez et serré ['arrondissement d'Ypres dans un étau de fer. Mais eet étau il le brisera un jour en éclats. Le branie est donné, l'esprit public une fois réveiilé ne s'arrête plus. II n'y a qu'un geai pour continuer votre comparaison prise dans le règne ani mal il n'y a qu'un geai se parant soltement des plumes du paon qui puisse être assez aveuglé pour ne le pas voir. Après cela, libre vous d'entrer ou non en polé- mique avec nous. Nous ne prenons souci ni de votre dédain, ni votre estime. Mais le public nous ne savons pourquoi pre tend que vous faites de la fantasmagorie et que si vous désertez la polémique, vous avez une excellente raison pour cela. Pour nous, moins sévères, nous tenons pour certain que c'est de votre part noblesse chevaleresque. La fierté sied aux grandes ómes et, après vous être fait le proxénète de la candidature Van Merris, vous ne sauriez, sans dégénérer, quitter les nuages olympiens. Mais, de grèce, si vous ne vou lez que le ridicule vous achève entièrement, cessez de parler des communications que vous recevez. La lettre que vous pretendez avoir recue en ré- ponse a nos articles électoraux est la soeur jumelle de celle dont vous fites si grand bruit aux éleclions de juin 1868 deux canards de pareille envergure en un an, c'est abuser de la permission II en est des Communications que vous recevez, père Escobar, comme des oreilles de certaines geus dont parle le poëte Lorsque l'on va chez eux pour trouver leurs oreilles, Leurs oreilles n'y sont jamais. Voici quelques phrases extraites d'une lettre écrite d'Ostende après l'élection du 24 mai. L'encouragement et les excellents conseils qu'elle renferme, on les croi- rait écrits pour d'autres que pour les électeurs d'Os tende, tant les insinuations sont identiques 1 II suflit de changer le notn de la localité pour s'en apercevoir. Lisez L'éclatante victoire que vient de remporter le parti libéral dans l'élection provinciale d'hier est le signe certain du réveil de l'opinion publique, trop longtemps comprimée par la pression et les menaces du parti oligarchique. Elle fera ouvrir les yeux plus d'un d'entre ceux-la qui régnaient autocraliquement, en se dra- pant dans la pourpre et l'hermine du pouvoir. Le népotisme a entendu sonner le tocsin de sa déca den ce. Cette victoire est l'anéantissement complet du parti hybride, qui, sous le masque de moderé, tentait depuis longtemps déja de s'implanter chez nous, en essayant par toute espèce de petites manoeuvres, de fausser complétement l'esprit véritablement libéral de la population d'Ostende. Aux influences de position adroitement acquises, aux influences de fortune, a la pression insolite que, de tous cólés, on a fait peser sur l'électeur; aux ob sessions d'un pédantisme brutal et arrogant, l'élec teur a répondu en revendiquant le droit de disposer librement de son vole. s> Et il a bien fait. Nous exlrayons du comple-rendu de l'une des der- nières séances de la Chambre des représentants, donné par la Chronique, les lignes suivantes m. coomans. Je la retire, M. le président, et je dirai, pour resterdans lesconvenancesparlementaires, que les principes, en politique, sont des jouets avec lesquels on amuse les enfants. (Rumeurs sur plusieurs bancs.) m. le président. Ce sont la de tristes enseigne- menls, M. Coomans. m. coomans. Cen'est pas ma fautes'ils sont tristes, M. le président il me suflit qu'ils soient vrais. Des principes! mais on en fait ce qu'on veut, des principes! si. frère-orban. Parlez pour vous. m. coomans. Et pour vous aussi, s'il vous plait. N'est-ce pas vous, M. Frère, qui avez fait proclamer par le congrès libéral de 1846, comme un des dogmes fondamentaux du libéralisme beige, le principe de la sécularisation absolue de l'enseignement donné par l'Etat? m. frère orban. C'est moi. m. coomans. Qu'en avez-vöus fait de ce principe, depuis douze ans que vous êtes au pouvoir La loi de 1842, contre laquelle vous aviez tant tonné dans l'op- position, vous l'avez laissée intacte, etnon-seulement vous n'avez pas oséy toucher,mais vous avez permis a M. Vandenpeereboom de faire son règlement sur les écoles d'adultes, que vous avez reconnu, depuis, être une extension de la loi de 1842. m. alph. vandenpeereboom. Je m'honore de ce règlement. m. coomans. Je vous en honore aussi, M. Vanden peereboom. Au fond, et malgré les petites allures de libéralisme que vous vous donnez parfois, je vous tiens pour tout aussi bon el aussi fervent serviteur de l'Eglise que moi. Hilarité a gauche Se non vero, ben trovato Nous trouvons dans le Progrès les curieuses lignes que voici En dépouillant les votes a Foix (Ariège), un scruta- teur a découvert un bulletin blanc ainsi libellé Comme gouvernement, que la France possède Un empereur, un roi, voire même un président; Qu'a Thiers ou qu'a Ledru, M. Rouher succède, Bonnet blanc, blanc bonnet, pour moi c'est évident. Aussi, n'esperant pas sauvegarder ma laine, Qu'on nomme député celui que l'on voudra... Je n'ai pas oublie ce qu'a dit Lafontaine Hélas! pauvres moutonstoujours on vous tondra UN MOUTON RÉSIGNÉ. Quel dommage que ces vers ne soient pas sortis du cerveau du Progresl C'eüt été charmant de naïveté Car mieux que personne le compère doit connaltre le prix de la laine. Quelques modifications aux heures de départ des différents trains ont eu lieu depuis le 1" du mois. Nous en publions le tableau la 4ms page du journal. Correspondance particuliere de 1'OPIlflOI'. Bruxelles, 28 Mai. II est a peu prés certain maintenant que le projet de loi sur la milice ne sera pas voté par la Chambre dans le courant de cette session. La discussion de la loi sur la contrainte par corps va occuper les trois derniers jours de Ia semaine. Après quoi viendront quelques projets d'intérêt secondaire qui auront beau- coup de peine a réunir un nombre do membres suffi- sant pour les voter. Quant au projet sur la milice, a moins que la Chambre ne se pique tout a coup d'un beau zèle, il sera remis a la session prochaine, et d'ici-la peut-être aura-t-on trouvé une solution a la question des exemptions, sur laquelle on n'est pas parvenu jus- qu'è présent a se meltre d'accord. La difïiculté ne porte point sur les ministres du culte. Dans le fait, il n'arrive pas que des jeunes gens soient ordonnés prêtres avant l'ège fixé pour le tirage au sort. Le point sur lequel on se sépare, c'est celui qui concerne les élèves en théologie. L'amendement le plus radical veut que les élèves en théologie ne soient exemptés dansaucun cas; celui du gouverne ment limite l'exemption aux élèves fesant leurs études théologiques dans les séminaires reconnus et subsi diés par l'Etat. Puis vient enfin le système de la droite qui prétend l'étendre, au contraire, a tous les élèves théologiens, même a ceux qui font leurs études dans les couvents. Vos leeteurs savent que, la semaine dernière, par- lant au nom de ses amis, M. Thonissen a déclaré que si ce dernier système était repoussé par le gouverne ment, la droite tout entière voterait en masse contre le budget de la guerre. Peut-être cette menace n'est- elle pas étrangère au désir que semble éprouver le cabinet de remeltre a la session prochaine la conti nuation de la discussion du projet de loi sur la milice. Telle est du moins l'opinion que j'ai entendu expri- mer par des hommes politiques en position d'être bien informés. Le gouvernement n'est, du reste, pas seul a désirer l'ajournement de cette discussion. Des deux cótés de la Chambre, il y a égale lassitude et même désir de voir la session se terminer le plus tót possible. Chaque jour, l'assemblée a toutes les peines du monde a se trouver en nombre et les demandes de congé se mul- tiplient de plus en plus. Ce sont la des symplómes

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L’Opinion (1863-1873) | 1869 | | pagina 2